đâđš Fred Hageneder - La bataille pour la Terre : les stratĂ©gies dĂ©routantes de lâindustrie des combustibles fossiles â Partie 2
De puissants groupes dâintĂ©rĂȘts de lâindustrie des combustibles fossiles continuent Ă investir massivement dans des opĂ©rations secrĂštes visant Ă boycotter les mesures efficaces de protection du climat
đâđš La bataille pour la Terre : les stratĂ©gies dĂ©routantes de lâindustrie des combustibles fossiles â Partie 2
đ° Par Fred Hageneder, le 2 novembre 22
Dans son livre The New Climate War : the fight to take back our planet (La nouvelle guerre climatique: la lutte pour la reconquĂȘte de notre planĂšte), le climatologue Michael E. Mann raconte comment de puissants groupes dâintĂ©rĂȘts de lâindustrie des combustibles fossiles continuent Ă investir des centaines de millions de dollars dans des opĂ©rations secrĂštes visant Ă boycotter les mesures efficaces de protection du climat. Ce nâest quâen sachant Ă quoi sâen tenir que nous pourrons Ă©viter dâĂȘtre dĂ©sinformĂ©s, trompĂ©s et manipulĂ©s.
LâĂ©cocentriste Fred Hageneder complĂšte ici son rĂ©sumĂ© explicatif du message extrĂȘmement important de Mann.
La premiĂšre partie consiste en un rĂ©sumĂ© de « lâancienne guerre climatique » et traite des stratĂ©gies actuelles de dĂ©sinformation et de tromperie.
Distraction et diversion
La dĂ©sinformation seule ne suffit pas. Trop de gens voudraient regarder plus en profondeur et voir au-delĂ des mensonges superficiels. Câest prĂ©cisĂ©ment lĂ quâintervient un procĂ©dĂ© que lâon appelle en anglais smokeand mirrors (fumĂ©e et miroirs). Si la dĂ©sinformation et la tromperie sont la fumĂ©e qui rend tout flou et imprĂ©cis, la distraction et la diversion sont les miroirs. Et quây a-t-il de plus distrayant que de voir soudain sa propre image dĂ©formĂ©e ?
Lorsque le nouveau mouvement climatique de 2019 a mis Big Oil sous les feux de la rampe avec la question «Quâallez-vous enfin faire contre la pollution de la nature ?», lâindustrie sâest dĂ©robĂ©e et a retournĂ© le miroir : «Au fond, câest la faute des consommateurs ! Nous ne faisons que satisfaire la demande».
Câest ainsi quâa commencĂ© lâhistoire de «lâempreinte carbone personnelle». Depuis 2019, le jeu des reproches est la branche la plus rĂ©ussie de la campagne anti-climat. Tant les activistes que le grand public, qui veut vraiment aider et vivre une vie meilleure, plus «verte», tombent dans le panneau et sâentre-dĂ©chirent : Vous chauffez encore au pĂ©trole, je nây crois pas ! â Vous avez toujours une voiture ?!? â Tu ne prends pas lâavion, nâest-ce pas ? â Comment peut-on manger du bĆuf alors que le bĂ©tail a Ă©tĂ© nourri avec du soja dâAmazonie ?!?
Pour alimenter cette querelle sans fin, ce nâest rien de moins que le gĂ©ant pĂ©trolier BP qui, dĂšs le milieu des annĂ©es 2000, a promu le concept dâ« empreinte carbone personnelle ». Ils ont mĂȘme mis sur le marchĂ© lâun des premiers calculateurs dâempreinte carbone personnelle. Tout cela pour dĂ©tourner lâattention de leur propre responsabilitĂ©.
Les querelles entraĂźnent des divisions, et câest dans lâintĂ©rĂȘt de lâindustrie. Un public divisĂ© ne peut pas parler dâune seule voix. «Diviser pour mieux rĂ©gner», comme le conseillait Jules CĂ©sar.
