đâđ¨ Le combat du père de Julian Assange pour la libertĂŠ de son fils.
"Les lanceurs dâalerte & les journalistes sont nos hĂŠros, ils prouvent que si ceux qui sont au pouvoir pratiquent ce qu'ils pratiquent, nous pouvons nous aussi riposter & leur faire perdre la face."
đâđ¨ Le combat du père de Julian Assange pour la libertĂŠ de son fils.
John Shipton tient un rĂ´le de premier plan dans âIthakaâ, un nouveau documentaire sur le combat du journaliste et de sa famille pour la libertĂŠ de la presse.
Par Carolina Azevedo, le 1er septembre 2023 - English version below
Le 11 avril 2019, Julian Assange a ĂŠtĂŠ menottĂŠ et traĂŽnĂŠ hors de l'ambassade d'Ăquateur Ă Londres, puis dans un vĂŠhicule blindĂŠ de la police mĂŠtropolitaine. L'image qui a fait le tour des journaux tĂŠlĂŠvisĂŠs est celle d'un homme usĂŠ par sept annĂŠes d'isolement, avec une longue barbe et des cheveux blancs, dont le corps pèse et rĂŠsiste aux quatre policiers chargĂŠs de le maĂŽtriser. Ces moments ouvrent un nouveau chapitre de l'histoire de WikiLeaks et de la lutte des journalistes contre une dĂŠcision qui pourrait porter atteinte Ă la libertĂŠ d'expression et Ă la presse dans le monde entier. Câest avec cette scène que sâouvre ĂŠgalement le documentaire âIthakaâ, rĂŠalisĂŠ par Ben Lawrence, avec John Shipton, le père de M. Assange, qui sort en salles cette semaine.
Depuis la sortie du film en 2021, John Shipton parcourt le monde Ă la recherche de soutiens pour la cause de son fils. Au BrĂŠsil, il a participĂŠ Ă des confĂŠrences de presse et prĂŠvoit de rencontrer des dirigeants d'organisations telles que le Mercosur et la Cour interamĂŠricaine des droits de l'homme. Dans une interview accordĂŠe au Monde Diplomatique Brasil, il a dĂŠclarĂŠ :
âJe voudrais que ces organisations adoptent le principe selon lequel la libertĂŠ de Julian Assange est leur libertĂŠâ.
La plupart des dirigeants des pays d'AmĂŠrique latine soutiennent dĂŠjĂ la cause, notamment le prĂŠsident Lula, qui a ĂŠcrit sur les rĂŠseaux sociaux en juin dernier :
âSon arrestation va Ă l'encontre des principes de la dĂŠmocratie et de la libertĂŠ de la presse. Il est primordial que nous nous mobilisions tous pour le dĂŠfendreâ.
Ce soutien ne semble toutefois pas suffire, puisque les trois derniers prĂŠsidents amĂŠricains refusent d'abandonner les poursuites contre le journaliste, accusĂŠ par l'Ătat amĂŠricain en vertu de l'Espionage Act, crĂŠĂŠ dans le contexte de la Première Guerre mondiale dans le but de contrer la fuite d'informations secrètes vers des pays ennemis. Depuis les annĂŠes 1970, la loi a cependant ĂŠtĂŠ rĂŠinterprĂŠtĂŠe par les tribunaux, qui l'ont utilisĂŠe pour incriminer toute personne partageant des informations classĂŠes confidentielles, mettant ainsi en pĂŠril le travail de tous les journalistes d'investigation dans le monde.
La loi sur l'espionnage contre la libertĂŠ d'expression
La loi a ĂŠtĂŠ utilisĂŠe pour la première fois contre le journalisme en juin 1971, lorsque le New York Times a commencĂŠ Ă publier des extraits des Pentagon Papers - un document de 7 000 pages qui exposait les dĂŠcisions controversĂŠes des Ătats-Unis sur la guerre du ViĂŞt Nam. Furieuse que soit rendue publique la vĂŠritable histoire du conflit, l'administration Nixon a ordonnĂŠ au journal de cesser de publier les documents. Face au refus du journal de retirer sa publication, le ministère de la Justice a fait valoir devant un tribunal fĂŠdĂŠral que la publication du rapport confidentiel constituait une violation de l'Espionage Act, et a requis une injonction interdisant au journal de publier d'autres parties du rapport. Cette tentative de censurer un journal devant un tribunal fĂŠdĂŠral fut une première pour le gouvernement amĂŠricain.
