đâđš Le Royaume-Uni snobe l'enquĂȘte du Conseil de l'Europe sur Julian Assange
âQue des Ă©lĂ©ments vĂ©reux du CPS tentent de brouiller les pistes est une chose. C'en est une autre pour le gouvernement britannique de faire obstruction, d'une façon que seul un coupable adopteraitâ.
đâđš Le Royaume-Uni snobe l'enquĂȘte du Conseil de l'Europe sur Julian Assange
Par Mark Curtis / Declassified UK, le 25 octobre 2024
Le ministĂšre de l'IntĂ©rieur britannique commet une âgrave erreurâ en ignorant l'appel du Conseil de l'Europe Ă revoir le traitement rĂ©servĂ© Ă Julian Assange, a averti l'Ă©pouse du fondateur de WikiLeaks.
L'assemblĂ©e parlementaire du Conseil, dont le Royaume-Uni est membre, a adoptĂ© au dĂ©but du mois une rĂ©solution classant Julian Assange parmi les âprisonniers politiquesâ.
M. Assange a passĂ© cinq ans dans la prison de haute sĂ©curitĂ© de Belmarsh, Ă Londres, avant d'ĂȘtre libĂ©rĂ© en juin et de s'envoler pour son Australie natale. Le gouvernement britannique l'avait incarcĂ©rĂ© alors que les Ătats-Unis poursuivaient la procĂ©dure d'extradition devant les tribunaux britanniques.
Son incarcération a indigné le Conseil de l'Europe, créé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avec le soutien de Winston Churchill.
Dans sa résolution, le Conseil de l'Europe a appelé les autorités britanniques à procéder à un examen
âen vue d'Ă©tablir si [M. Assange] a Ă©tĂ© exposĂ© Ă la torture ou Ă des peines ou traitements inhumains ou dĂ©gradants, conformĂ©ment Ă leurs obligations internationalesâ.
Elle a constaté que les autorités britanniques
ân'ont pas protĂ©gĂ© efficacement la libertĂ© d'expression et le droit Ă la libertĂ© de M. Assange, l'exposant Ă une dĂ©tention prolongĂ©e dans une prison de haute sĂ©curitĂ© malgrĂ© la nature politique des accusations les plus graves portĂ©es contre luiâ.
Declassified a donc demandé au ministÚre de l'Intérieur britannique quelle était sa réponse à l'appel du Conseil de l'Europe.
Le ministÚre a contourné la question en répondant :
âLa demande d'extradition de Julian Assange a Ă©tĂ© rĂ©solue. Comme il est d'usage, toutes les demandes d'extradition sont examinĂ©es au cas par cas par nos tribunaux indĂ©pendants et conformĂ©ment Ă la lĂ©gislation britanniqueâ.
Les requĂȘtes de l'assemblĂ©e parlementaire ne sont pas contraignantes pour les gouvernements europĂ©ens, mais ces derniers sont âtenus d' y rĂ©pondreâ.
La dissimulation
Stella Assange, l'Ă©pouse de Julian, a dĂ©clarĂ© Ă Declassified que le ministĂšre de l'IntĂ©rieur commet une âgrave erreurâ en refusant de rĂ©pondre Ă l'appel du Conseil de l'Europe.
âNous savons que le Crown Prosecution Service a fait disparaĂźtre des documents clĂ©s relatifs Ă l'emprisonnement de Julian et a refusĂ© de fournir des informations, d'abord Ă une journaliste, et maintenant au tribunal, qui pourraient faire la lumiĂšre sur l'aspect politique de la persĂ©cution de Julian au Royaume-Uniâ, a-t-elle dĂ©clarĂ©.
âQue des Ă©lĂ©ments vĂ©reux du CPS soient de connivence avec des gouvernements Ă©trangers pour persĂ©cuter un Ă©diteur et tenter de brouiller les pistes est une chose. C'en est une autre pour le gouvernement britannique de faire obstruction de cette maniĂšre Ă la suite d'un rapport indĂ©pendant du Conseil de l'Europe et d'un vote de l'Ă©crasante majoritĂ© de la Chambre demandant au Royaume-Uni de mener une enquĂȘteâ.
Elle a ajoutĂ© : âLe gouvernement britannique participe effectivement Ă la dissimulation, d'une maniĂšre que seul un coupable adopteraitâ.
Torture psychologique
Dans sa rĂ©solution, le Conseil de l'Europe estime que la dĂ©tention de M. Assange dans le centre de haute sĂ©curitĂ© de Belmarsh est âdisproportionnĂ©e par rapport Ă l'infraction qui lui est reprochĂ©eâ.
