đâđš Daniel Ellsberg: "Il est scandaleux que Biden continue Ă poursuivre Julian Assange"
Si Julian Assange est extradĂ© & poursuivi aux USA, je dirais quâavec le climat actuel, ce sera un vĂ©ritable tournant & notre presse sera essentiellement digne de celle de la Russie de Staline.
đâđš Daniel Ellsberg: "Il est scandaleux que Biden continue Ă poursuivre Julian Assange"
Par Stefania Maurizi @SMaurizi, le 22 mars 2022 .
DANIEL ELLSBERG, LA SOURCE LĂGENDAIRE DES PAPIERS DU PENTAGON - Il a quatre-vingt-dix ans, mais il est fort et aussi lucide que jamais. Ă mesure qu'il parle, un demi-siĂšcle de passion civique et de courage moral se dĂ©ploie, et avec lui la prise de conscience que les temps ont changĂ©. Cinquante et un ans aprĂšs la publication des Pentagon Papers, un journaliste, Julian Assange, est en prison pour violation de lâEspionage Act, tout comme Daniel Ellsberg. La libertĂ© de la presse sera-t-elle Ă nouveau victorieuse, comme ce fut le cas pour Ellsberg ?
C'est une lĂ©gende. Un homme au courage moral exceptionnel, qui a risquĂ© sa vie pour rĂ©vĂ©ler la vĂ©ritĂ©. Il y a 51 ans, Daniel Ellsberg passait nuit aprĂšs nuit devant une machine Xerox pour photocopier les Pentagon Papers. 7 000 pages de documents top secrets rĂ©vĂ©lant comment le gouvernement amĂ©ricain a menti Ă ses citoyens sur la guerre au Vietnam et a envoyĂ© des milliers de jeunes AmĂ©ricains mourir pour une guerre sans espoir. La publication des "Pentagon Papers" par le New York Times et le Washington Post a dĂ©clenchĂ© un combat lĂ©gendaire pour la libertĂ© de la presse qui est allĂ© jusqu'Ă la Cour suprĂȘme des Ătats-Unis, aprĂšs que l'administration de Nixon a tentĂ© de bloquer ces rĂ©vĂ©lations top secrĂštes et que Daniel Ellsberg a Ă©tĂ© accusĂ© d'avoir violĂ© une loi draconienne: l'Espionage Act de 1917. Il risquait la prison Ă vie. Mais la presse a gagnĂ©. La Cour suprĂȘme des Ătats-Unis a statuĂ© que le gouvernement ne pouvait empĂȘcher le New York Times et le Washington Post de publier les Pentagon Papers, car la presse bĂ©nĂ©ficie de la protection constitutionnelle duPremier Amendement. Quant Ă Daniel Ellsberg, les poursuites engagĂ©es contre lui au titre de l'Espionage Act se sont effondrĂ©es. Un demi-siĂšcle plus tard, les Ătats-Unis ont accusĂ© un journaliste, le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, d'avoir violĂ© cette mĂȘme loi. Il risque lui aussi la prison Ă vie. C'est la premiĂšre fois dans l'histoire des Ătats-Unis qu'un journaliste - et non une source, comme Ellsberg - est accusĂ© de telles violations de l'Espionage Act. Il Fatto Quotidiano s'est entretenu en profondeur avec Daniel Ellsberg.
Interview originale: https://www.ilfattoquotidiano.it/in-edicola/guarda/
Retranscription:
đ Stefania Maurizi
Je voudrais revenir à 1971, précisément à ces nuits que vous avez passées à photocopier les Pentagon Papers. N'étiez-vous pas terrifié par la possibilité de passer votre vie en prison ?
Daniel Ellberg
Je ne voulais pas passer ma vie en prison, mais lorsqu'il s'agissait de risquer cela pour avoir une chance d'Ă©courter une guerre qui tuait des centaines de milliers, voire plusieurs millions de personnes, alors le prix Ă payer pour une personne de perdre sa libertĂ©, ou mĂȘme de mourir semblait ĂȘtre une dĂ©cision trĂšs naturelle Ă prendre. AprĂšs tout, j'avais Ă©tĂ© formĂ© dans l'armĂ©e, essentiellement en temps de paix, en tant que marine, mais au Vietnam, j'ai utilisĂ© cette formation pour ĂȘtre avec les troupes et voir la guerre de prĂšs. Vous voyez, le courage physique de tous, c'est la routine. Mais en temps de paix, les civils cherchent Ă ne prendre aucun risque, que ce soit pour leur carriĂšre, pour leur gagne-pain. Ce sont souvent les mĂȘmes personnes qui ont risquĂ© leur vie et leur corps au combat. L'exemple des jeunes AmĂ©ricains qui allaient en prison pour protester le plus vigoureusement possible contre la guerre, et passaient des annĂ©es en prison pour dire que la guerre Ă©tait mauvaise - sans leur exemple, je dois dire que je n'aurais probablement pas pensĂ© Ă faire ce que j'ai fait, ce qui m'a fait risquer la prison. Leur exemple a facilitĂ© la dĂ©marche.
