đâđš L'erreur tactique de Netanyahu : un IsraĂ«l fragmentĂ© face Ă lâunitĂ© palestinienne.
Les Palestiniens montrent que l'unité ne se résume pas aux langages cliché, slogans creux & conférences de presse dans des hÎtels de luxe, mais à la résistance sur le terrain, de Gaza à Naplouse.
đâđš L'erreur tactique de Netanyahu : un IsraĂ«l fragmentĂ© face Ă lâunitĂ© palestinienne.
Par Ramzy Baroud, le 16 mai 2023
Toutes les guerres israĂ©liennes contre les Palestiniens au fil des annĂ©es ont Ă©tĂ© promues et justifiĂ©es par Tel-Aviv au nom de la « sĂ©curitĂ© » et de la « lutte contre le terrorisme ». Le plus grand dĂ©fi d'IsraĂ«l au cours de bon nombre de ces guerres n'a pas Ă©tĂ© la RĂ©sistance palestinienne, mĂȘme si elle est inĂ©branlable et rĂ©siliente. Le dĂ©fi a toujours Ă©tĂ© la capacitĂ© de Tel-Aviv Ă tuer de nombreux Palestiniens, y compris des civils, sans ternir son image internationale d'oasis de dĂ©mocratie et de civilisation. IsraĂ«l a rapidement perdu la bataille des relations publiques, et maintenant, il perd Ă©galement un autre type de bataille. Tout au long de ses 75 ans d'histoire, depuis sa naissance violente sur les ruines de la Palestine historique en mai 1948 jusqu'Ă sa derniĂšre guerre contre Gaza assiĂ©gĂ©e le 9 mai, l'histoire d'IsraĂ«l a Ă©tĂ© associĂ©e Ă la violence. La propagande occidentale pro-israĂ©lienne, ainsi que la magistrale manipulation israĂ©lienne des faits et la rĂ©Ă©criture de l'histoire, ont permis Ă IsraĂ«l de rejeter la responsabilitĂ© de la violence sur d'autres : premiĂšrement, les Arabes qui auraient soi-disant attaquĂ© IsraĂ«l, sans provocation, maintes et maintes fois ; puis les "terroristes" palestiniens de toutes couleurs idĂ©ologiques, les socialistes, les laĂŻcs et, depuis peu, les "intĂ©gristes islamiques". HĂ©las, la hasbara israĂ©lienne a fonctionnĂ©, non pas Ă cause de son pur gĂ©nie mais Ă cause de l'embargo quasi total sur la voix palestinienne dans tous les aspects de la vie. Cet embargo se poursuit Ă ce jour et s'est Ă©tendu pour atteindre les plates-formes de rĂ©seaux sociaux dominants, au premier rang desquelles Facebook. Mais le combat pour la vĂ©ritĂ©, l'intĂ©gritĂ© intellectuelle et la libertĂ© d'expression continue, et les succĂšs palestiniens sont maintenant bien plus importants que toutes les tentatives d'IsraĂ«l, de ses bienfaiteurs et de ses partisans pour censurer, Ă©carter ou Ă©touffer la voix palestinienne. L'Ă©poque oĂč l'on cachait les crimes israĂ©liens ou les imputait Ă quelqu'un d'autre semble rĂ©volue. Il y a des raisons pour lesquelles la propagande israĂ©lienne vit ses pires jours. Outre le pouvoir et l'influence exercĂ©s par les intellectuels palestiniens, les militants des mĂ©dias sociaux et les nombreuses plateformes mises Ă leur disposition par le biais d'innombrables rĂ©seaux de solidaritĂ© Ă travers le monde, la hasbara israĂ©lienne est elle-mĂȘme devenue faible et peu convaincante.
