👁🗨 Joe Biden livre des armes à Israël toutes les 36 heures
L'offensive d'Israël sur Gaza se poursuit parce que M. Biden estime qu'il doit se poursuivre. S'il en jugeait autrement, il interromprait le circuit d'approvisionnement en armes permettant cet assaut.
👁🗨 Joe Biden livre des armes à Israël toutes les 36 heures
Par Stephen Semler, le 13 mars 2024
L'administration Biden a réussi à faire profil bas en répartissant les livraisons d'armes à Israël sur plus de 100 petites ventes de munitions, permettant au président de se positionner en pacificateur alors que les armes américaines ont quasi rayé la bande de Gaza de la carte.
Dans les cent cinquante jours qui ont suivi le 7 octobre, Israël a tué 31 000 Palestiniens, en a blessé 72 000, en a déplacé 1,7 million et a rasé ou endommagé plus de la moitié des bâtiments de Gaza. Joe Biden a envoyé plus de cent cargaisons d'armes à Israël au cours de la même période. Lors d'une récente réunion d'information confidentielle, des fonctionnaires américains ont déclaré aux membres du Congrès que l'administration Biden avait approuvé et livré plus de cent ventes d'armes distinctes à Israël au cours des cent cinquante jours qui ont suivi le 7 octobre,
“ce qui représente des milliers de munitions de précision, de bombes de petit diamètre, d'explosifs de bunker, d'armes légères et d'autres aides létales”,
a rapporté le Washington Post mercredi dernier. Cela représente en moyenne une nouvelle vente d'armes toutes les trente-six heures.
Ces transferts sont classés comme des ventes, mais très peu d'entre eux répondent à cette définition au sens propre du terme. La grande majorité d'entre eux sont financés par des subventions du département d'État. M. Biden n'a rendu publiques que deux de ces ventes à Israël financées par des fonds publics, et il ne l’a fait que parce qu’il y est contraint. La section 36 de la loi sur le contrôle des exportations d'armes (AECA) exige que le président notifie au Congrès un projet de vente d'armes dépassant une certaine valeur. Le seuil de notification dépend du type de matériel (pour les “équipements militaires importants”, il est de 14 millions de dollars, pour les autres articles et services militaires, de 50 millions de dollars, et pour les services de construction militaire, de 200 millions de dollars), mais aussi du destinataire. Pour les pays de l'OTAN et la Corée du Sud, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon et Israël, les seuils de notification pour ces trois catégories sont considérablement plus élevés (respectivement, 25 millions de dollars, 100 millions de dollars et 300 millions de dollars).
Alors que Joe Biden revendique haut et fort l'armement de l'Ukraine, il préfère armer Israël en cachette. La quantité de ventes effectuées depuis le 7 octobre en est l'illustration. En répartissant son soutien militaire à Israël sur plus d'une centaine de ventes, Biden les a presque toutes maintenues “sous le seuil” de l'AECA, évitant ainsi l'examen du Congrès et du public. M. Biden a peut-être repris cette astuce de son prédécesseur. Donald Trump a exploité la même faille pour éviter le contrôle des contrats d'armement avec l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, dont les bombardements intensifs et aveugles au Yémen avaient à l'époque provoqué une grave crise humanitaire.
En dissimulant ces transferts au public, il est plus facile pour M. Biden de se présenter comme “l'humanitaire de l'année” à Gaza, alors qu'il ne ménage pas ses efforts pour aider Israël à détruire ce territoire. La série de parachutages de vivres de M. Biden donne l'impression qu'il tente courageusement de remédier à une catastrophe qui échappe à son contrôle. Les responsables de l'administration perpétuent ce discours en insistant sur le fait que le président n'a aucune influence sur Israël.
“On croit à tort que les États-Unis peuvent dicter à d'autres pays leurs décisions souveraines”,
a récemment déclaré le porte-parole du département d'État, Matthew Miller.
C'est faux. La catastrophe de Gaza est le fruit d'un choix politique délibéré de M. Biden. L'offensive militaire d'Israël n'aurait pas jamais été possible sans que M. Biden n'injecte en urgence de si grandes quantités d'armes dans l'arsenal israélien au cours des derniers mois. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a admis que l'assaut d'Israël sur Gaza dépendait d'un flux constant (un déluge, en fait) d'armes américaines, déclarant un jour à un groupe de fonctionnaires locaux :
“Nous avons besoin de trois choses de la part des États-Unis : des munitions, des munitions et des munitions”.
Du 7 octobre à la mi-février, Biden a livré 21 000 bombes à Israël, qui en a déjà largué la moitié.
En novembre, M. Netanyahou a lancé un appel urgent aux législateurs américains dans des termes similaires : “J'ai besoin de munitions, de munitions et de munitions - pour hier”, a-t-il déclaré, réclamant en particulier des obus d'artillerie de 155 mm. Plus de trente groupes d'aide et de défense des droits avaient pressé l'administration Biden de ne pas fournir ce type de munitions, car ces obus ne sont pas guidés, sont hautement explosifs (avec un rayon d'action de 100 à 300 mètres) et ont été utilisés par Israël par le passé pour frapper des hôpitaux, des écoles, des abris et des zones de sécurité. Biden en a livré 57 021 à Israël quelques semaines plus tard. L'armée israélienne a annoncé début décembre qu'elle avait tiré plus de cent mille obus depuis le début de l'invasion terrestre de Gaza le 27 octobre, ajoutant que l'artillerie joue un “rôle crucial” en fournissant une “très bonne couverture de feu” à ses troupes.
Israël n'a pas la capacité de production nécessaire avec ses propres munitions pour mener l'une des campagnes de bombardement les plus meurtrières et les plus intenses de l'histoire. L'assaut d'Israël sur Gaza se poursuit parce que M. Biden estime qu'il doit se poursuivre. S'il en jugeait autrement, il interromprait le circuit d'approvisionnement en armes conçu par ses soins pour permettre cet assaut.
Lors d'un récent sondage, 52 % des Américains ont déclaré que les États-Unis devraient mettre fin aux transferts d'armes vers Israël, tandis que 27 % seulement ont déclaré qu'ils devraient se poursuivre. En 2020, les électeurs de M. Biden ont répondu par 62 % contre 14 %.
* Stephen Semler est cofondateur du Security Policy Reform Institute, un groupe de réflexion américain sur la politique étrangère financé par la base.
https://jacobin.com/2024/03/biden-weapons-israel-gaza-palestine