đâđš Les mĂ©dias d'entreprise sont les anti-WikiLeaks
Les journalistes - comme Julian Assange - sont censés révéler la vérité au public, et non de servir les puissants en menant une chasse aux sorciÚres pour identifier les sources dévoilant les vérités.
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Par Elizabeth Vos, Spécial Consortium News, le 17 avril 2023
Les journalistes sont chargés par le public de révéler la vérité, et non de servir les puissants dans une chasse aux sorciÚres pour les sources de la vérité, écrit Elizabeth Vos.
Il Ă©tait impossible d'imaginer, il y a quatre ans, lorsque le rĂ©dacteur en chef de WikiLeaks, Julian Assange, a Ă©tĂ© traĂźnĂ© hors de l'ambassade d'Ăquateur Ă Londres et jetĂ© dans la prison de Belmarsh, que les mĂ©dias d'entreprise, qui avaient dĂ©nigrĂ© Assange, pourraient s'abaisser Ă de nouveaux niveaux de servitude gouvernementale.
C'est désormais chose faite avec l'arrestation de Jack Teixeira, un jeune Garde national de l'Air de 21 ans, accusé d'avoir divulgué des documents gouvernementaux ultra-secrets. Ces fuites ont mis en lumiÚre un certain nombre de mensonges importants proférés à la fois par le gouvernement américain et les grands médias au sujet de la guerre en cours en Ukraine.
Parmi les nombreux Ă©lĂ©ments intĂ©ressants, les documents rĂ©vĂšlent que les forces spĂ©ciales amĂ©ricaines ainsi que les forces de l'OTAN sont sur le terrain en Ukraine, que l'Ukraine n'est pas du tout prĂ©parĂ©e Ă son offensive de printemps prĂ©vue, ainsi que des preuves de l'espionnage par les Ătats-Unis de leurs alliĂ©s et d'AntĂłnio Guterres, le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral des Nations unies.
Selon Al Jazeera :
"Plusieurs Ă©valuations prĂ©sumĂ©es des services de renseignement amĂ©ricains dĂ©peignent des perspectives plus pessimistes pour l'armĂ©e ukrainienne que celles fournies publiquement par les Ătats-Unis. Elles suggĂšrent que Kiev ne se dirige que vers des "gains territoriaux modestes" dans sa contre-offensive printaniĂšre tant attendue".
En d'autres termes, le contenu de ces fuites rĂ©vĂšle des mensonges profĂ©rĂ©s directement par les Ătats-Unis et l'OTAN, ainsi que par les mĂ©dias d'entreprise qui les servent.
Médias à l'affût
Mais comment les grands médias ont-ils réagi ? Le New York Times a collaboré avec Aric Toler, un rédacteur de Bellingcat financé par les gouvernements américain et britannique, pour dénoncer publiquement l'auteur présumé des fuites, M. Teixeira, moins d'un jour aprÚs que les autorités fédérales l'eurent identifié.
Mais le Times et le Washington Post avaient décrit Texiera sans le nommer avant que le ministÚre de la justice ne le fasse, faisant ainsi le travail du FBI à leur place en retrouvant l'auteur de la fuite.
Selon la dĂ©claration sous serment Ă l'appui des poursuites engagĂ©es contre Teixeira, qui bĂ©nĂ©ficiait d'une habilitation de sĂ©curitĂ© de haut niveau, le FBI a citĂ© Ă comparaĂźtre Discord, une application souvent utilisĂ©e par les joueurs pour communiquer, et oĂč les documents auraient Ă©tĂ© divulguĂ©s Ă l'origine. Les informations communiquĂ©es par Discord ont ensuite conduit Ă l'arrestation de Teixeira.
La fuite elle-mĂȘme, et l'arrestation de la source prĂ©sumĂ©e sont dĂ©jĂ importantes, mais ce qui rend cette histoire troublante, c'est le rĂŽle des mĂ©dias dans la recherche active et l'exposition de Teixeira, rĂ©vĂ©lant son identitĂ© au lieu de le protĂ©ger.