Il est sans aucun doute vrai que les choix personnels en matiĂšre de mode de vie sâadditionnent et ont un impact sur lâempreinte humaine globale. Mais les choix des consommateurs sont Ă©galement trĂšs limitĂ©s. Cela est apparu trĂšs clairement lors du premier blocage Corona en 2020: lorsque la vie privĂ©e sâest arrĂȘtĂ©e, mais que les usines et les mines ont continuĂ© Ă fonctionner, les Ă©missions mondiales de gaz Ă effet de serre nâont diminuĂ© que de 4,5 %. En rĂ©alitĂ©, ce ne sont pas les avions et le transport privĂ© de personnes qui sont les principaux responsables du changement climatique, mais lâagriculture industrielle et lâĂ©conomie dâextraction (extraction et transformation de « matiĂšres premiĂšres »). Saviez-vous que dans un pays comme le Canada, qui exporte des combustibles fossiles, lâextraction et la transformation des combustibles fossiles reprĂ©sentent Ă elles seules 26 pour cent des Ă©missions nationales de gaz Ă effet de serre ?
Nous devons donc non seulement montrer nous-mĂȘmes lâexemple, mais aussi exiger des changements systĂ©miques de grande ampleur au niveau politique et industriel.
Pour empĂȘcher les gens de faire prĂ©cisĂ©ment cela, le jeu de la culpabilitĂ© et de la honte a Ă©tĂ© poussĂ© Ă lâextrĂȘme : Des scientifiques (du climat) et des dĂ©fenseurs de la nature de premier plan sont pris dans la «ligne de mire de la machine dâattaque financĂ©e par lâindustrie fossile», comme Mann lâappelle : bashing (critiques graves), insultes et mĂȘme diffamation.
Une approche populaire consiste Ă accuser dâhypocrisie les dĂ©fenseurs les plus cĂ©lĂšbres et les plus influents de la protection du climat. Leonardo DiCaprio, par exemple, est un militant engagĂ© dans la protection de la nature et la lutte contre le changement climatique. Mais les fake news (nouvelles forgĂ©es) Ă©manant de la droite politique, notamment de lâempire mĂ©diatique Murdoch, produisent des titres tels que « Ă©co-guerrier ou hypocrite ? Leonardo DiCaprio fait le tour du monde pour faire la fĂȘte⊠tout en nous sermonnant tous sur le rĂ©chauffement climatique » (1) et «Leo DiCaprio nâest pas le seul hypocrite en matiĂšre de changement climatique» (le prĂ©sident Obama et mĂȘme le pape François Ă©tant Ă©galement citĂ©s). (2)
Et chacun sait quelles attaques calomnieuses massives sâabattent sur la jeune militante du climat Greta Thunberg. Pour Ă©viter les miles aĂ©riens, elle a mĂȘme fait de la voile pour se rendre au sommet climatique de New York en septembre 2019. Et a ensuite Ă©tĂ© attaquĂ©e pour le fait que le voilier est en partie composĂ© de « plastique non recyclable » (3). Ce nĂ©gationniste poursuit :
« Elle nâa mĂȘme pas encore renoncĂ© Ă son tĂ©lĂ©phone portable ou Ă la nourriture emballĂ©e dans du plastique, et pourtant elle veut que nous mourions de faim et que nous vivions sans aucune technologie, ce qui inclut aussi les panneaux solaires et les Ă©oliennes, puisquâils utilisent eux aussi des joints en plastique et de lâĂ©lectronique. Lâodieuse Greta et son escroquerie doivent ĂȘtre stoppĂ©es ». (4)
Outre les nombreuses fautes dâorthographe et la mauvaise grammaire, de tels blogs ne survivent pas face Ă la rĂ©alitĂ©. Si Thunberg et sa famille ne sâintĂ©ressaient quâĂ lâargent, pourquoi donnerait-elle son prix humanitaire dâun million dâeuros Ă des projets caritatifs qui luttent « contre la crise climatique et Ă©cologique » ? (5)
Lâironie est que ni DiCaprio ni Thunberg nâont jamais dit que les individus devaient changer leur mode de vie. Tous deux Ă©voquent simplement la nĂ©cessitĂ© dâun changement systĂ©mique. Lâaccusation dâhypocrisie ne sâapplique donc pas. Personne ne peut ĂȘtre hypocrite parce quâil ne fait pas les choses quâil nâa pas recommandĂ©es dâemblĂ©e aux autres.