Les pages ont ÊtÊ transmises au journal par Daniel Ellsberg, un analyste qui a participÊ à la rÊdaction du rapport. Ellsberg qui Êtait jugÊ pour espionnage et a failli être condamnÊ à 115 ans de prison, apparaÎt brièvement dans le documentaire, dÊfendant les droits des lanceurs d'alerte et des journalistes comme Chelsea Manning, Julian Assange et Edward Snowden. Dans une interview accordÊe au Guardian en juin 2021, à l'âge de 90 ans, Ellsberg livre cette analyse :
âLes lanceurs d'alerte sont beaucoup moins bien protĂŠgĂŠs aujourd'hui. [Le prĂŠsident Barack] Obama a utilisĂŠ la loi huit ou neuf fois en deux mandats. Trump lâa invoquĂŠe huit fois en un seul mandat. Les sources ont donc un risque dâĂŞtre poursuivies beaucoup plus ĂŠlevĂŠ qu'avant mon affaire, et mĂŞme au cours des 30 annĂŠes qui ont suivi.â
En fait, c'est avec l'administration Obama que le ministère de la Justice a commencÊ à recourir à l'Espionage Act de manière agressive contre les lanceurs d'alerte divulguant des informations aux journalistes, contrairement à l'objectif initial de la loi, qui prÊvoyait des fuites vers des pays ennemis, et non celles ayant pour but de fournir aux citoyens des informations dans l'intÊrêt du public. Shipton constate que, depuis,
âles Ătats-Unis ont ĂŠtabli un ordre fondĂŠ sur une vision unipolaire de la politique mondiale et de la gĂŠopolitique. Par consĂŠquent, ils se sont mis Ă ĂŠlargir arbitrairement le champ d'application de leurs lois territoriales afin d'intimider et de pouvoir faire taire les journalistes dans le monde entierâ.
Assange attaquĂŠ par trois prĂŠsidents
L'une des premières cibles majeures de cette campagne d'intimidation a ĂŠtĂŠ Chelsea Manning, une analyste du renseignement de l'armĂŠe en Irak accusĂŠe d'avoir fourni des fichiers classifiĂŠs Ă WikiLeaks en 2010. Ces fichiers comprenaient la vidĂŠo âCollateral Murderâ - qui montrait un hĂŠlicoptère amĂŠricain tirant sur des journalistes de Reuters et des civils en Irak -, des dossiers sur la guerre en Afghanistan et en Irak, des câbles diplomatiques du dĂŠpartement d'Ătat, et les dossiers de GuantĂĄnamo Bay. C'est pour cette mĂŞme publication qu'Assange reste incarcĂŠrĂŠ Ă la prison de haute sĂŠcuritĂŠ de Belmarsh en Angleterre.
Reconnue coupable en aoÝt 2013 et condamnÊe à 35 ans de prison - de loin la plus longue peine jamais infligÊe à un lanceur d'alerte - Manning a bÊnÊficiÊ d'une grâce prÊsidentielle à la fin du mandat d'Obama, et a ÊtÊ libÊrÊe en mai 2017.
La campagne pour la libĂŠration d'Assange approche donc de la fin du quatrième mandat prĂŠsidentiel aux Ătats-Unis sans connaĂŽtre un sort similaire Ă celui de Manning. Ă gauche comme Ă droite, les prĂŠsidents ignorent les dĂŠmarches de la famille du journaliste et continuent d'infliger Ă Assange ce que Nils Melzer, expert en torture de l'ONU, a qualifiĂŠ de âmeurtre au ralentiâ.
