👁🗨 “La Palestine et l'avenir américain” : La passivité se paiera au prix fort.
L'Amérique ne résistera pas à la corruption de ses idéaux tout en gardant légitimité & posture mondiale. Le destin des USA est lié à celui des Palestiniens, destin qu'il nous appartient de déterminer.
👁🗨 “La Palestine et l'avenir américain” : La passivité se paiera au prix fort.
Par Cara Marianna, le 27 novembre 2023
L'Amérique ne résistera pas à la corruption de ses idéaux en gardant légitimité & posture mondiale. Dès lors, le destin des États-Unis est lié à celui du peuple palestinien, destin qu'il nous appartient de déterminer.
Pendant de trop nombreuses décennies, j'ai pensé - comme tant d'autres continuent de le faire - que je ne pouvais rien faire qui puisse faire faire la différence ou apporter un changement significatif pour remédier à la crise de la corruption, et au dysfonctionnement de mon pays. Un profond sentiment d'inutilité, ou peut-être de paresse, pousse beaucoup d'entre nous à baisser les bras et à se retirer de l'engagement politique - si tant est qu'on s'en soit préoccupé un jour.
Mais quel est le prix à payer pour un tel renoncement à la vie publique ? Qu'est-ce qu'on abandonne ? Qu'est-ce qui se perd ? Et qu'est-ce que cela rend possible ? La campagne israélienne contre les Palestiniens de Gaza nous confronte à ces questions.
Comme en écho, le romancier Peter Dimock vient de publier sur The Floutist une lettre ouverte à Joe Biden qui apporte des réponses dévastatrices aux questions que je me pose. Sa lettre traite du génocide en cours à Gaza, de notre responsabilité collective à cet égard et, dans la mesure où nous restons silencieux, de notre complicité individuelle.
Les événements de Gaza nous appellent à l'action, même si c'est notre incapacité collective à agir qui les a rendus possibles, une incapacité de plusieurs dizaines d'années.
Les Américains n'ont pas assumé la responsabilité de leur politique étrangère - ils n'y ont même pas prêté attention, n'ont rien appris à ce sujet, et ont encore moins fait quoi que ce soit pour arrêter ou changer un régime si désastreux qu'il a entraîné, au cours de ce seul siècle, la mort pure et simple ou indirecte de 4,5 à 4,7 millions de personnes - selon le projet “Cost of War” [Le coût de la guerre] de la Brown University.
Nombre d'entre nous ont encore du mal à admettre que le gouvernement des États-Unis soutient ouvertement le génocide en cours au quotidien dans la bande de Gaza. L'Amérique approuve aujourd'hui le mal même qu'elle a combattu pendant la Seconde Guerre mondiale, tout en normalisant l'idéologie raciste à l'origine de ce génocide. Les réflexions de M. Dimock sont particulièrement pertinentes à cet égard. Sous la direction de M. Biden,
“… la politique américaine constitue le mal absolu du crime de génocide. Un tel fléau ne devrait jamais être invoqué pour justifier le “droit d'une nation à se défendre”. Ne pas s'opposer au crime de génocide, c'est s'associer à sa perpétration. Si l'on ne s'oppose pas au génocide maintenant, il deviendra à jamais la norme dans les relations internationales. La logique de l'idéologie politique nazie exterministe aura rétrospectivement prouvé qu'elle n'était pas un phénomène exceptionnel - le renoncement au principe implicite de la valeur universelle de toute vie - mais l'accomplissement de la dépravation du pouvoir politique, qui affirme que l'exercice illimité de la violence d'une force absolue constitue finalement la seule monnaie d'auto-justification pertinente universellement reconnue par le pouvoir.”
Il faut lire ce paragraphe plusieurs fois pour en saisir toute la portée. Si nous n'arrêtons pas ce génocide, si nous le laissons se poursuivre, alors nous aurons adopté et revalorisé l'idéologie nazie - sa théorie et sa pratique “exterministes” - pour en faire la règle plutôt que l'exception et l'expression logique, voire inévitable, d'un pouvoir politique débridé.
La perversion du pouvoir politique décrite de manière si accablante par Dimock devient possible lorsque les citoyens ordinaires se désengagent de la vie publique et politique. C'est là un des coûts à payer pour nous tous aujourd'hui. Mais il y en a d'autres, que M. Dimock identifie avec une acuité pénétrante en s'adressant directement à M. Biden :
“Votre participation active, ainsi que celle de votre administration, au génocide des quarante-six derniers jours rend chaque citoyen américain implicitement complice de ce crime dans la mesure où il ne s'oppose pas directement et activement à vos politiques. En refusant d'enquêter, de poursuivre et d'intervenir pour empêcher le génocide qui se déroule actuellement à Gaza - comme l'exige la ‘Convention sur le génocide’ - vous contraignez chaque Américain à participer à la déchéance de notre identité morale et éthique et de notre cohérence en tant que peuple démocratique attaché à la quête universelle de l'émancipation humaine et de la justice historique universelle.”
Certains moments de l'histoire nous appellent à agir, lorsque le prix à payer pour l'inaction est tel que nous risquons de renoncer à jamais à nos fondements moraux et éthiques. C'est le cas aujourd'hui. Au-delà du renouvellement de notre démocratie, qu'une participation politique pourrait nous permettre de réaliser, il nous faut agir si nous voulons préserver ce qu'il y a de meilleur en nous en tant qu'individus et en tant que peuple uni par les idéaux inscrits dans les documents fondateurs de notre nation, parmi lesquels la liberté, l'égalité et la justice, même s'ils ne sont concrétisés que de façon très imparfaite.
L'Amérique ne pourra pas résister à la corruption totale de ses idéaux - ce qui est précisément en train de se produire - tout en conservant sa légitimité et sa position dans le monde. C'est ainsi que le destin de l'Amérique est désormais lié à celui du peuple palestinien, destin qu'il nous appartient de déterminer. Comme l'a écrit Joe Lauria, rédacteur en chef de Consortium News, dans un article intitulé “La trêve de Thanksgiving”, le 24 novembre, “le pouvoir de mettre fin à cette guerre est en fin de compte entre les mains du peuple américain...”. Ce génocide ne cessera que lorsque le peuple américain y mettra fin.
Les événements de Gaza nous appellent à l'action. La façon dont nous choisirons d'agir décidera du sens et de la valeur de notre existence, tout comme elle déterminera le destin de notre nation et de nos perspectives d'avenir.