👁🗨 L'horreur, l'horreur
Tel est le rêve dément d'Israël. Mais l'orgie de mort d'Israël n'écrasera pas le Hamas. Le Hamas est une idée. Cette idée se nourrit du sang des martyrs. Et Israël lui en fournit en abondance.
👁🗨 L'horreur, l'horreur
Par Chris Hedges, le 11 novembre 2023
Les attaques génocidaires d'Israël, qui tuent des centaines de Palestiniens par jour, dont quelque 160 enfants, se sont étendues au bombardement des derniers hôpitaux de Gaza.
DOHA, Qatar : Je suis dans le studio du service arabe d'Al Jazeera et je regarde un flux en direct de la ville de Gaza. Le reporter d'Al Jazeera qui se trouvait dans le nord a dû se réfugier dans le sud de la bande de Gaza en raison de l'intensité des bombardements israéliens. Il a laissé sa caméra derrière lui. Il l'a braquée sur l'hôpital Al-Shifa, le plus grand complexe médical de Gaza. Il fait nuit. Les chars israéliens tirent directement sur l'enceinte de l'hôpital. De longs éclairs rouges horizontaux. Une attaque délibérée contre un hôpital. Un crime de guerre délibéré. Le massacre délibéré des civils les plus démunis, y compris les grands malades et les enfants en bas âge. Puis le signal s'éteint.
Nous sommes assis devant les écrans. Nous nous taisons. Nous savons ce que cela signifie. Pas d'électricité. Pas d'eau. Pas d'internet. Pas de fournitures médicales. Chaque enfant en couveuse va mourir. Tous les patients sous dialyse vont mourir. Tous les patients de l'unité de soins intensifs vont mourir. Tous ceux qui ont besoin d'oxygène vont mourir. Tous ceux qui ont besoin d'une intervention chirurgicale d'urgence vont mourir. Et qu'adviendra-t-il des 50 000 personnes qui, chassées de chez elles par les bombardements incessants, se sont réfugiées dans l'enceinte de l'hôpital ? Nous connaissez également la réponse à cette question. Beaucoup d'entre elles mourront aussi.
Il n'y a pas de mots pour exprimer ce dont nous sommes témoins. En cinq semaines d'horreur, c'est l'un des summums de l'horreur. L'indifférence de l'Europe est déjà suffisamment grave. La complicité active des États-Unis est impensable. Rien ne peut justifier pareille situation. Rien. Et Joe Biden entrera dans l'histoire comme le complice d'un génocide. Que les esprits des milliers d'enfants qu'il a contribué à assassiner le hantent jusqu'à la fin de ses jours.
Israël et les États-Unis envoient un message glaçant au reste du monde. Le droit international et humanitaire, y compris la Convention de Genève, sont autant de bouts de papier vides de sens. Ils ne s'appliquaient pas en Irak. Ils ne s'appliquent pas à Gaza. Nous pulvériserons vos quartiers et vos villes avec des bombes et des missiles. Nous assassinerons sans état d'âme vos femmes, vos enfants, vos anciens et vos malades. Nous mettrons en place des blocus pour assurer la famine et la propagation des maladies infectieuses. Vous, les “races inférieures”, ne comptez pas. Pour nous, vous êtes de la vermine à éradiquer. Nous possédons tout. Essayez de nous en priver, nous vous tuerons. Et nous n'aurons jamais de comptes à rendre.
On ne nous pas déteste pour nos valeurs. On nous déteste parce que nous n'en avons pas . On nous déteste parce que les règles ne s'appliquent qu'aux autres. Pas à nous. On nous déteste parce que nous nous sommes arrogés le droit de massacrer sans discernement. On nous déteste parce que nous sommes sans cœur et cruels. Parce que nous sommes hypocrites, parce que nous prétendons protéger les civils, l'État de droit et les valeurs universelles, tout en fauchant chaque jour la vie de centaines de personnes à Gaza, dont 160 enfants.
