👁🗨 Le fonctionnement de l'establishment Part. 2
Les juges Burnett & Lewis, compère de Swift dans le dossier Rwanda, ou Holroyde, & Burnett pour l'affaire Assange vont statuer sur le dernier appel. Voilà comment l'establishment fait son sale boulot.
👁🗨 Le fonctionnement de l'establishment Part. 2
Par Craig Murray, le 17 juillet 2023
Les juges Burnett & Lewis, compère de Swift pour le cas du Rwanda, ou Holroyde, avec Burnett pour l'affaire Assange vont statuer sur le dernier recours, car c'est ainsi que l'establishment fait tranquillement son sale boulot.
Car c'est ainsi que l'establishment fait tranquillement son sale boulot.
Cet article va présenter des juges haut placés dont j'ai déjà parlé sur mon blog, et expliquer ce je pense de l’issue de l'affaire Assange en vue de l'extradition.
Vous vous souvenez peut-être que mon article analysant le rejet de l'appel d'Assange devant la High Court par le juge Lewis et le juge Swift - l'ancien avocat du gouvernement qui avait déclaré que les services de renseignement étaient ses clients préférés - se concentrait fortement sur une analyse des recours rejetés par Swift contre la politique du gouvernement consistant à expulser les demandeurs d'asile vers le Rwanda.
Je suis assez content de cet article dans son ensemble, mais le point central sur le Rwanda était le suivant :
Swift et Lewis soutiennent en outre, aux paragraphes 81 à 84, qu'en droit interne britannique, la reconnaissance par le ministre de l'intérieur du Rwanda comme pays sûr est "irréfutable", c'est-à-dire qu'il n'existe aucune possibilité juridique de remettre en question sa véracité, et qu'elle ne nécessite pas non plus l'approbation du Parlement. La "sécurité" au Rwanda est un fait établi par la loi simplement parce que Braverman le certifie.
Après avoir déclaré qu'en vertu de la législation conservatrice sur l'immigration, le ministre de l'intérieur peut certifier que n'importe quel pays est sûr, indépendamment de la vérité objective (à condition que certaines étapes de la procédure soient respectées), Swift et Lewis poursuivent avec le non-sens sur lequel repose leur jugement, à savoir que parce qu'un pays a été certifié "sûr" aux fins de la législation nationale britannique, il est en fait éligible à l'accueil des expulsés britanniques en vertu de la Convention des Nations unies sur les réfugiés.
Je suis heureux d'annoncer que l'arrêt Swift/Lewis sur le Rwanda a été annulé en appel, précisément sur la question de la nécessité pour la Cour de décider si dans le monde réel - par opposition à un document officiel ou à la tête de Suella Braverman - le Rwanda est réellement un endroit suffisamment sûr pour y envoyer des demandeurs d'asile.
Au motif que le Rwanda n'est pas sûr, Lord Underhill et Sir Geoffrey Vos, Master of the Rolls [Maître des rôles et registres de la chancellerie d'Angleterre], ont statué, par deux voix contre une, que la politique d'expulsion n'était pas légale, contre l'avis dissident du Lord Chief Justice Burnett.
Sir Geoffrez Vos, Master of the Rolls, a déclaré ceci :
90. Le SSHD [ministre de l'intérieur] nous a soumis, en effet, que, à la lumière des garanties et assurances détaillées du MEDP [Partenariat pour la migration et le développement économique] et de la relation de longue date avec le Rwanda et de ses incitations financières et autres à remplir ses obligations ; le passé n'a qu'une importance limitée, voire aucune importance réelle. Il s'agit là d'un argument clé, car les preuves fournies par le HCR portaient toutes sur ce qui a eu lieu par le passé, et sur ce qui se passait au moment présent. Le SSHD a déclaré qu'une évaluation prédictive était nécessaire, et que dans le cadre d’'un tel exercice, il n'était pas important que la situation ait été loin d’être idéale dans le passé.
91. Je n'accepte pas que le passé et le présent puissent être ignorés ou mis de côté comme le suggère le SSHD. Bien sûr, une évaluation prédictive est nécessaire, et bien entendu, la plus grande attention sera accordée aux garanties et aux assurances fournies par le gouvernement rwandais.
Mais la probabilité que les promesses soient tenues doit, tout au moins en partie, être évaluée en fonction des évènements passés, et de la capacité et la volonté de l'entité qui s’engage à tenir ses promesses. Le SSHD reconnaît en effet que le système d'asile rwandais a encore des progrès à faire...
Vos a également critiqué le fait que Swift et Lewis n'aient pas accordé suffisamment de poids aux opinions du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, déclarant que leur opinion était, sans être déterminante, "importante", et qu'elle n'avait pas été suffisamment prise en compte.
