đâđš Assange : La funeste mascarade de la tyrannie dĂ©guisĂ©e en justice
L'exĂ©cutif considĂ©rera toujours le judiciaire comme nĂ©cessaire Ă l'accomplissement du sale boulot. La persĂ©cution de Julian, sans lien avec la loi, n'est que la dĂ©monstration du pouvoir de l'Ătat.

đâđš Assange : La funeste mascarade de la tyrannie dĂ©guisĂ©e en justice
Par Craig Murray @CraigMurrayOrg, le 15 juin 2023
La persĂ©cution de Julian n'a rien Ă voir avec la loi. Il s'agit d'une simple dĂ©monstration du pouvoir Ă©crasant de l'Ătat.
Jamais aucun gouvernement n'a Ă©tĂ© aussi malfaisant et rĂ©pugnant au point d'ĂȘtre incapable de trouver des avocats, et en particulier des juges, pour exĂ©cuter ses ordres.
Hitler n'a pas eu besoin de fabriquer des avocats et des juges. Un nombre trĂšs important, voire la majoritĂ©, de juristes allemands Ă©tablis et rĂ©putĂ©s Ă©taient prĂȘts Ă participer activement Ă la loi nazie, tant Ă son Ă©laboration qu'Ă sa mise en Ćuvre.
Cela inclut bien sûr Roland Freisler, docteur en droit de l'université d'Iéna, qui était avocat avant son élévation.
Le procureur Telford Thomas a ouvert le procĂšs des avocats nazis Ă Nuremberg :
" Cette affaire est inhabituelle, en ce sens que les prĂ©venus sont accusĂ©s de crimes commis au nom de la loi. Ces hommes, ainsi que leurs collĂšgues dĂ©cĂ©dĂ©s ou en fuite, Ă©taient l'incarnation de ce qui passait pour ĂȘtre la justice dans le TroisiĂšme Reich.
La plupart des accusĂ©s ont Ă©tĂ©, Ă diffĂ©rents moments, juges, procureurs et fonctionnaires du ministĂšre de la justice du Reich. TOUS LES ACCUSĂS, SAUF UN, SONT DES JURISTES PROFESSIONNELS. Ils sont habituĂ©s aux tribunaux et aux salles d'audience, mĂȘme si leur rĂŽle actuel est peut-ĂȘtre nouveau pour eux.
Mais un tribunal est bien plus qu'une salle d'audience ; c'est un processus et un esprit. C'est la maison du droit. Les accusés le savent, ou ont dû le savoir dans le passé. Je doute qu'ils l'aient jamais oublié.
En effet, le fondement de l'accusation dans cette affaire est que ces hommes, dirigeants du systĂšme judiciaire allemand, ont consciemment et dĂ©libĂ©rĂ©ment supprimĂ© la loi, se sont livrĂ©s Ă une mascarade macabre de tyrannie dĂ©guisĂ©e en justice, et ont transformĂ© le systĂšme judiciaire allemand en un moteur de despotisme, de conquĂȘte, de pillage et de massacre. "
La citation de Thomas "une mascarade diabolique de tyrannie dĂ©guisĂ©e en justice" est une phrase qui me trotte dans la tĂȘte et qui rĂ©sume parfaitement le processus "juridique" de l'Ătat contre Julian Assange, que j'ai dĂ©crit en dĂ©tail ces derniĂšres annĂ©es.
Il faut ajouter Ă cela, bien sĂ»r, le fait que les Ătats de l'OTAN dĂ©testent Assange - et cherchent Ă l'assassiner judiciairement - prĂ©cisĂ©ment pour avoir rĂ©vĂ©lĂ© des vĂ©ritĂ©s qui embarrassent leur systĂšme de "conquĂȘte, pillage et massacre" en Irak, en Afghanistan, en Libye, au YĂ©men, en Syrie et ailleurs.
Il convient de noter qu'Hitler n'était pas le seul à pouvoir faire appel à des avocats respectés pour exécuter ses ordres.
Le procureur des procĂšs-spectacles de Staline, Andrei Vishinski, que Freisler s'est rendu Ă Moscou pour le voir Ă l'Ćuvre et dont il a consciemment copiĂ© les vocifĂ©rations et railleries, Ă©tait lui aussi un "vrai" avocat, diplĂŽmĂ© de l'universitĂ© de Kiev et ayant exercĂ© Ă Moscou.
(Je signale au passage que le juge préféré de Staline, Ulrich, était un autodidacte issu des tribunaux militaires).
Nous sommes Ă©levĂ©s dans le respect innĂ© de l'Ătat de droit et dans la conviction que, mĂȘme s'il commet des erreurs, il est impartial et honnĂȘte. Malheureusement, il ne s'agit lĂ que de l'un des mythes qui rĂ©gissent le fonctionnement de notre sociĂ©tĂ©. C'est une chose que j'ai fini par comprendre, Ă contrecoeur.
NĂ©anmoins, j'ai Ă©tĂ© tellement abasourdi par la dĂ©cision du juge Jonathan Swift, qui a rejetĂ© l'appel interjetĂ© par Assange devant la High Court dans le cadre de la saga de l'extradition, que j'ai dĂ©cidĂ© dâaller creuser un peu plus loin.
J'ai donc commencé par la surprenante décision rendue par Swift en décembre, de concert avec le juge Lewis, selon laquelle le plan du gouvernement conservateur visant à expulser des réfugiés vers le Rwanda est légal.
Son jugement repose avant tout sur l'idée que toute fiction concoctée par le gouvernement britannique a plus de valeur juridique que les faits réels. Il ne fait aucun doute dans le monde réel que le Rwanda est une dictature épouvantable qui tue ses opposants. Il n'y a pas non plus de doute sur le fait qu'il a tué les habitants des camps de réfugiés situés sur son sol.
