đâđš Les libertĂ©s fondamentales de la presse au cĆur de l'affaire Julian Assange
Dans la guerre pour l'extradition dâAssange, les Ătats-Unis affirment leur droit de traquer n'importe quel journaliste n'importe oĂč dans le monde, de l'extrader & le jeter dans une prison amĂ©ricaine.

đâđš Les libertĂ©s fondamentales de la presse au cĆur de l'affaire Julian Assange
Par Chip Gibbons, le 26 février 2024
Au moins une demi-heure avant que la Royal Court of Justice n'ouvre ses portes le mardi 20 fĂ©vrier, des milliers de personnes s'Ă©taient dĂ©jĂ rassemblĂ©es Ă l'extĂ©rieur du palais de justice. Deux heures plus tard, deux juges britanniques allaient entendre durant deux jours d'arguments dans ce qui pourrait ĂȘtre l'ultime plaidoyer du journaliste Julian Assange pour que les tribunaux britanniques empĂȘchent son extradition vers les Ătats-Unis. Les Ătats-Unis cherchent Ă faire juger le fondateur de WikiLeaks pour avoir dĂ©noncĂ© leurs crimes de guerre, ce qui crĂ©erait un prĂ©cĂ©dent selon lequel lâEspionage Act peut ĂȘtre utilisĂ© pour poursuivre des journalistes qui publient des informations qui ne plaisent pas au gouvernement amĂ©ricain.
L'opinion des manifestants rassemblĂ©s Ă l'extĂ©rieur Ă©tait scandĂ©e dans leur slogan : âUne seule dĂ©cision, pas d'extraditionâ.
Durant ces deux journĂ©es, les manifestants sont restĂ©s devant le palais de justice. Ils se sont rassemblĂ©s avant l'ouverture du tribunal et nombre d'entre eux Ă©taient encore dehors Ă la fin de l'audience. Lorsque les membres de la famille d'Assange, de son Ă©quipe juridique et de WikiLeaks sont sortis du tribunal chaque jour, ils ont Ă©tĂ© accueillis par des applaudissements. Il a plu mercredi matin, mais des centaines de personnes Ă©taient encore dehors avant l'ouverture du tribunal. Ă l'heure oĂč la sĂ©ance a Ă©tĂ© levĂ©e, la pluie avait disparu et les manifestants se comptaient Ă nouveau par milliers. Des rubans jaunes âFree Assangeâ couvraient les grilles du tribunal. Toute personne entrant ou sortant du tribunal ne pouvaient que traverser la foule massĂ©e devant.
De l'autre cĂŽtĂ© de la rue se trouvait un podium oĂč des intervenants se sont adressĂ©s Ă la foule. Des membres des parlements britannique, allemand, europĂ©en et australien ont pris la parole, ainsi que des syndicalistes et des militants des droits de l'homme, dont moi. Jeremy Corbyn a dĂ©clarĂ© aux manifestants que M. Assange
âest un vrai journaliste. Les vrais journalistes prennent des risques. Les vrais journalistes recherchent la vĂ©ritĂ©, quel qu'en soit le prixâ.
Selon M. Corbyn, M. Assange, avant d'ĂȘtre emprisonnĂ©, âa dit la vĂ©ritĂ©â sur les guerres dâIrak et dâAfghanistan, sur la cupiditĂ© et l'exploitation des nations les plus pauvres par les entreprises, et sur
âla servilitĂ© avec laquellet nos mĂ©dias conspirent avec les gouvernements et les militaires pour cacher la vĂ©ritĂ© sur les horreurs de la guerreâ. M. Corbyn a demandĂ© Ă la foule de rĂ©flĂ©chir si M. Assange Ă©tait libre et non en prison : âQue dirait-il du bombardement de Rafah et de la destruction de la vie dans toute la bande de Gaza ? Que dirait-il de l'armement hautement sophistiquĂ© utilisĂ©, et qui a jusqu'Ă prĂ©sent coĂ»tĂ© la vie Ă prĂšs de trente mille Palestiniens ?â
Au terme de deux jours d'audience, la foule a dĂ©filĂ© jusqu'Ă Whitehall oĂč Stella Assange, l'Ă©pouse de Julian Assange, s'est adressĂ©e Ă elle.
âLe monde nous regarde et se rend enfin compte de ce dont il s'agit vraimentâ, a-t-elle dĂ©clarĂ© Ă la foule. âLes poursuites engagĂ©es contre son mariâ, a-t-elle ajoutĂ©, âreprĂ©sentent une offensive contre la vĂ©ritĂ©, une attaque contre le droit du public Ă savoir, et la tentative d'un pays de perpĂ©tuer son impunitĂ© et ses dissimulations et de continuer Ă tuer en toute impunitĂ©, sans la menace d'un mĂ©dia qui les examinerait de prĂšs, d'un public qui exigerait un changementâ.