Tout en condamnant Manning, le dĂŠpartement de la justice de l'administration Obama a estimĂŠ qu'il ne pouvait pas inculper Assange pour la publication des documents, car il n'y avait aucune diffĂŠrence entre ce que faisait WikiLeaks et les pratique du New York Times ou tout autre mĂŠdia, puisque protĂŠgĂŠ par la Constitution amĂŠricaine qui garantit libertĂŠ de la presse et confidentialitĂŠ des sources. Sans preuve concrète, le gouvernement sâest acharnĂŠ Ă essayer d'inculper M. Assange les huit annĂŠes suivantes sans poursuites pĂŠnales, alors quâil vivait rĂŠfugiĂŠ dans l'ambassade de l'Ăquateur Ă Londres pendant tout ce temps.
Faute d'inculpation par Obama, Assange est devenu la cible du ministère de la Justice de Trump, qui a consacrĂŠ ses deux premières annĂŠes de mandat Ă tenter de contraindre l'Ăquateur - alors dirigĂŠ par le nouveau prĂŠsident LenĂn Moreno - Ă suspendre l'asile diplomatique que le pays avait accordĂŠ Ă Assange en 2012. En avril 2019, l'administration Trump a finalement ĂŠmis la demande d'extradition dont la police britannique s'est servie pour arrĂŞter Assange dès lâinstant oĂš l'Ăquateur a officiellement suspendu son asile diplomatique.
MalgrĂŠ les pressions exercĂŠes par John Shipton et le reste de l'ĂŠquipe juridique d'Assange pour obtenir une grâce prĂŠsidentielle Ă la fin de l'administration Trump, le prĂŠsident - qui a dĂŠclarĂŠ qu'il âadore WikiLeaksâ pendant sa campagne en 2016 - n'a pas levĂŠ le petit doigt pour faire sortir le journaliste de la prison de haute sĂŠcuritĂŠ en Grande-Bretagne. Depuis, l'administration Biden continue de rĂŠclamer l'extradition d'Assange vers les Ătats-Unis, oĂš il encourt une peine pouvant aller jusqu'Ă 135 ans de prison.
Lutter contre l'extradition
Le risque d'extradition Êtant de plus en plus ÊlevÊ, la famille d'Assange cherche d'autres moyens de faire pression sur le gouvernement amÊricain pour qu'il abandonne les poursuites. Le personnage d'Assange est toutefois devenu progressivement impopulaire auprès de la gauche politique et du parti dÊmocrate depuis 2016, quand WikiLeaks a publiÊ des courriels provenant du compte de John Podesta, chef de la campagne de la dÊmocrate Hillary Clinton. Cette fuite a ÊtÊ l'une des principales raisons du retournement de situation lors des Êlections, qui a menÊ à l'accession de Trump à la prÊsidence.
Les grands mĂŠdias, qui ont bĂŠnĂŠficiĂŠ des fuites de 2011 sur les crimes de guerre en Afghanistan et en Irak et ont dĂŠfendu le droit d'Assange Ă transmettre ces informations, ont ĂŠgalement majoritairement cessĂŠ leur soutien Ă sa cause. Comme l'a rappelĂŠ M. Shipton lors d'une confĂŠrence de presse dans la ville de SĂŁo Paulo le 28 aoĂťt, le prĂŠsident Lula lui-mĂŞme a dĂŠjĂ critiquĂŠ le silence de la presse et sa rĂŠticence Ă soutenir la cause de M. Assange.
Dans un Êlan dÊsespÊrÊ, cependant, la famille s'est aussi tournÊe vers la droite, dans une dÊmarche qui ne correspond guère aux intentions initiales de WikiLeaks. En plus de faire pression pour obtenir la grâce de Trump à la fin du documentaire, Shipton cite souvent l'ancien prÊsident comme quelqu'un sur qui il peut compter pour obtenir la libertÊ de son fils :
âJe ne veux rien dire de mal sur Donald Trump, les gens le font dĂŠjĂ suffisamment. [...] Cependant, son fils, considĂŠrĂŠ comme porte-parole de certaines facettes de la campagne de Trump, affirme que son père sera favorable Ă Julian Assange.â
QuestionnÊ sur la raison de sa dÊmarche frôlant le soutien à des personnes comme Trump et Tucker Carlson - un journaliste d'extrême droite dont les propos sont truffÊs de thÊories du complot, de misogynie et de racisme, auquel Shipton se rÊfère à plusieurs reprises comme un exemple de mÊdia alternatif - le père d'Assange a dÊclarÊ qu'ils sont des dÊfenseurs exemplaires du Premier Amendement de la Constitution, qui garantit la libertÊ d'expression.
