đâđš Le MinistĂšre public de la Couronne a dĂ©truit tous les documents relatifs aux quatre voyages de Keir Starmer Ă Washington.
Les archives amĂ©ricaines montrent que Starmer, alors chargĂ© du projet d'extradition dâAssange vers la SuĂšde, a rencontrĂ© Ă plusieurs reprises le ministre de la Justice Holder Ă Washington en 2011.
đâđš Le MinistĂšre public de la Couronne a dĂ©truit tous les documents relatifs aux quatre voyages de Keir Starmer Ă Washington.
Par Matt Kennard, le 29 juin 2023
M. Starmer s'est rendu à Washington à trois reprises alors qu'il était chargé de la proposition d'extradition d'Assange vers la SuÚde.
M. Starmer a dirigé une délégation britannique de cinq personnes qui a rencontré M. Holder pendant 45 minutes à Washington en novembre 2011.
La dĂ©lĂ©gation comprenait le procureur de liaison britannique aux Ătats-Unis, qui s'occupait de l'extradition.
Le chef de la division de la sécurité nationale du ministÚre américain de la Justice a également assisté à la réunion.
Le CPS refuse de préciser à Declassified si la destruction des documents de Washington est une procédure de routine
Le Crown Prosecution Service (CPS), le ministĂšre public d'Angleterre et du Pays de Galles, a fait disparaĂźtre tous les documents relatifs aux voyages de son ancien chef, Keir Starmer, aux Ătats-Unis.
M. Starmer a occupé le poste de directeur des poursuites publiques (DPP) de 2008 à 2013, période pendant laquelle le CPS supervisait le projet d'extradition de Julian Assange vers la SuÚde pour qu'il y soit interrogé sur des allégations d'agression sexuelle.
Starmer, devenu dĂ©putĂ© en 2015, est aujourd'hui chef du parti travailliste. Julian Assange, quant Ă lui, est sur le point d'ĂȘtre extradĂ© vers les Ătats-Unis oĂč il risque jusqu'Ă 175 ans de prison pour des accusations liĂ©es principalement Ă l'Espionage Act.
Lorsqu'il Ă©tait procureur, M. Starmer s'est rendu Ă Washington en 2009, 2011, 2012 et 2013, coĂ»tant 21 603 livres sterling au contribuable britannique. C'Ă©tait sa destination Ă lâĂ©tranger la plus frĂ©quente lorsqu'il Ă©tait en poste. Max Hill, l'actuel DPP, n'a effectuĂ© qu'un seul voyage Ă Washington au cours de ses cinq annĂ©es de mandat.
Pendant le mandat de Starmer, le CPS a été entaché d'irrégularités dans l'affaire du fondateur de WikiLeaks.
L'organisation a admis avoir dĂ©truit des courriels clĂ©s liĂ©s Ă l'affaire Assange, couvrant principalement la pĂ©riode oĂč Starmer Ă©tait en poste, tandis que l'avocat du CPS chargĂ© de superviser l'affaire a conseillĂ© aux SuĂ©dois, en 2010 ou 2011, de ne pas se rendre Ă Londres pour interviewer Assange.
Un entretien Ă ce moment-lĂ aurait pu Ă©viter la longue impasse quâa constituĂ© la pĂ©riode de rĂ©clusion Ă l'ambassade.
M. Assange et WikiLeaks ont commencĂ© Ă publier des cĂąbles diplomatiques amĂ©ricains classifiĂ©s, en collaboration avec certains des plus grands journaux du monde, en novembre 2010. Le mĂȘme mois, la SuĂšde a Ă©mis un mandat d'arrĂȘt international Ă l'encontre d'Assange pour des allĂ©gations d'inconduite sexuelle, ce qui a conduit Ă une longue bataille juridique dans laquelle le CPS s'est fortement impliquĂ©.
La journaliste italienne Stefania Maurizi mÚne depuis des années un combat juridique pour accéder aux documents relatifs au CPS et à l'affaire Assange. Cependant, le rÎle de son directeur de l'époque, Keir Starmer, dans cet épisode est toujours resté trouble.
Starmer Ă Washington
En vertu de la loi sur la liberté de l'information (Freedom of Information Act), Declassified a demandé l'itinéraire de chacun des quatre voyages de Starmer à Washington, ainsi que les détails de ces réunions officielles, y compris les notes de synthÚse.