Stella Assange a dĂ©crit son mari comme le prisonnier politique le plus cĂ©lĂšbre du monde. Ăvoquant la mort rĂ©cente du dissident russe Alexei Navalny dans une colonie pĂ©nitentiaire russe, elle a dĂ©clarĂ© Ă ses soutiens :
âNous voyons ce qui est arrivĂ© Ă l'autre prisonnier politique le plus cĂ©lĂšbre la semaine derniĂšre. Cela ne doit pas arriver Ă Julianâ.
Son avertissement n'était pas une hyperbole. Julian Assange n'a pas été vu en public depuis l'audience d'extradition du 6 janvier 2021. Julian et Stella Assange se sont vu refuser le droit de publier les photos de leur mariage pour des raisons de sécurité. Bien que présent lors de l'audience d'extradition initiale, Julian Assange s'est vu refuser le droit de comparaßtre en personne lors des audiences d'appel précédentes.
Cette fois-ci, Assange a finalement obtenu le droit de comparaßtre en personne. Bien qu'une cage de métal vide attende Assange dans la salle d'audience, ce dernier était trop malade pour se présenter. Il s'était cassé une cÎte en raison d'une toux excessive.
Julian Assange n'a pas été vu en public depuis l'audience d'extradition du 6 janvier 2021.
La situation est désastreuse. Et pas seulement pour la vie d'un homme. L'affaire Assange est le procÚs de la liberté de la presse du XXIe siÚcle.
Si les Ătats-Unis parviennent Ă poursuivre Assange en vertu de la loi sur l'espionnage pour avoir publiĂ© des informations sur leurs crimes de guerre, ils rĂ©duiront en miettes les garanties du Premier Amendement en matiĂšre de libertĂ© de la presse. Mais les prĂ©judices s'Ă©tendront bien au-delĂ des frontiĂšres amĂ©ricaines. M. Assange n'est pas amĂ©ricain et WikiLeaks n'est pas basĂ© aux Ătats-Unis. Les Ătats-Unis revendiquent le droit de traquer n'importe quel journaliste n'importe oĂč dans le monde, de le faire emprisonner, de l'emmener aux Ătats-Unis et de le faire disparaĂźtre dans une prison amĂ©ricaine.
Si le gouvernement américain réussit, il remportera une victoire non seulement contre Assange, mais aussi contre la liberté de la presse dans le monde.
Le long chemin vers l'audience de février
La saga juridique d'Assange, ainsi que la guerre extralĂ©gale menĂ©e par le gouvernement amĂ©ricain Ă son encontre, a Ă©tĂ© un processus long et tortueux. Blocages de finances, complots d'assassinat, des annĂ©es passĂ©es enfermĂ© dans une ambassade, inculpations et nouvelles inculpations, appels et contre-appels - il s'est passĂ© tant de choses qu'il peut ĂȘtre difficile, mĂȘme pour un observateur chevronnĂ©, de suivre le dĂ©roulement des Ă©vĂ©nements.
Bien que le gouvernement amĂ©ricain ait commencĂ© Ă Ă©laborer des plans pour dĂ©truire WikiLeaks peu de temps aprĂšs la crĂ©ation de l'organisation, le danger pour M. Assange a vĂ©ritablement commencĂ© le 5 avril 2010. Ce jour-lĂ , au National Press Club de Washington, M. Assange et WikiLeaks ont publiĂ© une vidĂ©o d'une attaque d'hĂ©licoptĂšre amĂ©ricain en Irak. WikiLeaks a intitulĂ© cette vidĂ©o de maniĂšre provocante âCollateral Murderâ. L'attaque a tuĂ© dix-huit civils, dont deux journalistes de Reuters. On entend un soldat dire : âOh oui, regardez ces bĂątards mortsâ.
Lorsqu'une camionnette s'arrĂȘte pour secourir les blessĂ©s, les soldats lui tirent dessus. Ils tuent les hommes qui s'y trouvent et blessent deux enfants. AprĂšs avoir appris qu'ils avaient blessĂ© des enfants, un soldat dĂ©clare :
âEt alors, c'est de leur faute s'ils amĂšnent leurs enfants au combat.â
Tout au long de la vidéo, on entend clairement les soldats déformer les faits afin d'obtenir l'autorisation de tirer sur les cibles qu'ils souhaitent atteindre.
Au cours de l'annĂ©e suivante, WikiLeaks a collaborĂ© avec la presse traditionnelle pour publier les journaux de bord des guerres d'Afghanistan et d'Irak, des cĂąbles du dĂ©partement d'Ătat, et des Ă©valuations de dĂ©tenus de GuantĂĄnamo Bay. Toutes ces informations publiĂ©es entre 2010 et 2011 ont Ă©tĂ© communiquĂ©es Ă WikiLeaks par la lanceuse d'alerte Chelsea Manning, alors simple soldat de l'armĂ©e amĂ©ricaine. ImmĂ©diatement, les autoritĂ©s militaires se sont lancĂ©es Ă la recherche de la source. Manning a Ă©tĂ© retrouvĂ©e, soumise Ă ce qui a Ă©tĂ© largement condamnĂ© comme de la torture, et traduite en cour martiale.
