👁‍🗨 Le parti pris de Biden pour Israël n'a d'égal que son absence d’humanité

L'armée israélienne a intentionnellement visé le convoi, “systématiquement, voiture après voiture”. Ce n’est pas la “‘faute à pas de chance’ où, ‘oups’, nous avons largué la bombe au mauvais endroit”.

Le meurtre des travailleurs de la WCK n'était pas exceptionnel, il n'a servi qu'à alerter les autorités étrangères sur la dangerosité de la bande de Gaza. (Al Mayadeen English ; Illustré par Zeinab el-Hajj)

👁‍🗨 Le parti pris de Biden pour Israël n'a d'égal que son manque d’humanité

Par Jamal Kanj, le 8 avril 2024 à 15:35

Il ne faut pas s'étonner si ou quand Biden approuve finalement la fausse enquête finale d'Israël, qui absout son armée de toute responsabilité dans le meurtre des travailleurs de la World Central Kitchen.

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“Nous avons été scandalisés d'apprendre qu'une frappe des Forces de défense israéliennes a tué hier un certain nombre de travailleurs humanitaires civils de la World Central Kitchen (WCK)”.

C'est ce qu'a déclaré John Kirby, le conseiller en communication pour la Sécurité nationale de la Maison Blanche, à la suite de l'assassinat par Israël de sept personnes, dont six travailleurs humanitaires étrangers, à Gaza.

La déclaration apparemment énergique de Kirby était tout sauf sincère. En apparence, elle a l'air authentique, alors qu'il s'agit en fait d'un cocktail empoisonné dont l'objectif est double. Tout d'abord, le fait d'appeler Israël à mener une enquête diligente n'est rien d'autre qu'une tentative de détourner les demandes d'enquête internationale impartiale sur le massacre. Comme l'a déclaré le chef Jose Andres, fondateur du WCK, à Martha Raddatz dans l'émission “This Week” de la chaîne ABC,

“l'auteur du crime ne peut pas enquêter sur lui-même”.

Ensuite, elle vise à apaiser la véritable indignation de la base du Parti démocrate et des jeunes électeurs américains vis-à-vis de la complicité de Biden avec les crimes de guerre israéliens, telle qu'elle est perçue.

Le choix délibéré des mots utilisés par Kirby, tels que “indignation” plutôt que “condamnation”, sert non seulement un objectif euphémique, mais aussi des calculs politiques. Dans le langage diplomatique, “outrage” traduit une émotion telle que la colère ou l'indignation, alors que “condamner” implique une désapprobation formelle, potentiellement porteuse d'implications juridiques. Ainsi, l'administration Biden a exprimé sa colère, mais s'est abstenue de condamner formellement le meurtre des travailleurs humanitaires internationaux.

L'expression de l'indignation de l'administration s'est accompagnée de la déclaration suivante : “Nous espérons... que les responsabilités seront dûment établies”. Malgré le soutien matériel et politique fourni par Biden aux meurtres israéliens, il n'y a pas eu de demande explicite de rendre des comptes. Au lieu de cela, il n'y a eu que la vague expression d'un “espoir” de les voir se concrétiser. Kirby a en outre mis en garde Israël, soulignant la nécessité d'être “plus précis” et “plus prudent” quand ils assassinent.

Le lendemain, face à l'insistance d'un journaliste, Kirby a repris la parole et disculpé de facto Israël d'un meurtre dont il s'était ostensiblement indigné moins de 24 heures plus tôt. L'indignation initiale s'est métamorphosée en normalisation du meurtre, Kirby affirmant qu'il n'y avait aucune preuve suggérant que le ciblage du convoi du WCK était une attaque délibérée des forces israéliennes.

De son côté, et dans le but d'aider les États-Unis à saper toute enquête indépendante, Israël a publié des conclusions initiales imputant la responsabilité de cette “grave erreur” à des officiers subalternes de l'armée. Et dans un commentaire mesquin dépourvu d'excuses explicites, le Premier ministre israélien affirmant : “C’est le genre de choses qui arrive en temps de guerre”.

Les premières conclusions expéditives d'Israël ont négligé de répondre à la question cruciale de savoir comment ils ont pu se tromper dans l'identification du convoi, qui avait coordonné ses déplacements avec l'armée israélienne avant de quitter l’entrepôt. De plus, l'attaque contre le convoi a été lancée à trois reprises, à trois endroits différents, sur une zone de moins de 2,5 km. Le chef Jose Andres a accusé l'armée israélienne d'avoir intentionnellement visé le convoi du WCK, “systématiquement, voiture après voiture”. Ce n’est pas la “‘faute à pas de chance’ où, ‘oups’, nous avons largué la bombe au mauvais endroit”, a-t-il déclaré à l'agence Reuters.

Ce ‘oups’ est le reflet d'une politique consistant à “tirer d'abord et à se poser la question ensuite”, qui a caractérisé les règles d'engagement d'Israël au cours des six derniers mois. Cette politique a entraîné la destruction méthodique d'importantes cibles non militaires, telles que les universités, les hôpitaux et les centrales électriques, ainsi que le blocus des combustibles et le ciblage des policiers qui protégeaient les camions d'aide, ainsi que des associations locales qui les relayaient. Ce code de conduite a déjà entraîné la mort de 196 travailleurs humanitaires. Aujourd'hui, avec le ciblage de la World Central Kitchen, il révèle le plan d'Israël visant à rendre Gaza invivable et ingouvernable.