đ SM
C'Ă©tait le courage des opposants Ă la guerre...
DE
Ceux qui sont allĂ©s en prison n'Ă©taient pas, dans l'ensemble, des pacifistes absolus, dans le sens oĂč ils s'opposaient Ă toutes les guerres. Ils s'opposaient Ă cette guerre impĂ©riale injustifiĂ©e. Et il n'existe pas vraiment de catĂ©gorie pour cela, dans l'objection de conscience, dans la plupart des pays, et pas aux Ătats-Unis: l'objection sĂ©lective Ă la guerre. Donc, ils sont allĂ©s en prison pour ça.
đ SM
Lorsque le New York Times a publiĂ© le premier article basĂ© sur vos documents, vous ĂȘtes-vous cachĂ© pour Ă©viter d'ĂȘtre arrĂȘtĂ©?
DE
Lorsque le Times a Ă©tĂ© assignĂ© en justice - il y a eu une injonction pour la premiĂšre fois de notre histoire - et sommĂ© dâarrĂȘter la publication, alors j'ai senti que je devais le transmettre Ă d'autres journaux, et je l'ai donnĂ© au Washington Post, et ils ont Ă©tĂ© aussi assignĂ©s. Pour transmettre les copies que nous avions Ă d'autres, il fallait que nous Ă©chappions au FBI, alors pendant 13 jours nous nous sommes cachĂ©s, avec l'aide d'amis, qui n'ont jamais Ă©tĂ© identifiĂ©s publiquement et qui ne veulent pas lâĂȘtre. Mais grĂące leur aide, nous les avons transmises Ă 17 autres journaux, et il y a eu deux autres injonctions, jusqu'Ă ce que le gouvernement abandonne, et rĂ©alise qu'il ne pouvait plus rien arrĂȘter. Quand je me suis dĂ©barrassĂ© de tous les journaux que j'avais, je me suis rendu aux autoritĂ©s au bout de 13 jours, et j'ai Ă©tĂ© mis en examen.
đ SM
Vous n'ĂȘtes pas allĂ© en prison, mais Chelsea Manning a passĂ© huit ans en prison et a tentĂ© de se suicider Ă trois reprises, Edward Snowden a Ă©tĂ© contraint de s'enfuir en Russie, et Julian Assange a Ă©tĂ© inculpĂ© pour violation de lâEspionage Act. Vous attendiez-vous Ă ce que les Ătats-Unis, pour la premiĂšre fois de leur histoire, inculpent un journaliste pour avoir publiĂ© des informations vĂ©ridiques dans l'intĂ©rĂȘt du public?
DE
Les avocats qui suivaient cette affaire Ă l'American Civil Liberties Union (ACLU), prĂ©disaient que Donald Trump allait poursuivre des journalistes. Aucun prĂ©sident ne l'avait encore fait, c'est une violation flagrante du Premier Amendement. C'est Ă©videmment inconstitutionnel, ce qui ne freine Ă©videmment pas Trump, et il est scandaleux que Biden ait poursuivi. Il aurait dĂ» renoncer aux poursuites initiĂ©es par Trump pour l'extradition de Julian. Biden pouvait abandonner n'importe quand, il pouvait le faire immĂ©diatement. C'Ă©tait trĂšs probablement inconstitutionnel, mĂȘme dans mon cas: j'Ă©tais le premier Ă ĂȘtre inculpĂ© ainsi, pour des fuites, mais j'Ă©tais un ancien fonctionnaire. J'Ă©tais une source, et pas un journaliste - ils ne considĂšrent pas les sources comme des journalistes. Dans mon cas, on pouvait argumenter d'un cĂŽtĂ© comme de l'autre, pour savoir si c'Ă©tait constitutionnel ou pas. Dans le cas de Julian, il n'y a pas d'argument de l'autre cĂŽtĂ©: c'est Ă©videmment inconstitutionnel, en AmĂ©rique, en vertu du Premier Amendement. Obama avait envisagĂ© d'inculper Julian, mais avait reculĂ© prĂ©cisĂ©ment pour cette raison: s'ils s'en prenaient Ă Julian pour ces motifs, ils n'auraient aucune excuse pour ne pas s'en prendre au New York Times. Et ils ne voulaient pas en arriver lĂ , en partie parce que le New York Times est extrĂȘmement utile aux administrations successives. Il soutient essentiellement l'empire, et ne s'oppose pas Ă ce que l'on dĂ©pense sans compter pour la soi-disant DĂ©fense. C'est un exutoire trĂšs utile pour eux, mĂȘme s'il imprime occasionnellement des choses qu'ils prĂ©fĂ©reraient ne pas voir publiĂ©es.