Mais ce n'est pas grave, disent Swift et Lewis, parce que le gouvernement rwandais a déclaré dans un protocole d'accord qu'il ne ferait pas cela à nos réfugiés, qui sont différents des autres réfugiés :
73. Les demandeurs s'appuient sur ce qui s'est passé en 2018 lorsque des réfugiés de pays voisins au camp de réfugiés de Kiziba ont protesté contre les conditions dans le camp. Il a été rapporté (par exemple, par Human Rights Watch) que la police qui est entrée dans le camp en réponse aux manifestations a fait un usage excessif de la force. Ils ont tiré sur les réfugiés et certains ont été tués. Les requérants soulignent également, de maniÚre plus générale, les limites imposées au Rwanda à la liberté d'expression. plus généralement les limites au Rwanda de la liberté d'exprimer une opinion politique si cette opinion est critique à l'égard des autorités rwandaises.
74. Nous ne considĂ©rons pas qu'une dĂ©duction directe puisse ĂȘtre tirĂ©e des Ă©vĂ©nements survenus au camp de rĂ©fugiĂ©s de Kiziba en 2018. Il est peu probable que les circonstances qui ont conduit Ă ces manifestations se rĂ©pĂštent pour toute personne transfĂ©rĂ©e au Rwanda dans le cadre du MEDP. Le traitement des personnes transfĂ©rĂ©es, tant avant qu'aprĂšs la dĂ©termination de leurs demandes d'asile, est prĂ©vu dans le mĂ©morandum d'entente (paragraphes 8 et 10) et dans la convention de soutien. Pour les raisons dĂ©jĂ Ă©voquĂ©es, nous considĂ©rons que les autoritĂ©s rwandaises respecteront les conditions Ă©noncĂ©es dans ces documents.
...
En outre, la Convention sur les rĂ©fugiĂ©s, selon Swift et Lewis, stipule que les rĂ©fugiĂ©s ne doivent pas ĂȘtre traitĂ©s plus durement que les citoyens d'un Ătat. Par consĂ©quent, si le Rwanda persĂ©cute son propre peuple, il n'y a pas de violation Ă persĂ©cuter les rĂ©fugiĂ©s que nous envoyons Ă©galement.
...l'affaire des demandeurs se résume à la proposition selon laquelle, aprÚs le renvoi au Rwanda, il est possible qu'une ou plusieurs des personnes transférées en viennent à avoir des opinions critiques à l'égard des autorités rwandaises, et cette possibilité signifie que le seuil de Soering est désormais franchi.
77. Il est prouvĂ© que les possibilitĂ©s d'opposition politique au Rwanda sont trĂšs limitĂ©es et Ă©troitement rĂ©glementĂ©es. La situation est exposĂ©e dans le document d'Ă©valuation "General Human Rights in Rwanda", l'un des documents publiĂ©s par le ministre de l'IntĂ©rieur le 9 mai 2022. Il existe des restrictions au droit de rĂ©union pacifique, Ă la libertĂ© de la presse et Ă la libertĂ© d'expression. Les requĂ©rants ont soutenu que cet Ă©tat de fait pourrait signifier que tout transfert au Rwanda entraĂźnerait une violation de l'article 15 de la Convention relative au statut des rĂ©fugiĂ©s (qui prĂ©voit que les rĂ©fugiĂ©s doivent bĂ©nĂ©ficier du traitement le plus favorable accordĂ© aux nationaux en ce qui concerne les associations non politiques et sans but lucratif et les syndicats). Toutefois, nous estimons que cet argument n'est pas du tout convaincant. Abstraction faite du fait que l'article 15 ne s'Ă©tend pas Ă tous les droits d'association, il s'agit, en tout Ă©tat de cause, d'une disposition de non-discrimination, c'est-Ă -dire que les personnes protĂ©gĂ©es par la Convention sur les rĂ©fugiĂ©s ne doivent pas ĂȘtre traitĂ©es moins favorablement que les propres citoyens du pays d'accueil. Il n'y a aucune preuve en ce sens dans le cas prĂ©sent.

En effet, selon Swift et Lewis, les arguments de la partie défenderesse sont "spéculatifs". Rien ne prouve que le gouvernement rwandais souhaite les torturer, tout simplement parce qu'il ne les a pas encore rencontrés. En outre, le gouvernement rwandais a promis de ne pas maltraiter les personnes dans le cadre d'un accord avec le Royaume-Uni, le "MEDP", qui donne au gouvernement rwandais 120 millions d'euros en espÚces à voler ou à dépenser pour le développement économique du Rwanda.
âPour en revenir au contenu du document d'Ă©valuation du ministre de l'intĂ©rieur, il existe Ă©galement des preuves (tirĂ©es d'un rapport du dĂ©partement d'Ătat amĂ©ricain datant de 2020) que des opposants politiques ont Ă©tĂ© dĂ©tenus dans des centres de dĂ©tention "non officiels" et que les personnes ainsi dĂ©tenues ont Ă©tĂ© soumises Ă la torture et Ă de mauvais traitements au sens de l'article 3, qui ne sont pas des actes de torture. En outre, il existe des preuves que les prisons au Rwanda sont surpeuplĂ©es et que les conditions sont trĂšs dĂ©favorables. NĂ©anmoins, l'argumentation des requĂ©rants est spĂ©culative. Elle ne repose sur aucune preuve d'une quelconque opinion actuelle. Il n'est pas suggĂ©rĂ© que l'un ou l'autre des requĂ©rants serait tenu de dissimuler ses opinions politiques ou autres. Les observations des requĂ©rants supposent Ă©galement que la rĂ©ponse des autoritĂ©s rwandaises Ă toute opinion qui pourrait ĂȘtre exprimĂ©e Ă l'avenir par une personne transfĂ©rĂ©e impliquerait (ou pourrait impliquer) un mauvais traitement au titre de l'article 3. Ătant donnĂ© que la personne concernĂ©e aurait Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©e selon les termes du MEDP, cette possibilitĂ© n'est pas un risque rĂ©el.â
Swift et Lewis soutiennent en outre, aux paragraphes 81 à 84, qu'en droit interne britannique, la certification par le ministre de l'intérieur du Rwanda comme pays sûr est "irréfutable" - c'est-à -dire qu'il n'y a aucune possibilité juridique de remettre en question sa véracité, et qu'elle ne nécessite pas non plus l'approbation du Parlement. La "sécurité" du Rwanda est un fait en droit simplement parce que Braverman certifie qu'elle l'est.