En juillet 2010, le FBI a enquĂȘtĂ© pour savoir si des civils avaient aidĂ© Manning. En octobre de la mĂȘme annĂ©e, le FBI a ouvert des dossiers d'enquĂȘte sur Assange et WikiLeaks. En dĂ©cembre, le ministĂšre de la justice envisageait d'engager des poursuites contre Assange.
Bien que les responsables des services de renseignement du FBI aient Ă©tabli les inculpations potentielles susceptibles dâĂȘtre retenues contre M. Assange, en faisant valoir qu'elles Ă©taient nĂ©cessaires pour dissuader de futures divulgations, l'administration Obama a refusĂ© de valider ces poursuites. Ă l'Ă©poque, M. Obama avait poursuivi plus de lanceurs dâalerte en vertu de la loi sur l'espionnage que toutes les administrations prĂ©cĂ©dentes rĂ©unies, et affichait le pire bilan d'une administration depuis Richard Nixon en matiĂšre de libertĂ© de la presse. Pourtant, son administration a hĂ©sitĂ© Ă engager des poursuites contre M. Assange, estimant que cela crĂ©erait un prĂ©cĂ©dent juridique pouvant ĂȘtre utilisĂ© pour poursuivre le New York Times. La communautĂ© du renseignement Ă©tait tellement en colĂšre contre la dĂ©cision d'Obama qu'en 2014, la CIA et le FBI ont sollicitĂ© une audience personnelle au prĂ©sident.
Le dossier est restĂ© en suspens. Et l'administration Obama a encouragĂ© d'autres pays Ă poursuivre Assange. Craignant d'ĂȘtre extradĂ© vers les Ătats-Unis, M. Assange s'est vu accorder l'asile politique par le gouvernement dĂ©mocratique socialiste de l'Ăquateur. Ă la suite d'une sĂ©rie complexe d'Ă©vĂ©nements condamnĂ©s par le groupe de travail des Nations unies sur la dĂ©tention arbitraire, M. Assange s'est retrouvĂ© piĂ©gĂ© dans l'ambassade de l'Ăquateur Ă Londres, oĂč il a vĂ©cu sept ans.
Ă l'intĂ©rieur de l'ambassade, M. Assange et WikiLeaks ont aidĂ© Edward Snowden, le lanceur d'alerte de la NSA, Ă demander l'asile et ont publiĂ© des courriels du ComitĂ© national dĂ©mocrate [DNC] ainsi que des outils de piratage secrets de la CIA. En bref, Julian Assange a continuĂ© Ă se faire de puissants ennemis au sein de l'establishment politique et de la communautĂ© du renseignement des Ătats-Unis.
La publication des outils de piratage de la CIA, âVault 7â, a eu lieu alors que Trump Ă©tait prĂ©sident et a mis la CIA en colĂšre. Le directeur de la CIA, Mike Pompeo, a dĂ©clarĂ© que WikiLeaks Ă©tait une âagence de renseignement non Ă©tatique hostileâ. Sur la base de cette dĂ©signation, la CIA a envisagĂ© d'enlever ou mĂȘme de tuer le journaliste.
Lors d'une table ronde au Frontline Club, un club de journalistes basé à Londres, Jennifer Robinson, célÚbre avocate spécialisée dans les droits de l'homme et membre de longue date de l'équipe juridique d'Assange, a déclaré à la salle comble :
âJe n'oublierai jamais que j'ai lu les commentaires de Mike Pompeo en descendant de l'avion aux Ătats-Unis. J'ai tout de suite compris ce qu'ils faisaient, Ă savoir utiliser cette sĂ©mantique pour crĂ©er une nouvelle catĂ©gorie pour WikiLeaks leur permettant de poursuivre WikiLeaks d'une autre maniĂšreâ.
Une semaine aprÚs les déclarations de M. Pompeo, le procureur général Jeff Sessions a annoncé que l'arrestation de M. Assange était une priorité. Au sein du ministÚre de la Justice, des théories précédemment rejetées sur la maniÚre de procéder ont été relancées.
M. Assange avait obtenu l'asile du gouvernement de Rafael Correa. Mais le successeur de Correa, le prĂ©sident LenĂn Moreno, a radicalement rompu avec la politique de Correa, cherchant Ă rĂ©orienter l'Ăquateur dans la sphĂšre d'influence des Ătats-Unis. Tout en cherchant Ă obtenir un prĂȘt du Fonds monĂ©taire international, M. Moreno a rĂ©voquĂ© l'asile d'Assange, et a permis Ă la police britannique de pĂ©nĂ©trer dans l'ambassade souveraine de l'Ăquateur et d'arrĂȘter le rĂ©fugiĂ© politique.
