đâđš L'autoritĂ© morale des Ătats-Unis est morte et enterrĂ©e
MĂȘme si Assange est libĂ©rĂ©, l'empire US aura passĂ© des annĂ©es Ă emprisonner un journaliste sera toujours le pire belliciste du monde, et le plus grand violateur des droits de l'homme.
đâđš L'autoritĂ© morale des Etats-Unis est morte et enterrĂ©e
Par Caitlin Johnstone, le 16 avril 2023
mĂȘme si Assange est libĂ©rĂ©. L'empire amĂ©ricain aura tout de mĂȘme passĂ© des annĂ©es Ă emprisonner un journaliste pour avoir fait du bon journalisme, il sera toujours le pire belliciste du monde et le plus grand violateur des droits de l'homme.
Sept démocrates progressistes de la Chambre des représentants ont signé une lettre adressée au procureur général Merrick Garland, demandant à l'administration Biden d'abandonner les poursuites contre Julian Assange et de cesser de demander son extradition.
Il s'agit d'une bonne lettre. Elle énumÚre les principaux groupes de défense de la liberté de la presse et les organismes de surveillance des droits de l'homme qui ont appelé à la libération de Julian Assange, identifie correctement les menaces que cette affaire fait peser sur la liberté de la presse dans le monde entier, et évite d'introduire subrepticement les calomnies classiques à l'encontre de Julian Assange qui font généralement leur chemin dans les objections de haut niveau du courant dominant à la persécution du fondateur de WikiLeaks. C'est indéniablement une bonne chose que cette lettre ait été publiée.
Cela dit, j'aimerais attirer l'attention sur cette partie de la lettre et en souligner quelques passages :
âLes poursuites engagĂ©es contre Julian Assange pour avoir exercĂ© des activitĂ©s journalistiques diminuent considĂ©rablement la crĂ©dibilitĂ© de l'AmĂ©rique en tant que dĂ©fenseure de ces valeurs, sapent la position morale des Ătats-Unis sur la scĂšne internationale, et couvrent de fait les gouvernements autoritaires qui peuvent (et le font) invoquer les poursuites engagĂ©es contre Julian Assange pour rejeter les critiques fondĂ©es sur des preuves concernant leur bilan en matiĂšre de droits de l'homme, et pour crĂ©er un prĂ©cĂ©dent justifiant la criminalisation des reportages sur leurs activitĂ©s. Les dirigeants des dĂ©mocraties, les principaux organismes internationaux et les parlementaires du monde entier s'opposent aux poursuites engagĂ©es contre M. Assange. L'ancien rapporteur spĂ©cial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, et le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Dunja MijatoviÄ, se sont tous deux opposĂ©s Ă l'extradition. Le Premier ministre australien Anthony Albanese a demandĂ© au gouvernement amĂ©ricain de mettre fin Ă la poursuite d'Assange. Les dirigeants de presque tous les grands pays d'AmĂ©rique latine, dont le prĂ©sident mexicain AndrĂ©s Manuel LĂłpez Obrador, le prĂ©sident brĂ©silien Luiz InĂĄcio Lula da Silva et le prĂ©sident argentin Alberto FernĂĄndez, ont demandĂ© l'abandon des poursuites. Des parlementaires du monde entier, notamment du Royaume-Uni, d'Allemagne et d'Australie, ont tous demandĂ© que M. Assange ne soit pas extradĂ© vers les Ătats-Unis.
Ce tollĂ© mondial contre les poursuites engagĂ©es par le gouvernement amĂ©ricain Ă l'encontre de M. Assange a mis en lumiĂšre les conflits entre les valeurs dĂ©clarĂ©es des Ătats-Unis en matiĂšre de libertĂ© de la presse et la poursuite de M. Assange. Le Guardian Ă©crit : âCette semaine, les Ătats-Unis se sont proclamĂ©s phare de la dĂ©mocratie dans un monde de plus en plus autoritaire. Si M. Biden veut vraiment protĂ©ger la capacitĂ© des mĂ©dias Ă demander des comptes aux gouvernements, il devrait commencer par abandonner les poursuites engagĂ©es contre M. Assange". De mĂȘme, le comitĂ© Ă©ditorial du Sydney Morning Herald a dĂ©clarĂ© : "Alors que le prĂ©sident amĂ©ricain Joe Biden vient d'organiser un sommet pour la dĂ©mocratie, il semble contradictoire de se donner tant de mal pour gagner un procĂšs qui, s'il aboutit, limitera la libertĂ© d'expressionâ.â
Il s'agit lĂ , Ă mon sens, de la partie de la lettre qui a le plus d'impact, dans le sens oĂč c'est celle qui est la plus susceptible d'attirer l'attention des responsables de la persĂ©cution actuelle d'Assange. En effet, elle semble avoir Ă©tĂ© dĂ©libĂ©rĂ©ment rĂ©digĂ©e dans ce but.