AprÚs avoir déclaré qu'en vertu de la législation conservatrice sur l'immigration, le ministre de l'intérieur peut certifier que n'importe quel pays est sûr, indépendamment de la réalité objective (à condition que certaines étapes de la procédure soient respectées), Swift et Lewis passent ensuite au non-sens sur lequel repose leur jugement, à savoir que le fait qu'un pays ait été certifié "sûr" aux fins de la législation nationale britannique le rend effectivement éligible à l'accueil de personnes expulsées par le Royaume-Uni en vertu de la Convention des Nations Unies sur les Réfugiés.
La convention des Nations unies sur les réfugiés stipule ce qui suit
Aucun des Ătats contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque maniĂšre que ce soit un rĂ©fugiĂ©, sur les frontiĂšres des territoires oĂč sa vie ou sa libertĂ© serait menacĂ©e en raison de sa race, sa religion, sa nationalitĂ©, son appartenance Ă tel ou tel groupe social, ou de ses opinions politiques.
Telle est l'obligation en vertu du droit international, incorporée dans le droit britannique. Elle ne disparaßt pas avec la signature du ministre de l'intérieur, mais dépend de l'état réel des choses.
Dans la vraie vie, ou dans le cadre de la convention sur les réfugiés, il ne serait pas prudent d'expulser des personnes vers le Yémen, l'Ukraine de l'Est ou le Soudan simplement parce que Braverman a signé un document. La Convention sur les réfugiés n'est pas soumise aux propositions fantaisistes des certificats "irréfutables" de Whitehall.
En tant que serviteurs dĂ©vouĂ©s de l'exĂ©cutif, Lewis et Swift ont indĂ©niablement une chose en commun avec Freisler, Ullrich et Vishinski, Ă savoir une certaine forme d'impatience Ă l'Ă©gard d'accusĂ©s importuns qui les ennuient avec des preuves, des arguments gĂȘnants et des quantitĂ©s irritantes de paperasse, et qui essaient de sauver leur propre vie.
Lewis et Swift introduisent leur jugement sur le Rwanda en fulminant contre le désagrément d'avoir à se frayer un chemin dans la paperasserie que les déportés ont eu le culot de produire pour leur défense :
36. Les plaidoiries dans cette procĂ©dure ne sont pas des modĂšles de bonnes pratiques. L'instruction relative Ă la pratique 54A exige que les exposĂ©s des faits et des motifs soient clairs et concis. Aucun des actes de procĂ©dure ne rĂ©pond Ă cette exigence, mĂȘme si nombre d'entre eux, sinon tous, ont Ă©tĂ© rĂ©visĂ©s une ou plusieurs fois depuis l'ouverture de la procĂ©dure. Du cĂŽtĂ© des requĂ©rants, le mĂ©moire relatif Ă la requĂȘte CO/2032/2022 (AAA et autres) a pris la tĂȘte des dĂ©bats, exposant divers motifs gĂ©nĂ©riques de contestation ainsi que des motifs spĂ©cifiques aux circonstances de l'affaire des requĂ©rants individuels dans cette affaire. Sept motifs gĂ©nĂ©riques de contestation sont invoquĂ©s (motifs 1, 1A - 1C, 2A et 3-6). Toutefois, ces motifs ont tendance Ă se recouper ou Ă renvoyer l'un Ă l'autre. D'autres plaintes dĂ©posĂ©es par d'autres requĂ©rants ont adoptĂ© ces motifs gĂ©nĂ©riques de contestation ou en ont formulĂ© des variantes, tout en dĂ©posant des plaintes fondĂ©es sur leurs propres spĂ©cificitĂ©s. Le recours dans l'affaire CO/2056/2022 (l'affaire de l'aide Ă l'asile) soulĂšve des plaintes concernant la procĂ©dure de prise de dĂ©cision du ministre de l'intĂ©rieur. Ce qui est dit Ă propos de l'Ă©quitĂ© procĂ©durale dans cette affaire recoupe largement les plaintes relatives Ă l'Ă©quitĂ© procĂ©durale soulevĂ©es dans l'affaire CO/2023/2022 et dans d'autres plaintes. Asylum Aid soutient que ces questions dĂ©montrent qu'il y a une injustice systĂ©mique dans la procĂ©dure adoptĂ©e pour traiter les dĂ©cisions de non admissibilitĂ© et d'Ă©loignement. Le plaidoyer du Home Secretary est une rĂ©ponse en nature. Les motifs de dĂ©fense dĂ©taillĂ©s modifiĂ©s (pour toutes les demandes) comptent quelque 215 pages.
37. à la demande du tribunal, les parties ont préparé une liste de points à traiter. Toutefois, cet exercice n'a pas permis de simplifier la situation : la liste identifie 29 questions génériques, dont beaucoup sont répétitives ou se chevauchent, et de nombreuses autres questions spécifiques à chaque demande.
38. La mĂȘme approche a Ă©tĂ© reprise dans les Arguments Squelettes. Il convient de mentionner l'argumentation principale dans les affaires CO/2032/2022 et CO/2104/2022 (262 pages), et l'argumentation principale dans l'affaire CO/2094/2022 (63 pages). Chacun d'entre eux dĂ©passe largement la limite maximale autorisĂ©e par l'instruction pratique 54A (25 pages). La possibilitĂ© de dĂ©poser des plaidoiries plus longues que le maximum autorisĂ© n'a pas Ă©tĂ© sollicitĂ©e au prĂ©alable ; chaque document a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© Ă la Cour comme un fait accompli. La taille de ces documents n'a pas permis de clarifier la maniĂšre dont les diffĂ©rents griefs sont formulĂ©s. Les documents se perdent dans les mĂ©andres et se rĂ©pĂštent.
