👁‍🗨 Julian Assange, emprisonné au nom de la vérité

Le rôle du journalisme d'investigation ne doit pas tomber dans l'oubli, et nous devons rechercher la vérité dans ce labyrinthe de mensonges, ce récit dominé par les États-Unis.

Julian Assannge. Photo par dedevanderroove / Flickr. Licence Creative Commons.

👁‍🗨 Julian Assange, emprisonné au nom de la vérité

Par Juanjo Andrés Cuervo, le 20 février 2023

Le 11 février, des milliers de personnes ont défilé dans tout Londres pour célébrer le carnaval d'Assange. Il s'agissait d'un nouvel exemple de solidarité avec le journaliste australien, détenu à la prison de Belmarsh depuis 2019.

Quel est le crime commis par Assange ? Avoir dit la vérité. Une vérité dissimulée par le monde occidental. Le monde n'est pas une arène manichéenne où tracer une ligne séparant le bien du mal serait aisé.

Il y a plus de dix ans, le fondateur de Wikileaks a révélé les crimes commis par les États-Unis en Afghanistan et en Iran. Grâce aux informations fournies par des personnes comme lui et d'autres journalistes d'investigation, le récit dominant de la guerre contre la terreur pour instaurer la démocratie ne tient pas la route.

“Quis custodiet ipsos custodes”, écrit Juvénal dans les Satires. Traduit par "Qui gardera les gardes d’eux-mêmes ?", nous pouvons nous poser la même question à propos des États-Unis. Le pays qui a envahi l'Afghanistan à deux reprises, dévasté le Viêt Nam, participé au renversement de Sukarno en Indonésie, ou imposé à Cuba un blocus encore aujourd'hui.

Dans le documentaire de John Pilger "The war on democracy", le journaliste australien analyse l'implication des Etats-Unis dans la plupart des pays d'Amérique latine. Guatemala, Panama, Nicaragua, Honduras et Salvador, Chili, Venezuela, Haïti, Brésil et Argentine sont quelques-uns des pays qui ont subi la mort de milliers de personnes par l'intervention des États-Unis.

John Pilger a interviewé Duane Clarridge, ancien chef de la CIA pour l'Amérique latine, sur l'implication des États-Unis dans le renversement de Salvador Allende.

Julian Assange. Photo par Garry Knight/ Flickr/ Le Journal des Alternatives. Licence Creative Commons.

Clarridge a expliqué que l'intervention des Etats-Unis était due à des "intérêts de sécurité nationale", admettant que Pinochet avait commis des crimes au Chili.

Aujourd'hui, Julian Assange souffre dans une prison précisément pour cette raison. Wikileaks a publié les vidéos de l'armée américaine commettant des crimes en Irak, et 91 000 documents sur l'invasion de l'Afghanistan, entre autres documents secrets. Sa voix est réduite au silence tandis que sa vie s'éteint.

Un tribunal pour une vraie démocratie

En 1967, un groupe de philosophes, d'activistes et de théoriciens politiques a organisé un procès contre les États-Unis pour leurs crimes au Vietnam. Des personnes comme James Baldwin, Simone de Beauvoir, Tariq Ali, Bertrand Russell et Jean-Paul Sartre ont participé à ce qui est devenu le Tribunal Russell-Sartre.

En 2020, son nom a été modifié pour commémorer Julian Assange. Le 20 janvier, et présidée par Amy Goodman et le philosophe Srećko Horvat, la troisième édition du Tribunal Belmarsh a été organisée avec des intervenants tels que Stella Assange, Noam Chomsky et Jeremy Corbyn. L'objectif est le même qu'en 1967 : dire au monde la vérité.

Mark Twain dit que "l'histoire ne se répète pas, mais rime bien souvent". Par leur pouvoir hégémonique, les États-Unis ont tenté de légitimer leurs invasions dans de nombreux pays du monde. Aujourd'hui, ils forcent les membres de l'OTAN à dépenser toujours davantage en armes pour la guerre en Ukraine.

Mais ces derniers temps, ce discours vacille. Il y a quelques semaines, l'ancien premier ministre israélien Naftali Bennett a souligné que ces pays occidentaux ont contrecarré une tentative de pourparlers de paix. Il a spécialement accusé Boris Johnson et Joe Biden d'avoir insufflé une rhétorique incendiaire pour maintenir le conflit en cours.

Et il y a quelques jours à peine, Seymour Hersh a publié un article expliquant que les États-Unis auraient fait sauter le gazoduc Nord Stream. Il a remporté un prix Pulitzer en 1970 pour son reportage sur le massacre de My Lai, et a largement rendu compte de l'espionnage par la CIA des militants anti-guerre à l'époque de la guerre du Vietnam.

Et si certaines puissances occidentales n’étaient pas intéressées par la protection du peuple ukrainien ? Et si ces mêmes puissances ne respectaient pas la liberté d'expression et mettaient les dissidents en prison ? À l'occasion du 20e anniversaire de la plus grande manifestation anti-guerre à Londres, contre la guerre en Irak, il semble pertinent de poser ces questions.

Rappelons que l'invasion de l'Irak était basée sur un mensonge. Le pays était censé posséder des armes de destruction massive. C’était faux. Nous devons rechercher la vérité dans ce labyrinthe de mensonges, ce récit dominé par les États-Unis.

https://theprisma.co.uk/2023/02/20/julian-assange-a-prisoner-for-the-truth/