👁🗨 Les États-Unis ont remis l'Australie à sa place... une fois de plus
L'Australie s'est retrouvée au fond du trou ce week-end, se faisant rappeler où se trouve sa place, avec la fin de non recevoir des États-Unis à la maladroite requête d'abandon de l'affaire Assange.
👁🗨 Les États-Unis ont remis l'Australie à sa place... une fois de plus
Par Michael Pascoe, le 2 août 2023
Après un mois plutôt extraordinaire d'escalade constante des relations publiques en matière de défense et d'opportunités de conspiration, l'Australie s'est retrouvée au fond du trou le week-end dernier, se faisant rappeler où se trouve sa place.
Alors que le point culminant des battues médiatiques, des séances photo, des exercices militaires et des entretiens ministériels de haut niveau se multipliait, l'Australie a été ravie d'apprendre qu'elle pouvait devenir un rouage encore plus intégré de la machine militaire américaine, une base américaine encore plus importante, et que la fierté américaine était bien plus déterminante que l'octroi d'une petite faveur à un gouvernement client complaisant.
Ce dernier point est en fait ce que le gouvernement américain veut dire en rejetant une fois de plus la demande maladroite du gouvernement Albanese pour que l'affaire de Julian Assange "prenne fin", ou quelque chose comme ça.
En tout cas, que notre gouvernement soit incapable de dire qu'il souhaite que les États-Unis abandonnent les poursuites contre Assange montre à quel point nous sommes soumis.
Dire les choses en termes clairs serait plus embarrassant pour le Premier ministre Anthony Albanese et la ministre des Affaires étrangères Penny Wong si les États-Unis répondaient en haussant les épaules.
Une petite amélioration
L'unique chose qui pourrait être considérée comme une petite amélioration dans la poursuite bipartite de l'éditeur de WikiLeaks par les États-Unis est que le secrétaire d'État américain Antony Blinken a seulement affirmé que le rôle d'Assange dans la publication des câbles risquait de nuire à la sécurité nationale des États-Unis - il n'a pas affirmé qu'il avait réellement causé du tort, car il est désormais bien établi que ce n'est pas le cas.
La coopération de WikiLeaks avec le Guardian, le New York Times, Der Spiegel, Le Monde et El Pais a certainement mis les États-Unis dans l'embarras - les images d'un hélicoptère de combat tuant des journalistes, les détails de divers crimes de guerre non sanctionnés, et plusieurs centaines de milliers de victimes civiles non signalées jusqu'à présent, sont autant d'éléments susceptibles d’avoir un tel effet.
Les États-Unis n'ont pas l'intention de poursuivre les éditeurs de quotidiens, mais ils affirment que l'éditeur de WikiLeaks n'est pas un éditeur, en guise d'avertissement à ceux qui seraient tentés de les mettre dans l'embarras.
Les républicains et les démocrates haïssent Assange, parce qu'il a mis le gouvernement et l'armée dans l'embarras, et les démocrates en particulier détestent spécialement Assange pour avoir publié des courriels piratés par les Russes qui ont mis Hillary Clinton en déroute.
Mais ces crimes de guerre n'étaient qu'un malaise passager. Au-delà de l'indignation publique, personne ne semble s'en préoccuper, et les affaires reprennent comme si de rien n'était. Aucun État client ne s'y est opposé.
Les États-Unis fixent les règles
Dans l'"ordre international fondé sur des règles" auquel nous avons adhéré, ce que nos politiciens et nos médias répètent inlassablement, les États-Unis établissent les règles à leur guise, et ne sont pas tenus de les respecter eux-mêmes.
La signature par la Chine et les Îles Salomon de plusieurs accords de coopération le mois dernier, dont un portant sur les formations de la police, en est un bref exemple.
(Une remarque en passant concernant les normes des médias est la façon dont il est régulièrement rapporté que la Chine aurait "persuadé" les îles Salomon d'établir des relations diplomatiques avec Pékin au détriment de Taïwan, sans mentionner que c'est le cas de l'Australie, des États-Unis et de tous les pays, à l'exception de 14 très petits pays).
Les États-Unis et l'Australie déduisent ou affirment carrément que la Chine ne devrait pas développer ses intérêts dans le Pacifique Sud, de peur d'affaiblir "l'ordre international fondé sur des règles".
Ce que je n'ai remarqué chez personne d'autre, c'est que les États-Unis ont invoqué leurs propres règles, et non le droit international, pour imposer un embargo commercial aux îles Salomon en 1984, après que les insulaires eurent osé exercer leur souveraineté en arrêtant un thonier américain qui pêchait illégalement dans leurs eaux.