đ SM
Pourquoi pensez-vous que l'administration Biden n'abandonne pas l'affaire?
DE
Biden, lorsqu'il Ă©tait vice-prĂ©sident, au tout dĂ©but, en 2010, a qualifiĂ© Julian Assange de terroriste high-tech, ce qui est absurde. Il est violemment opposĂ© aux fuites, et en fait tous les prĂ©sidents sont trĂšs remontĂ©s contre les fuites dont ils redoutent la publication, mais ils reculent devant la perspective d'une action clairement inconstitutionnelle. Trump ne l'a pas fait, et Biden aurait dĂ» le faire, mais il ne l'a pas fait jusqu'Ă prĂ©sent. Il n'est pas encore trop tard pour qu'il corrige cela, mais je ne m'attends pas Ă ce qu'il le fasse. Il montre tellement d'animositĂ© envers Julian que je pense que non. Je ne sais absolument pas pourquoi, d'ailleurs. Dâune maniĂšre gĂ©nĂ©rale, cĂŽtĂ© politique Ă©trangĂšre, il n'a rien montrĂ© de progressiste ou de favorable Ă un retrait des poursuites. En politique intĂ©rieure, Ă bien des Ă©gards, il a agi mieux que ce que presque tous attendaient, mais en politique Ă©trangĂšre : c'est la mĂȘme orientation que celle d'Obama, trĂšs mauvaise, et Ă peu prĂšs aussi celle de Trump.
đ SM
Selon Yahoo ! News, la CIA a tentĂ© d'empoisonner Julian Assange ou de le kidnapper. Si les Ătats-Unis peuvent l'extrader, vous attendez-vous Ă un procĂšs Ă©quitable?
DE
Un procĂšs Ă©quitable? Oh, il n'a aucune chance d'avoir un procĂšs Ă©quitable, pas plus que les autres personnes accusĂ©es et condamnĂ©es en vertu de lâEspionage Act, ou mĂȘme moi. Je suis le seul qui, d'une certaine maniĂšre, "s'en est tirĂ©", en ce sens que l'administration ne m'a pas mis en prison Ă vie ou pour une longue pĂ©riode, et cela en raison d'un ensemble d'Ă©vĂ©nements trĂšs inhabituels, et ce sont les mĂȘmes techniques utilisĂ©es pour Julian. Au moment oĂč ils envisageaient de le kidnapper Ă l'ambassade d'Ăquateur, peut-ĂȘtre de le tuer, peut-ĂȘtre de l'empoisonner, mais aussi d'envisager des fusillades de toutes sortes pour l'attraper, on a [aussi] fait venir de Miami treize hommes, douze ou treize, des agents de la CIA, dont l'un Ă©tait au moins agent de la CIA Ă l'Ă©poque, mais ils avaient tous travaillĂ© pour la CIA Ă la Baie des Cochons. Ils ont Ă©tĂ© rĂ©quisitionnĂ©s avec l'ordre de "neutraliser Daniel Ellsberg, et totalement". Quand j'ai demandĂ© au procureur: "Qu'est-ce que ça veut dire ? Me tuer?", il a rĂ©pondu: "Eh bien, les mots Ă©taient "vous neutraliser totalement", mais vous savez, ceux qui travaillent pour la CIA n'utilisent jamais le mot âtuerâ". Mais c'Ă©tait des tueurs, ces gens avaient Ă©tĂ© impliquĂ©s dans des tentatives d'assassinat de Castro, et mĂȘme de Trujillo. Ils ne m'ont pas [tuĂ©]. Encore une fois, j'ai Ă©chappĂ© Ă ce sort, parce qu'au dernier moment, ils ont pensĂ© qu'ils Ă©taient piĂ©gĂ©s et allaient se faire prendre, donc j'ai eu de la chance, encore une fois. Aucune des autres personnes inculpĂ©es n'a eu cette chance, quasiment toutes ont Ă©tĂ© condamnĂ©es, dans de nombreux cas par des nĂ©gociations de plaidoyer, parce qu'elles ont