👁🗨 90 morts, des villages vidés : les Palestiniens de Cisjordanie victimes des colons israéliens et de Tsahal
5000 palestiniens sont morts à Gaza en deux semaines, les milices de colons israéliens multiplient assassinats, pillages & expulsions forcées en Cisjordanie, avec le soutien du gouvernement.
👁🗨 90 morts, des villages vidés : les Palestiniens de Cisjordanie victimes des colons israéliens et de Tsahal
Par Arsène Justo, le 23 octobre 2023
Dans un article paru samedi 21 octobre, le Monde titre “Guerre Israël-Hamas : à la faveur de la guerre, les colons israéliens accélèrent le dépeuplement de collines de Cisjordanie”. Par le doux euphémisme de “dépeuplement”, le journal décrit les opérations de nettoyage ethnique menées par des colons israéliens ultranationalistes en Cisjordanie.
Si ces pratiques sont systématiques dans la région, on se rappelle de l’attaque d’Huwara il y a huit mois, elles se sont multipliées ces derniers jours, prenant comme prétexte la punition collective assénée aux Palestiniens après l’attaque du Hamas par l’Etat sioniste et profitant du focus médiatique sur Gaza.
Le bilan s’élèverait déjà à 90 palestiniens morts, dont de nombreux enfants, ainsi que près de 1300 blessés. Au moins deux villages, Al-Qanub et Wadi Al-Sik, auraient par ailleurs été complètement vidés de leurs habitants, tandis que de nombreux autres ont été pris d’assaut par des milices armées, généralement épaulées par l’armée israélienne.
En parallèle, les déplacements des palestiniens sont toujours plus entravés, puisque les check-points militaires, déjà omniprésents avant le 7 octobre, se sont encore multipliés et sont désormais totalement infranchissables, enfermant les Palestiniens de Cisjordanie dans une multitude d’enclaves, à la merci totale des milices de colons. Tenter de franchir ces check-points peut s’avérer fatal.
Le jeudi 12 octobre par exemple, des soldats d’un check-point situé près de Yabrud ont ouvert le feu sur un véhicule transportant une famille palestinienne, tuant Randa Abdullah Abdul Aziz Ajaj et blessant grièvement son fils, Ismail Ajaj. Comme l’a expliqué un habitant de Qaryut à +972 mag :
“En ce moment, nous vivons en état de siège. La plupart des villages de Cisjordanie sont enfermés par des monticules de terre et il est impossible d’en sortir”, en plus de quoi “il y a des colons partout. Chaque fois que nous nous approchons d’une maison proche d’une colonie, ils nous tirent dessus. Ils profitent de la situation qui prévaut à Gaza pour se venger en Cisjordanie. Car personne ne s’intéresse à la Cisjordanie aujourd’hui”.
Selon Yesh Din de Volunteers for human rights, ce sont 18 villages qui ont été attaqués depuis le 7 octobre, tandis que de nombreux médias d’extrême-droite ont arrangué les colons israéliens à '“conquérir les villages près de chez [eux]” pour soi-disant se venger de l’attaque du Hamas. Comme dit plus haut, ce sont 51 palestiniens qui ont été tués en Cisjordanie depuis samedi, tandis que 64 autres cisjordaniens seraient morts entre le 7 et le 18 octobre.
Cette multiplication d’attaques se fait avec le soutien plus ou moins officiel du gouvernement israélien. Ce dernier a en effet bombardé une mosquée à Jénine hier, faisant deux morts. Dans le même temps, le ministre de la sécurité nationale, Ben Gvir, a distribué ces derniers jours des milliers d’armes, notamment des fusils d’assaut, à des ‘unités de sécurité civiles’ composées de colons. pour qu’ils puissent « se défendre ». L’armée n’intervient en revanche pas pour empêcher les attaques de colons, auxquelles elle participe au contraire le plus souvent.
+972 mag rapporte ainsi que « mercredi 11 octobre, dans le village de Qusra, près de Naplouse, trois Palestiniens – Moa’th Odeh, Musab Abu Rida et Obida Abu Sarur – ont été tués par balle, tandis qu’une fillette de 6 ans a été blessée au haut du corps. On ignore qui a ouvert le feu sur eux. L’attaque a commencé par des tirs de colons encagoulés sur des maisons du village, selon trois témoins oculaires et le personnel médical qui a soigné les blessés sur place. Des images vidéo montrent six hommes masqués, armés de pistolets et de fusils M-16, ouvrant le feu à l’intérieur du village. Plus tard dans la journée, selon des témoins oculaires, un autre habitant, Hassan Abu Sarur, âgé de 13 ans, a également été abattu lorsque des soldats sont entrés dans le village après que les colons s’en furent retirés ».
Le média israélo-palestinien rapporte également les propos d’Ahmed, un habitant de Qusra, témoin de l’attaque :
“Mon cousin a été touché à la tête, mon frère a reçu une balle tout juste à l’entrée de sa maison. Les soldats ont ensuite pris le [enregistreur vidéo numérique] qui enregistrait tout ; une heure après l’événement, ils sont venus et ont confisqué les caméras. Je suis sûr qu’ils l’ont fait pour ‘effacer les preuves’. Enfin, toujours d’après +972 mag : « Les habitants de Qusra ont déclaré qu’un petit nombre de soldats avaient accompagné les colons tout au long de l’attaque. Lorsque les villageois ont jeté des pierres sur les colons pour les forcer à reculer, les soldats ont appuyé les colons par des tirs réels, selon les habitants”.
Ce soutien gouvernemental aux milices ultranationalistes sionistes n’est en fait pas très surprenant : au sein de la coalition gouvernementale israélienne et aux côtés du très droitier Likoud de Netanyahou, on trouve entre autres Force Juive, un parti suprémaciste juif, qui prône l’établissement d’un Etat israélien “ethniquement pur”. Le dirigeant de ce parti est justement Itamar Ben-Gvir, ministre de la sécurité nationale depuis 2022 et à l’initiative de l’ordre donné à la police d’armer les colons israéliens de Cisjordanie.
Cette hausse des attaques s’inscrit dans une radicalisation des colons et des ultra-sionistes israéliens ces dernières années, encouragée par le gouvernement. Ces massacres, qui ont lieu loin de Gaza et du Hamas, jettent une lumière crue sur la situation en Palestine et sur la violence de la situation coloniale dans la région. A l’heure où l’offensive du Hamas sert de prétexte pour opposer “terrorisme” et “démocratie”, la Cisjordanie continue d’être le théâtre d’une colonisation ultra-violente.