👁🗨 Caroline Kennedy déclare que les États-Unis sont ouverts à un accord de plaidoyer en faveur d'Assange
L'affaire Assange a créé des tensions entre USA & Australie alors que Washington attend la coopération de Canberra pour implanter des bases militaires en Australie & renforcer la pression sur la Chine
👁🗨 Caroline Kennedy déclare que les États-Unis sont ouverts à un accord de plaidoyer en faveur d'Assange
Par Joe Lauria, Spécial Consortium News, le 14 août 2023
L'ambassadrice des États-Unis en Australie pense qu'un accord de plaidoyer pourrait libérer l'éditeur de WikiLeaks Julian Assange, lui permettant de purger une peine plus courte pour un crime moins grave dans son pays d'origine.
Caroline Kennedy a déclaré au Sydney Morning Herald, dans une interview publiée en première page lundi, que la décision de conclure un accord était du ressort du ministère américain de la Justice. “Il ne s'agit donc pas vraiment d'une question diplomatique, mais je pense qu'il est tout à fait possible de trouver une solution”, a-t-elle déclaré au journal.
Mme Kennedy a évoqué les commentaires catégoriques du secrétaire d'État américain, Antony Blinken, le 31 juillet à Brisbane,
“M. Assange a été accusé de délits très graves aux États-Unis en lien avec son rôle présumé dans l'une des plus grandes compromissions d'informations classifiées de l'histoire de notre pays. ... Je ne dis cela que parce que, tout comme nous comprenons parfaitement les points de vue australiens, nos amis doivent également être conscients des points de vue américains”.
Malgré les propos virulents de M. Blinken, M. Kennedy a déclaré : “Mais il y a un moyen de résoudre ce problème. Vous lisez les journaux, tout comme moi”.
Gabriel Shipton, le frère de M. Assange, a déclaré au Herald :
“Caroline Kennedy ne tiendrait pas ces propos si elle ne voulait pas trouver une issue. Les Américains préfèrent se débarrasser de cette affaire”.
Selon le journal, il pourrait y avoir un "accord de plaidoyer à la David Hicks", un "plaidoyer Alford", dans lequel M. Assange pourrait continuer à clamer son innocence tout en acceptant une accusation moins grave qui lui permettrait de purger une peine supplémentaire en Australie. Les quatre années que M. Assange a déjà passées en détention provisoire à la prison londonienne de haute sécurité de Belmarsh pourraient sans doute être prises en compte.
Un plaidoyer aux États-Unis ?
David Hicks est un Australien détenu par les États-Unis à Guantanamo pendant cinq ans. Il a finalement été libéré par les États-Unis, sous la pression du gouvernement australien, après avoir accepté un plaidoyer Alford, dans lequel il plaidait coupable d'un seul chef d'accusation, tout en étant autorisé à clamer son innocence au motif que, selon lui, il ne bénéficierait pas d'un procès équitable.
Hicks a été renvoyé en Australie où il a purgé une peine supplémentaire de sept mois de prison. Son affaire a ensuite été rejetée en appel lorsqu'il a été établi que le chef d'accusation d'"assistance matérielle à des terroristes" n'était pas encore un délit au moment de son arrestation.
Le Herald a cité Don Rothwell, expert en droit international à l'Australian National University de Canberra, qui a déclaré que Julian Assange devrait se rendre aux États-Unis pour conclure l'accord de plaidoyer.
“Tout ce que nous savons de Julian Assange montre qu'il s'agit là d'un point de blocage majeur pour lui”, a déclaré M. Rothwell. “Or, il n'est pas possible de conclure un accord de plaidoyer en dehors de la juridiction concernée, sauf dans des circonstances tout à fait exceptionnelles”.
Cependant, Bruce Afran, un avocat constitutionnel américain, a déclaré en mai au webcast CN Live ! de Consortium News qu'il serait en effet possible pour M. Assange de rester en Grande-Bretagne pour conclure l'accord.
“En général, les tribunaux américains n'agissent que si le défendeur se trouve dans le district et se présente au tribunal”, a déclaré M. Afran. “Toutefois, rien ne les y oblige formellement non plus. Et dans un contexte donné, un plaidoyer serait possible à échelle internationale. Je ne pense pas qu'il y ait de mal à cela. Aucune loi ne l'interdit. Si toutes les parties y consentent, le tribunal a compétence”.
M. Afran a déclaré qu'après avoir passé sept ans à l'ambassade d'Équateur à Londres et quatre ans à Belmarsh, M. Assange “craindrait bien sûr de devoir se rendre aux États-Unis.”
M. Afran a déclaré qu'il était tout à fait compréhensible que M. Assange ne fasse pas confiance aux États-Unis pour mener à bien un accord s'il s'y rendait.