Ă©tĂ© menacĂ©es de peines beaucoup plus lourdes. Des [peines] Ă vie pour trahison ou espionnage, et ils ont acceptĂ© des inculpations moins lourdes, mais cela les a quand mĂȘme maintenus en prison pendant des annĂ©es, dans de nombreux cas. Comme mon ami Mordechai Vanunu, en IsraĂ«l, qui a rĂ©vĂ©lĂ© le programme nuclĂ©aire israĂ©lien. Il est restĂ© en prison 17 ans, dont 11 ans et demi en isolement, la plupart du temps dans une cellule de six pieds sur neuf pieds, deux mĂštres sur trois, si vous pouvez vous imaginer cela. Ces gouvernements sont donc extrĂȘmement vindicatifs Ă l'idĂ©e que leurs secrets coupables [sortent], les preuves de leurs crimes, de leurs mensonges, de la violation de leurs traitĂ©s. Ils ne veulent pas qu'ils soient rĂ©vĂ©lĂ©s, car le public pourrait en faire tout un plat. En fait, lorsque cela sort, malheureusement, je dois dire quâil ne se passe gĂ©nĂ©ralement pas grand-chose. Je ne peux pas dire que rĂ©vĂ©ler la vĂ©ritĂ© nâa pas l'impact dont jâaurais rĂȘvĂ©. Les gens l'acceptent en quelque sorte, et suivent le mouvement. NĂ©anmoins, il y a une chance que cela aide, et lorsque d'Ă©normes quantitĂ©s de vies sont en jeu, cela en vaut la peine, et le risque.
đ SM
Vous pensez donc qu'il n'y a aucune chance de procĂšs Ă©quitable pour Julian Assange...
DE
Parce qu'en vertu de lâEspionage Act, l'accusĂ© n'a aucune chance de dire au jury pourquoi il a fait ce qu'il a fait, ou ce qu'il espĂ©rait obtenir, quels Ă©taient les avantages escomptĂ©s pour le public et, dans certains cas, rĂ©alisĂ©s, et quel Ă©tait le prĂ©judice rĂ©el, gĂ©nĂ©ralement nul, pour la sĂ©curitĂ© nationale. Mis Ă part le fait, comme vous l'avez mentionnĂ©, que dans son cas, comme dans le mien, des crimes ont Ă©tĂ© commis contre lui : des conspirations pour lui nuire, totalement, criminellement, comme dans mon cas. Mais dans mon cas, aprĂšs les rĂ©vĂ©lations, l'affaire a Ă©tĂ© abandonnĂ©e.
đ SM
Dans votre cas, l'affaire de l'Espionage Act a Ă©tĂ© abandonnĂ©e Ă cause des âplombiersâ de Nixon, qui se sont introduits dans le bureau de votre mĂ©decin, en gros...
DE
C'Ă©tait l'un des aspects. Cela seul n'a pas suffit pour que le juge rejette l'affaire. C'Ă©tait l'une des premiĂšres rĂ©vĂ©lations, qu'ils avaient cambriolĂ© le bureau de mon ancien psychanalyste, pour obtenir des informations et me faire chanter pour me faire taire. Pas pour me salir, mais pour me menacer de me salir, afin que je ne rĂ©vĂšle plus les secrets de l'administration Nixon. Mais il y avait autre chose : des Ă©coutes tĂ©lĂ©phoniques sans mandat, clairement illĂ©gales Ă l'Ă©poque, le recours Ă la CIA pour Ă©tablir mon profil psychologique, pour voir comment ils pourraient me manipuler ou me faire chanter, quels Ă©taient mes points faibles, pour me neutraliser. Tous ces Ă©lĂ©ments ont amenĂ© le juge Ă dire que ces circonstances louches offensaient son sens de la justice, et que les accusations devaient ĂȘtre rejetĂ©es avec prĂ©judice, ce qui signifie que je ne pourrais pas ĂȘtre rejugĂ© pour ces accusations.
