đâđš Matt Kennard - Arrestation d'Assange: Les Britanniques ont affectĂ© 15 personnes Ă l'opĂ©ration secrĂšte
"Je leur ai donnĂ© Ă chacun une photo dĂ©dicacĂ©e prise dans la salle des opĂ©rations le jour mĂȘme, avec une lĂ©gende disant 'L'Ă©quipe spĂ©ciale Brexit de Julian Assange le 11 avril 2019'" â Sir Alan Duncan
đâđš Arrestation d'Assange: Les Britanniques ont affectĂ© 15 personnes Ă l'opĂ©ration secrĂšte
đ° Par Matt Kennard, le 28 novembre 2022
De nouvelles informations suscitent de nouvelles inquiétudes quant à la politisation de l'affaire judiciaire du fondateur de WikiLeaks.
Assange avait obtenu l'asile d'un pays ami pour Ă©viter d'ĂȘtre persĂ©cutĂ© par le gouvernement amĂ©ricain pour ses activitĂ©s journalistiques.
Mais huit employĂ©s du Home Office [ministĂšre de l'IntĂ©rieur] et sept du Cabinet Office [dĂ©partement exĂ©cutif du gouvernement britannique chargĂ© du soutien du Premier ministre et du cabinet du Royaume-Uni. Il est dirigĂ© par le Premier ministre] ont participĂ© Ă l'opĂ©ration de police secrĂšte visant Ă arrĂȘter Assange.
- Le ministÚre de la Justice, qui contrÎle les tribunaux et les prisons d'Angleterre, refuse de dire si son personnel a participé à l'opération.
- Le Foreign Office refuse de dire si ses locaux ont été utilisés.
Selon de nouvelles informations, le gouvernement britannique a affectĂ© au moins 15 personnes Ă l'opĂ©ration secrĂšte visant Ă arracher Julian Assange de l'ambassade d'Ăquateur Ă Londres.
Le fondateur de WikiLeaks a obtenu l'asile politique de l'Ăquateur en 2012, mais n'a jamais Ă©tĂ© autorisĂ© Ă quitter la Grande-Bretagne pour Ă©viter d'ĂȘtre persĂ©cutĂ© par le gouvernement amĂ©ricain.
Le journaliste australien se trouve dans la prison de haute sĂ©curitĂ© de Belmarsh depuis plus de trois ans et demi, et risque une peine de 175 ans de prison aprĂšs le feu vert de la Haute Cour britannique Ă son extradition vers les Ătats-Unis en dĂ©cembre 2021.
"L'opération Pelican" était une action secrÚte de la police métropolitaine visant à déloger Assange de son asile, qui a finalement eu lieu en avril 2019. L'asile est un droit inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l'homme.
L'existence de l'opération n'a été révélée que dans les Mémoires de l'ancien ministre des Affaires étrangÚres, Sir Alan Duncan, publiées l'année derniÚre. Le gouvernement britannique bloque réguliÚrement les demandes d'information sur l'affaire Assange, ou y répond de façon obscure.
Mais le Cabinet Office a récemment déclaré au Parlement que sept de ses fonctionnaires travaillaient sur l'opération Pélican. Le rÎle du ministÚre est de "soutenir le Premier ministre et d'assurer le bon fonctionnement du gouvernement", mais il est aussi impliqué dans la sécurité nationale et le renseignement.
On ne voit pas trÚs bien pourquoi le Cabinet Office affecterait autant de personnel à une opération de police de ce type. Interrogé sur leur rÎle, le Cabinet Office a déclaré que ces sept fonctionnaires travaillaient "en liaison" avec la Metropolitan Police sur l'opération.
Le Home Office, quant Ă lui, a dĂ©clarĂ© au Parlement que huit fonctionnaires travaillaient sur l'opĂ©ration Pelican. Le ministĂšre de l'IntĂ©rieur supervise le MI5 et le chef du dĂ©partement doit approuver les extraditions vers la plupart des pays Ă©trangers. En juin, Priti Patel, alors ministre de l'IntĂ©rieur, a ordonnĂ© l'extradition d'Assange vers les Ătats-Unis.
