👁🗨 Déjà vu
Les proxénètes de la guerre migrent d’une administration à l'autre, manipulés par leurs maîtres & relayés par des médias en faillite, nous entraînant d'un bourbier à l'autre vers un nouveau cauchemar.
👁🗨 Déjà vu
Par Chris Hedges, le 19 juin 2025
Les mensonges utilisés pour déclencher la guerre en Irak sont ressuscités pour déclencher une guerre avec l'Iran. Les évaluations des agences du renseignement et des organismes internationaux sont rejetées, remplacées par des hallucinations.
Il n’y a que très peu de différence entre les mensonges utilisés pour déclencher la guerre en Irak et ceux utilisés pour promouvoir une guerre contre l'Iran. Les évaluations de nos agences du renseignement et des organismes internationaux sont, comme elles l'ont été durant les appels à l'invasion de l'Irak, rejetées en bloc comme autant d'hallucinations.
Tous les vieux clichés resurgissent pour nous entraîner dans un autre fiasco militaire. Un pays qui ne représente aucune menace pour nous ni pour ses voisins serait sur le point d'acquérir une arme de destruction massive (ADM) qui mettrait en péril notre existence. Ce pays et ses dirigeants incarneraient le mal à l'état pur. La liberté et la démocratie seraient en jeu. Si nous n'agissons pas maintenant, la prochaine preuve irréfutable prendrait a forme d’un champignon atomique. Notre supériorité militaire nous assurerait la victoire. Nous sommes les sauveurs du monde. Des bombardements massifs, une version actualisée de la stratégie “Choc et effroi”, apporteraient paix et harmonie.
Ces mensonges nous ont déjà été servi avant la guerre de 2003 en Irak. Vingt-deux ans plus tard, ils refont surface. Quiconque prône la négociation, la diplomatie et la paix n’est qu’un complice des terroristes.
N'avons-nous tiré aucune leçon des fiascos en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie, sans parler de l'Ukraine ?
Tous les charognards qui nous ont vendu ces guerres passées sous de faux prétextes, tels que l'animateur de talk-show conservateur Mark Levin, Max Boot — qui écrit que “cet impératif stratégique justifie le bombardement de Fordow”, où le programme d'enrichissement nucléaire iranien est enfoui sous terre — David Frum, John Bolton, le général Jack Keane, Newt Gingrich, Sean Hannity et Thomas Friedman, reviennent saturer les ondes de leur alarmisme à couper le souffle.
Peu importe que leur grand plan consistant à renverser les talibans en Afghanistan, puis à envahir et à renverser les régimes en Irak, au Liban, en Syrie, en Libye, au Soudan, en Somalie et enfin en Iran, leur ait explosé au visage. Peu importe que leur boulimie belliciste ait fait des centaines de milliers, voire des millions de morts et coûté des milliards au Trésor américain. Peu importe l'absurdité pure et simple de leurs arguments. Leurs canaux de communication sont bien protégés. Ils sont les relais dociles du complexe militaro-industriel, des néoconservateurs décérébrés et des sionistes génocidaires, qui croient à un renouveau magique du monde fondé sur la violence, indifférents aux catastrophes à répétition.