đ SM
Alors que dans le cas de Julian Assange, les révélations de projets de la CIA pour le tuer n'ont pas incité le juge à abandonner l'affaire...
DE
Elle ne les a pas sĂ©rieusement prises en considĂ©ration, ce qui semble choquant. Le droit britannique est diffĂ©rent du droit amĂ©ricain, dans le sens oĂč il n'y a pas de Premier Amendement. Nous avons eu une rĂ©volution, et nous avons eu un Premier Amendement, une guerre d'indĂ©pendance, pas eux, sans disposition sur la libertĂ© de la presse. En thĂ©orie, Julian ou moi-mĂȘme serions presque certainement considĂ©rĂ©s comme ayant violĂ© la loi britannique sur les secrets officiels, si câĂ©tait intentĂ© par la Grande-Bretagne - leur loi est beaucoup plus dure pour la libertĂ© d'expression et contre la presse. Alors peut-ĂȘtre que le juge ne pouvait pas prendre ça au sĂ©rieux, Ă©tant britannique. Mais l'idĂ©e d'entendre illĂ©galement les discussions d'un accusĂ© avec ses avocats et ses mĂ©decins, et tout ce qui est dit avec chaque visiteur - je lui ai rendu visite deux fois Ă l'ambassade d'Ăquateur, et je suis sĂ»r que cela a Ă©tĂ© enregistrĂ© - et cela, Ă©videmment, mĂȘme en Grande-Bretagne [il sourit], et oĂč que ce soit dâailleurs, devrait conduire Ă l'abandon de l'affaire, sauf dans une sociĂ©tĂ© policiĂšre bien identifiable, disons comme l'Allemagne de l'Est, par exemple.
đ SM
Lorsque vous avez rĂ©vĂ©lĂ© les "Pentagon Papers", ceux-ci ont dĂ©clenchĂ© une affaire lĂ©gendaire de libertĂ© de la presse jusqu'Ă la Cour suprĂȘme des Ătats-Unis. Si les Ătats-Unis peuvent extrader Julian Assange, pensez-vous que la Cour suprĂȘme des Ătats-Unis se prononcera en faveur de la libertĂ© de la presse dans son cas?
DE
Vous vous souvenez, j'ai Ă©tĂ© jugĂ© il y a un demi-siĂšcle, il y a exactement 51 ans maintenant. Ă l'Ă©poque, la Cour suprĂȘme aurait presque certainement rejetĂ© une affaire impliquant des journalistes. Comme je l'ai dit, elle aurait probablement, mais probablement seulement, rejetĂ© mon cas en tant que source, mais dans le cas d'un journaliste, certainement. Et aucun prĂ©sident n'a Ă©tĂ© prĂȘt Ă le faire depuis, jusqu'Ă Trump, et maintenant Biden. Biden le fait aujourdâhui. Si Julian Assange est extradĂ© et poursuivi en AmĂ©rique, je dirais qu'avec l'ambiance actuelle, depuis le 11 septembre et ces vingt derniĂšres annĂ©es, il pourrait bien ĂȘtre condamnĂ©, mĂȘme s'il ne devrait pas l'ĂȘtre. Le Premier Amendement disparaĂźtra alors. Cela signifie que non seulement les sources, mais aussi les journalistes, devront craindre d'ĂȘtre poursuivis et condamnĂ©s pour avoir fait leur travail en remettant en cause le gouvernement, en publiant des informations que le gouvernement veut rendre invisibles. Il s'agit d'un gouvernement qui, nous le savons, mĂšne des guerres agressives, criminelles, comme en Irak, une agression caractĂ©risĂ©e, et ce gouvernement se prĂ©occupe trĂšs, trĂšs peu des populations de ces zones, comme il actuellement en Afghanistan. Il est choquant qu'ils rĂ©duisent maintenant les Afghans, de maniĂšre punitive, Ă la famine et au froid, en maintenant leurs fonds gelĂ©s, tĂ©moignant du peu d'intĂ©rĂȘt jamais eu pour le peuple afghan, comme ils l'ont montrĂ© pendant 20 ans, en les bombardant Ă lâaide de drones et de raids, etc. En bref : c'est un gouvernement dont il faut exposer les mĂ©faits, et si... si le cas de Julian marque un vĂ©ritable tournant, alors nous aurons essentiellement une presse comme celle de la Russie de Staline.