Mais quelle est la quintessence dâune telle accusation ? Que toute personne qui ose ouvrir la bouche quand il sâagit de la planĂšte devrait vivre Ă cent pour cent sans produits ? Pas de plastique, pas de consommation de combustibles fossiles, pas dâĂ©lectricitĂ© ? Le rĂ©sultat dystopique serait que tous les activistes resteraient chez eux et ne feraient plus jamais parler dâeux ! Exactement ce dont rĂȘvent les industriels « libertaires » de droite. Et pendant ce temps, ils peuvent intimider le public et lâendoctriner contre la protection de la nature et du climat en criant : «Ils (les activistes) veulent te prendre ton burger ! Ils veulent te prendre ta voiture !»
Lorsque la dĂ©putĂ©e amĂ©ricaine et partisane acharnĂ©e dâun Green New Deal (nouvel accord vert), Alexandria Ocasio Cortez, a Ă©galement Ă©tĂ© traitĂ©e dâhypocrite parce quâelle utilisait des voitures, elle a refusĂ© de jouer le jeu de la culpabilitĂ© et de la honte et a rĂ©pondu : «Moi aussi, je prends lâavion et jâutilise lâĂ©lectricitĂ©. Vivre dans le monde tel quâil est nâest pas un argument contre le fait de travailler Ă un avenir meilleur». (6)
Câest exactement ce que nous pouvons retenir. Nous devons tous faire des compromis et «prendre des dĂ©cisions non durables dans un systĂšme oĂč la vĂ©ritable durabilitĂ© est impossible», comme le dit Sami Grover. Son blog «In Defense of Eco-Hypocrisy» (pour la dĂ©fense de lâĂ©co-hypocrisie) est un brillant entraĂźnement pour tous afin de nous prĂ©munir contre ce genre dâabsurditĂ©. (7) Aucun dâentre nous ne peut ĂȘtre parfait, alors arrĂȘtons de nous disputer Ă ce sujet et tenons-nous plutĂŽt ensemble.
Mais la guerre pour la Terre va au-delĂ des questions de style de vie. Nous devons toujours ĂȘtre conscients du danger omniprĂ©sent de « diviser pour mieux rĂ©gner », sinon tout conflit en matiĂšre de politique dâidentitĂ© â quâil sâagisse de questions de genre, dâĂąge, de compĂ©tences, de race ou de statut social â fera le jeu de lâagenda «libertaire» multinational (plus dâinformations dans la partie 6).
Certaines entreprises produisant des combustibles fossiles exploitent mĂȘme dĂ©libĂ©rĂ©ment et sans scrupules les questions sociales. En attisant les malentendus et les tensions entre les deux cĂŽtĂ©s dâun argument, elles divisent lâopinion publique. En 2020, par exemple, Chevron sâest positionnĂ© publiquement comme un alliĂ© de Black Lives Matter, mais lâa secrĂštement minĂ© en soutenant des plateformes racistes. (8) Et comme le montre une Ă©tude de Yale, les personnes de couleur aux Ătats-Unis sont plus favorables aux mesures de protection du climat que les AmĂ©ricains blancs, mais Big Oil tente constamment de monter les minoritĂ©s sociales contre la protection de la nature (voir partie 5). (9)
Et ça marche ! Lâopinion publique se dispute plus que jamais sur dâinnombrables dĂ©tails par lesquels les gens se distinguent les uns des autres. En ce sens, la crise de Corona et les disputes sur les vaccins sont une bĂ©nĂ©diction supplĂ©mentaire qui tombe sur lâindustrie fossile dĂ©jĂ gĂątĂ©e par la chance. Une distraction parfaite. Les gens sont en proie Ă de profondes craintes pour leur santĂ© et/ou la perte de leurs libertĂ©s, et les profondes divergences dâopinion â et la fabrication dâopinions â ne guĂ©rissent pas si vite. Cela peut ĂȘtre favorable Ă Big Oil, mais pour lâhumanitĂ© â et la planĂšte entiĂšre â cela signifie encore des annĂ©es perdues, pendant lesquelles on ne se concentre pas sur lâurgence Ă©cologique mondiale.