Oubliez l'évaluation annuelle des menaces des services du renseignement selon laquelle
“l'Iran ne développe pas d'arme nucléaire et le guide suprême Khomeini n'a pas autorisé le programme d'armement nucléaire qu'il a suspendu en 2003”,
ce que a rappelé cette semaine le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi. Oubliez que Benjamin Netanyahu, depuis près de trois décennies, ne cesse de clamer que l'Iran est sur le point de se doter de l'arme nucléaire. Oubliez que l'attaque préventive d'Israël contre l'Iran est un crime de guerre, sans parler des bombardements d'un hôpital, d'ambulances et de journalistes. Oubliez les centaines de civils iraniens qu'Israël a massacrés dans ses vagues de frappes aériennes. Oubliez qu'Israël a lancé son attaque contre l'Iran alors que le sixième cycle de négociations sur l'enrichissement nucléaire entre les États-Unis et l'Iran devait avoir lieu à Oman. Oubliez que c'est le Premier ministre israélien, et non le dirigeant iranien, qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt, accusé de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. Oubliez qu'Israël, alors qu'il mène une agression génocidaire contre les Palestiniens, détient au moins 90 armes nucléaires - construites en violation du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) - et bloque les inspections de l'AIEA. Oubliez que c’est Donald Trump qui a rompu en 2018 le Plan d'action global conjoint (JCPOA), un accord visant à limiter le programme nucléaire iranien, auquel l'Iran s’est pourtant conformé. Oubliez que Washington et Londres ont orchestré le coup d'État de 1953 pour renverser le gouvernement démocratiquement élu de l'Iran, le premier de la région, et ont installé au pouvoir le Shah Mohammad Reza Pahlavi, un pion docile. Oubliez que les États-Unis, avec Israël, ont formé et équipé la SAVAK, la police secrète sauvage du Shah.
Bombardez ! Bombardez ! Bombardez !
Le prétendu programme d'armes nucléaires de l'Iran est l'équivalent sans aucune preuve des mythiques armes de destruction massive de Saddam Hussein et de son alliance avec Al-Qaïda.
L'invasion et l'occupation de l'Irak, qui ont causé la mort de plus de 4 000 soldats et marines américains et de centaines de milliers de civils irakiens, ont favorisé des destructions massives, l'instabilité régionale et la naissance d'une série de groupes extrémistes fanatiques, dont l'État islamique d'Irak et de Syrie (État islamique). Les promesses vaines - que notre invasion implanterait la démocratie à Bagdad, qui se répandrait à travers le Moyen-Orient, que nous serions accueillis comme des libérateurs et que les revenus du pétrole paieraient la reconstruction - n’ont été qu’un fantasme propagé par l'administration George W. Bush et les think tanks de Washington. Ces suppôts de la guerre éternelle ne saisissent pas le mécanisme ni les conséquences de la guerre. Ils ignorent tout, tant sur le plan culturel, historique que linguistique, des pays qu'ils attaquent. Irak. Afghanistan, Libye. Syrie. Iran. Je doute qu'ils puissent faire la différence.
Ces pom-pom girls de la guerre, une fois discréditées, sont passés maîtres dans l'art de faire leur mea culpa. Ils nous assurent de leurs bonnes intentions. Ils ne voulaient pas colporter de désinformation. Ils voulaient seulement protéger le monde des “méchants” et assurer notre sécurité nationale. Personne, pas même au sein des administrations Bush et Trump, n'est intentionnellement malhonnête. Ce n'est pas leur faute s'ils agissent sur la base de renseignements erronés. Le problème est une question de jugement, pas de vertu. Ce sont de bonnes personnes.
Mais c'est peut-être là le plus gros mensonge. Les évaluations des services du renseignement justifiant la guerre contre l'Irak ont été concoctées par une cabale de néoconservateurs fanatiques et de sionistes enragés parce qu'ils n'aimaient pas les évaluations de la CIA et d'autres agences du renseignement. Aujourd'hui, une autre cabale, menée par les partisans d'Israël, trafique les évaluations des services du renseignement pour justifier une guerre contre l'Iran. Ces guerres ne sont pas menées de bonne foi. Elles ne reposent pas sur une évaluation minutieuse et rationnelle de renseignements vérifiables. Ce sont des visions utopiques déconnectées de la réalité, ignorant leurs propres agences du renseignement ainsi que les organismes internationaux tels que les Nations unies, les inspecteurs en armes de destruction massive ou l'AIEA.