Il n'est donc pas étonnant que les îles Salomon jouent la Chine contre les États-Unis et leur mandataire local, l'Australie, pour obtenir tout ce qu'elles peuvent obtenir.
L'éternelle histoire d'espionnage
Le mois dernier, la plus longue histoire de sinophobie dans les médias australiens a été la bonne vieille histoire du "vaisseau espion chinois", ABC en particulier semblant se préoccuper du navire de renseignement chinois qui arriverait au large de nos côtes pour écouter tout ce qui pourrait être entendu au cours des jeux de guerre contre la Chine.
Tout a commencé le 7 juillet, lorsque ABC a averti que le navire était en route :
"De multiples sources militaires ont confirmé à ABC qu'elles se préparaient à l'arrivée imminente du navire auxiliaire des renseignements généraux (AGI), qui devrait surveiller de près les exercices biennaux massifs menés conjointement par les États-Unis et l'Australie, juste à l'extérieur des eaux territoriales australiennes."
Et puis il est arrivé, et les jeux de guerre se sont déroulés pendant que le navire était là, et il y a eu "une rencontre" avec un avion-espion de la RAAF qui a espionné le navire-espion.
Peu importe que les voyages réguliers de navires espions chinois soient devenus aussi prévisibles que les pubs pour jouets avant Noël, et qu'ils ne représentent pas grand-chose par rapport à nos propres pratiques d'espionnage si agressives vis-à-vis de la Chine - un niveau de "deux poids, deux mesures" que Brian Toohey, journaliste chevronné en matière de sécurité, a dénoncé de manière exhaustive.
“Nous espionnons, ils espionnent, tout le monde espionne - il suffit de demander aux Timorais de l'Est et aux Indonésiens ce qu'ils pensent de nos espions. Et il peut être tout à fait sain pour chaque camp de savoir ce que fait l'autre, afin d'éviter des malentendus catastrophiques.”
Les jeux de guerre eux-mêmes ont fourni de nombreuses opportunités de relations publiques pour la défense entre les États-Unis et l'Australie. Les choses qui font "boum" peuvent garantir une couverture télévisuelle considérable.
Le mois d'agitation du drapeau américano-australien a atteint son apogée avec les discussions de samedi entre les ministres australiens des affaires étrangères, Penny Wong, et de la Défense, Richard Marles, avec leurs homologues américains.
Après avoir rendu hommage aux quatre militaires australiens tués dans un accident d'hélicoptère, il a été question d'annoncer l'arrivée plus régulière de navires et de sous-marins américains dans un plus grand nombre de ports australiens, en plus de l'installation effective de bombardiers B52 et d'un plus grand nombre de marines américains dans les régions les plus peuplées, ainsi que la formation à la fabrication ou à l'assemblage de missiles pour les États-Unis.
Personne ne le dit officiellement, mais tout cela fait partie du désir des États-Unis de contenir la Chine. Les États-Unis ne font pas de faveurs à l'Australie, ils font ce qu'ils veulent.
Et en retour ?
Et en retour, les États-Unis ne sont même pas prêts à abandonner les poursuites engagées contre un éditeur australien.
L'Australie a maintenu le citoyen australien Daniel Duggan à l'isolement pendant neuf mois, à la demande des États-Unis, en raison d'allégations relatives à la formation de pilotes chinois par M. Duggan il y a plus de dix ans.
M. Duggan rejette les accusations, et affirme que la formation des pilotes était une activité purement commerciale.
Entre-temps, l'Australie a demandé à la Chine de publier les détails de l'accord de coopération policière avec les Îles Salomon, afin de "garantir la transparence", faisant écho aux États-Unis qui ont critiqué la Chine et les Îles Salomon pour leur "manque total de transparence".
La Chine pourrait tout à fait attendre cette transparence de la part d’AUKUS, dont l'orientation est nettement plus menaçante, et ses détails infiniment plus opaques.
D'ailleurs, l'opinion publique australienne pourrait poser la même question, sans pour autant obtenir de réponses. Même la conférence nationale de l'ALP [Australien Labor Party : Parti travailliste australien] s'apprête à interrompre le débat sur les accords AUKUS.
La politique deux poids, deux mesures, ça vous parle ?
https://thenewdaily.com.au/news/national/2023/08/02/united-states-julian-assange-pascoe/