Israël a réagi avec indignation, outré, quand on l'a accusé d'avoir bombardé l'hôpital al-Ahli à Gaza, qui a fait des centaines de morts. Israël a affirmé que ce bombardement provenait d'une roquette égarée tirée par le Jihad islamique palestinien. Rien dans l'arsenal du Hamas ou du Djihad islamique n'aurait pu produire l'énorme puissance explosive du missile qui a frappé l'hôpital. Ceux d'entre nous qui ont couvert Gaza ont si souvent entendu cette rengaine israélienne qu'elle en est risible. Les Israéliens imputent toujours leurs crimes de guerre au Hamas et aux Palestiniens, et tentent à présent d'affirmer que les hôpitaux sont des centres de commandement du Hamas, et qu'ils sont donc des cibles légitimes. Ils ne fournissent jamais de preuves. L'armée et le gouvernement israéliens mentent comme ils respirent.
Médecins sans frontières, dont le personnel travaille à Al-Shifa, a publié un communiqué indiquant que les patients, les médecins et les infirmières sont “piégés dans les hôpitaux sous le feu des militaires”. L'organisation a appelé le “gouvernement israélien à cesser cet assaut acharné sur le système de santé de Gaza”.
“Au cours des dernières 24 heures, les hôpitaux de Gaza ont subi des bombardements incessants. Le complexe hospitalier d'Al-Shifa, le plus grand établissement de santé où le personnel de MSF travaille encore, a été touché à plusieurs reprises, y compris les services de maternité et de consultation externe, faisant de nombreux morts et blessés”, peut-on lire dans la déclaration. “Les hostilités autour de l'hôpital se poursuivent. Les équipes de MSF et des centaines de patients se trouvent toujours à l'intérieur de l'hôpital Al-Shifa. MSF réitère d'urgence ses appels à stopper l'assaut contre les hôpitaux, à un cessez-le-feu immédiat et à la protection des installations médicales, du personnel médical et des patients”.
Trois autres hôpitaux dans le nord de Gaza et dans à Gaza City sont encerclés par les forces israéliennes et les chars, dans ce qu'un médecin a appelé “une journée de guerre contre les hôpitaux”, selon Al Jazeera. L'hôpital indonésien aurait également été privé d'électricité. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) signale que 20 des 36 hôpitaux de Gaza ne fonctionnent plus.
Le cynisme d'Israël et de Washington est à couper le souffle. Il n'y a aucune différence d'intention. Washington veut seulement que les choses se fassent vite. Des corridors humanitaires ? Des pauses dans les bombardements ? Il s'agit de véhicules destinés à faciliter le dépeuplement total du nord de Gaza. La poignée de camions d'aide autorisés à franchir la frontière de Rafah avec l'Égypte ? Une astuce de relations publiques. Le seul objectif est de tuer, tuer, tuer. Plus c'est rapide, mieux c'est. Les fonctionnaires de M. Biden ne parlent que de ce qui se passera une fois qu'Israël aura fini de décimer Gaza. Ils savent que le massacre israélien ne s'arrêtera que lorsque les Gazaouis vivront dehors, sans abri, dans la partie sud de la bande de Gaza, et mourront de faim, sans eau, ni soins médicaux.
Avant l'incursion terrestre d'Israël, Gaza était l'un des endroits les plus densément peuplés de la planète. Imaginez ce qui se passera lorsque 1,1 million de Gazaouis du nord s'ajouteront à plus d'un million d'habitants du sud. Imaginez ce qui se passera lorsque des maladies infectieuses de type choléra se propageront. Imaginez les ravages de la famine. La pression montera pour que l'on fasse quelque chose. Et ce geste, espère Israël, sera d’inciter les Palestiniens à passer la frontière pour se réfugier dans le Sinaï, en Égypte. Une fois là-bas, ils n'en reviendront jamais. Le nettoyage ethnique de Gaza par Israël sera terminé. Celui de la Cisjordanie pourra commencer.
Tel est le rêve dément d'Israël. Pour y parvenir, il rendra Gaza inhabitable.
Posez-vous la question : si vous étiez un Palestinien à Gaza et que vous aviez accès à une arme, que feriez-vous ? Si Israël tuait votre famille, comment réagiriez-vous ? En quoi le droit international ou humanitaire vous intéresse-t-il, puisque vous savez qu'il ne s'applique qu'aux opprimés, et non aux oppresseurs ? Si la terreur était le seul langage utilisé et apparemment compris par Israël pour communiquer, quelle serait votre réponse, la terreur ?
L'orgie de mort d'Israël n'écrasera pas le Hamas. Le Hamas est une idée. Cette idée se nourrit du sang des martyrs. Israël lui en fournit en abondance.