Il s'agit manifestement d'un problĂšme rĂ©current chez Swift. L'examen de son arrĂȘtĂ© sur les dĂ©portations au Rwanda n'est qu'un prĂ©lude, afin de mettre en contexte cet arrĂȘtĂ© sur le recours Assange. Ce que j'ai trouvĂ© en commun dans les deux dĂ©cisions, c'est l'insistance avec laquelle le rĂ©cit prĂ©sentĂ© par l'exĂ©cutif ne doit pas ĂȘtre remis en question, ainsi qu'un dĂ©goĂ»t marquĂ© Ă l'idĂ©e de devoir entendre de longs arguments au nom des personnes dont la vie est en jeu.
Il s'agit manifestement d'un problĂšme particulier de Swift. L'examen de son arrĂȘtĂ© sur les dĂ©portations au Rwanda n'est qu'un prĂ©lude, afin de mettre en contexte cet arrĂȘtĂ© sur le recours Assange. Ce que j'ai trouvĂ© en commun dans les deux dĂ©cisions, c'est l'insistance avec laquelle le rĂ©cit prĂ©sentĂ© par l'exĂ©cutif ne doit pas ĂȘtre remis en question, ainsi qu'un dĂ©goĂ»t marquĂ© Ă l'idĂ©e de devoir entendre de longs arguments au nom des personnes dont la vie est en jeu.L'appel Assange
Je considÚre que l'appel de Julian Assange devant la Haute Cour est en soi un document d'importance historique. J'ai donc décidé de le publier dans son intégralité et je vous recommande à tout le moins de vous y plonger.
L'appel dâAssange devant la High Court

Je considÚre que l'appel de Julian Assange devant la Haute Cour est en soi un document d'importance historique. J'ai donc décidé de le publier dans son intégralité et je vous recommande vivement de vous y plonger.
Appel de Julian Assange devant la Cour suprĂȘme
La toute premiÚre phrase de l'appel d'Assange est éloquente et illustre la raison pour laquelle la procédure d'extradition s'est déroulée à huis clos, et pourquoi la High Court est déterminée à éviter toute audience publique de fond :
" Julian Assange et Wikileaks sont à l'origine de la révélation d'actes criminels commis par le gouvernement américain à une échelle massive et sans précédent.
Dans les 3 premiÚres pages (sur 150), il expose l'argument et la portée de celui-ci :
" DANS LE CADRE D'UN RECOURS EN VERTU DE L'ARTICLE 103 DE LA LOI SUR L'EXTRADITION DE 2003
ENTRE : JULIAN ASSANGE, requĂ©rant vs LE GOUVERNEMENT DES ĂTATS-UNIS D'AMĂRIQUE dĂ©fendeur
MOTIFS DE L'APPEL
Les références à CB/X sont des références à l'ensemble des autorisations de base. Les références à EB/X sont des références à l'ensemble des preuves de l'article 103.
1. Introduction
1.1. Julian Assange et Wikileaks sont Ă l'origine de la rĂ©vĂ©lation d'actes criminels commis par le gouvernement amĂ©ricain Ă une Ă©chelle massive et sans prĂ©cĂ©dent. La publication en 2010 et 2011 de documents envoyĂ©s par un officier militaire en service, le soldat Manning, se situe en tĂȘte des divulgations d'intĂ©rĂȘt public. En publiant ces documents, "WikiLeaks a exposĂ© des actes rĂ©prĂ©hensibles scandaleux, voire meurtriers, [y compris] des crimes de guerre, des actes de torture et des atrocitĂ©s contre des civils" (Feldstein, EB/10, §4).
1.2. Le travail de Julian Assange, qui vise Ă garantir la responsabilitĂ© publique en exposant les violations des droits de l'homme dans le monde, et en facilitant les enquĂȘtes et les poursuites en cas de criminalitĂ© d'Ătat, a contribuĂ© Ă sauver d'innombrables vies, Ă mettre un terme Ă des violations des droits de l'homme et Ă faire tomber des rĂ©gimes despotiques et autocratiques.
1.3. Les personnes qui dĂ©noncent la grande criminalitĂ© d'Ătat, les dĂ©fenseurs des droits de l'homme, sont, et ont toujours Ă©tĂ©, exposĂ©es Ă des actes de reprĂ©sailles politiques et de persĂ©cution de la part des rĂ©gimes dont ils dĂ©noncent la criminalitĂ©. Julian Assange ne fait pas exception Ă la rĂšgle.
1.4. La loi protĂšge farouchement les dĂ©fenseurs des droits de l'homme. La dĂ©nonciation de la criminalitĂ© de l'Ătat est, en droit, un acte politique protĂ©gĂ©, le produit d'une opinion politique. Les poursuites "en raison" de tels actes sont tout simplement interdites par l'article 81 de la loi de 2003.
1.5. L'historique de ces poursuites, entre les rĂ©vĂ©lations de M. Assange en 2010 et 2011 et l'acte d'accusation en 2018, est un exemple classique de persĂ©cution politique. Le dĂ©roulement de cette affaire depuis 2011 est tout simplement extraordinaire. Elle implique, entre autres, des complots du gouvernement amĂ©ricain visant Ă interfĂ©rer avec les juges qui enquĂȘtent sur les affaires rĂ©vĂ©lĂ©es par M. Assange, Ă rĂ©duire au silence la Cour pĂ©nale internationale (CPI) qui s'est saisie des rĂ©vĂ©lations de M. Assange, et Ă kidnapper et restituer M. Assange lui-mĂȘme, ou encore Ă l'assassiner. Ce qui illustre un comportement du type de ceux que l'on attendrait normalement d'une dictature militaire. La DoJ n'a pas agi sur (ou mĂȘme abordĂ©) ces questions du point de vue de l'article 81 parce que (bien que la loi ait Ă©tĂ© attirĂ©e clairement et Ă plusieurs reprises Ă son attention) elle n'a pas reconnu ou admis que la rĂ©vĂ©lation de la criminalitĂ© de l'Ătat est, en droit, un acte "politique" protĂ©gĂ©, engageant l'article 81.