Officiellement, la police a arrĂȘtĂ© M. Assange pour ne pas avoir respectĂ© les termes de spa libĂ©ration sous caution, mais plus tard dans la journĂ©e, les Ătats-Unis ont dĂ©voilĂ© un acte d'accusation. Finalement, les Ătats-Unis ont retenu dix-huit chefs d'accusation contre l'Ă©diteur australien. Dix-sept de ces chefs d'accusation ont Ă©tĂ© retenus au titre de l'Espionage Act, la loi utilisĂ©e pour poursuivre des lanceurs dâalerte tels que Daniel Ellsberg, Chelsea Manning et Daniel Hale. M. Assange doit Ă©galement rĂ©pondre d'un chef d'accusation pour conspiration en vue de violer la loi sur la fraude et les abus informatiques (les lanceurs dâalerte Manning et Thomas Drake ont Ă©galement Ă©tĂ© inculpĂ©s en vertu de cette loi).
En 2021, la juge de district britannique Vanessa Baraitser a bloquĂ© la demande d'extradition des Ătats-Unis. Ce faisant, elle a rejetĂ© tous les arguments avancĂ©s par M. Assange en matiĂšre de libertĂ© de la presse et du droit dâexpression. Toutefois, compte tenu de la santĂ© mentale d'Assange et de ses probables conditions de dĂ©tention, elle a bloquĂ© l'extradition au motif qu'elle serait oppressive.
Dans les procĂ©dures d'extradition au Royaume-Uni, les procureurs britanniques reprĂ©sentent les Ătats-Unis. Ă la demande des Ătats-Unis, ils ont fait appel de la dĂ©cision du juge Baraitser. Plus tard dans l'annĂ©e, la High Court britannique a annulĂ© la dĂ©cision. Selon le systĂšme britannique, il faut ĂȘtre autorisĂ© Ă faire appel. La Cour suprĂȘme britannique, estimant qu'il n'y avait pas de point de droit dĂ©fendable, a refusĂ© Ă M. Assange l'autorisation de faire appel. Un magistrat britannique a ordonnĂ© l'extradition d'Assange vers les Ătats-Unis, et le ministre de l'intĂ©rieur a signĂ© un ordre d'extradition.
Bien que cela puisse sembler ĂȘtre la fin de la route, Ă bien des Ă©gards, cela a relancĂ© la procĂ©dure d'appel. L'Ă©quipe juridique d'Assange pourrait maintenant dĂ©poser un âappel incidentâ. Il s'agit d'un appel des dĂ©cisions du juge initial contre les arguments de M. Assange relatifs Ă la libertĂ© de la presse et au droit d'expression.
M. Assange a de nouveau besoin d'une autorisation pour faire appel. Les audiences des 20 et 21 fĂ©vrier devant la King's Bench Division de la High Court ont portĂ© sur la question de savoir si M. Assange avait des raisons de faire appel. Si M. Assange perd, le seul moyen pour lui d'Ă©viter des poursuites aux Ătats-Unis pour ses activitĂ©s journalistiques est une intervention de la Cour europĂ©enne des droits de l'homme ou un changement d'avis Ă Washington. C'est pourquoi les mĂ©dias et les dĂ©fenseurs de M. Assange ont considĂ©rĂ© qu'il s'agissait de lâultime recours de M. Assange au Royaume-Uni.
L'audience
Lors des audiences de la semaine derniĂšre, et pour la premiĂšre fois depuis l'audience d'extradition initiale, les tribunaux britanniques ont Ă©tĂ© contraints de se pencher sur les aspects de l'accusation d'Assange liĂ©s Ă la libertĂ© de la presse, qui ont captivĂ© l'intĂ©rĂȘt du monde entier.
à ce stade de l'appel, les arguments portent essentiellement sur des points de droit trÚs techniques. Cet ésotérisme juridique peut souvent déformer ou masquer des questions politiques ou humaines sous-jacentes en jeu. Pourtant, le premier jour des plaidoiries de l'accusation britannique, Clair Dobbin a, par inadvertance, parfaitement clarifié les choses.
Au lieu de citer des traitĂ©s, des lois nationales ou des affaires antĂ©rieures, Mme Dobbin a proclamĂ© qu'Assange n'Ă©tait pas journaliste, et que Manning pas une lanceuse dâalerte.