"Le Crown Prosecution Service (CPS) ne dĂ©tient aucune information entrant dans le cadre de votre demande", a dĂ©clarĂ© l'organisme public Ă Declassified. "Les informations dĂ©tenues ont Ă©tĂ© dĂ©truites conformĂ©ment aux calendriers de conservation.â
Interrogé par Declassified sur la nature de ces calendriers de conservation, le CPS a renvoyé à sa politique de conservation et de destruction. Mais ce document ne contient aucune référence aux délais de conservation des documents du CPS.
Interrogé pour obtenir des éclaircissements - et pour savoir si la destruction des documents de Starmer à Washington était une opération de routine - le CPS n'a pas répondu.
"Les informations ont Ă©tĂ© dĂ©truites.â
Mais s'il n'existe plus aucune trace officielle de ce que Starmer a fait lors de ces quatre voyages du cÎté britannique, certaines informations ont été révélées du cÎté américain.
Les archives amĂ©ricaines montrent que le 9 novembre 2011, Eric Holder, alors procureur gĂ©nĂ©ral des Ătats-Unis, a rencontrĂ© Starmer dans son bureau du ministĂšre amĂ©ricain de la justice (DoJ) pendant 45 minutes.
Le CPS de Starmer s'occupait alors de la proposition d'extradition d'Assange vers la SuĂšde. En dĂ©cembre 2010, M. Holder avait Ă©tĂ© questionnĂ© sur la publication des cĂąbles de WikiLeaks. âNous faisons tout ce que nous pouvonsâ, avait-il rĂ©pondu.
InterrogĂ© sur la possibilitĂ© d'engager des poursuites au titre de lâEspionage Act, M. Holder a ajoutĂ© : "Cela pourrait certainement jouer un rĂŽle, mais il y a d'autres lois, d'autres outils Ă notre disposition".
Il a ajoutĂ© qu'il avait donnĂ© son feu vert Ă un certain nombre d'actions non spĂ©cifiĂ©es dans le cadre d'une enquĂȘte criminelle sur WikiLeaks. "J'ai personnellement autorisĂ© un certain nombre de choses la semaine derniĂšre, ce qui montre le sĂ©rieux avec lequel nous prenons cette affaire et le niveau d'implication le plus Ă©levĂ© au sein du ministĂšre de la justice.â
RĂ©union au DoJ
Le personnel impliqué dans la réunion Starmer-Holder au DoJ indique qu'elle était axée sur la sécurité nationale. Il est possible que certaines des actions non spécifiées contre WikiLeaks et Assange mentionnées par Holder l'année précédente aient été discutées.
M. Starmer faisait partie d'une dĂ©lĂ©gation britannique de cinq personnes. Celle-ci comprenait Gary Balch, alors procureur de liaison du Royaume-Uni auprĂšs des Ătats-Unis, qui s'occupait de l'extradition.
Patrick Stevens, alors chef de la division internationale du CPS, qui dĂ©veloppait et dirigeait les activitĂ©s du CPS dans le monde entier "pour soutenir la sĂ©curitĂ© nationale du Royaume-Uni", Ă©tait Ă©galement prĂ©sent. M. Stevens dĂ©clare qu'Ă l'Ă©poque, il Ă©tait "au cĆur de la stratĂ©gie du gouvernement britannique en matiĂšre de sĂ©curitĂ© nationale et de justice internationale".
à leurs cÎtés, Susan Hemming, alors responsable du contre-terrorisme au CPS, était en charge des questions liées, entre autres, aux "secrets officiels".
âCes affaires peuvent devenir Ă©minemment politiques au Royaume-Uni.â
CĂŽtĂ© amĂ©ricain, le point de contact Ă©tait Amy Jeffress, alors attachĂ©e du DoJ Ă l'ambassade des Ătats-Unis Ă Londres, rĂŽle qui impliquait une coordination avec le CPS. Avant d'occuper ce poste, elle avait Ă©tĂ© conseillĂšre Ă la sĂ©curitĂ© nationale auprĂšs du procureur gĂ©nĂ©ral Holder, ce qui impliquait une "interface rĂ©guliĂšre" avec la communautĂ© du renseignement amĂ©ricain.