1.6. En outre, les preuves dans cette affaire ont Ă©voluĂ© depuis la dĂ©cision du DoJ en janvier 2021. Les enquĂȘtes menĂ©es en AmĂ©rique donnent dĂ©sormais une image plus complĂšte des plans de l'Ătat amĂ©ricain visant Ă enlever, restituer et assassiner M. Assange. Elles rĂ©vĂšlent Ă©galement que l'ouverture d'une procĂ©dure pĂ©nale dans cette affaire - par une plainte pĂ©nale en dĂ©cembre 2017 - a eu lieu aprĂšs que des obstacles (dont certains auraient Ă©tĂ© mis en place par le Royaume-Uni) contre ces plans criminels.
1.7. Les poursuites auxquelles les Ătats-Unis ont Ă©tĂ© contraints de recourir en lieu et place, entamĂ©es en 2018, ne sont pas moins extraordinaires.
(a) Elle est sans précédent sur le plan juridique.
(b) Elle touche de plein fouet les principes établis de la liberté d'expression.
(c) Pour y remédier, elle prévoit un procÚs au cours duquel M. Assange, en tant qu'étranger, peut se voir refuser l'invocation du Premier Amendement
(d) en fait, un procÚs en dehors des protections de la Constitution américaine tout court, et
(e) s'accompagne d'une exposition à une peine grossiÚrement disproportionnée.
En bref, les circonstances de l'accusation sont si frappantes et inhabituelles qu'elles constituent en elles-mĂȘmes des obstacles Ă l'extradition.
1.8. En ce qui concerne les circonstances de la demande d'extradition qui s'est ensuivie.
(f) Elle viole l'interdiction d'extradition pour des délits politiques expressément prévue par le traité pertinent et par le droit international.
(g) Elle dénature délibérément les faits essentiels.
Le DoJ a examiné ces questions une par une et a estimé qu'aucune d'entre elles n'enfreignait la loi de 2003. Pour les raisons qui suivent, elle s'est manifestement trompée à plusieurs égards.
1.9. Mais mĂȘme si elle avait raison sur chacun de ces points pris sĂ©parĂ©ment, le DoJ devait ensuite, mais il a complĂštement Ă©chouĂ©, prendre du recul et examiner ce qu'ils lui disaient cumulativement sur les origines politiques de cette affaire. En bref, ils constituaient tous, individuellement et cumulativement, la preuve la plus Ă©vidente d'une poursuite engagĂ©e "en raison" des opinions politiques de M. Assange, Ă savoir son engagement dĂ©clarĂ© et avĂ©rĂ© en faveur de la dĂ©nonciation de la criminalitĂ© Ă l'Ă©chelle de l'Ătat amĂ©ricain.
1.10. Ces motifs d'appel perfectionnés, signifiés conformément à Crim PR r.50.20(5), sont structurés comme suit :
1.11. La partie A traite du premier moyen d'appel, à savoir que le juge a rejeté à tort l'argument selon lequel la demande était faite dans le but de poursuivre ou de punir Julian Assange pour ses opinions politiques, et qu'elle était donc interdite par l'article 81(a).1 En conséquence, la partie A donne un aperçu de l'histoire de cette affaire et explique l'affaire globale de l'article 81 que le juge de paix n'a pas abordée. Cela comprend :
(i) Section 2 : les preuves présentées au DoJ concernant les opinions politiques de M. Assange ;
(ii) la section 3 : les preuves présentées au DoJ concernant la criminalité que M. Assange a exposée. Le motif 1 englobe également l'allégation d'abus de procédure, en raison de la motivation cachée de la demande et de l'accusation sous-jacente, qui est traitée dans la partie D.
(iii) Section 4 : La loi que le DoJ a ignorée ;
(iv) Section 5 et 6 : les autres preuves présentées au DoJ concernant les origines des poursuites de 2018.
(v) Section 7 : La décision du DoJ
1.12. Partie B : adresse les moyens de recours 2 Ă 6. Il s'agit des divers aspects flagrants des poursuites, finalement entamĂ©es en 2018, qui empĂȘchent individuellement l'extradition, indĂ©pendamment de l'article 81 ; y compris :
(i) Section 9 : Poursuite sans précédent (Motif du recours 2 : Article 7 de la CEDH) ;
(ii) Section 10 : Poursuite pour un discours protégé (motif de recours 3 : article 10 de la CEDH) ;
(iii) article 11 : poursuites visant à obtenir un verdict de culpabilité (quatriÚme moyen de recours : article 6 de la CEDH)
(iv) Article 12 : poursuites ne bénéficiant d'aucune protection des droits de la Convention (motif du recours n° 5) ;
(v) Article 13 : suivi d'une peine manifestement disproportionnée (motif du recours 6).
1.13. La partie C traite des moyens de recours 7 et 8. Il s'agit des aspects de la demande d'extradition qui s'ensuit et qui, individuellement, empĂȘchent l'extradition, indĂ©pendamment de l'article 81 ; y compris :
(i) Section 14 : une demande d'extradition pour des délits politiques, en violation du traité et du droit international (motif de recours 7) ;
(ii) Section 15 : Une demande d'extradition qui déforme délibérément les faits essentiels, de maniÚre injuste, inappropriée et inexacte (Motif de recours 8).
1.14. La partie D revient à l'article 81 et à l'abus de procédure (premier moyen du pourvoi), comme le DJ aurait dû le faire, dans la section 16. Enfin, les sections 17 et 18 traitent des nouveaux éléments de preuve dans cette affaire. "
S'ensuivent 147 pages supplémentaires d'arguments juridiques remarquables, y compris des preuves irréfutables.