L'emprisonnement d'Assange Ă Belmarsh, tout en prĂ©parant l'Ă©tape sans prĂ©cĂ©dent consistant Ă juger un Ă©diteur en vertu de la loi sur l'espionnage, sape en effet la position morale des Ătats-Unis sur la scĂšne internationale, et donne aux gouvernements que les Ătats-Unis n'aiment pas la possibilitĂ© de rejeter le discours de Washington sur les droits de l'homme en le qualifiant d'hypocrisie cynique et performative. Mais alors que les auteurs de la lettre au procureur gĂ©nĂ©ral de Biden prĂ©sentent cela comme quelque chose d'illĂ©gitime qui est fait contrairement Ă des faits avĂ©rĂ©s, en rĂ©alitĂ© l'autoritĂ© morale des Ătats-Unis pour critiquer le bilan des nations Ă©trangĂšres en matiĂšre de droits de l'homme a Ă©tĂ© irrĂ©mĂ©diablement dĂ©truite. Pas seulement dans les tunnels de rĂ©alitĂ© des propagandistes Ă©trangers, mais dans la rĂ©alitĂ©.
Lorsque les gens parlent d'"autoritĂ© morale", c'est souvent de maniĂšre abstraite et philosophique, comme s'il s'agissait d'une question de cohĂ©rence logique : "Vous n'avez aucune autoritĂ© morale sur ce sujet parce que vous ĂȘtes un hypocrite et que votre position dĂ©clarĂ©e contredit vos propres actions." Comme s'il s'agissait simplement de savoir si les bonnes cases intellectuelles ont Ă©tĂ© cochĂ©es, et si elles ne l'ont pas Ă©tĂ©, cela signifie que vous pouvez les montrer du doigt et dĂ©clarer un Ă©chec et mat mental. Mais la question de l'autoritĂ© morale se rĂ©sume Ă quelque chose de beaucoup plus tangible que cela.
L'autorité morale correspond à la mesure des qualifications d'une personne en matiÚre de leadership sur les questions morales. Si je suis connu comme une personne morale qui prend des décisions éthiques, il est logique que les gens se tournent vers moi pour que j'exerce un leadership sur les questions morales. Si je suis connu comme étant une personne immorale, personne ne viendra me consulter pour des conseils éthiques, parce qu'ils ont compris que je n'ai pas les qualifications nécessaires pour jouer ce rÎle.
Par consĂ©quent, lorsque les gens tentent de prĂ©senter la persĂ©cution d'Assange comme une question de perception publique et de lutte contre les rĂ©cits Ă©trangers sur les Ătats-Unis, ils se trompent. Le problĂšme n'est pas que la persĂ©cution d'Assange donne une mauvaise image des Ătats-Unis, le problĂšme est qu'elle prouve que les Ătats-Unis ont une mauvaise attitude.
Et bien sĂ»r, nous n'avions pas vraiment besoin de la persĂ©cution d'Assange pour nous en rendre compte par nous-mĂȘmes. Les Ătats-Unis sont le seul gouvernement au monde Ă avoir consacrĂ© le XXIe siĂšcle Ă tuer des millions de personnes dans des guerres pour la domination gĂ©ostratĂ©gique, Ă asphyxier des populations par des sanctions et des blocus dans le monde entier, Ă encercler la planĂšte avec des centaines de bases militaires dans le but de dominer le monde, et Ă constamment augmenter le risque d'armageddon nuclĂ©aire avec ses programmes d'escalade orientĂ©s vers la sĂ©curisation de l'hĂ©gĂ©monie unipolaire. Le cas d'Assange ne fait qu'accentuer l'absence totale de morale.
Tout cela restera vrai mĂȘme si Assange est libĂ©rĂ©. L'empire amĂ©ricain aura tout de mĂȘme passĂ© des annĂ©es Ă emprisonner un journaliste pour avoir fait du bon journalisme, il sera toujours le pire belliciste du monde et le plus grand violateur des droits de l'homme. Son statut moral est mort et enterrĂ©, et le monde devrait cesser de suivre son exemple pour crĂ©er un monde juste et Ă©thique. Elle n'a tout simplement pas les qualifications nĂ©cessaires pour le faire. En fait, il est bien la pire structure de pouvoir au monde Ă ne pas en avoir les compĂ©tences.