Au lieu de nous battre les uns contre les autres, unissons-nous pour un cap simple et clair : DĂ©fendons la Terre et tous ses habitants. Justice sociale pour tous les ĂȘtres humains, justice climatique pour tous les ĂȘtres vivants. Il nây a pas de justice sur une terre morte. Quelle que soit la personne qui se tient ou qui marche Ă cĂŽtĂ© de moi, je la respecte naturellement comme mon Ă©gale, simplement parce quâelle est un citoyen de la Terre, indĂ©pendamment de son empreinte carbone personnelle, de sa couleur de peau, de son sexe, de sa race, de son Ăąge, de ses capacitĂ©s ou de son statut LGBTQ+. Nous sommes tous dans le mĂȘme bateau (le vaisseau spatial Terre). DĂ©fendons la vie ensemble et utilisons notre colonne vertĂ©brale droite tant que nous le pouvons encore.
Retard
La stratĂ©gie de Big Oil visant Ă retarder le passage des combustibles fossiles aux Ă©nergies renouvelables va dans deux directions. Lâune des approches est directe et primitive. Lâautre est sophistiquĂ©e et carrĂ©ment gĂ©niale. Les deux sont efficaces. Le climatologue Michael E. Mann les appelle « Sinking the Competition » â couler la concurrence. (10)
Lâapproche directe comprend les attaques, les calomnies et les nouvelles forgĂ©es. Il nâest pas surprenant que les Ă©nergies renouvelables puissent ĂȘtre facilement attaquĂ©es de toutes les maniĂšres possibles. Ătant donnĂ© que toutes les technologies « vertes » ont leurs faiblesses, en particulier lorsquâelles sont utilisĂ©es Ă grande Ă©chelle, les occasions de critiquer ne manquent pas. Ce qui est remarquable, câest que les reproches pointent les points faibles et rejettent ensuite lâensemble de la technologie (peut-ĂȘtre mĂȘme en criant au «mensonge», Ă l' »hypocrisie» ou au «complot»), jetant ainsi le bĂ©bĂ© avec lâeau du bain au lieu de sâefforcer ensemble dâamĂ©liorer des idĂ©es fondamentalement bonnes.
Lâautre approche, plus sophistiquĂ©e, consiste à «saper les progrĂšs rĂ©els dans le domaine du climat en promouvant des âsolutionsâ ⊠qui ne sont pas du tout de vraies solutions» (Mann). Ces non-solutions sont le gaz naturel, les « carburants de transition », le «charbon propre» et la sĂ©questration du carbone, lâĂ©nergie nuclĂ©aire et la gĂ©o-ingĂ©nierie. Mais comme elles sont toujours sĂ©rieusement discutĂ©es dans les mĂ©dias et en haut lieu, elles continuent Ă dĂ©tourner lâattention et Ă retarder les vĂ©ritables mesures de politique climatique (plus dâinformations Ă ce sujet dans la troisiĂšme partie).
Ainsi, Ă lâĂ©tĂ© 2019, au plus fort du nouveau mouvement climatique, le ministĂšre amĂ©ricain de lâĂ©nergie (DoE) a effectivement annoncĂ© que le gaz naturel Ă©tait un « gaz de libertĂ© » (sans blague !) et a parlĂ© de « molĂ©cules de libertĂ© ». (11) De telles dĂ©clarations audacieuses font rĂ©fĂ©rence au fait que le gaz naturel gĂ©nĂšre environ deux fois moins de CO2 que le charbon par watt dâĂ©lectricitĂ© produite. Câest une excellente nouvelle pour le climat, non ?
Ce que Big Oil nâajoute pas, câest que le gaz naturel est principalement composĂ© de mĂ©thane. Et les Ă©missions de mĂ©thane, en tant que gaz Ă effet de serre, sont environ 86 fois plus nocives que le CO2. (Voir mon article sur la surestimation dĂ©libĂ©rĂ©e du rĂŽle du carbone dans le changement climatique et la nĂ©gligence du mĂ©thane). Outre ces Ă©missions catastrophiques, la plupart du gaz naturel est aujourdâhui extrait par fracturation hydraulique (« fracking »), ce qui dĂ©truit les paysages, gĂ©nĂšre dâĂ©normes quantitĂ©s de dĂ©chets radioactifs et de pollution, et contamine souvent chimiquement les nappes phrĂ©atiques et donc lâeau potable (pour en savoir plus, voir la quatriĂšme partie). De tels « carburants de transition » sont un pont vers nulle part. Pour dĂ©tourner lâattention, il faut dĂ©jĂ une guerre dâUkraine avec une crise du gaz (plus dâinformations dans la partie 5).