Le résumé des crimes du gouvernement américain exposés par Julian Assange aux pages 9 à 18 est tout simplement époustouflant. Cette section commence ainsi :
Chacune des cinq publications de "sécurité nationale" visées par cette demande d'extradition a révélé l'implication du gouvernement américain dans des crimes d'une ampleur inégalée. Ces révélations ont apporté des preuves irréfutables, entre autres, de restitutions illégales, de tortures et de la présence de sites noirs de la CIA dans les prisons européennes, ainsi que des mesures agressives prises pour préserver l'impunité et éviter que des agents américains impliqués dans ces crimes ne soient poursuivis en justice. Ce qui suit représente les preuves incontestées devant le DJ des atrocités que M. Assange a révélées.
Voici un exemple parmi d'autres des preuves qui ont suivi :
3.3. La preuve incontestĂ©e de M. Stafford-Smith consiste Ă dire que les cĂąbles, par exemple, rĂ©vĂ©lĂ©s par WikiLeaks concernant les assassinats de drones du gouvernement amĂ©ricain au Pakistan "ont contribuĂ© aux conclusions [ultĂ©rieures] des tribunaux selon lesquelles les frappes de drones amĂ©ricains constituent des infractions pĂ©nales et que des poursuites pĂ©nales devraient ĂȘtre engagĂ©es contre les hauts fonctionnaires amĂ©ricains impliquĂ©s dans ces frappes" (Stafford-Smith, EB/22, §84, 91). âCes dĂ©cisions ont jouĂ© un rĂŽle majeur dans les litiges au Pakistan" (EB/40 Tr 8.9.20, xic, p4). La Haute Cour de Peshawar a statuĂ©, entre autres, que les frappes de drones menĂ©es par la CIA et les autoritĂ©s amĂ©ricaines constituaient une "violation flagrante des droits de l'homme fondamentaux", y compris "une violation flagrante du droit absolu Ă la vie" et âun crime de guerre" (Stafford-Smith, EB/22, §91). Ce que "nous devons appeler des infractions criminelles ont Ă©tĂ© commises" (EB/40 Tr 8.9.230, xic. p4). En outre, et par consĂ©quent, "les frappes de drones, qui se comptaient par centaines et causaient de nombreux [...] dĂ©cĂšs d'innocents, ont cessĂ© trĂšs rapidement", de sorte qu'"aucun cas n'a Ă©tĂ© signalĂ© [...] en 2019" (Stafford Smith, EB/22, §93). WikiLeaks a "mis un terme Ă une violation massive des droits de l'homme" (Stafford-Smith, EB/22, §92-93). Le Pakistan Ă©tait un alliĂ© amĂ©ricain. Ce n'Ă©tait pas comme si nous faisions cela Ă un ennemi, et cela aussi est tout simplement extraordinaire pour moi" (Stafford-Smith, EB/40 Tr 8.9.20, re-x, 26-
27). Sans les rĂ©vĂ©lations de WikiLeaks, il "aurait Ă©tĂ© vraiment extrĂȘmement diffĂ©rent et trĂšs difficile" de prĂ©venir ce crime (Stafford-Smith, EB/40 Tr 8.9.20, xic, p5). L'appel contient bien d'autres Ă©lĂ©ments que les gouvernements amĂ©ricain et britannique ne souhaiteraient pas communiquer en publicâ.
L'appel contient bien d'autres éléments que les gouvernements américain et britannique ne souhaiteraient pas voir répétés en public :
DeuxiÚmement, le rapport fournit d'autres preuves corroborantes (non disponibles pour le DJ) du fruit des discussions "no limits" qui en ont résulté.
DeuxiÚmement, le rapport fournit d'autres preuves corroborantes (dont le DJ ne disposait pas) du fruit des discussions "sans limites" qui en ont résulté, à savoir l'émergence de plans du gouvernement américain, au sujet desquels le témoin 2 (EB/2) a témoigné devant le DJ, visant à :
(i) Kidnapper M. Assange : "Cette enquĂȘte de Yahoo News, basĂ©e sur des conversations avec plus de 30 anciens fonctionnaires amĂ©ricains - dont huit ont dĂ©crit les dĂ©tails des propositions de la CIA d'enlever Assange" (p2)
Pompeo et [la directrice adjointe de la CIA Gina] Haspel voulaient se venger d'Assange. Lors de réunions entre les hauts fonctionnaires de l'administration Trump aprÚs que WikiLeaks a commencé à publier les documents de Vault 7, Pompeo a commencé à discuter de l'enlÚvement d'Assange " (p18).
(ii) Afin de restituer M. Assange aux Ătats-Unis :
Pompeo et d'autres membres de l'agence ont proposĂ© d'enlever Assange de l'ambassade et de le ramener subrepticement aux Ătats-Unis via un pays tiers - un processus connu sous le nom de "restitution". L'idĂ©e Ă©tait de "s'introduire dans l'ambassade, de faire sortir [Assange] et de l'emmener lĂ oĂč nous le souhaitons", a dĂ©clarĂ© un ancien responsable des services de renseignement (p. 18).
(iii) Ou bien assassiner M. Assange :
"Certains hauts responsables de la CIA et de l'administration Trump ont mĂȘme discutĂ© de l'assassinat d'Assange, allant jusqu'Ă demander des "croquis" ou des "options" sur la maniĂšre de procĂ©der pour l'assassiner. Les discussions sur l'enlĂšvement ou l'assassinat d'Assange ont eu lieu "aux plus hauts niveaux" de l'administration Trumpâ, a dĂ©clarĂ© un ancien haut responsable du contre-espionnage. Certaines discussions allaient mĂȘme au-delĂ de l'enlĂšvement. Des fonctionnaires amĂ©ricains ont Ă©galement envisagĂ© de tuer M. Assange, selon trois anciens fonctionnaires. L'un d'entre eux a dĂ©clarĂ© avoir Ă©tĂ© informĂ© d'une rĂ©union au printemps 2017 au cours de laquelle âle prĂ©sident a demandĂ© si la CIA pouvait assassiner Assange et lui a fourni des "options" sur la maniĂšre de le faire." (p20) "Les dirigeants de l'agence ont demandĂ© et reçu des "esquisses" de plans pour tuer Assange ... a dĂ©clarĂ© un ancien responsable du renseignement. Il y a eu des discussions "pour savoir si tuer Assange Ă©tait possible, et si c'Ă©tait lĂ©gal", a dĂ©clarĂ© l'ancien fonctionnaire. (p. 20).