L'ancien prĂŠsident est cependant l'un des plus grands responsables d'attaques contre les journalistes dans l'histoire rĂŠcente des Ătats-Unis. M. Trump s'en est rĂŠgulièrement pris aux mĂŠdias lors de ses meetings et sur Twitter, qualifiant la presse de âfake newsâ, d'âennemie du peupleâ, de âmalhonnĂŞteâ et âcorrompueâ, de âjournalistes de bas ĂŠtageâ, de âmauvaises personnesâ, de âracailleâ et de âcertaines des pires personnes que j'aie jamais rencontrĂŠesâ. Comme l'a dĂŠclarĂŠ M. Trump Ă Leslie Stahl de CBS News peu après son ĂŠlection Ă la prĂŠsidence en 2016, il essayait de dĂŠtruire la crĂŠdibilitĂŠ des articles de presse le concernant.
Selon une enquĂŞte du ComitĂŠ pour la protection des journalistes, prĂŠsentĂŠe dans le dossier âL'administration Trump et les mĂŠdiasâ, outre les milliers de fausses dĂŠclarations faites par Trump, sa promotion des thĂŠories du complot et ses attaques contre la crĂŠdibilitĂŠ des mĂŠdias ont dangereusement minĂŠ le travail des journalistes pour la vĂŠritĂŠ, et des attaques plus directes ont mis en pĂŠril la presse nationale. Au cours de son mandat, M. Trump a appelĂŠ au boycott des organes de presse et Ă la modification de la loi sur la diffamation pour pouvoir museler la presse ; il a poursuivi le New York Times, le Washington Post et CNN pour diffamation après qu'ils eurent publiĂŠ les opinions d'ĂŠditorialistes et de collaborateurs ; il a tentĂŠ de rĂŠvoquer les accrĂŠditations de presse de la Maison Blanche des journalistes dont les questions et reportages ne lui plaisaient pas ; et il a mĂŞme encouragĂŠ l'ingĂŠrence du gouvernement fĂŠdĂŠral dans les affaires des propriĂŠtaires de CNN et du Washington Post.
Il n'y a donc pas d'homme politique plus susceptible de lui nuire que le RĂŠpublicain qui, en dehors de la Maison Blanche, ne cesse de parler de jeter les journalistes en prison - peu après la publication par des journalistes dâune fuite de projet de texte montrant que la Cour suprĂŞme ĂŠtait sur le point de retourner l'arrĂŞtĂŠ Roe v. Wade, qui garantit le droit constitutionnel fĂŠdĂŠral Ă l'avortement, M. Trump a publiĂŠ sur ses rĂŠseaux sociaux :
âAllez voir le journaliste et demandez-lui qui [a fait fuiter l'information]. Si vous n'obtenez pas de rĂŠponse, mettez cette personne en prison jusqu'Ă ce qu'elle vous donne la rĂŠponse. Et vous pouvez ajouter le rĂŠdacteur en chef Ă la liste.â
Attaques contre la presse et autres rĂŠpercussions de l'affaire Assange
Expliquant qu'il a vu son fils pour la dernière fois en octobre l'annÊe dernière et qu'il ne le reverra pas avant octobre prochain, M. Shipton indique que l'Êtat mental et physique de M. Assange après 13 ans de privation de libertÊ est très inquiÊtant, citant Nils Melzer :
âLa torture est un outil utilisĂŠ pour envoyer un avertissement Ă d'autres. Elle est plus particulièrement convaincante lorsqu'elle est infligĂŠe Ă la vue de tousâ.