Selon Mme Dobbin, WikiLeaks est un site web qui sollicite et publie des documents volĂ©s, piratĂ©s ou obtenus autrement et de maniĂšre illĂ©gale. L'existence mĂȘme de WikiLeaks, aux yeux de l'accusation, semble constituer une incitation criminelle. Mme Manning, selon Mme Dobbin, a agi en rĂ©ponse Ă cette sollicitation de documents classifiĂ©s âvolĂ©sâ et les a remis Ă WikiLeaks, qui les a publiĂ©s. Cette publication a profitĂ© Ă des âĂtats Ă©trangers hostiles, des terroristes et des organisations criminellesâ, affirme Mme Dobbin, qui note qu'Oussama ben Laden les a lus alors qu'il Ă©tait clandestin. Bien entendu, presque tous ceux qui suivaient les affaires internationales en 2010 et 2011 ont probablement consultĂ© WikiLeaks. Le disque dur de l'ordinateur de Ben Laden contenait Ă©galement des sketches de Mr Bean, des dessins animĂ©s de Tom et Jerry et des vidĂ©os virales de petits chats.
Une grande partie des arguments de Mme Dobbin selon lesquels WikiLeaks nâĂ©tait pas une plateforme de journalisme, et Manning n'Ă©tait pas lanceuse d'alerte ne semble reposer que sur le fait qu'ils n'Ă©taient pas censĂ©s divulguer et publier les informations qu'ils ont publiĂ©es. Bien entendu, les lanceurs dâalerte n'ont que rarement, voire jamais, le consentement de ceux Ă propos desquels ils tirent la sonnette d'alarme. Et le journalisme d'investigation ne demande pas l'autorisation des puissants avant d'exposer leurs crimes.
M. Dobbin a Ă©galement invoquĂ© l'accusation de âconspiration en vue de commettre une intrusion informatiqueâ portĂ©e par le gouvernement contre M. Assange. Selon le gouvernement amĂ©ricain, Mme Manning aurait demandĂ© Ă M. Assange de l'aider Ă dĂ©chiffrer un mot de passe, et l'objectif n'Ă©tait pas de permettre Ă Mme Manning d'accĂ©der Ă des documents secrets dont elle n'avait pas connaissance. Il se serait plutĂŽt agi de lui permettre d'accĂ©der au compte de quelqu'un d'autre afin de brouiller les pistes.
Cette thĂ©orie pose un certain nombre de problĂšmes : mĂȘme Mme Manning ne savait pas avec qui elle parlait, rien ne prouve que son interlocuteur ait mĂȘme tentĂ© de dĂ©chiffrer le mot de passe, le stratagĂšme n'ayant manifestement pas fonctionnĂ© et, selon les experts, ce dont le gouvernement amĂ©ricain accuse Manning et Assange est techniquement impossible. NĂ©anmoins, Mme Dobbin a voulu alerter la cour sur ce qui se serait passĂ© si le complot avait rĂ©ussi : les enquĂȘteurs militaires auraient eu plus de mal Ă identifier Mme Manning comme Ă©tant la source de WikiLeaks.
Lors de sa rĂ©futation des arguments de l'accusation, l'avocat de la dĂ©fense Mark Summers a notĂ© que pas une seule fois au cours de leur prĂ©sentation de deux heures et demie, l'accusation n'a mentionnĂ© ce que les documents exposaient : la criminalitĂ© d'Ătat et les crimes de guerre.
Si ces Ă©changes ont clairement montrĂ© le vĂ©ritable enjeu de la procĂ©dure, l'essentiel des arguments a portĂ© sur des points de droit complexes. Le traitĂ© d'extradition entre les Ătats-Unis et le Royaume-Uni, comme presque tous les traitĂ©s d'extradition signĂ©s par le Royaume-Uni, interdit l'extradition pour des dĂ©lits politiques. L'espionnage est considĂ©rĂ© comme l'un des exemples les plus flagrants d'infraction politique. Les avocats d'Assange ont Ă©galement fait valoir qu'exposer la criminalitĂ© d'un Ătat et ĂȘtre poursuivi pour cela constitue une punition inhĂ©rente Ă l'expression politique.
Alors que le traitĂ© interdit indĂ©niablement l'extradition pour des dĂ©lits politiques, une loi britannique de 2003 sur l'extradition omet toute rĂ©fĂ©rence Ă cette partie du traitĂ©. La dĂ©fense a fait valoir que la formulation du traitĂ© Ă©tait toujours dâactualitĂ©. L'accusation a cependant soutenu qu'il n'Ă©tait pas applicable et que son omission Ă©tait consciente, citant un lord qui, en 1996, a estimĂ© que l'exception relative aux dĂ©lits politiques Ă©tait un produit des âidĂ©aux libĂ©raux de l'Europe occidentale et de l'AmĂ©rique du Nordâ sans pertinence dans le monde dâaujourdâhui. On peut se demander si l'accusation considĂšre la dĂ©mocratie, les droits de la dĂ©fense ou la libertĂ© d'expression comme des idĂ©aux libĂ©raux pĂ©rimĂ©s dâEurope occidentale et d'AmĂ©rique du Nord.