Swift rejette le recours de 150 pages en seulement trois pages, d'un refus sec et sarcastique.
Les motifs d'appel proposés sont au nombre de huit. Ils sont exposés trÚs longuement (environ 100 pages), mais la longueur extraordinaire de la plaidoirie ne sert qu'à montrer clairement que l'appel proposé n'est rien d'autre qu'une tentative de réitérer les arguments détaillés présentés au juge de district et rejetés par ce dernier.
Swift stipule ensuite que si les avocats d'Assange sollicitent une audience pour que leur demande d'appel soit entendue, cette audience sera limitée à 30 minutes.
En outre, il limite la dĂ©fense d'Assange Ă 20 pages. 20 pages et 30 minutes (ce qui correspond Ă la durĂ©e de l'audience, y compris la rĂ©ponse du gouvernement amĂ©ricain). Telle est la valeur que Swift accorde aux plaidoiries en faveur de la vie d'un homme. Swift se moque mĂȘme de la dĂ©fense : "Les prĂ©sents motifs d'appel sont difficiles Ă cerner et ne respectent aucune rĂšgle connue en matiĂšre de plaidoirie".
Swift dĂ©clare que "la question est celle posĂ©e par l'article 103 de la loi de 2003 sur l'extradition, et le juge aurait-il dĂ» trancher diffĂ©remment lors de l'audience d'extradition ? Swift soumet ensuite cette "question" Ă des contraintes irrĂ©alisables. L'Ă©valuation des faits par le juge et l'apprĂ©ciation de l'argumentation ne peuvent ĂȘtre rĂ©examinĂ©es. Il s'oppose Ă©galement Ă la production de nouvelles preuves, alors que la loi sur l'extradition autorise expressĂ©ment la production de nouvelles preuves en appel.
Swift est un dĂ©fenseur du gouvernement. Il s'est dĂ©voilĂ© quelque peu dans cette interview accordĂ©e Ă un magazine juridique, oĂč il a dĂ©clarĂ© :
" Mes clients préférés étaient les services de sécurité et de renseignement, ainsi que le ministÚre de l'Intérieur. Ils prennent au sérieux la préparation et la collecte de preuves : ils s'engagent réellement à faire les choses correctement."
et
"Ce qui compte vraiment, c'est que le lien de confiance entre l'exécutif et le judiciaire soit maintenu "
Mais, peut-ĂȘtre encore plus rĂ©vĂ©lateur, dans cette brĂšve interview sur sa carriĂšre, il choisit d'ajouter une anecdote tout Ă fait gratuite et orientĂ©e sur le caractĂšre dĂ©sagrĂ©able des gens de gauche, ce qui implique nĂ©cessairement qu'il adopte des positions opposĂ©es Ă celles de la gauche :
âPremier membre de sa famille Ă aller Ă l'universitĂ© et premier avocat, il se souvient de son accueil au New College. 'Bonjour, je suis Jonathan', et j'ai eu droit Ă une rĂ©ponse du genre 'Je suis Dave. Je suis militant. F*** off ! AprĂšs tout, c'Ă©tait le milieu des annĂ©es 1980.â
Ce qu'incarne Swift est parfaitement clair, et l'on peut compter sur lui pour rejeter l'appel d'Assange sans discuter d'aucun point dĂ©licat concernant les crimes d'Ătat.
Il s'avÚre que la réputation de Swift est bien établie. On m'a envoyé une copie de ce tweet révélateur.

Devant la Cour de premiĂšre instance, le juge Baraitser s'est prononcĂ© contre Assange sur les huit motifs, mais avait tranchĂ© en sa faveur pour des raisons de santĂ© mentale et de conditions de dĂ©tention aux Ătats-Unis. Cette dĂ©cision a donnĂ© lieu Ă une procĂ©dure complexe d'appels successifs devant la High Court.
Dans un premier temps, les Ătats-Unis ont Ă©tĂ© autorisĂ©s Ă faire appel sur la base des critĂšres de santĂ© et des conditions de dĂ©tention aux Ătats-Unis. AprĂšs leur victoire, ce fut au tour d'Assange de faire appel pour les huit autres motifs pour lesquels il avait perdu devant le tribunal de district.
La diffĂ©rence entre le traitement par la High Court de l'appel des Ătats-Unis, qui a Ă©tĂ© admis avec succĂšs, et celui de l'appel d'Assange, qui a Ă©tĂ© rejetĂ© d'emblĂ©e, est trĂšs rĂ©vĂ©latrice.
L'appel des Ătats-Unis reposait en grande partie sur de nouvelles preuves. Il s'agissait de nouvelles garanties diplomatiques de la part des Ătats-Unis, affirmant qu'Assange ne serait pas placĂ© dans une prison super-maximale avant le procĂšs, et qu'il ne ferait pas l'objet de mesures administratives spĂ©ciales, sauf si cela s'avĂ©rait nĂ©cessaire.