Le climat politique actuel aux Ătats-Unis et dans le monde est prĂŠoccupant pour la libertĂŠ d'Assange : les prĂŠsidents et candidats de part et d'autre de l'ĂŠchiquier politique ont successivement ignorĂŠ ou attaquĂŠ la cause du journaliste, compromettant ainsi la pĂŠrennitĂŠ du travail des journalistes qui, eux non plus, n'ont pas accordĂŠ Ă cette affaire l'importance qu'elle mĂŠritait. La personnalitĂŠ controversĂŠe d'Assange a nui Ă sa popularitĂŠ, mais il ne faut pas oublier les implications pratiques de son cas sur les activitĂŠs journalistiques dans le monde entier.
M. Shipton conclut son entretien avec les journalistes en soulignant qu'âau cours des 14 dernières annĂŠes, nous avons vu le paysage mĂŠdiatique reflĂŠter la qualitĂŠ et le style de WikiLeaks et de Julian Assangeâ. En fait, son personnage a jouĂŠ un rĂ´le central dans la manière dont nous dĂŠcouvrons les secrets d'Ătat et les comportements illĂŠgaux dans la plus grande âdĂŠmocratieâ du monde. Depuis 2006, l'organisation a publiĂŠ plus de 10 millions de documents exposant des crimes de guerre, des actes de torture, des accidents nuclĂŠaires, des violences policières et d'autres crimes et cas de corruption.
Toutefois, s'il est extradĂŠ et reconnu coupable en vertu de l'Espionage Act, le prĂŠcĂŠdent crĂŠĂŠ permettrait dâexercer un contrĂ´le sur le travail des journalistes des organes d'information les plus traditionnels dans le monde. C'est sur ce point que Shipton tente d'attirer l'attention dans âIthakaâ, dans l'espoir que son message soit entendu avant qu'il ne soit trop tard. Comme l'affirme Slavoj Ĺ˝iĹžek dans un article traduit par Revista piauĂ en septembre 2013,
âNous avons besoin d'un rĂŠseau international pour organiser la protection de ceux qui dĂŠnoncent le contrĂ´le et diffusent leurs messages. Ils sont nos hĂŠros parce qu'ils prouvent que si ceux qui sont au pouvoir pratiquent ce qu'ils pratiquent, nous pouvons nous aussi riposter et leur faire perdre tous leurs moyensâ.
* Carolina Azevedo est une collaboratrice de l'ĂŠquipe du Monde Diplomatique Brasil.
đâđ¨ Julian Assange's father's fight for his son's freedom.
"Whistleblowers & journalists are our heroes, they prove that if those in power practice what they practice, we too can fight back & defeat them."
John Shipton stars in "Ithaka", a new documentary about the journalist and his family's fight for press freedom.
By Carolina Azevedo, September 1, 2023
On April 11, 2019, Julian Assange was handcuffed and dragged out of the Ecuadorian embassy in London, then into an armored Metropolitan Police vehicle. The image that made the rounds of the TV news was of a man worn down by seven years in solitary confinement, with a long beard and white hair, his body weighing down and resisting the four police officers tasked with subduing him. These moments open a new chapter in the history of WikiLeaks and the struggle of journalists against a decision that could undermine freedom of expression and the press worldwide. This scene also opens the documentary "Ithaka", directed by Ben Lawrence and starring John Shipton, Mr. Assange's father, which opens in cinemas this week.
Since the film's release in 2021, John Shipton has been travelling the world in search of support for his son's cause. In Brazil, he has taken part in press conferences and plans to meet leaders of organizations such as Mercosur and the Inter-American Court of Human Rights. In an interview with Monde Diplomatique Brasil, he declared:
"I would like these organizations to adopt the principle that Julian Assange's freedom is their freedom".
Most leaders of Latin American countries already support the cause, including President Lula, who wrote on social networks last June:
"His arrest goes against the principles of democracy and freedom of the press. It is essential that we all mobilize to defend him".
This support doesn't seem to be enough, however, as the last three US presidents have refused to drop charges against the journalist, who is charged by the US state under the Espionage Act, created in the context of the First World War to counter the leak of secret information to enemy countries. Since the 1970s, however, the law has been reinterpreted by the courts, which have used it to criminalize anyone sharing classified information, thereby jeopardizing the work of all investigative journalists worldwide.
