👁🗨 Diviser une nation
Les fantasmes de contrôle d'Israël échouent invariablement. Malgré les profonds traumatismes, les Palestiniens sont plus unis que jamais grâce à une résistance acharnée & d'innombrables sacrifices.

👁🗨 Diviser une nation
Ou la quête incessante d'Israël pour déchirer les Palestiniens.
Par Ramzy Baroud, le 18 juillet 2025
Israël met en œuvre des plans agressifs en vue de façonner l'avenir de la Palestine et de la région au sens large, selon sa vision de “l'après” génocide à Gaza.
La dernière version de cette stratégie, pour le moins étrange, propose de diviser la Cisjordanie occupée en “émirats”, en commençant par “l'émirat d'Hébron”.
Ce rebondissement inattendu dans la longue quête d'Israël pour détrôner le leadership palestinien a d'abord fait surface dans le Wall Street Journal, un journal américain résolument pro-israélien. Il a ensuite rapidement dominé tous les médias israéliens.
Le rapport détaille une lettre d'un individu identifié par le WSJ comme “le chef du clan le plus influent d'Hébron”. Adressée à Nir Barakat, ancien maire israélien de Jérusalem, la lettre du cheikh Wadee' al-Jaabari appelle à la “coopération avec Israël” au nom de la “coexistence”.
Selon le “chef de clan”, cette “coexistence” se concrétiserait dans l'“émirat de Hébron”. En échange de la reconnaissance de
“l'émirat de Hébron comme représentant des résidents arabes du district de Hébron”, cet “émirat” “reconnaîtrait l'État d'Israël comme l'État-nation du peuple juif”.
Cette histoire peut sembler déroutante. En effet, le discours palestinien, qu'il s'agisse de la géographie ou de l'affiliation politique, n'a jamais envisagé un concept aussi absurde que celui d'“émirats” unifiés en Cisjordanie.
Un autre élément surprenant est que l'identité nationale palestinienne et la fierté de la résilience inébranlable de leur peuple, en particulier à Gaza, ont atteint un niveau sans précédent. Proposer des alternatives claniques à la direction palestinienne légitime semble inapproprié et voué à l'échec.
Le désespoir d'Israël est palpable. À Gaza, il est incapable de vaincre le Hamas et les autres factions palestiniennes qui résistent à la prise de contrôle de la bande de Gaza par Israël depuis 21 mois. Toutes les tentatives visant à mettre en place une direction palestinienne alternative ont été un échec complet.
Cet échec a contraint Israël à armer et à financer une bande criminelle opérant à Gaza avant le 7 octobre 2023. Cette milice sévit sous le commandement de Yasser Abu Shabab.
Elle a été impliquée dans une série de crimes violents. Parmi ces crimes, on compte le détournement de l'aide humanitaire pour perpétuer la famine à Gaza, ainsi que l'orchestration de violences liées à la distribution de l'aide.
À l'instar du chef de clan de Hébron, le gang criminel d'Abu Shabab ne bénéficie d'aucune légitimité et ne reçoit aucun soutien de la population palestinienne. Pourquoi Israël ferait-il appel à des individus aussi peu recommandables alors que l'Autorité palestinienne (AP), déjà engagée dans une “coordination sécuritaire” avec Israël en Cisjordanie, semble disposée à se plier à ses exigences ?

Ce refus catégorique de reconnaître les Palestiniens comme une nation explique leur attitude. Ainsi, même une entité nationaliste palestinienne collaboratrice serait considérée comme problématique par Israël.
Si le gouvernement de Benjamin Netanyahu n'est pas le premier à explorer des alternatives claniques parmi les Palestiniens, le Premier ministre israélien et ses alliés extrémistes sont particulièrement déterminés à démanteler toute revendication palestinienne d'existence en tant que nation. Cette ambition a été explicitement exprimée par le ministre des Finances extrémiste Bezalel Smotrich. En mars 2023, à Paris, il a notamment déclaré que l'existence d'une nation palestinienne n'est qu'une “fiction”.
Ainsi, malgré sa volonté de coopérer avec Israël pour contrôler Gaza, l'Autorité palestinienne ne parvient pas à dissiper les inquiétudes d'Israël. En effet, confier le pouvoir à l'Autorité palestinienne reviendrait à reconnaître le nationalisme palestinien, une perspective qui va fondamentalement à l'encontre des objectifs d'Israël, qui consistent à contester le droit du peuple palestinien à la nation, à l'État et à la souveraineté.
Bien qu'Israël ait toujours échoué à établir et à maintenir une direction palestinienne alternative, ses tentatives ont invariablement engendré des tensions et des violences.
Avant la Nakba de 1948, le mouvement sioniste, aux côtés des autorités britanniques colonisant la Palestine, a engagé d'importants moyens dans la destruction du Comité supérieur arabe, un organisme nationaliste regroupant plusieurs partis politiques. Il y est parvenu en soutenant les clans collaborateurs, dans l'espoir de réduire l'influence du mouvement nationaliste palestinien.
Lorsque l'État d'Israël a occupé en 1967 le reste de la Palestine historique, il a de nouveau eu recours à cette même ruse, qui consiste à diviser pour régner. Il a notamment formé une force de police palestinienne sous le contrôle direct des administrations militaires israéliennes, et a constitué un réseau clandestin de collaborateurs.
Suite à la victoire écrasante des candidats nationalistes aux élections de 1976 dans les territoires occupés, Israël a réagi en réprimant les politiciens affiliés à l'OLP, en arrêtant, expulsant et assassinant certains d'entre eux.
Deux ans plus tard, en 1978, il lançait son projet des “Ligues villageoises”. Il a sélectionné des personnalités traditionnelles accommodantes et les a désignées comme représentants légitimes des Palestiniens.
Ces individus, armés, protégés et financés par l'armée d'occupation israélienne, étaient chargés de représenter leurs clans respectifs à Hébron, Bethléem, Ramallah, Gaza et d'autres villes.
Les Palestiniens les ont immédiatement qualifiés de collaborateurs. Ils ont été largement boycottés et socialement ostracisés.
Finalement, face à l'évidence, Israël n'a eu d'autre choix que de s'engager directement avec l'OLP. Cela a mené aux accords d'Oslo en 1993, puis à la création de l'Autorité palestinienne.
Cependant, le problème fondamental restait entier : la revendication d'un État palestinien par l'Autorité palestinienne, anathème pour un Israël radicalement ancré à droite.
Voilà ce qui explique l’insistance du gouvernement Netanyahu à affirmer que l'Autorité palestinienne n'aura aucun rôle à jouer à Gaza dans le scénario “Post-Gaza”. Si l'Autorité palestinienne pouvait servir les intérêts d'Israël en contenant cette bande rebelle, un tel triomphe recentrerait inévitablement le débat sur la création d'un État palestinien, un concept réprouvé par la plupart des Israéliens.
Il ne fait aucun doute que ni le gang d'Abu Shabab ni l'émirat d'Hébron ne gouverneront les Palestiniens, que ce soit à Gaza ou en Cisjordanie. L'insistance d'Israël à promouvoir ces alternatives souligne toutefois sa détermination historique à priver les Palestiniens de tout sentiment d'appartenance nationale.
Les fantasmes persistants d'Israël en matière de contrôle échouent invariablement. Malgré leurs profonds traumatismes, les Palestiniens sont plus unis que jamais, leur identité collective et leur sentiment d'appartenance nationale s'étant renforcés grâce à une résistance acharnée et d'innombrables sacrifices.
Traduit par Spirit of Free Speech
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