IsraĂ«l est une sociĂ©tĂ© fragmentĂ©e. S'il est vrai que les IsraĂ©liens s'unissent souvent en temps de guerre, cette fois-ci, leur unitĂ© est obsolĂšte et peu impressionnante. La montĂ©e en puissance d'un gouvernement d'extrĂȘme droite, voire fasciste, sous la direction du Premier ministre assiĂ©gĂ© Benjamin Netanyahu en dĂ©cembre dernier, a gĂ©nĂ©rĂ© des manifestations de masse qui ont secouĂ© les villes israĂ©liennes depuis lors. Pris au piĂšge, Netanyahu avait besoin d'un exutoire pour unifier les IsraĂ©liens en colĂšre derriĂšre lui et pour satisfaire ses ministres d'extrĂȘme droite. Il a choisi d'attaquer Gaza. Le choix d'exporter les crises politiques d'IsraĂ«l en Palestine est une vieille tactique. Cependant, depuis la rĂ©sistance palestinienne rigide et de plus en plus forte ces derniĂšres annĂ©es, une guerre Ă Gaza n'est plus une option facile. La guerre de mai 2021, surnommĂ©e «Gardien des murs» par IsraĂ«l et «ĂpĂ©e de JĂ©rusalem» par les Palestiniens, par exemple, a Ă©tĂ© un rappel douloureux de la façon dont de telles erreurs de calcul insensĂ©es de la part de Tel-Aviv peuvent se retourner contre eux. Ainsi, Netanyahu a eu recours Ă un modĂšle diffĂ©rent : une mini-guerre qui cible un groupe palestinien dans une zone isolĂ©e, Ă la fois, par exemple, la fosse aux lions Ă Naplouse et le Jihad islamique Ă Gaza. Le choix de Netanyahu d'attaquer Gaza et d'assassiner les principaux dirigeants de la branche militaire du Jihad islamique, les Brigades Al-Qods, n'Ă©tait pas un choix alĂ©atoire. Le groupe est suffisamment fort pour qu'une opĂ©ration militaire aussi dĂ©cisive et sanglante puisse ĂȘtre commercialisĂ©e par Netanyahu et ses partisans comme une restauration de la «dissuasion», mais sans impliquer IsraĂ«l dans une guerre prolongĂ©e et coĂ»teuse avec tous les groupes de la RĂ©sistance palestinienne en mĂȘme temps. Cette tactique a fonctionnĂ© dans le passĂ©, du moins selon les propres calculs d'IsraĂ«l. En novembre 2019, IsraĂ«l a lancĂ© une guerre contre le Jihad islamique Ă Gaza. Il a Ă©tĂ© surnommĂ© "Ceinture noire". Bien que d'autres groupes de la RĂ©sistance aient alors dĂ©clarĂ© leur soutien au Jihad islamique, ils ne se sont pas engagĂ©s directement dans le combat. Pourquoi? Pendant des annĂ©es, la RĂ©sistance Ă Gaza a voulu changer les rĂšgles d'engagement avec IsraĂ«l. Au lieu de permettre Ă IsraĂ«l de dĂ©terminer le moment et le lieu de la guerre en fonction du programme et du degrĂ© de prĂ©paration de Tel-Aviv, les factions de la RĂ©sistance Ă Gaza voulaient avoir leur mot Ă dire sur le moment de telles batailles. IsraĂ«l a complĂštement Ă©chouĂ© Ă comprendre la stratĂ©gie palestinienne et a supposĂ© que l'opĂ©ration "Ceinture noire" reflĂ©tait la faiblesse, l'indĂ©cision et, plus dangereusement, la dĂ©sunion palestinienne. La guerre de mai 2021 et l'Intifada pour l'UnitĂ© auraient dĂ» alerter IsraĂ«l sur le fait que les groupes de la RĂ©sistance palestinienne sont restĂ©s unis et que la Salle des opĂ©rations conjointes de la RĂ©sistance, qui comprend le Hamas, le Jihad islamique et le FPLP socialiste, entre autres, continue de fonctionner Ă l'unisson. Netanyahu a souhaitĂ© ignorer les messages clairs transmis par les Palestiniens, non seulement Ă Gaza mais aussi par le biais de la RĂ©sistance unifiĂ©e en Cisjordanie, peut-ĂȘtre par dĂ©sespoir de dĂ©tourner l'attention de ses multiples crises politiques et procĂšs pour corruption chez lui. Pour une raison quelconque, Netanyahu pensait qu'il serait capable de copier avec succĂšs l'expĂ©rience de la « ceinture noire », de diviser la RĂ©sistance et de restaurer la « dissuasion ».
