👁🗨 Assange, l'un des nôtres : après la carte de presse honoraire, adhésion au syndicat des journalistes de Campanie
Assange est en train d'être tué, petit à petit, ils l'ont déjà fait disparaître. L'affaire ne sera pas résolue par la loi. Le véritable bouclier pour Assange, c'est la pression de l'opinion publique.
👁🗨 Assange l'un des nôtres : après la carte de presse honoraire, adhésion au syndicat des journalistes de Campanie
Par Laura Viggiano, le 3 mars 2023
À l'occasion de la Journée de solidarité, le Syndicat unitaire des journalistes de Campanie (SUGC) a remis la carte de membre honoraire à Julian Assange. Claudio Silvestri, secrétaire de l'organisation régionale, qui fait partie de la FNSI [Federazione Nazionale Stampa Italiana, syndicat unitaire des journalistes italiens], l'a remise à Stefania Maurizi, une journaliste italienne qui travaille depuis des années avec Assange et WikiLeaks, lors d'un événement organisé par le réseau FreeAssange Napoli le 1er mars. Un geste symbolique mais important, qui fait suite à celui de l'Ordre national des journalistes, et réaffirme la valeur du travail journalistique d'Assange et de WikiLeaks.
Ont participé à la réunion, entre autres, Marina Castellaneta, professeur de droit international ; Giuseppe Giulietti, fondateur d'Articolo21 et ancien président de la FNSI ; Kristinn Hrafnsson, rédacteur en chef de WikiLeaks (avec un message vidéo dont la traduction intégrale est disponible à la fin de cet article) ; et Sergio D'Angelo, représentant de la ville de Naples, parmi les conseillers municipaux qui ont proposé l'ordre du jour approuvé à une large majorité pour conférer la citoyenneté d'honneur à Julian Assange. Naples sera la première municipalité à le faire dans les prochaines semaines.
Assange, considéré comme un espion par les États-Unis, arrêté en vertu d'une loi de 1917 contre l'espionnage considérée comme un danger pour la sécurité nationale et adoptée peu avant l'entrée des États-Unis dans le conflit mondial, est toujours emprisonné dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, surnommée le "Guantanamo de Londres". Le fondateur de WikiLeakes est accusé d'espionnage et de complot pour avoir divulgué des secrets d'État à travers des milliers de fichiers publiés par l'organisation WikiLeaks. Sont particulièrement sensibles, pour les États-Unis d'Amérique, les documents sur les crimes de guerre commis par les soldats américains pendant les conflits en Irak et en Afghanistan, mais pas seulement.
La réunion napolitaine, intitulée "La vérité n'est pas un crime. Naples pour Assange", a mis en évidence la valeur d'intérêt général de la cause pour le droit de rapporter des nouvelles, le droit d'être informé et de connaître des vérités qui ne sont pas dangereuses pour la sécurité des Etats mais pour l'image des gouvernements qui, en fait, détournent la démocratie en simulant une réalité démocratique et en cachant la vérité pour leur propre intérêt. Ne pas s'en préoccuper serait renoncer à exiger la vérité et la justice...
"La Journée de solidarité doit également être comprise comme la Journée de solidarité pour la liberté d'expression. Le déni de la vérité et de la justice est une honte pour la constitution du pays", a déclaré Giuseppe Giulitti. "Ce ne sont pas des affaires privées de familles, d'individus, d'amis. Cela vaut pour Assange, pour la famille Rocchelli, pour la famille Regeni, pour la famille Paciolla et pour bien d'autres. Nous avons choisi Naples pour réaffirmer notre engagement envers Assange, qui risque l'extradition et la prison à vie pour avoir révélé des dossiers truqués et pour avoir exercé son métier de journaliste. Nous demandons qu'après Naples, toutes les villes, à commencer par Rome, unissent leurs voix, car bâillonner Assange signifie bâillonner et condamner la liberté de la presse, en Italie et dans le monde".
"C'est un geste incontournable pour notre communauté, sur une question qui nous concerne tous, ainsi que toutes les libertés, pas seulement celle d'informer. Emprisonner Assange signifie bâillonner WikiLeaks, qui a été contraint de suspendre ses activités", a souligné Claudio Silvestri. "Quand on dit que le journaliste a été arrêté parce qu'il est un espion, c’est faux. Assange est en prison parce qu'il a permis au monde de connaître des secrets sur des scandales qui n'auraient pas dûs être révélés. Je pense qu'il est important que les syndicats européens et internationaux fassent symboliquement la même chose que ce que nous avons fait ici à Naples, car le message doit être clair : ils bâillonnent la libre information, foulent aux pieds tous les droits". Marina Castellaneta, juriste et maître de conférences en droit international, a également souligné, sur la base de divers arrêts et chartes des droits partagés par la communauté internationale, que la détention d'Assange est arbitraire ainsi que la conséquence d'une persécution où il fait l'objet d'une enquête en tant qu'espion, et non en tant que journaliste australien. Une extradition vers les États-Unis est demandée à son encontre. Une extradition qui "a d'abord été refusée par les juges britanniques, qui ont ensuite annulé le jugement sur la base d'une erreur", sans tenir compte d'une série d'indications de la Cour européenne.
Stefania Maurizi s'est adressée à l'assistance en s'attardant sur les parents de Mario Paciolla, présents dans la salle, et a évoqué "la jungle de secrets qui enveloppe tant d'histoires" comme celle de Mario et de sa famille. Pour Assange, elle se dit "dubitative" sur le fait que la justice pour le journaliste australien puisse émaner de la loi. "Avec cette affaire, nous arrivons à un tournant. La société est à la croisée des chemins. S'ils parviennent à l'extrader, explique-t-elle, nous vivrons dans une société qui peut ne pas sembler autoritaire, mais qui l'est, en réalité. Une société où vous ne pouvez pas révéler les crimes de guerre, les pratiques de torture exercées par l'État, n'est pas une société démocratique. C'est impossible en dictature, vous ne pouvez pas révéler les crimes d'État parce que vous vous faites tuer. Politkovskaïa et tous les autres ont été tués pour avoir révélé les crimes de leur État. Mais en démocratie, cela devrait être possible. Une société qui ne peut pas révéler ce que l'État fait avec l'argent et au nom de ses citoyens n'est pas une société libre. C'est là toute la différence entre la démocratie et la dictature". "Si, par contre, nous parvenons à éviter l'extradition, alors, poursuit Maurizi, nous pouvons dire que nous bénéficions encore de ces libertés garanties par la démocratie". En fait, Assange "est en train d'être tué, petit à petit", a-t-elle dit, en parlant de ceux qui lui demandent si elle pense qu'Assange sera tué une fois extradé. "Entre-temps, ils l'ont déjà fait disparaître. Je ne pense pas que l'affaire sera résolue avec la loi. Je pense qu'elle sera résolue grâce à la pression de l'opinion publique. Le véritable bouclier pour Assange, c'est la pression de l'opinion publique".