Ce qui est gĂ©nial dans la promotion de non-solutions par Big Oil, câest
que câest bon pour la nouvelle image lavĂ©e au vert si nous pouvons dire : « Nous avons proposĂ© des solutions ! »
que de grandes sommes dâargent public allouĂ©es Ă la recherche sur lâĂ©nergie « verte » peuvent finalement ĂȘtre siphonnĂ©es par lâindustrie fossile pour le dĂ©veloppement de technologies inutiles. De cette maniĂšre, les gĂ©ants multinationaux des Ă©nergies fossiles reçoivent encore plus de subventions publiques, alors que
les budgets publics pour une recherche raisonnable dans le domaine des Ă©nergies durables sont Ă©puisĂ©s. «Sinking the Competition» â la concurrence coule.
Humeur apocalyptique et désespoir
Lorsque toutes les autres mĂ©thodes commencent Ă Ă©chouer (câest lĂ que rĂ©side la bonne nouvelle: apparemment, tout cela ne fonctionne plus aussi bien !), le dernier front de la nouvelle guerre climatique est la crĂ©ation dâune ambiance de fin du monde et de dĂ©sespoir. AprĂšs avoir ouvertement niĂ© pendant des dĂ©cennies la destruction du climat par lâhomme, le front fossile est passĂ© directement Ă la diffusion dâune atmosphĂšre de fin du monde et Ă lâaffirmation que nous ne pouvons plus rien faire pour arrĂȘter la dĂ©gradation du climat et du monde vivant. «De toute façon, il est trop tard». (12)
MĂȘme si cela peut paraĂźtre surprenant au premier abord, le message selon lequel le sort de la planĂšte est dĂ©jĂ scellĂ© joue bien dans les cartes de Big Oil. Si lâhumeur apocalyptique (croyance en la fin du monde) est si attrayante pour les Ă©lites de lâancien ordre mondial fossile, câest parce que cette humeur gĂ©nĂšre un dĂ©tachement intĂ©rieur chez ceux qui y croient. Lorsquâil nây a pas dâespoir, pas dâavenir, lâimpuissance et lâapathie sâinstallent. «Lâapocalypse est le nouveau protectionnisme Ă but lucratif pour les combustibles fossiles. Lâimpuissance est le nouveau message», diagnostique lâĂ©crivain indĂ©pendant Ketan Joshi. (13)
Ce message est particuliĂšrement sarcastique, car depuis la naissance de la protection moderne de la nature dans les annĂ©es 1960, les dĂ©fenseurs de la Terre sont traitĂ©s d' »alarmistes » par les conservateurs et lâextrĂȘme droite. Au cours de ces dĂ©cennies, la sixiĂšme extinction de masse a commencĂ©, la Terre a entre-temps perdu de maniĂšre mesurable 83 pour cent des mammifĂšres terrestres sauvages, 80 pour cent des baleines et des dauphins, 75 pour cent des insectes, pour ne citer que quelques chiffres effrayants. Mais pendant tout ce temps, toute personne qui sâexprimait de maniĂšre honnĂȘte et informĂ©e Ă©tait accusĂ©e dâalarmisme. Cependant, comme le souligne M.E. Mann, il y a une diffĂ©rence entre inquiĂ©tude et alarmisme.
Et maintenant que les faits de la destruction de la planĂšte deviennent Ă©vidents et indiscutables pour le grand public, lâindustrie des Ă©nergies fossiles elle-mĂȘme encourage lâhumeur apocalyptique. Car la peur apocalyptique prive les gens de leur pouvoir et engendre une inertie passive. LĂ encore, la crise de Corona est une aubaine pour Big Oil, car le niveau gĂ©nĂ©ral dâanxiĂ©tĂ© de la population a grimpĂ© en flĂšche depuis lors. En lâespace de deux annĂ©es de pandĂ©mie, un sentiment dâapocalypse dystopique sâest insinuĂ© dans les sociĂ©tĂ©s modernes, et qui se soucie de lâĂ©lĂ©vation du niveau de la mer prĂ©vue dâici la fin du siĂšcle, alors que sa propre vie et son propre mode de vie semblent dĂ©jĂ menacĂ©s.