La dĂ©fense de M. Assange a Ă©galement fait valoir que l'extradition d'une personne pour un dĂ©lit politique constitue un abus de procĂ©dure, soulĂšve un certain nombre d'arguments fondĂ©s sur la Convention europĂ©enne des droits de l'homme, et a fait valoir qu'il Ă©tait peu probable que M. Assange bĂ©nĂ©ficie d'un procĂšs Ă©quitable, que le fait qu'aucun journaliste n'ait jamais Ă©tĂ© inculpĂ© au titre de la loi sur l'espionnage auparavant signifiait qu'il n'aurait rien pu prĂ©voir, en terme de sanction pĂ©nale, au moment oĂč il a agi. Ils ont soulignĂ© une dĂ©claration d'un procureur amĂ©ricain selon laquelle les Ătats-Unis pourraient faire valoir qu'en tant que ressortissant Ă©tranger, Assange n'a pas de droits au Premier Amendement comme preuve de la partialitĂ© Ă laquelle il pourrait ĂȘtre confrontĂ© devant les tribunaux amĂ©ricains, et ont fait valoir qu'en vertu des prĂ©cĂ©dents Ă©tablis par la Cour europĂ©enne des droits de l'homme, Mme Manning serait considĂ©rĂ©e comme lanceuse d'alerte et qu'Assange ne pourrait donc pas ĂȘtre poursuivi pour avoir publiĂ© ses rĂ©vĂ©lations en vertu de la lĂ©gislation europĂ©enne en matiĂšre de droits de l'homme.
L'accusation a semblĂ© soutenir que toute affirmation selon laquelle les poursuites visent Ă Ă©touffer l'expression politique de M. Assange constitue un dĂ©nigrement inacceptable des propos des procureurs amĂ©ricains, et a citĂ© l'affirmation du procureur amĂ©ricain Gordon Kromberg selon laquelle il ne considĂšre pas M. Assange comme journaliste, pour preuve que les poursuites ne pouvaient pas viser le journalisme de M. Assange. Kromberg a Ă©tĂ© accusĂ© d'engager des poursuites politiquement douteuses contre les musulmans et a comparĂ© le lanceur dâalerte sur les drones Daniel Hale Ă un trafiquant d'hĂ©roĂŻne.
L'un des Ă©changes les plus choquants entre procureurs et juges a portĂ© sur la peine de mort. Le Royaume-Uni n'extradera pas ceux qui risquent la peine de mort dans le pays vers lequel ils sont extradĂ©s. Les avocats d'Assange ont fait valoir que, mĂȘme si aucune des charges retenues contre Assange ne prĂ©voit la peine de mort, les Ătats-Unis pourraient, en se basant sur le mĂȘme schĂ©ma factuel, retravailler les poursuites pour les rendre passibles de la peine capitale. Mme Manning a Ă©tĂ© inculpĂ©e d'une infraction passible de la peine capitale, Ă savoir âaide Ă l'ennemiâ (elle a Ă©tĂ© acquittĂ©e). Assange pourrait ĂȘtre accusĂ© de complicitĂ© de trahison, selon la dĂ©fense. Par consĂ©quent, si les Ătats-Unis ne s'engagent pas Ă ne pas appliquer la peine de mort, M. Assange ne peut pas ĂȘtre extradĂ©.
Bien qu'il soit logique pour les avocats d'Assange de prĂ©senter cet argument, il est un peu tirĂ© par les cheveux. InterrogĂ©s par le juge Jeremy Johnson sur les arguments de la dĂ©fense concernant la peine de mort, les procureurs ont rĂ©pondu qu'il Ă©tait possible que cela se produise et que, si c'Ă©tait le cas, le Royaume-Uni serait impuissant Ă l'empĂȘcher. Pourtant, l'accusation a soutenu qu'il Ă©tait correct d'autoriser l'extradition.
L'accusation a semblĂ© soutenir que lorsqu'il s'agit de demandes d'extradition amĂ©ricaines, le ministre de l'IntĂ©rieur et le systĂšme judiciaire britannique n'ont d'autre rĂŽle que de les approuver sans discussion, se condamnant ainsi Ă la servilitĂ© Ă l'Ă©gard des Ătats-Unis.
Le procÚs de la liberté de la presse du siÚcle sans presse ?
Le procĂšs d'Assange est peut-ĂȘtre le procĂšs du siĂšcle de la libertĂ© de la presse, mais les tribunaux britanniques ont fait tout ce qui Ă©tait en leur pouvoir pour empĂȘcher la presse de couvrir cette derniĂšre audience. Les deux fois oĂč j'ai couvert les prĂ©cĂ©dentes audiences d'Assange pour Jacobin, j'ai reçu un lien me permettant de suivre l'audience depuis Washington, DC. Cette fois-ci, il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© de ne pas accorder d'accĂšs Ă distance aux journalistes non prĂ©sents en Angleterre et au Pays de Galles. De Fox News Ă Truthout en passant par le journaliste indĂ©pendant Kevin Gosztola, tous les journalistes internationaux ont Ă©tĂ© informĂ©s que l'accĂšs Ă distance n'Ă©tait pas dans âl'intĂ©rĂȘt de la justiceâ.