Le ciblage du convoi du WCK fait donc partie d'une stratégie israélienne plus globale visant à saper le système de distribution, à semer le chaos et à faire porter la responsabilité de la famine à Gaza sur les dysfonctionnements des livraisons plutôt que sur le blocus israélien. À cette fin, l'UNRWA, la seule organisation dotée d'un personnel local et de la plus grande infrastructure logistique pour des programmes d'aide durables dans la région, a été empêchée par Israël de recevoir et de distribuer des produits alimentaires dans la bande de Gaza. Le ciblage des centres de distribution et des groupes d'aide internationaux résulte probablement de la frustration des Israéliens, car ni les privations ni la famine n'ont réussi à transformer Gaza en un espace invivable. Malgré la situation, la population a fait preuve de civisme, déjouant ainsi la malveillance des Israéliens.

Quoi qu'il en soit, on peut se demander pourquoi il a fallu le meurtre de six étrangers pour attirer l'attention des dirigeants mondiaux, alors que la mort de 33 000 personnes, dont plus de 20 000 femmes et enfants à Gaza, n'a pas suscité la même indignation. Pourquoi le monde occidental “civilisé” n'a-t-il pas exprimé son indignation face au meurtre de la petite Hind Rajab, âgée de six ans, piégée dans la voiture accidentée de sa famille, et qui a pleuré au téléphone pendant des heures avant d'être assassinée froidement et gratuitement par un char d'assaut israélien ?

En d'autres termes, pour l'Europe et les États-Unis, “les victimes ne sont pas égales, sauf certaines plus que d'autres”. Il est si hypocrite et sournois de la part de l'administration Biden d'exprimer son indignation face à un meurtre en particulier alors qu'elle a soutenu, normalisé et permis à Israël de commettre de tels crimes ces six derniers mois.

Juxtaposez maintenant l’“indignation” de la Maison Blanche à l'annonce faite un jour plus tôt de fournir à Israël “une nouvelle dotation d'une valeur de plusieurs milliards en avions de combat et en bombes”, y compris 1 800 bombes MK84 d'une tonne semblables à celles qu'Israël a larguées au beau milieu de l'un des camps de réfugiés les plus densément peuplés de la bande de Gaza.

Le meurtre des travailleurs de la WCK n'était pas un accident, il a servi d'avertissement aux étrangers que Gaza est trop dangereuse. À l'instar d'autres groupes humanitaires qui ont quitté Gaza, Israël a effectivement interdit l'accès des médias internationaux à Gaza. Leur disparition a donné à Israël une grande marge de manœuvre pour déterminer qui tuer et quoi détruire en toute impunité. Fait remarquable, pour la première fois dans l'histoire récente, les réseaux américains et les chaînes d'information par câble, ainsi que les principales publications et agences de presse européennes, ont été absents d'un théâtre de guerre majeur. Les médias occidentaux se sont montrés plus qu'accommodants dans ce black-out médiatique en acquiesçant aux directives du rideau de fer moderne et en accompagnant les forces d'invasion pour couvrir les actions du “Rambo israélien” à Gaza, tout en fermant les yeux sur les meurtres de travailleurs humanitaires internationaux et des civils de Gaza.

Non seulement Israël n'a pas autorisé l'accès de Gaza aux journalistes internationaux, mais il s'est attaqué aux reporters palestiniens en utilisant un programme basé sur l'intelligence artificielle connu sous le nom de “Lavender” pour assassiner plus de 100 journalistes. Il s'agit du plus grand nombre de journalistes tués depuis que le Committee to Protect Journalists [Comité de protection des journalistes] a commencé à collecter des données en 1992. La machine israélienne de chasse aux êtres humains utilise un système d'intelligence artificielle appelé “Where's Daddy” [Où est papa ?] pour traquer les individus une fois rentrés chez eux et les tuer, avec leur famille. Malgré les appels à la liberté de la presse lancés par les médias occidentaux, ceux-ci sont restés remarquablement mutiques sur les meurtres de leurs collègues palestiniens “moins égaux que les autres”.

Malheureusement, Netanyahou se moque du monde occidental, et de l'administration Biden en particulier, et les utilise à sa guise pour promouvoir ses objectifs. Au cours des six derniers mois de génocide, l'administration Biden a fait preuve d'une promptitude alarmante à dissimuler les atrocités israéliennes, aussi flagrantes soient-elles. Malgré les preuves attestant du contraire, M. Biden a persisté à répéter les mensonges de M. Netanyahou comme sur des photos fictives d'enfants décapités, et a continué à affirmer l'existence d'un quartier général militaire sous l'hôpital al-Shifa, bien après que ces affirmations aient été démenties.

Ainsi, rien d’étonnant à ce que Biden approuve la fausse enquête finalisée par Israël, qui absout son armée de toute responsabilité dans l'assassinat des travailleurs de la World Central Kitchen. L'“indignation” feinte de Biden devrait éviter à Israël de devoir se soumettre à une enquête impartiale sur son dernier crime de guerre. Pour quelqu'un se prétendant rempli de compassion, la loyauté de Biden envers Israël éclipse sa propre humanité.

https://english.almayadeen.net/articles/opinion/biden-s-bias-toward--israel--transcends-his-mock-humanity