ParallĂšlement, les accusations dâalarmisme lancĂ©es par la droite contre les scientifiques et les activistes du climat continuent de battre leur plein. Lâune des grandes forces de lâextrĂȘme droite ultra conservatrice et «libertaire» qui fait la pluie et le beau temps ici, câest quâelle sait toujours tenir des propos contradictoires en permanence dans ses messages, du genre « il est trop tĂŽt pour agir ! » et en mĂȘme temps «il est trop tard pour agir !». Car semer la confusion et le doute est une stratĂ©gie qui dĂ©moralise les gens. «Le doute est notre produit», comme le disait dĂ©jĂ Big Tobacco Ă ses lobbyistes en 1969. Finalement, nous abandonnons parce que nous ne savons plus ce que nous devons croire.
Sources de la partie 2
Source principale :
Michael E. Mann 2021, The New Climate War : the fight to take back our planet. Scribe, Londres.
En allemand : Propagandaschlacht ums Klima. Maison dâĂ©dition Solare Zukunft, Erlangen.
Sources
Michael E. Mann 2021. The New Climate War: the fight to take back our planet. Scribe.
2 https://nypost.com/2016/05/26/leo-di-caprio-isnt-the-only-climate-change-hypocrite/
5 https://www.bbc.co.uk/news/science-environment-53477604
6
7 https://medium.com/@sami.grover/in-defense-of-eco-hypocrisy-b71fb86f2b2f
9 https://climatecommunication.yale.edu/publications/race-and-climate-change/
10 Michael E. Mann, The New Climate War: the fight to take back our planet. Scribe 2021. Chapter 6.
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Tags: Alexandria Ocasio-Cortez, Bataille pour la Terre, changement climatique, Chevron, choix de vie, crise de Corona, empreinte carbone personnelle, gaz Ă effet de serre, Greta Thunberg
Fred Hageneder
Fred Hageneder est nĂ© en 1962 Ă Hamburg. Depuis 1980, il Ă©tudie les arbres dans leur globalitĂ©, du point de vue de la culture (mythologie, coutumes, religion) et de la nature (botanique, Ă©volution, Ă©cologie). Depuis 1999, il a Ă©crit plusieurs livres sur lâethnobotanique des arbres, câest-Ă -dire sur leur signification dans lâhistoire des cultures et des religions. A ce jour, ses livres ont Ă©tĂ© traduits en seize langues (dont lâanglais, lâespagnol, lâitalien, le tchĂšque et le japonais). Il a donnĂ© plus dâune centaine de confĂ©rences en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Espagne, en Suisse et en Turquie. Il a Ă©tĂ© lecteur externe pour une thĂšse sur le monde des arbres au Pacifica Graduate Institute de Carpinteria, Californie, Mythologische Studien, en 2009. Il lit rĂ©guliĂšrement des travaux en ethno-botanique pour lâUniversitĂ© de Chicago Press. Il est cofondateur du Ancient Yew Group (AYG, groupe des ifs ancestraux), un groupe indĂ©pendant de chercheurs et activistes qui lutte pour la protection des plus anciens ifs dâEurope. Il est membre de Sanasi, un groupe international pluridisciplinaire de scientifiques qui documentent les « sites sacrĂ©s naturels » du monde entier. Et il est membre de lâEcocentric Alliance, une association de professeurs dâuniversitĂ©, dâauteurs, dâĂ©cologues, dâexperts en protection de la nature et dâactivistes, qui Ćuvre dans le monde entier pour amener toutes les couches de la sociĂ©tĂ© Ă lâĂ©cologie profonde. Fred Hageneder joue de la harpe indigĂšne, il a composĂ© de la musique pour diffĂ©rentes essences de bois. Graphiste et musicien, il vit Ă Wales, prĂšs des Black Mountains.