The Espionage Act versus freedom of expression
The law was first used against journalism in June 1971, when the New York Times began publishing extracts from the Pentagon Papers - a 7,000-page document exposing controversial U.S. decisions on the Vietnam War. Furious that the true story of the conflict was being made public, the Nixon administration ordered the paper to stop publishing the documents. Faced with the newspaper's refusal to withdraw publication, the Department of Justice argued in federal court that publication of the confidential report constituted a violation of the Espionage Act, and sought an injunction prohibiting the newspaper from publishing further parts of the report. This attempt to censor a newspaper in federal court was a first for the US government.
The pages were sent to the newspaper by Daniel Ellsberg, an analyst who helped write the report. Ellsberg, who was on trial for espionage and nearly sentenced to 115 years in prison, appears briefly in the documentary, defending the rights of whistleblowers and journalists such as Chelsea Manning, Julian Assange and Edward Snowden. In an interview with The Guardian in June 2021, at the age of 90, Ellsberg delivers this analysis:
"Whistleblowers are much less well protected today. [President Barack] Obama used the law eight or nine times in two terms. Trump invoked it eight times in one term. So sources have a much higher risk of being sued than they did before my case, and even in the 30 years since."
In fact, it was with the Obama administration that the Justice Department began to use the Espionage Act aggressively against whistleblowers leaking information to journalists, contrary to the law's original purpose, which was for leaks to enemy countries, not those intended to provide citizens with information in the public interest. Shipton notes that, since then,
"the United States has established an order based on a unipolar vision of world politics and geopolitics. As a result, it has arbitrarily expanded the scope of its territorial laws to intimidate and silence journalists around the world".
Assange attacked by three presidents
One of the first major targets of this intimidation campaign was Chelsea Manning, an army intelligence analyst in Iraq accused of providing classified files to WikiLeaks in 2010. These files included the "Collateral Murder" video - which showed a US helicopter firing on Reuters journalists and civilians in Iraq - files on the war in Afghanistan and Iraq, State Department diplomatic cables, and the GuantĂĄnamo Bay files. It is for this same publication that Assange remains incarcerated in the high-security Belmarsh prison in England.
Convicted in August 2013 and sentenced to 35 years in prison - by far the longest sentence ever given to a whistleblower - Manning received a presidential pardon at the end of Obama's term, and was released in May 2017.
The campaign for Assange's release is therefore approaching the end of the fourth presidential term in the United States without meeting a similar fate to Manning's. On both left and right, presidents are ignoring the steps taken by the journalist's family and continuing to inflict on Assange what UN torture expert Nils Melzer has described as "murder in slow motion".
While condemning Manning, the Obama administration's Justice Department took the view that it could not charge Assange for publishing the documents, as there was no difference between what WikiLeaks did and the practices of the New York Times or any other media outlet, since protected by the US Constitution, which guarantees freedom of the press and confidentiality of sources. Without concrete proof, the government persisted in trying to charge Mr. Assange for the next eight years without criminal prosecution, even though he was living as a refugee in the Ecuadorian embassy in London during this time.
Failing indictment by Obama, Assange became the target of Trump's Justice Department, which devoted its first two years in office to trying to force Ecuador - then led by new president LenĂn Moreno - to suspend the diplomatic asylum the country had granted Assange in 2012. In April 2019, the Trump administration finally issued the extradition request that the British police used to arrest Assange the moment Ecuador officially suspended its diplomatic asylum.
Despite pressure from John Shipton and the rest of Assange's legal team for a presidential pardon at the end of the Trump administration, the president - who declared that he "loves WikiLeaks" during his campaign in 2016 - didn't lift a finger to get the journalist out of Britain's maximum security prison. Since then, the Biden administration has continued to call for Assange's extradition to the United States, where he faces a sentence of up to 135 years in prison.
Fighting extradition
With the risk of extradition growing ever higher, Assange's family is looking for other ways to pressure the US government into dropping the charges. Assange's persona, however, has become progressively unpopular with the political left and the Democratic Party since 2016, when WikiLeaks published emails from the account of John Podesta, head of Democrat Hillary Clinton's campaign. This leak was one of the main reasons for the election turnaround that led to Trump's accession to the presidency.