Mme Jeffress a quittĂ© le DoJ Ă Washington pour rejoindre l'ambassade des Ătats-Unis Ă Londres en septembre 2010, deux mois aprĂšs que WikiLeaks a commencĂ© Ă publier les journaux de guerre afghans. Elle est restĂ©e Ă Londres jusqu'en 2014.
Lorsqu'Assange a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© Ă l'ambassade d'Ăquateur Ă Londres en avril 2019, Mme Jeffress a dĂ©clarĂ© au Washington Post : "Il faudra quelques annĂ©es avant qu'une dĂ©cision finale ne soit prise - au moins un an et probablement plus". Et elle a ajoutĂ© : "Ces affaires peuvent devenir Ă©minemment politiques au Royaume-Uni".
La sécurité nationale
Une autre fonctionnaire amĂ©ricaine prĂ©sente Ă la rĂ©union de Starmer avec le DoJ Ă©tait Denise Cheung, future adjointe de la section de la sĂ©curitĂ© nationale du DoJ. Bruce Schwartz, alors conseiller du DoJ pour les affaires internationales, Ă©tait Ă©galement prĂ©sent et a reçu le prix d'excellence du DoJ pour la promotion des intĂ©rĂȘts de la sĂ©curitĂ© nationale des Ătats-Unis.
Lisa Monaco, une autre fonctionnaire du DoJ prĂ©sente Ă la rĂ©union, venait d'ĂȘtre nommĂ©e procureur gĂ©nĂ©ral adjoint pour la sĂ©curitĂ© nationale, Ă la tĂȘte de la division du DoJ chargĂ©e de superviser les fonctions de renseignement.
Mme Monaco, aujourd'hui procureur gĂ©nĂ©ral adjoint des Ătats-Unis, s'est rendue Ă Londres en fĂ©vrier dernier pour "rĂ©affirmer et renforcer le solide partenariat entre les Ătats-Unis et la Grande-Bretagne dans la lutte contre les menaces pesant sur notre sĂ©curitĂ© nationale".
Elle a rencontré Matthew Rycroft, secrétaire permanent du ministÚre de l'intérieur, "afin de poursuivre les étroites relations de travail entre le ministÚre de l'intérieur et le ministÚre de la justice".
Un officier des services de renseignement britanniques a qualifié l'affaire suédoise de "coup monté".
Declassified a prĂ©cĂ©demment rĂ©vĂ©lĂ© que le ministĂšre de l'intĂ©rieur britannique avait dĂ©ployĂ© huit personnes dans le cadre de l'opĂ©ration secrĂšte visant Ă arracher M. Assange Ă son asile Ă l'ambassade de l'Ăquateur Ă Londres. Il s'agissait d'une opĂ©ration tout Ă fait anormale, car l'Ăquateur est un pays ami, et l'asile est un droit inscrit dans la DĂ©claration universelle des droits de l'homme.
Le fait que le CPS n'ait pas divulgué les documents relatifs à Assange risque de faire naßtre des soupçons de dissimulation. En avril 2013, alors que Starmer était encore en poste, le CPS a rejeté la demande d'Assange concernant les données personnelles en sa possession "en raison des affaires en cours".
MĂȘme le GCHQ*, la plus grande agence d'espionnage du Royaume-Uni, avait accĂ©dĂ© Ă la demande d'Assange concernant les donnĂ©es Ă caractĂšre personnel qu'il dĂ©tenait sur lui et qui rĂ©vĂ©laient que l'un de ses agents de renseignement avait qualifiĂ© l'affaire suĂ©doise de "coup montĂ©".
Keir Starmer n'a pas réagi à une demande de commentaire.
* GCHQ : le Government Communications Headquarters est le service gouvernemental du Royaume-Uni responsable du renseignement d'origine Ă©lectromagnĂ©tique et de la sĂ©curitĂ© des systĂšmes d'information. Il est placĂ© sous la responsabilitĂ© du SecrĂ©taire dâĂtat britannique aux Affaires Ă©trangĂšres et du Commonwealth.
https://declassifieduk.org/cps-has-destroyed-all-records-of-keir-starmers-four-trips-to-washington/