La frĂ©nĂ©sie des mĂ©dias a semblĂ© unanimement axĂ©e sur l'identification de l'auteur de la fuite plutĂŽt que sur le contenu de l'information qui mĂ©ritait d'ĂȘtre publiĂ©.
L'exact opposé de WikiLeaks
Ă lâinverse, Julian Assange est allĂ© jusqu'aux limites absolues de l'endurance humaine pour protĂ©ger les sources de dĂ©nonciation.
En 2017, au dĂ©but de l'administration Trump, ce dernier aurait Ă©tĂ© prĂȘt Ă nĂ©gocier une grĂące pour Assange s'il rĂ©vĂ©lait les sources des courriels de la DNC et rĂ©futait le Russiagate une fois pour toutes.
En août 2016, Assange a fait des commentaires à la télévision néerlandaise, admettant pratiquement que la source des courriels du DNC était le membre du personnel du DNC assassiné, Seth Rich. Alors, pourquoi ne pas admettre l'identité d'une source morte, s'il s'agit bien de Rich, réfuter le Russiagate, et gagner sa liberté ?
Parce que l'obligation de WikiLeaks, selon Assange, Ă©tait la protection absolue des sources, quel qu'en soit le prix. C'est mĂȘme un principe qui pourrait coĂ»ter la vie au journaliste primĂ©.
WikiLeaks a ensuite publié Vault 7 : une manne de secrets de piratage informatique de la CIA. Cette publication a mis en colÚre Mike Pompeo, alors chef de la CIA, et peu aprÚs, Jim Comey, alors directeur du FBI, et aurait mis fin à toutes les négociations pour la libération de M. Assange.
M. Assange a Ă©galement soutenu des lanceurs dâalerte qui n'ont pas soumis de documents Ă WikiLeaks, notamment Edward Snowden et Reality Winner. Les pourparlers entre le Royaume-Uni et l'Ăquateur pour obtenir la libĂ©ration d'Assange en 2012 ont Ă©tĂ© abandonnĂ©s lorsque Assange a aidĂ© Snowden en la personne de Sarah Harrison, collaboratrice de Wikileaks, alors qu'il Ă©tait bloquĂ© en transit lors de son Ă©vasion de Hong Kong, a dĂ©clarĂ© Stella Assange, avocate et Ă©pouse de Julian Assange, Ă Consortium News.
Lorsque Winner a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©e, Assange a soutenu sa libĂ©ration, et a critiquĂ© The Intercept pour avoir mal protĂ©gĂ© Winner en tant que source. Il est mĂȘme allĂ© jusqu'Ă proposer de se rendre aux autoritĂ©s en Ă©change de la libĂ©ration de Chelsea Manning.
Aujourd'hui, dans une veine totalement opposée, le New York Times et le Washington Post ont collaboré avec de soi-disant journalistes de Bellingcat pour, selon leurs termes, "traquer" l'auteur de la fuite de documents top secrets concernant la guerre en Ukraine.
Que des journaux de référence aillent jusqu'à travailler activement pour exposer au public une source d'informations d'importance cruciale et vitale est stupéfiant si on le compare au sérieux des efforts déployés par des journalistes comme Assange pour protéger leurs sources.
De telles activitĂ©s sont peut-ĂȘtre moins surprenantes de la part de membres de Bellingcat, une organisation financĂ©e par des Ătats de l'OTAN et des groupes liĂ©s aux services de renseignement et dont The Grayzone rapporte qu'elle est "apprĂ©ciĂ©e" par les responsables de la CIA.
Les journalistes sont chargés par le public de révéler la vérité, et non de servir les puissants en menant une chasse aux sorciÚres pour identifier les sources de la vérité. Au lieu de cela, le New York Times et ses co-conspirateurs de Bellingcat semblent avoir cherché à punir l'auteur d'une fuite révélant les mensonges du gouvernement américain et des grands médias.
Les médias traditionnels ne sont pas simplement une forme de journalisme de second ordre par rapport à WikiLeaks, ils en sont l'opposé intentionnel.
* Elizabeth Vos est journaliste indépendante et collaboratrice de Consortium News. Elle co-anime CN Live !
https://consortiumnews.com/2023/04/17/corporate-media-are-the-anti-wikileaks/