Ces "garanties" auraient pu ĂȘtre donnĂ©es lors de l'audience initiale, mais ce ne fut pas le cas, car les Ătats-Unis ont bien entendu l'intention de placer Julian dans une prison super-maximale. Les juges Burnett et Holroyde, qui ont statuĂ© en faveur des Ătats-Unis, ont dĂ©clarĂ© sans ambages que les nouvelles garanties Ă©taient recevables parce que les garanties ne sont pas des "preuves" :
âUne note diplomatique ou une note de garantie n'est pas une "preuve" au sens de l'article 106(5)(a) de la loi de 2003 : il ne s'agit ni d'une dĂ©claration visant Ă prouver l'existence d'un fait passĂ©, ni d'une dĂ©claration d'opinion d'un expert sur une question pertinente. Il s'agit plutĂŽt d'une dĂ©claration sur les intentions de l'Ătat requĂ©rant quant Ă sa future conduiteâ.
Ils ont donc décidé que, si de nouvelles preuves sont exclues, les nouvelles "garanties" ne le sont pas, un peu de plaidoirie spéciale qu'ils ont simplement extraite de leur gros cul.
Comparez cela aux preuves prĂ©sentĂ©es par Assange selon lesquelles les Ătats-Unis ont espionnĂ© son Ă©quipe de dĂ©fense juridique, ont complotĂ© pour le kidnapper, tout en discutant activement de son assassinat. Ces preuves sont exclues au motif qu'il s'agit de "nouvelles preuves", et qu'elles sont en partie basĂ©es sur des rapports journalistiques. Le fait que le tĂ©moin principal du gouvernement amĂ©ricain ait admis avoir menti et avoir fait sa dĂ©position pour de l'argent a Ă©galement Ă©tĂ© Ă©cartĂ© au motif que les informations sont disponibles dans des rapports journalistiques.
Pourtant, une interview de l'un des psychiatres ayant tĂ©moignĂ© en faveur de Julian Assange, prĂ©sentĂ©e par les Ătats-Unis dans le cadre de leur appel devant la High Court, a Ă©tĂ© acceptĂ©e et n'a pas Ă©tĂ© exclue en tant que "nouvelle preuve" ou "rapport de presse".
Vous pouvez lire l'intĂ©gralitĂ© de l'arrĂȘt Burnett et Holroyde, qui examine l'Ă©valuation par le juge de district des preuves relatives Ă la santĂ© mentale de Julian Assange et aux conditions de dĂ©tention aux Ătats-Unis, et il est impossible de ne pas conclure qu'ils sont absolument en train de "remettre en question l'Ă©valuation des faits et l'apprĂ©ciation des arguments par le juge d'origine".
Ils ne font littéralement rien d'autre.
Par consĂ©quent, en se prononçant en faveur de l'appel des Ătats-Unis, la High Court s'est livrĂ©e prĂ©cisĂ©ment Ă l'exercice que Swift juge irrecevable lorsqu'il est plaidĂ© pour l'autre partie de l'affaire, pour l'appel d'Assange.
Mon morceau préféré d'hypocrisie puante de Holroyde et Burnett se trouve au paragraphe 45 :
âLes procĂ©dures d'extradition ne sont pas des procĂ©dures de droit privĂ©, mais un processus par lequel des obligations contractuelles solennelles sont satisfaites dans le contexte d'un cadre qui garantit que la personne recherchĂ©e bĂ©nĂ©ficie de garanties appropriĂ©es.â
L'expression "des obligations contractuelles solennelles sont satisfaites" devrait dĂ©clencher un sentiment de rĂ©pulsion immĂ©diat. Le traitĂ© en question est le traitĂ© d'extradition Ătats-Unis/Royaume-Uni de 2003, qui stipule, Ă l'article 4, que toute extradition Ă caractĂšre politique est exclue.
La dĂ©cision de la District Court, expressĂ©ment appuyĂ©e par Swift, est que le traitĂ© d'extradition entre le Royaume-Uni et les Ătats-Unis n'a pas de valeur juridique et que, par consĂ©quent, l'interdiction d'extradition politique qu'il contient ne s'applique pas. Swift accepte l'argument selon lequel la loi sur l'extradition de 2003 ne comportant pas d'interdiction d'extradition pour des raisons politiques, cette disposition du traitĂ© ne s'applique pas.
Le traitĂ© d'extradition, dĂ©clare Swift sans ambages, n'est pas "invocable", c'est-Ă -dire qu'il ne peut pas ĂȘtre pris en compte sur le plan juridique.
Le fait qu'il puisse ĂȘtre tout Ă la fois ceci et par ailleurs une "obligation solennelle" Ă la base de toute cette procĂ©dure est une contradiction extraordinaire qui n'inquiĂšte aucun de ces juges dans leur souci d'imposer rapidement et efficacement la force brute de l'Ătat. L'ensemble du processus est conçu comme une punition pour la rĂ©vĂ©lation non autorisĂ©e de la vĂ©ritĂ© par Assange.
Comment une extradition peut-elle avoir lieu spĂ©cifiquement dans le cadre d'un traitĂ© dont les dispositions ne peuvent lui ĂȘtre appliquĂ©es, voilĂ une Ă©nigme que seuls les magistrats britanniques chevronnĂ©s pourraient rĂ©soudre grĂące Ă la plasticitĂ© de leur intelligence et, plus essentiellement, Ă celle de leur conscience.
Le pouvoir exĂ©cutif considĂ©rera toujours le pouvoir judiciaire comme nĂ©cessaire Ă l'accomplissement du sale boulot. Et câest valable de n'importe quel exĂ©cutif. Il peut y avoir des soubresauts occasionnels dans les pĂ©riodes de convulsion politique. Il y a eu une impasse temporaire avec la Cour suprĂȘme sur certains aspects du Brexit, par exemple. Mais le pouvoir judiciaire se rĂ©aligne rapidement sur l'exĂ©cutif. Le pouvoir de l'Ătat reste une constante.
La persĂ©cution de Julian n'a rien Ă voir avec la loi. Il s'agit d'une simple dĂ©monstration du pouvoir Ă©crasant de l'Ătat.
https://consortiumnews.com/2023/06/15/assange-an-unholy-masquerade-of-tyranny-disguised-as-justice/