đâđš Conflits armĂ©s & Cour internationale de justice
Qu'est-ce qu'un âdĂ©lai raisonnableâ quand des dizaines d'enfants sont tuĂ©s chaque jour ? Je ne pense pas que la Cour tombe dans le panneau, bien qu'elle ait lâair pressĂ©e d'expĂ©dier l'affaire.
đâđš Conflits armĂ©s & Cour internationale de justice
Par Craig Murray, le 25 janvier 2024
Demain, la Cour internationale de justice rendra sa dĂ©cision sur la requĂȘte sud-africaine de mesures conservatoires visant Ă empĂȘcher un gĂ©nocide Ă Gaza. Nombreux sont ceux qui retiennent leur souffle dans l'attente d'une main tendue. Quelle en sera l'issue ?
Vous pouvez lire mon point de vue sur certains des arguments en jeu dans mon article pour Middle East Eye. Il n'y a pas dâespace commentaires sur MEE, alors n'hĂ©sitez pas Ă discuter de cet article ici.
Vous vous souviendrez que mes impressions sur le comportement des juges à La Haye ne m'ont pas laissé beaucoup d'espoir. Ils ne semblaient vraiment pas à l'aise dans une affaire qui met en accusation les agissements de l'ensemble de l'establishment politique occidental, et pas seulement ceux d'Israël. Pourtant, on ne pouvait pas dire que l'Afrique du Sud n'avait pas présenté de solides preuves prima facie de génocide, y compris de nombreuses preuves d'intention, ce qui, à ce stade, était le mieux que ce que l'Afrique du Sud avait à faire.
Il me semble que les juges ont été visiblement intéressés par les arguments de procédure selon lesquels l'Afrique du Sud ne pouvait pas porter l'affaire devant les tribunaux parce qu'elle n'était pas en conflit avec Israël au moment de la plainte. Mais je ne pense pas que cet argument tienne la route. Il ne fait aucun doute qu'il existe un différend entre l'Afrique du Sud et Israël sur la question de savoir si ce dernier commet un génocide. Le problÚme de procédure ne découle pas du texte de la Convention sur le génocide, mais simplement de la jurisprudence antérieure de la Cour, qui indique que les parties devraient s'efforcer de parvenir à une solution avant de s'adresser à la Cour.
Aucune de ces jurisprudences antĂ©rieures ne concerne le gĂ©nocide. Dans tout cas de gĂ©nocide prĂ©sumĂ©, il y a une urgence criante. Si l'argument procĂ©dural d'IsraĂ«l devait ĂȘtre retenu, tout pays commettant un gĂ©nocide n'aurait plus quâĂ ignorer toute question sur le thĂšme, et personne ne pourrait le poursuivre en justice, jusqu'Ă ce que le dĂ©lai âraisonnableâ de rĂ©ponse soit Ă©coulĂ©, pĂ©riode pendant laquelle le gĂ©nocide pourrait allĂšgrement se poursuivre. Qu'est-ce qu'un âdĂ©lai raisonnableâ quand des dizaines d'enfants sont tuĂ©s chaque jour ? Je ne pense pas que la Cour tombe dans le panneau, bien qu'elle soit visiblement pressĂ©e d'ĂȘtre dĂ©gagĂ©e de toute responsabilitĂ©.
Les juges sont bien sĂ»r eux-mĂȘmes des membres trĂšs privilĂ©giĂ©s de l'Ă©lite dirigeante. Le monde entier n'a jamais vu aussi clairement Ă quel point cette Ă©lite est acquise Ă la cause sioniste. Mais je garde encore un peu d'espoir car la Cour internationale de justice a des antĂ©cĂ©dents vraiment sĂ©rieux. Si demain nous apprenons qu'elle a failli, nous saurons que la notion de droit international aura dĂ©finitivement disparu.
Les équipes juridiques d'Israël et de l'Afrique du Sud auront probablement reçu, dans la plus stricte confidentialité, une indication du résultat de la part du président. Il s'agit de parer à tout évÚnement spontané et inattendu devant le tribunal. S'ils ne l'ont pas encore fait, ce sera fait demain matin à la premiÚre heure.
Mais lorsque 17 juges de nationalitĂ©s diverses siĂšgent ensemble, dont un Sud-Africain et un IsraĂ©lien, et que plusieurs d'entre eux sont exposĂ©s Ă l'influence et au dialogue avec leurs gouvernements respectifs, il faudrait ĂȘtre particuliĂšrement stupide pour croire que la dĂ©cision n'a pas dĂ©jĂ fait l'objet de fuites dans les cercles officiels haut-placĂ©s. Ce qui me rĂ©conforte, c'est que le ministre sud-africain des affaires Ă©trangĂšres se rend Ă La Haye pour entendre la dĂ©cision. Il ne le ferait pas si le rĂ©sultat Ă©tait un Ă©chec.
LĂ oĂč il y aurait humiliation, c'est dans la volontĂ© de la classe politique occidentale de s'abaisser purement et simplement Ă reconnaĂźtre la simple vĂ©ritĂ© des crimes d'IsraĂ«l. Ă grande Ă©chelle, ils dĂ©clarent qu'il est absurde de prĂ©tendre que les 15 000 enfants morts jusqu'Ă prĂ©sent pourraient dĂ©noter une intention gĂ©nocidaire. Ă une Ă©chelle plus rĂ©duite, Rishi Sunak, Keir Starmer et le porte-parole du dĂ©partement d'Ătat amĂ©ricain ont tous refusĂ©, au cours des derniĂšres 24 heures, de dire, clairement, que c'est un crime de tirer sur un civil non armĂ© portant un drapeau blanc.
Je m'attends à ce que la décision de demain soit un simulacre de jugement. La Cour dira qu'elle se prononcera sur l'affaire en temps voulu et que, dans l'intervalle, Israël devrait veiller à prendre toutes les mesures nécessaires pour se conformer au droit humanitaire international et réprimer l'incitation au génocide. Rien ne changerait donc.
Si toutefois la Cour ordonne un cessez-le-feu sur la base d'une preuve prima facie de gĂ©nocide, je pense que l'on assistera Ă une sĂ©rieuse modification des agissements des politiciens occidentaux, y compris une rĂ©duction de l'armement d'IsraĂ«l. Bien entendu, cela n'arrĂȘtera pas IsraĂ«l.
IsraĂ«l se livre au gĂ©nocide des Palestiniens depuis 75 ans. Tout ce que nous avons depuis le 7 octobre, c'est une nouvelle phase d'intensification. Au cours de l'annĂ©e prĂ©cĂ©dant le 7 octobre 2023, IsraĂ«l a tuĂ© plus de 350 Palestiniens. IsraĂ«l poursuivra ses politiques gĂ©nocidaires jusqu'Ă ce que son Ătat d'apartheid soit aboli. Telle est l'Ă©vidence fondamentale que la CIJ n'abordera pas demain.
https://www.craigmurray.org.uk/archives/2024/01/armed-conflict-and-the-icj/