Elle rappelle les conclusions du rapporteur spĂ©cial des Nations unies sur la torture de l'Ă©poque, Nils Melzer, selon lesquelles M. Assange a Ă©tĂ© exposĂ© Ă
âdes formes de plus en plus sĂ©vĂšres de traitements ou de sanctions cruels, inhumains ou dĂ©gradants, dont les effets cumulĂ©s ne peuvent ĂȘtre dĂ©crits que comme de la torture psychologiqueâ.
Le rapport de Melzer, produit en 2019 aprĂšs alors qu'Assange a Ă©tĂ© kidnappĂ© de l'ambassade de l'Ăquateur Ă Londres et incarcĂ©rĂ© Ă Belmarsh, appelait Ă enquĂȘter sur les fonctionnaires britanniques pour un Ă©ventuel âcomportement criminelâ dans le traitement qu'ils ont rĂ©servĂ© Ă Assange. Les mĂ©dias nationaux britanniques n'en ont jamais fait Ă©tat.
Le Conseil de l'Europe a estimĂ© que les autoritĂ©s britanniques âsemblent avoir ignorĂ©â les conclusions de M. Melzer.
La résolution a été adoptée par 88 voix pour, 13 contre et 20 abstentions. Les quatre membres britanniques de l'assemblée parlementaire ont voté contre, y compris Lord Richard Keen, un pair conservateur, qui a exprimé une opinion divergente.
M. Keen a fait valoir qu'il Ă©tait âjuridiquement incorrectâ de conclure que M. Assange a Ă©tĂ© dĂ©tenu illĂ©galement, puisqu'il a dĂ©jĂ violĂ© les conditions de sa mise en libertĂ© sous caution et qu'il Ă©tait considĂ©rĂ© comme susceptible de s'enfuir.
M. Keen a Ă©galement rejetĂ© l'accusation de torture portĂ©e contre le Royaume-Uni, affirmant que âl'Ă©tat psychologique fĂącheuxâ de M. Assange, identifiĂ© par M. Melzer, Ă©tait dĂ» Ă l'isolement prolongĂ© qu'il s'Ă©tait imposĂ© dans l'ambassade de l'Ăquateur Ă Londres et qu'il ne pouvait ĂȘtre imputĂ© aux autoritĂ©s britanniques.
Effet paralysant
Le Conseil de l'Europe a conclu que le traitement réservé à Assange
âcrĂ©e un dangereux effet paralysant et un climat d'autocensure affectant tous les journalistes, Ă©diteurs et autres acteurs rapportant des sujets essentiels au fonctionnement d'une sociĂ©tĂ© dĂ©mocratiqueâ.
Il ajoute quââIil porte gravement atteinte au rĂŽle de la presse et Ă la protection des journalistes et des lanceurs d'alerte dans le monde entierâ.
La rĂ©solution note Ă©galement que le Conseil est âalarmĂ©â par les informations selon lesquelles l'Agence centrale de renseignement des Ătats-Unis a secrĂštement surveillĂ© M. Assange alors qu'il se trouvait Ă l'ambassade de l'Ăquateur Ă Londres et aurait Ă©laborĂ© des plans pour l'empoisonner ou mĂȘme l'assassiner sur le sol britannique.
Rebecca Vincent, directrice des campagnes de Reporters sans frontiĂšres, a dĂ©clarĂ© que la condamnation de Julian Assange par les tribunaux britanniques Ă 50 semaines de prison pour non-respect de la libertĂ© sous caution Ă©tait âdisproportionnĂ©eâ.
Elle a ajouté :
âSa dĂ©tention prolongĂ©e dans une prison de haute sĂ©curitĂ©, alors qu'aucune charge n'a Ă©tĂ© retenue contre lui au Royaume-Uni et qu'il n'est dĂ©tenu que dans le cadre d'une dĂ©tention provisoire, constitue une violation flagrante de ses droits.â
Mme Vincent a ajouté :
âNous avons Ă©tĂ© confrontĂ©s Ă des restrictions inhabituelles de la part des autoritĂ©s britanniques lorsque nous avons essayĂ© de faire notre travail de dĂ©fense dans cette affaire, y compris des obstacles graves pour lâaccĂšs constant aux tribunaux britanniques afin de suivre les procĂ©dures d'extradition contre Assange, et pour lui rendre visite Ă la prison de Belmarsh. Tous ces aspects mĂ©ritent un examen indĂ©pendant approfondi.â
* Mark Curtis est rédacteur en chef de Declassified UK et l'auteur de cinq livres et de nombreux articles sur la politique étrangÚre du Royaume-Uni.
https://scheerpost.com/2024/10/25/uk-snubs-council-of-europe-over-assange-inquiry/