“Les États-Unis se donnent parfois des moyens de contourner ces accords”, a déclaré M. Afran. “La meilleure approche serait qu'il plaide pendant qu'il est au Royaume-Uni, nous pourrions alors résoudre la question soit par une peine supplémentaire de sept mois, comme David Hicks, soit par une année à purger au Royaume-Uni ou en Australie, soit par la durée de sa détention effective”, a-t-il ajouté.
M. Shipton a déclaré au Herald que partir aux États-Unis pour son frère était un “non-sens”. Il a ajouté : “Il est hors de question que Julian se rende aux Etats-Unis”.
M. Afran a déclaré que M. Assange ne devrait pas nécessairement plaider pour un délit d'espionnage ou d'intrusion informatique. “Il pourrait plaider simplement pour mauvaise manipulation d'informations officielles ou même, dans le pire des cas, pour conspiration en vue de cette utilisation d'informations officielles, un chef d'accusation bien moins grave”, a-t-il déclaré.
“Cela résoudrait également l'affaire et donnerait probablement satisfaction aux États-Unis, tout en permettant à Julian de garder la tête haute après toutes ces années”, a déclaré M. Afran. Un arrangement pour détournement de données confidentielles reviendrait à criminaliser la relation entre le journaliste et sa source.
Voir l'intégralité de l'intervention de M. Afran sur CN Live ! (3 min. 10 sec.) :
En attente de l'audience de la High Court
M. Afran a également déclaré que les avocats de M. Assange pouvaient prendre l'initiative de l'offre de plaidoyer.
Le 22 mai, deux jours avant que le président Joe Biden ne se rende en Australie pour un voyage qu'il a ensuite annulé, l'avocate de M. Assange, Jennifer Robinson, a déclaré pour la première fois, au nom de l'équipe juridique de M. Assange, qu'ils envisageaient un accord de plaidoyer.
Mme Robinson a déclaré au National Press Club de Canberra :
"Nous envisageons toutes les options. Cependant, notre position première est, bien entendu, que l'affaire doit être abandonnée. Nous affirmons qu'aucun crime n'a été commis, et que les faits ne révèlent aucun crime. Alors que pourrait bien plaider Julian?".
Julian Assange demeure incarcéré à Belmarsh dans l'attente d'une dernière audience de 30 minutes devant la High Court of England Wales, actuellement en vacances judiciaires jusqu'au 1er octobre. Les avocats de M. Assange tenteront de faire annuler la décision de la High Court de ne pas instruire son recours contre l'arrêté d'extradition du Ministère de l'Intérieur, et contre la plupart des décisions rendues par les juridictions de première instance dans cette affaire d'extradition.
En janvier 2021, cette juridiction avait refusé son extradition pour des raisons de santé, et en lien avec conditions de détention dans les prisons américaines, mais elle s'était rangée aux arguments des États-Unis sur tous les autres points légaux. Les États-Unis ont ensuite gagné leur appel devant la High Court, qui a annulé l'ordonnance de non extradition de M. Assange.
Le Premier ministre australien Anthony Albanese doit rencontrer le président Joe Biden à la Maison Blanche à la fin du mois d'octobre. Les partisans d'Assange peuvent alors espérer qu'un accord pour le retour d'Assange en Australie puisse être finalisé.
Mais la High Court pourrait siéger avant cela. Si elle rejette le dernier recours de M. Assange, celui-ci pourrait être embarqué pour Alexandria, en Virginie, où il risque jusqu'à 175 ans dans un cachot américain pour avoir publié des informations exactes sur les crimes de guerre et la corruption aux États-Unis.
Greg Barns, un avocat spécialisé dans les droits de l'homme qui conseille la campagne Assange, a déclaré à l'Australian Associated Press que le cas de M. Assange est venu troubler l'équilibre entre les États-Unis et l'Australie, alors que Washington cherche à obtenir la coopération de Canberra pour mettre en place de nouvelles installations militaires américaines en Australie, tout en augmentant la pression sur la Chine.
" Il s'agit clairement d'une question de diplomatie, car elle a mobilisé le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères - il ne s'agit pas d'une affaire d'extradition ordinaire", a déclaré M. Barns. "Cette affaire est devenue un point de friction au sein de l'alliance", a-t-il ajouté.
* Joe Lauria est rédacteur en chef de Consortium News et ancien correspondant aux Nations unies pour le Wall Street Journal, le Boston Globe et de nombreux autres journaux, dont The Montreal Gazette et The Star of Johannesburg. Il a été journaliste d'investigation pour le Sunday Times de Londres, journaliste financier pour Bloomberg News et a commencé sa carrière professionnelle à 19 ans comme pigiste pour le New York Times. Il est l'auteur de deux livres, A Political Odyssey, avec le sénateur Mike Gravel, préfacé par Daniel Ellsberg, et How I Lost By Hillary Clinton, préfacé par Julian Assange. Il peut être contacté à l'adresse joelauria@consortiumnews.com et suivi sur Twitter @unjoe
https://consortiumnews.com/2023/08/14/caroline-kennedy-says-us-open-to-assange-plea-deal/