👁🗨 La Palestine ne mourra pas
“Il est temps de cesser de nous excuser de soutenir Israël. Si Israël n'existait pas, les USA devraient en inventer un pour protéger leurs intérêts. Si j'étais juif, je serais sioniste”. — Joe Biden.
👁🗨 La Palestine ne mourra pas
Par Mohammed Abu Shamala* pour The Electronic Intifada, le 16 octobre 2023
J'ai été forcé de quitter ma maison à Al-Rimal, un quartier de la ville de Gaza.
Ces derniers jours, j'ai été suffisamment proche des frappes aériennes et des bombardements d'artillerie israéliens pour éprouver un profond sentiment de terreur. Ce sentiment est suivi d'un sentiment de tristesse et de chagrin pour les vies perdues.
Le fait de voir les Palestiniens vivre dans des conditions aussi désastreuses et de voir nos maisons réduites à l'état de ruines a marqué mon esprit de façon indélébile.
Ce qui ne s'effacera jamais de ma mémoire, c'est le sentiment d'insécurité et d'impuissance de ne pouvoir aider ceux qui souffrent.
Pourtant, même en ce moment sombre, alors qu'Israël rassemble ses forces d'apartheid contre nous avec l'aide des États-Unis, nous sommes toujours contraints de lutter pour la paix, la justice et la liberté.
Depuis plus de 16 ans, Israël soumet la bande de Gaza à un blocus accablant, entraînant de graves pénuries de vivres, de médicaments et d'eau potable. Bien que cette punition collective des Palestiniens de Gaza se poursuive, Yoav Gallant, ministre israélien de la défense, a déclaré, lors de la dernière attaque israélienne, que “nous imposons un siège complet à [Gaza]. Ni électricité, ni nourriture, ni eau, ni carburant - tout est bouclé”.
“Nous combattons des animaux et agissons en conséquence”, a-t-il ajouté. Ce langage est affligeant, abominable, et incarne le racisme de l'occupation israélienne. Il nous inflige également cette dure réalité : ce blocus fait souffrir et continuera de faire souffrir toutes les families palestiniennes.
Nous le voyons clairement dans l'assaut d'Israël sur le système de santé de Gaza. Israël a pris pour cible des ambulances et des installations médicales, mettant en péril tout traitement des malades et des blessés. Le droit fondamental aux soins de santé a été violé par Israël en toute impunité.
Une couverture partiale
Quels sont les journalistes qui rendront compte de cette situation ?
Israël n'autorise pas les journalistes étrangers à se rendre à Gaza pour couvrir la guerre, car il est conscient des horreurs qu'il y commet.
Tous les médias qui se sont vu refuser l'entrée à Gaza devraient partager cette information avec leur public. Ils devraient expliquer clairement pourquoi ils ne sont pas en mesure de rendre compte pleinement et fidèlement de la situation à Gaza.
Pendant ce temps, Israël a quadrillé le sud d'Israël avec des journalistes pour les encourager à rendre compte des informations qu'il veut voir rapporter.
Les médias occidentaux persistent dans leur couverture biaisée en faveur d'Israël. Pourquoi ?
Est-ce parce que nous ne sommes pas blancs ? Sommes-nous une communauté moins digne d’intérêt ?
Les médias occidentaux présentent Israël comme la victime et les Palestiniens comme des terroristes.
Les médias ont tellement occulté la réalité qu'ils ne peuvent même pas expliquer avec précision pourquoi les Palestiniens se battent contre Israël. Ils justifient les crimes de guerre israéliens contre les Palestiniens par la légitime défense, tout en ignorant que l'occupation israélienne dure depuis 75 ans.
Les médias donnent à tort l'impression que nous combattons Israël parce que nous avons quelque chose contre les Juifs. Ce n'est pas le cas.
Nous lutterions contre toute puissance coloniale qui nous soumet, comme l'ont fait les Sud-Africains noirs sous le régime de l'apartheid.
Ces vérités sont constamment occultées et, avec la coupure des réseaux de communication à Gaza, les voix palestiniennes ne seront que davantage réduites au silence.
Comment allons-nous donc partager nos histoires ?
“Est-ce qu’on va mourir ?”
Depuis le début de la dernière attaque israélienne, j'ai vu mon cousin de trois ans et sa famille contraints de quitter leur maison à Gaza parce que les forces israéliennes risquaient de la démolir juste sous leurs yeux.
Cet enfant s'est bouché les oreilles avec ses petites mains, répétant ces mots à voix basse : “Missile. Nous allons mourir. Il y a trop de bruit.”
J'en ai pleuré. Je l'ai pris dans mes bras et lui ai assuré que tout irait bien.
Puis, apeuré, il m'a demandé : “Est-ce qu'on va mourir ?”.
Cette question m'a percuté telle la foudre.
J'ai répondu, avec conviction et espoir : “En tant que Palestiniens, nous ne mourrons pas”.
Et là, j'ai vu la force et la détermination des enfants à affronter l'adversité, même face à de telles épreuves, alors qu'on ne devrait jamais les soumettre à une telle pression.
Les enfants de Gaza ont subi de plein fouet cette dernière attaque, et ceux qui ont survécu devront vivre avec ses retombées.
Les écoles et les terrains de jeux sont des cibles. Les jeunes esprits seront marqués par le traumatisme de la guerre.
Nous sommes battus année après année, mais on nous dit que c'est de notre faute.
J'ai vu un petit garçon de 5 ans de notre quartier s'effondrer, en pleurant et en criant.
J'ai approché le père et il m'a dit que son fils Samir avait vu les roquettes israéliennes tomber à proximité.
Depuis lors, Samir pleurait en répétant : "Je ne veux pas mourir".
Appel à la justice
Voilà ce que l'occupation, le siège et la violence israélienne nous ont infligé, à nous et à nos enfants. Et cela se répète de génération en génération, parce que les États-Unis favorisent l'apartheid israélien et la spoliation des Palestiniens au détriment d'une solution politique juste.
Et l'actuel président des États-Unis a montré sa volonté d'encourager notre aliénation, de soutenir l'agression israélienne et l'idéologie sioniste, intrinsèquement raciste, de l'État d'Israël.
En juin 1986, Joe Biden, alors sénateur du Delaware, a déclaré :
“Il est grand temps que nous cessions [...] de nous excuser pour notre soutien à Israël. Il n'y a pas à s'excuser. Pas du tout. Si Israël n'existait pas, les États-Unis d'Amérique devraient inventer un Israël pour protéger leurs intérêts dans la région”.
En outre, en mars 2016, Joe Biden a déclaré : “Si j'étais juif, je serais sioniste.” Il a ensuite précisé, avec un sourire en coin, que son père lui avait dit qu'il n'avait pas besoin d'être juif pour être sioniste.
Pourtant, au cœur de ce conflit, au cœur d'un langage déshumanisant, la population de Gaza s'accroche à sa résilience et à son espoir.
Actuellement, nous souffrons d'une grave pénurie de nourriture et d'eau potable.
Nos réserves alimentaires disponibles, et même nos réserves, sont en train de s'épuiser. Quant à la tentative du gouvernement israélien d'expulser les Palestiniens vers l'Égypte, je pense que le but d'Israël est de faire disparaître la patrie palestinienne.
Notre lutte pour la liberté se poursuit.
* Mohammed Abu Shamala a grandi dans le camp de réfugiés de Khan Younis, à Gaza. Sa famille est originaire de Beit Daras, où les villageois ont été déplacés par les forces sionistes en 1948.
https://electronicintifada.net/content/palestine-will-not-die/38876