Cette dĂ©cision a suscitĂ© l'indignation de la Media, Entertainment and Arts Alliance (MEAA), le syndicat des journalistes australiens. M. Assange est en effet citoyen australien, et le parti au pouvoir comme l'opposition ont demandĂ© aux Ătats-Unis de mettre fin aux poursuites. Le Haut-Commissaire australien au Royaume-Uni, Ă l'instigation de la MEAA, aurait soulevĂ© cette question auprĂšs du gouvernement britannique, mais en vain.
Les journalistes ont Ă©galement Ă©tĂ© informĂ©s Ă la derniĂšre minute de l'existence d'une accrĂ©ditation en personne, rendant complexe l'organisation de voyages internationaux. Les auditions devaient commencer mardi. C'est le vendredi prĂ©cĂ©dent que les premiĂšres dĂ©cisions d'accrĂ©ditation ont Ă©tĂ© prises. J'ai Ă©tĂ© informĂ© un peu plus d'une demi-heure avant la clĂŽture de l'audience quâun lien Ă distance mâavait Ă©tĂ© refusĂ©. L'e-mail ne prĂ©cisait pas si j'obtiendrais une accrĂ©ditation en personne. J'Ă©tais sur le point d'annuler mon vol de dimanche pour Londres lorsque j'ai reçu un courriel m'informant que j'avais Ă©tĂ© autorisĂ© Ă couvrir l'affaire en personne.
Pourtant, j'ai Ă©tĂ© mieux lotie que d'autres. Stefania Maurizi, qui couvre WikiLeaks depuis ses dĂ©buts, n'a Ă©tĂ© informĂ©e de son accrĂ©ditation que la veille. Elle Ă©tait alors en train d'embarquer dans un avion qui lâemmenait d'Italie au Royaume-Uni.
Le procĂšs d'Assange est peut-ĂȘtre le procĂšs du siĂšcle pour la libertĂ© de la presse, mais les tribunaux britanniques ont fait tout ce qui Ă©tait en leur pouvoir pour empĂȘcher la presse de couvrir la derniĂšre audience.
Une fois la presse sur place, les journalistes n'ont pas Ă©tĂ© mieux traitĂ©s. MalgrĂ© l'intĂ©rĂȘt massif du public - trois cents journalistes ont requis une accrĂ©ditation - le tribunal a choisi de tenir l'audience dans l'une des plus petites salles du bĂątiment. Il n'y avait qu'une seule salle de dĂ©bordement. Toute la presse a Ă©tĂ© affectĂ©e Ă l'avance soit Ă la galerie de la salle d'audience proprement dite, soit dans lâannexe oĂč l'audience serait retransmise.
C'est l'annexe qui m'a Ă©tĂ© attribuĂ©e. De nombreux journalistes Ă qui j'ai parlĂ© ont exprimĂ© leur prĂ©fĂ©rence pour l'annexe. Le niveau infĂ©rieur est Ă©quipĂ© de tables avec des prises de courant qu'ils peuvent utiliser pour travailler sur leur ordinateur portable tout en couvrant l'affaire. Bien qu'il s'agisse d'une pratique courante dans d'autres procĂ©dures, le juge a ordonnĂ© que tous les journalistes soient interdits d'accĂšs au niveau infĂ©rieur de l'annexe. Au lieu de cela, ils ont dĂ» s'asseoir au balcon. Outre le fait qu'ils n'avaient nulle part oĂč travailler, le balcon Ă©tait si Ă©loignĂ© des moniteurs oĂč Ă©tait retransmise lâaudience qu'il Ă©tait difficile de les voir. Quatre lustres bas obstruaient la vue.
Comme nos tickets nous désignaient en tant que représentants de la presse, on nous a refusé l'accÚs au niveau inférieur dÚs l'entrée. à un moment donné, des journalistes en colÚre ont quitté le balcon pour se rendre dans la salle principale. Mais un fonctionnaire du tribunal est passé et a demandé à chaque personne sa qualité, journaliste ou simple membre du public. Les journalistes ont été éjectés et renvoyés aux balcons. AprÚs la pause déjeuner du premier jour, les fonctionnaires du tribunal nous ont dit qu'ils avaient fait part de nos préoccupations au juge, mais que ce dernier s'en tenait à sa décision de confiner les journalistes de l'annexe au balcon. J'ai demandé aux fonctionnaires du tribunal si le juge savait que les journalistes ne pouvaient pas travailler, ne pouvaient pas voir et ne pouvaient pas entendre. J'ai été informé que ces préoccupations avaient été transmises au juge, qui s'en est tenu à sa décision.