Peu de temps aprĂšs l'assassinat des principaux commandants du Jihad islamique â Jihad al-Ghannam, Khalil al-Bahtini et Tariq Ezz al-Deen. â le 9 mai, Netanyahu est apparu lors d'une confĂ©rence de presse avec son ennemi jurĂ©, le ministre de la DĂ©fense Yoav Gallant, pour dĂ©tailler prĂ©maturĂ©ment la supposĂ©e victoire d'IsraĂ«l. Le tour de la victoire n'a cependant pas durĂ© longtemps. AprĂšs 35 heures de silence troublant, et alors que prĂšs de deux millions d'IsraĂ©liens se cachaient dans des abris comme s'ils attendaient leur chĂątiment, la RĂ©sistance a rĂ©pondu. Puis, les roquettes de la RĂ©sistance ont plu, semant la panique, de Sderot, Ashkelon et Netivot jusqu'Ă Rehovot ou Gush Etzion. Soudain, la guerre de « dissuasion », baptisĂ©e « bouclier et flĂšche » par l'armĂ©e israĂ©lienne, est devenue le cauchemar de Netanyahu. Et pourtant, tout cela a Ă©tĂ© fait par le seul Jihad islamique, en coordination et avec le soutien du reste des factions de la RĂ©sistance. Bien que le Hamas, le FPLP et d'autres aient pleinement soutenu le Jihad islamique dans son combat en cours, les responsables israĂ©liens se sont toujours abstenus de recourir Ă leurs menaces habituelles d'assassiner tous les dirigeants de la RĂ©sistance palestinienne. La seule exception a Ă©tĂ© les commentaires du ministre israĂ©lien de l'Ănergie et des Infrastructures, Israel Katz, qui a menacĂ©, dans une interview avec Kan 11 News, d'« Ă©liminer » les principaux dirigeants du Hamas Ă Gaza, Yahya Sinwar et Mohammed Deif. Maintenant, Ă partir du samedi soir 13 mai, un cessez-le-feu provisoire a Ă©tĂ© conclu, et les propagandistes pro-Netanyahu passeront de nombreuses heures Ă parler de la splendide victoire sur la «terreur», et les doreurs pro-israĂ©liens s'efforceront de dĂ©former les faits et de blĂąmer les Palestiniens , y compris les enfants, pour leur propre misĂšre. Mais la vĂ©ritĂ© incontestĂ©e est que la RĂ©sistance palestinienne a rĂ©ussi Ă dĂ©fier, voire Ă renverser, les rĂšgles d'engagement comme jamais auparavant. Plus important encore, les Palestiniens sur le terrain nous ont montrĂ© que l'unitĂ© ne s'exprime pas Ă travers un langage clichĂ©, des slogans vides et des confĂ©rences de presse dans des hĂŽtels de luxe. C'est l'unitĂ© de ceux qui rĂ©sistent sur le terrain, de Gaza Ă Naplouse et de JĂ©nine Ă Cheikh Jarrah, qui importe le plus.
* Ramzy Baroud est journaliste, auteur et rédacteur en chef de The Palestine Chronicle. Il est l'auteur de six livres. Son dernier livre, co-édité avec Ilan Pappé, est « Our Vision for Liberation : Engaged Palestinian Leaders and Intellectuals Speak Out ». Ses autres livres incluent "Mon pÚre était un combattant de la liberté" et "La derniÚre Terre". Baroud est chercheur principal non résident au Centre pour l'islam et les affaires mondiales (CIGA). Son site internet est www.ramzybaroud.net
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