L'histoire de l'Iran moderne est celle d'un peuple qui lutte contre des tyrans soutenus et financés par les puissances occidentales. La répression brutale des luttes démocratiques légitimes pendant des décennies a abouti à la révolution de 1979 qui a porté au pouvoir les religieux iraniens. Le nouveau gouvernement islamique de l'ayatollah Ruhollah Khomeini a défendu l'islam et a plaidé pour résister aux “puissances mondiales arrogantes” et à leurs alliés régionaux, qui oppriment d'autres peuples, notamment les Palestiniens, pour servir leurs propres intérêts.
“La trame centrale de l'histoire de l'Iran au cours des 200 dernières années n'est autre que l'humiliation nationale infligée par des puissances étrangères qui ont asservi et pillé le pays”, m'a confié Stephen Kinzer, auteur de ‘All the Shah's Men: An American Coup and the Roots of Middle East Terror’ [Tous les hommes du Shah : un coup d'État américain et les origines du terrorisme au Moyen-Orient]. “Les auteurs de ces crimes ont longtemps été les Britanniques et les Russes. À partir de 1953, les États-Unis ont commencé à prendre la relève. Cette année-là, les services secrets américains et britanniques ont renversé un gouvernement élu, anéanti la démocratie iranienne et soumis le pays à la dictature”.
“Puis, dans les années 1980, les États-Unis se sont rangés aux côtés de Saddam Hussein dans la guerre Iran-Irak, lui fournissant du matériel militaire et des services du renseignement qui ont permis à son armée de tuer des centaines de milliers d'Iraniens”, a déclaré Kinzer. “Au vu de cette histoire, la crédibilité morale des États-Unis pour se poser en défenseurs de la démocratie en Iran avoisine zéro”.
Vous pouvez voir mon interview avec Kinzer sur l'Iran ici.
Comment réagirions-nous si l'Iran orchestrait un coup d'État aux États-Unis pour remplacer un gouvernement élu par un dictateur impitoyable qui, pendant des décennies, persécutait, assassinait et emprisonnant des militants pour la démocratie ? Comment réagirions-nous si l'Iran armait et finançait un État voisin, comme nous l'avons fait durant la guerre de huit ans contre l'Irak, pour nous déclarer la guerre ? Comment réagirions-nous si l'Iran abattait l'un de nos avions de ligne comme l'a fait l'USS Vincennes (CG49) – surnommé avec ironie “Robocruiser” par les équipages d'autres navires américains – lorsqu'il a tiré des missiles sur un avion commercial rempli de civils iraniens en juillet 1988, tuant les 290 passagers, dont 66 enfants ? Comment réagirions-nous si les services de renseignement iraniens fomentaient des actes terroristes aux États-Unis, comme le font les services de renseignement américains et israéliens en Iran ? Comment réagirions-nous si ces attentats terroristes commandités par l'État comprenaient des attentats-suicides, des enlèvements, des décapitations, des sabotages et des “assassinats ciblés” de responsables gouvernementaux, de scientifiques et d'autres dirigeants iraniens ? Comment réagirions-nous si, à l'instar d'Israël, un pays nous attaquait sur une base hypothétique, une attaque illégale au regard de la Charte des Nations unies, qui interdit les guerres préventives ?
Les proxénètes de la guerre qui orchestrent ces fiascos militaires sont une fois de plus sortis de leur tanière. Ils migrent, tels des zombies, d’une administration à l'autre. Ils sévissent dans des think tanks — Project for the New American Century, American Enterprise Institute, Foreign Policy Research Initiative, The Atlantic Council et The Brookings Institution — financés par les grandes entreprises, le lobby israélien et le complexe militaro-industriel. Ce sont des pantins manipulés par leurs maîtres, relayés par des médias en faillite, qui nous entraînent d'un bourbier à l'autre.
Les même visages et les mêmes mensonges refont surface, nous propulsant vers un nouveau cauchemar.
Traduit par Spirit of Free Speech
Les "proxénètes de la guerre", c'est hélas tellement ça......