199. Il n'est pas possible de résoudre définitivement la différence entre les deux situations, mais je pense que nous devrions procéder sur la base des chiffres du HCR, à la fois parce qu'ils sont soigneusement expliqués et défendus dans les LB 2 et LB 3 et parce que nous devrions adopter une approche fondée sur les "motifs substantiels/risques réels". Selon moi, le taux de rejet étonnamment élevé des demandeurs d'asile provenant de zones de conflit connues, où le HCR recommande de ne pas retourner, suggère en effet une qualité médiocre des demandes d'asile.
Lord Underhill, comme Vos, a jugé qu'il appartenait à la Cour de déterminer la véracité de l'affirmation des conservateurs selon laquelle le Rwanda est un pays sûr pour les demandeurs d'asile. Underhill n'est pas allé jusqu'à dire la vérité, à savoir que toute personne qui n'est pas complètement folle sait que le Rwanda est une dictature nazie et n'est pas un pays sûr, mais il est parvenu à la même conclusion effective :
272. En résumé, la réimplantation des demandeurs d'asile au Rwanda dans le cadre du MEDP impliquerait que leurs demandes soient évaluées dans le cadre d'un système qui, d'après les preuves, a jusqu'à présent présenté de graves lacunes et, à la date de l'audience devant la Divisional Court, ces lacunes se sont avérées inchangées, et n'étaient pas susceptibles de l'être à court terme.
Il ne restait plus que le juge en chef conservateur Burnett. Il a reconnu qu'il appartenait à la Cour de déterminer si, dans le monde réel, le Rwanda était vraiment un pays sûr, et a en effet soutenu que c'était ce que Swift et Lewis avaient dit, alors que ce n'était manifestement pas le cas.
Burnett a ensuite déclaré que le Rwanda était en fait un pays sûr parce que M. Simon Mustard de l'OCRF l'avait dit - comme si un fonctionnaire du ministère des affaires étrangères comme Mustard (un ancien officier de police de Lothian and Borders [Écosse] particulièrement peu imaginatif) était en mesure de présenter un avis d'expert indépendant contredisant les desiderata des ministres.
Que Burnett considère le point de vue de Mustard comme faisant autorité est d'autant plus incongru que Burnett a consacré plusieurs paragraphes à démontrer que le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés n'était pas réellement indépendant, mais partial.
Burnett ne voit aucun risque à envoyer des gens au Rwanda, et conclut :
525. La question centrale de ces appels est de savoir s'il existe des motifs substantiels de croire que le refoulement de ces appelants et de tout autre individu vers le Rwanda conformément à l'accord conclu avec le gouvernement rwandais entraînera un risque réel de traitement contraire à l'article 3 de la CEDH, soit (a) en raison des lacunes du système d'asile et du risque réel de refoulement qui en découle, soit (b) au Rwanda même. Ma conclusion est conforme à celle de la Divisional Court. Les éléments de preuve pris dans leur ensemble ne permettent pas de conclure à l'existence d'un tel risque réel dans l'un ou l'autre cas.
Les personnes particulièrement bien informées parmi vous auront remarqué que M. Burnett a également statué en faveur de l'appel interjeté par les États-Unis dans l'affaire Assange, pour les mêmes raisons, à savoir que les garanties du gouvernement américain en matière de traitement étaient entièrement dignes de confiance, indépendamment de l'expérience réelle acquise dans d'autres affaires.
À l'université d'Oxford, Burnett était le meilleur ami d'Alan Duncan, le ministre conservateur des affaires étrangères qui a organisé l’arrestation d'Assange, et a géré la coordination avec les États-Unis au sujet de la demande d'extradition. Duncan a qualifié Assange de "misérable petit ver" au parlement, et Burnett, le meilleur ami conservateur de Duncan, a annulé la décision initiale en sa faveur interdisant l'extradition pour des raisons de santé et de condition carcérale. Voir mon article sur le sujet.
Vous voyez le lien ? Burnett et Swift se sont tous deux prononcés à des moments différents en faveur de l'extradition d'Assange, et ont tous deux jugé que l'expulsion des demandeurs d'asile vers le Rwanda était légale.
Le dernier recours d'Assange contre Swift et Lewis devant la High Court - limité par Swift à 25 pages et à une audience de 30 minutes - aura lieu vraisemblablement sous peu.
Je me risque à ce pronostic. Ni Vos ni Underhill, qui ont réfuté la légalité des déportations vers le Rwanda, ne feront partie du nouveau panel de deux juges d'Assange. Burnett y sera, probablement aux côtés de Lewis, le compère de Swift dans l'affaire du Rwanda, ou de Holroyde, celui de Burnett dans l'affaire Assange.
Car c'est ainsi que l'establishment fait tranquillement son sale boulot.
https://www.craigmurray.org.uk/archives/2023/07/how-the-establishment-works-part-2/