The mainstream media, which benefited from the 2011 leaks on war crimes in Afghanistan and Iraq and defended Assange's right to pass on this information, have also mostly ceased their support for his cause. As Shipton recalled at a press conference in the city of SĂŁo Paulo on August 28, President Lula himself has already criticized the press's silence and reluctance to support Assange's cause.
In a desperate move, however, the family has also turned to the right, in a move that hardly matches WikiLeaks' original intentions. In addition to lobbying for Trump's pardon at the end of the documentary, Shipton often cites the former president as someone he can count on to secure his son's freedom:
"I don't want to say anything bad about Donald Trump, people already do that enough. [...] However, his son, considered a spokesman for certain facets of Trump's campaign, says his father will be sympathetic to Julian Assange."
Asked about the reason for his approach bordering on support for the likes of Trump and Tucker Carlson - a far-right journalist whose comments are rife with conspiracy theories, misogyny and racism, to whom Shipton repeatedly refers as an example of alternative media - Assange's father said they are exemplary defenders of the First Amendment of the Constitution, which guarantees freedom of speech.
The former president, however, is one of the biggest perpetrators of attacks on journalists in recent US history. Trump has regularly attacked the media at his rallies and on Twitter, calling the press "fake news", "enemies of the people", "dishonest" and "corrupt", "low-level journalists", "bad people", "scum" and "some of the worst people I've ever met". As Trump told CBS News' Leslie Stahl shortly after his election to the presidency in 2016, he was trying to destroy the credibility of press reports about him.
According to an investigation by the Committee to Protect Journalists, featured in "The Trump Administration and the Media," in addition to the thousands of false statements Trump made, his promotion of conspiracy theories and attacks on media credibility dangerously undermined journalists' work for the truth, and more direct attacks endangered the national press. During his time in office, Trump has called for boycotts of news organizations and changes to libel law in order to muzzle the press; he has sued the New York Times, Washington Post and CNN for libel after they published the opinions of editorial writers and contributors; he has tried to revoke the White House press credentials of journalists whose questions and reporting he didn't like; and he has even encouraged federal government interference in the affairs of the owners of CNN and the Washington Post.
So there's no politician more likely to hurt him than the Republican who, outside the White House, never stops talking about throwing journalists in jail - shortly after reporters leaked draft text showing that the Supreme Court was about to overturn Roe v. Wade, which guarantees the federal constitutional right to abortion, Mr. Trump posted on his social networks:
"Go to the reporter and ask him who [leaked the information]. If you don't get an answer, put that person in jail until they give you the answer. And you can add the editor to the list."
Attacks on the press and other repercussions of the Assange affair
Explaining that he last saw his son in October last year and won't see him again until next October, Shipton says Assange's mental and physical state after 13 years of deprivation of liberty is very worrying, quoting Nils Melzer:
"Torture is a tool used to send a warning to others. It is most convincing when inflicted in plain sight".
The current political climate in the United States and around the world is worrying for Assange's freedom: presidents and candidates on both sides of the political spectrum have successively ignored or attacked the journalist's cause, thus compromising the sustainability of the work of journalists who, in turn, have not given the case the importance it deserves. Assange's controversial personality has damaged his popularity, but we mustn't forget the practical implications of his case for journalistic activities worldwide.
Shipton concludes his interview with the journalists by pointing out that "over the last 14 years, we've seen the media landscape reflect the quality and style of WikiLeaks and Julian Assange". In fact, his character has played a central role in how we uncover state secrets and illegal behavior in the world's largest "democracy". Since 2006, the organization has published over 10 million documents exposing war crimes, torture, nuclear accidents, police violence and other crimes and corruption.
However, if extradited and convicted under the Espionage Act, the precedent set would allow control over the work of journalists in the world's most traditional news organizations. It is to this point that Shipton attempts to draw attention in "Ithaka", in the hope that his message will be heard before it's too late. As Slavoj ŽiŞek states in an article translated by Revista piauà in September 2013,
"We need an international network to organize the protection of those who denounce control and spread their messages. They are our heroes because they prove that if those in power practice what they practice, we too can fight back and make them lose all their means."
https://diplomatique.org.br/luta-pai-julian-assange-liberdade-filho/