👁🗨 Patrick Lawrence: La cachette secrète de Biden
Dans quelle mesure le secret est-il essentiel au bon fonctionnement de la politique? Personne ne connaît la réponse à cette question avec plus d'acuité, et à un coût aussi élevé, que Julian Assange.
👁🗨 La cachette secrète de Biden
Par Patrick Lawrence, Spécial Consortium News, le 23 janvier 2023
Si ce président ne savait pas qu'il était en possession de documents classifiés, et pour certains depuis plus de dix ans, il n'est tout simplement pas qualifié pour occuper une fonction publique lui permettant un tel accès.
Il y a deux choses que j'aime dans l'imbroglio dans lequel se trouve notre président plus ou moins sénile, alors que sa collection de documents classifiés est mise au jour dans un barrage de révélations.
La première est l'incroyable foi des médias grand public dans la stupidité de l'opinion publique américaine. Y a-t-il quelque chose de plus convaincant pour mesurer la stupidité de ces médias ?
Joe "My Corvette's in the Garage" Biden hurle d'indignité lorsque Donald Trump est surpris avec des dossiers classifiés à Mar-a-Lago, sa propriété de Floride. Puis notre président en exercice est découvert avec ses propres cachettes de documents secrets ici, là, et partout.
Oh, mais c'est très différent, lit-on. Pas du tout la même chose, car Trump n'a pas coopéré avec les Archives nationales et le ministère de la Justice, alors que Biden, si.
Comme l'homme de Scranton se plaît maintenant à le dire, "Je n'ai rien fait de mal. Il n'y a rien de plus à dire." Le New York Times, les autres grands quotidiens et les diffuseurs d'entreprise rapportent tous cela avec un visage impassible : l'affaire Trump est une chose, celle de Biden en est une autre.
Nous sommes donc invités à penser que la possession illégale de documents classifiés n'est pas en cause. Même pas besoin d'y réfléchir. Tout est une question d'attitude.
Si vous affichez la bonne attitude lorsque vous êtes pris en flagrant délit d'acte criminel, vous pouvez vous tenir là, et clamer votre innocence, insister sur le fait que le garage où les documents classifiés ont été trouvés est fermé à clé parce que votre Corvette y est garée, et les médias iront jusqu'au bout pour vous.
Ils ne peuvent pas être stupides au point de penser que leurs lecteurs et téléspectateurs le sont aussi, me suis-je dit depuis que CBS News a ouvert la porte à cette farce d'absurdités il y a quelques semaines. Comme j'avais tort.
Nous avons un dossier de 50 ans attestant de la stupidité de Joe Biden. Nous savons maintenant, au cas où nous ne le savions pas déjà, qu'il n'y a pas de limite à la défense de sa stupidité par nos médias grand public.
Encore plus d'autoritarisme post-Trump
À mon sens, il s'agit d'une autre caractéristique de l'autoritarisme libéral qui a émergé après la victoire surprise de Trump sur Hillary Clinton lors de l'élection présidentielle de 2016. Depuis lors, c'est "un bleu, quel qu'il soit" [les “bleus” pour les démocrates, les “rouges” pour les conservateurs]: Biden est notre homme quoi qu'il arrive - dans ce cas, peu importe sa bêtise.
Les principaux journalistes à avoir couvert l'infraction juridique de Biden pour le Times méritent une brève mention. Michael Shear, Katie Rogers et Charlie Savage ne sont rien de plus que des vendeurs. Ils se porteraient mieux - et nous aussi - s'ils oubliaient le journalisme, pour vendre des voitures d'occasion dans un grand terrain de la banlieue du New Jersey.
Joe Biden et Donald Trump, le président en exercice et son prédécesseur immédiat, font désormais l'objet d'enquêtes menées par des conseillers spéciaux distincts, désignés par le ministère de la Justice.
Cette réalité surprenante est assortie de nombreuses vérités. Que les Américains en soient conscients ou non, et j'ai l'impression que peu le sont, ils sont maintenant confrontés au degré de secret qui entoure les activités de notre gouvernement.
Et c'est la deuxième raison pour laquelle j'aime ces embrouilles de documents classifiés. Il y a là un paradoxe : Il est illégal pour un fonctionnaire de posséder des documents classifiés sans autorisation, et il est parfaitement normal de le faire, compte tenu du degré de confidentialité sur lequel repose la politique américaine - notamment, mais pas seulement, la politique étrangère.
La culture de la dissimulation
Le moment est propice, du moins (et peut-être seulement) en théorie. Si les Américains peuvent commencer à accepter la culture de la dissimulation qui a envahi Washington pendant des décennies tel le kudzu sur un poteau électrique de Caroline du Sud, ils peuvent aussi commencer à réaffirmer le contrôle démocratique sur les institutions gouvernementales qui opèrent désormais en secret, dans une parfaite clandestinité, et donc dans l'indifférence aux souhaits et aux préférences de la population.
Pat Moynihan, le regretté sénateur de New York, a été parmi les premiers à affirmer que le secret à Washington était en passe de devenir un facteur de crise pour la démocratie américaine.
Dans Secrecy, son étude de 1998 sur le phénomène, Moynihan a parlé de "centres du secret" au sein du gouvernement américain, de "la routinisation du secret", de "la dissimulation comme modus vivendi".