âȘïž 'Des coĂ»ts disproportionnĂ©s'
D'autres ministÚres ont refusé de dire s'ils avaient du personnel travaillant sur l'opération Pelican, notamment le ministÚre de la Justice (MoJ).
Le MoJ est responsable des tribunaux d'Angleterre et du Pays de Galles, oĂč l'affaire d'extradition d'Assange fait actuellement l'objet d'une dĂ©cision d'appel. Il contrĂŽle Ă©galement ses prisons, dont la prison de haute sĂ©curitĂ© de Belmarsh, oĂč Assange est incarcĂ©rĂ©.
Lorsqu'on lui a demandĂ© si l'un de ses employĂ©s Ă©tait affectĂ© Ă la mission Pelican, le ministĂšre de la Justice a rĂ©pondu que "l'information demandĂ©e n'a pu ĂȘtre obtenue que par le biais d'une enquĂȘte": "Les informations recherchĂ©es n'ont pu ĂȘtre obtenues qu'Ă un coĂ»t disproportionnĂ©."
On ne comprend pas pourquoi le Home Office, un plus grand ministÚre avec plus de personnel, a pu ainsi répondre à une telle question, et pas le MoJ. Rien ne justifie que le MinistÚre de la Justice ait du personnel affecté à l'opération Pélican, et toute révélation à ce sujet mettrait le gouvernement dans l'embarras.
Entre-temps, le MinistÚre des Affaires étrangÚres a déclaré au Parlement qu'il n'avait pas de personnel "directement affecté" à Pelican, mais a refusé de dire si les personnes travaillant sur l'opération se trouvaient dans ses locaux.
âȘïž 'L'Ă©quipe spĂ©ciale Brexit de Julian Assangeâ
Sir Alan Duncan, ministre des Affaires Ă©trangĂšres pour les AmĂ©riques de 2016 Ă 19, Ă©tait le principal responsable britannique des nĂ©gociations diplomatiques entre le Royaume-Uni et l'Ăquateur pour extraire Assange de l'ambassade. Dans ses mĂ©moires, il a Ă©crit qu'il a regardĂ© en direct l'arrestation d'Assange depuis la salle des opĂ©rations au sommet du Foreign Office aux cĂŽtĂ©s du personnel de la mission Pelican.
AprĂšs l'incarcĂ©ration d'Assange Ă Belmarsh, Duncan a organisĂ© un apĂ©ritif dans son bureau pour l'Ă©quipe Pelican. "Je leur ai donnĂ© Ă chacun une photo dĂ©dicacĂ©e prise dans la salle des opĂ©rations le jour mĂȘme, avec une lĂ©gende disant 'L'Ă©quipe spĂ©ciale Brexit de Julian Assange le 11 avril 2019'", a-t-il Ă©crit.
Le prĂ©sident de l'Ăquateur de 2007 Ă 17, Rafael Correa, a rĂ©cemment dĂ©clarĂ© Ă Declassified qu'il avait accordĂ© l'asile Ă Assange parce que le journaliste australien "n'avait aucune chance de bĂ©nĂ©ficier d'un processus juridique Ă©quitable aux Ătats-Unis."
IIl a ajouté que le gouvernement britannique "a essayé de nous traiter comme un pays subalterne".
En septembre 2021, 30 anciens responsables amĂ©ricains ont rĂ©vĂ©lĂ© publiquement un complot de la CIA pour "tuer ou kidnapper" Assange Ă Londres. Dans l'Ă©ventualitĂ© oĂč Assange quitterait l'ambassade, l'article note que "les responsables amĂ©ricains ont demandĂ© Ă leurs homologues britanniques d'assurer la fusillade si des coups de feu s'avĂ©raient nĂ©cessaires, et les Britanniques ont acceptĂ©, selon un ancien haut responsable de l'administration."
Ces engagements ont trÚs probablement été pris par le ministÚre de l'Intérieur.
* Matt Kennard est enquĂȘteur en chef Ă Declassified UK. Il a Ă©tĂ© membre puis directeur du Centre for Investigative Journalism Ă Londres. Suivez-le sur Twitter @kennardmatt