Outre les difficultés visuels, lors de la premiÚre moitié de la premiÚre journée, le flux à distance était quasi inaudible. AprÚs le déjeuner, un ingénieur est venu régler le problÚme. Le lendemain, lorsque nous sommes revenus, un fonctionnaire du tribunal a fait une annonce totalement inaudible du balcon. Ironiquement, il s'est avéré qu'il nous informait que nous devions nous attendre à des problÚmes audio ce jour-là .
Lorsque la deuxiĂšme journĂ©e de procĂ©dure a commencĂ©, Dame Victoria Sharp, la juge principale de l'affaire, sâexprimait de maniĂšre claire et audible. Elle a Ă©voquĂ© les problĂšmes audio de la veille et a dĂ©clarĂ© qu'ils faisaient l'objet d'une enquĂȘte. Avec un timing comique, le procureur a commencĂ© Ă parler, de maniĂšre totalement inaudible. Les journalistes prĂ©sents dans l'annexe ont criĂ© qu'ils n'entendaient rien, et un fonctionnaire du tribunal a rĂ©pondu de maniĂšre bourrue : âNous sommes au courantâ. Lorsque la juge en a Ă©tĂ© informĂ©e, elle a interrompu la procĂ©dure jusqu'Ă ce que le problĂšme soit rĂ©solu.
Tous les collÚgues journalistes avec qui j'ai échangé ont pour le moins considéré les tribunaux britanniques comme irrespectueux de la presse.
En plus des problÚmes audio, un certain nombre de personnes écoutaient le flux sans avoir éteint leurs caméras et leurs micros. à certains moments, des individus pris au hasard ont pris le contrÎle des écrans. Le son d'une chasse d'eau a ainsi noyé les propos de l'un des avocats d'Assange.
Nous étions en train de couvrir, ou du moins de tenter de couvrir, le procÚs du siÚcle en matiÚre de liberté de la presse. Et à chaque fois, la presse a été entravée. On ne sait pas si les tribunaux britanniques ont voulu envoyer un message, ils été reçu comme tel.
Réduire la vérité au silence
WikiLeaks a publiĂ© la vidĂ©o âCollateral Murderâ en 2010. La frappe aĂ©rienne qu'elle dĂ©crit a eu lieu en 2007. Pour certains, cela peut sembler de l'histoire ancienne. Avec les nouvelles guerres meurtriĂšres qui font rage dans le monde, on perd facilement de vue les quatorze annĂ©es de vendetta du gouvernement amĂ©ricain contre Assange.
Lorsque WikiLeaks a fait son apparition, l'organisation Ă©tait considĂ©rĂ©e comme une bouffĂ©e d'air frais. Nombreux Ă©taient ceux qui Ă©taient Ă©coeurĂ©s par les mĂ©dias corporatistes encourageant les guerres d'Irak et d'Afghanistan. Les tentatives non dissimulĂ©es de WikiLeaks pour contester ces guerres en alertant le public sur la vĂ©ritĂ© ont rappelĂ© ce que pouvait ĂȘtre le meilleur journalisme.
Avec le gĂ©nocide Ă Gaza et les bombardements amĂ©ricains dans la rĂ©gion qui semblent dĂ©gĂ©nĂ©rer vers une guerre rĂ©gionale plus large, les mĂ©dias d'entreprise jouent Ă nouveau le rĂŽle qu'ils ont jouĂ© pendant la pĂ©riode prĂ©cĂ©dant la guerre d'Irak. Dans le mĂȘme temps, les dissensions au sein du gouvernement atteignent des niveaux record, peut-ĂȘtre jamais vus depuis la guerre du ViĂȘt Nam.
Washington aime mentir sur les guerres presque autant qu'il aime les initier. Notre Ă©poque a besoin d'un nouveau Daniel Ellsberg ou d'une nouvelle Chelsea Manning prĂȘts Ă dĂ©noncer ces tromperies meurtriĂšres, et nĂ©cessite de toute urgence des mĂ©dias aussi audacieux que Wikileaks, prĂȘts Ă remettre en question les mensonges militaires.
Le gouvernement a cherchĂ© Ă faire taire la vĂ©ritĂ© en faisant des lanceurs d'alerte des cibles, victimes de poursuites draconiennes. AprĂšs s'ĂȘtre attaquĂ© aux sources, il cherche maintenant Ă emprisonner le journaliste Julian Assange. Cette guerre contre WikiLeaks est un avertissement direct Ă ceux dĂ©sireux de s'opposer aux folies guerriĂšres actuelles. La libertĂ© de la presse est en jeu Ă un moment oĂč l'on a dĂ©sespĂ©rĂ©ment besoin d'une presse indĂ©pendante.
Comme Stella Assange l'a dit Ă ses soutiens aprĂšs l'audience,
âTout va dĂ©pendre de l'issue de cette affaireâ.
* Chip Gibbons est directeur politique de l'organisation Ă but non lucratif Defending Rights & Dissent.
https://jacobin.com/2024/02/julian-assange-uk-us-extradition-case-press-freedom