Un organisme appelé Information Security Oversight Office - un secret en soi pour la plupart d'entre nous - recense chaque année le nombre de secrets créés par des organismes gouvernementaux au cours des 12 mois précédents.
L'ISOO a été fondé sous l'administration Carter, en 1978. Il est intéressant de noter que son prédécesseur, l'Interagency Classification Review Committee, datait de l'administration Nixon, et était composé de fonctionnaires du département de la défense, du département d'État, du département de la justice, et de la Central Intelligence Agency.
Cette liste permet d'identifier les institutions gouvernementales qui gardaient les secrets les plus sensibles: celles qui géraient la politique étrangère et le complexe militaro-industriel, les services de renseignement et les opérations secrètes, ainsi que les services de police nationaux.
Comme l'a expliqué M. Moynihan, l'ISOO recense essentiellement les documents classifiés au cours d'une année donnée. Il n'est pas exagéré de dire que ce nombre a augmenté de manière exponentielle d'année en année, sans interruption, depuis l'époque de Moynihan.
À ce stade, il est communément admis par ceux qui y prêtent attention que seule une infime partie de ce que notre gouvernement décide et fait nous est accessible. C'est en tout cas ce que je pense depuis des années.
Démocratie et structures du secret
Dans quelle mesure le secret est-il considéré comme essentiel au bon fonctionnement de la politique ? Personne ne connaît la réponse à cette question avec plus d'acuité, et à un coût aussi élevé, que Julian Assange.
Le fondateur de WikiLeaks a reconnu très tôt que les structures de secret infiniment complexes de notre culture politique sont "la voie de la civilisation", comme il l'a dit un jour. Et il a compris que ces structures doivent être percées à jour si l'on veut que des formes authentiques de démocratie survivent et prospèrent.
C'est pour son dévouement à ce dernier objectif qu'Assange est maintenant derrière les barreaux.
Donald Trump a récupéré des documents classifiés. Joe Biden l'a fait aussi - et pendant de nombreuses années en tant que sénateur, puis en tant que vice-président de Barack Obama. Le studieux Obama a-t-il fait de même ? Bush I (qui avait été directeur de la C.I.A., ne l'oublions pas) et Bush II l'ont-ils fait ?
Dick Cheney, Donald Rumsfeld et les bureaucrates de haut rang de chaque administration l'ont-ils fait ? Dans le cas de Bill et Hillary Clinton, je ne vais même pas poser la question.
La pratique ne m'émeut pas beaucoup, en vérité. Ce qui me trouble, c'est la mesure dans laquelle le secret constitue la norme et, plus précisément, comment le secret rend possible la pratique des impérialistes qui dirigent nos politiques étrangères hégémoniques.
L'Amérique, comme l'a souligné un commentateur avisé il n'y a pas si longtemps, gère désormais un empire mondial dont très peu de ses propres citoyens sont conscients.
Outre les "nous coopérons" - "nous nous sommes fait prendre", traduction - "nous sommes transparents", est l'autre formule que l'administration Biden emploie à envi, et que les médias répètent sans qu'aucun journaliste ne remette en question sa véracité.
La rétention des faits, jusqu'à ce que CBS News les découvre, ne passe pas pour de la transparence. Toutes les excuses farfelues - ma préférée étant "le garage est fermé" - ne sont pas synonymes de transparence. Elles témoignent de la dissimulation.
La plus grave de ces contre-vérités, et elles le sont à première vue, est que Biden ne savait pas qu'il y avait des dossiers classifiés dans sa maison de Wilmington, dans le Delaware, ou dans son bureau privé de Washington, ou dans son garage, ou dans "une zone de stockage adjacente au garage", quoi que cela puisse vouloir dire.
Voici ma réponse à cela : si ce menteur en goguette ne savait pas qu'il était en possession de documents classifiés, et dans certains cas depuis plus de dix ans, il ne peut tout simplement pas être considéré comme qualifié pour être président ou occuper une fonction publique lui permettant de bénéficier de tels accès.
En attaquant Trump après la perquisition du FBI dans la propriété de Mar-a-Lago, Joe Biden a déclaré que l'ancien président était "irresponsable". Raconte moi ça, Joe. Raconte-nous tout, toi dont les secrets pourraient bien surpasser ceux de quiconque occupe actuellement une fonction publique.
Une dernière question : qui a révélé la présence de documents classifiés dans la résidence et le bureau privé de Joe Biden ?
Connaissant les divisions constatées chez les démocrates quant à l'intention de Biden de briguer un second mandat l'année prochaine, s'agit-il d'une opération subterfuge menée par ceux qui craignent pour son déclin mental, et veulent le mettre définitivement hors-jeu ?
* Patrick Lawrence, correspondant à l'étranger pendant de nombreuses années, notamment pour l'International Herald Tribune, est chroniqueur, essayiste, auteur et conférencier. Son dernier livre est Time No Longer : Americans After the American Century. Son compte Twitter, @thefloutist, a été définitivement censuré. Son site web est Patrick Lawrence. Soutenez son travail via son site Patreon. Son site web est Patrick Lawrence. Soutenez son travail via son site Patreon.
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