👁🗨 Patrick Lawrence : Trump et l'affaire "Stormy" du Deep State
Il importe peu à l'État profond de savoir comment une grande part des citoyens concernés va percevoir l'action. La priorité est désormais claire: il faut éliminer Trump en tant que force politique.
👁🗨 Trump et l’affaire "Stormy" du Deep State
Par Patrick Lawrence / Consortium News, le 21 mars 2023
Nous continuons à nous retrouver face à l'épave des années du Russiagate, lorsque le 45e président a menacé l'appareil de sécurité nationale pour, peut-être, la première fois depuis que Kennedy a renvoyé Allen Dulles en tant que directeur de la C.I.A. en 1961.
L'autre soir, nous sommes tombés sur une vidéo de Donald Trump qui, dès les premières minutes, a suscité un véritable délire. L'homme qui a été notre 45e président et qui sera notre 47e s'en prend à "l'ensemble de l'establishment néoconservateur mondialiste" et aux "Deep Staters qui chassent des monstres et des fantômes à l'étranger [et] nous entraînent perpétuellement dans des guerres sans fin". Trump nous dit maintenant qu'il veut une révision majeure du Pentagone, de l'appareil de sécurité nationale et des agences de renseignement.
"Le président Biden nous a rapproché de la Troisième Guerre mondiale comme jamais auparavant", affirme M. Trump. " Chaque jour que cette guerre par procuration en Ukraine se poursuit, nous sommes au bord d'une guerre mondiale. Nous devons être absolument clairs sur le fait que notre objectif est d'obtenir immédiatement une cessation totale des hostilités. Nous avons besoin de la paix sans délai."
Et ensuite :
"Nous devons achever le processus de réévaluation fondamentale de l'objectif et de la mission de l'OTAN. Nos responsables de la politique étrangère continuent d'essayer d'entraîner le monde tout entier dans un conflit avec une Russie dotée de l'arme nucléaire, en se basant sur le mensonge selon lequel la Russie représente notre plus grande menace."
Puis, après une pause théâtrale :
"La plus grande menace pour la civilisation occidentale aujourd'hui n'est pas la Russie. Sans doute plus que toute autre chose, la menace vient de nous."
Sans vouloir simplifier indûment les choses, vous savez maintenant pourquoi le bureau du procureur de New York est sur le point d'émettre un mandat d'arrêt contre M. Trump pour des faits délictueux. Le procureur de Manhattan, Alvin Bragg, sert dans ce cas de petit appendice à l'État profond. Et la situation de 2016 est identique à celle d'aujourd'hui : l'État profond ne veut pas que l'homme tenant des propos tels que cités ci-dessus devienne président et commandant en chef.
Newsweek a mis à disposition un extrait d'une minute de cette vidéo, qui a été enregistrée jeudi dernier, dans ce reportage d'ILA Slisco. Breitbart, si vous souhaitez vous y plonger, propose une séquence un peu plus longue ici. Truth Social, une plateforme de réseaux sociaux appartenant à Trump, propose l'intégralité de la vidéo. Mais pour y accéder, il faut être membre de ce qu'on appelle "Truth" [Vérité]. Je ne suis pas moi-même un adepte des organisations portant ce genre de nom.
En écoutant les premières minutes de la vidéo de jeudi, on est presque prêt à voter pour Trump s'il remporte à nouveau l'investiture du Parti républicain. Mais très vite, The Donald tombe dans l'excès, comme à son habitude. Très vite, le candidat anti-guerre, anti-OTAN et anti-Russie parle de "l'effondrement de la famille nucléaire" et d'autres maux sociaux :
"Ce sont les marxistes qui voudraient que nous devenions une nation sans Dieu, adorant l'autel de la race, du sexe et de l'environnement.”
Pour mémoire, je ne pense pas qu'une personnalité publique américaine à même de tenir ce genre de discours paranoïaque puisse dépasser le niveau de sous-assistant du troisième conseiller municipal d'une ville ne comptant pas plus de 600 habitants.
Préparer le terrain pour 2024
Mais le côté John Birchy* de Donald Trump n'est pas la question, alors qu'il est en attente de l'acte d'accusation et du mandat d'arrêt de M. Bragg. Il s'agit de le retirer du processus politique et peut-être même de la circulation pour la campagne de 2024. Telle est l'intention de la direction du Parti démocrate - truffée de connivents de l'État profond - depuis que Trump a déclaré ses positions en matière de politique étrangère lors de la campagne électorale de 2016.
Il est encore plus urgent pour les Démocrates et l'appareil de sécurité nationale d'écarter Trump de la course présidentielle de 2024, étant donné la détérioration mentale choquante de Joey Biden, déjà depuis l'entrée en fonction de ce dernier il y a deux ans. Avez-vous vu la vidéo de Biden lors de sa rencontre avec Leo Varadkar, le Taoiseach [en irlandais]: “chef du gouvernement” irlandais, dans le bureau ovale jeudi dernier ? Remarquez son attitude. Écoutez-le. Des cartes de repérage pour se rappeler que c'est la Saint-Patrick ? Il n'est pas étonnant que les agents de la Maison-Blanche, dont les oreilles sont câblées, aient frénétiquement chassé les journalistes de la pièce au moment des questions. Biden est cliniquement à bout à ce stade.
Le dossier du procureur, comme cela a été largement rapporté, concerne une star du porno nommée Stormy Daniels, qui affirme avoir eu une liaison dans une chambre d'hôtel avec Trump en 2006. L'avocat de Trump, Michael Cohen, semble avoir versé à Daniels 130 000 dollars en guise d'argent de poche à l'approche des élections de novembre 2016. Trump aurait payé à Cohen le même montant lorsqu'il a été facturé plus tard pour des frais juridiques.
L'affaire Bragg repose sur des allégations selon lesquelles Trump aurait dissimulé un paiement d'argent occulte qui équivaut à une violation de la loi électorale.
Je ne connais pas les fondements juridiques des allégations de Bragg, mais ils me semblent fragiles. La Commission électorale fédérale et le Bureau des procureurs fédéraux de New York ont examiné l'affaire plus tôt et n'y ont pas vu suffisamment d'éléments pour s'en préoccuper. Les avocats de ce dernier étaient en colère, vous vous en souvenez peut-être, avant que le bureau ne se retire.
Je ne les blâme pas. Un homme marié paie un partenaire de lit qui le fait chanter pour qu'il se taise. Se passe-t-il quelque chose de nouveau sous le soleil, racontez- moi en quoi cela peut être considéré par un tribunal comme une ingérence dans les élections ? Cette affaire est bien plus minable qu'elle n'est intéressante, importante ou d'une quelconque conséquence.
Permettez-moi d'exprimer mon point de vue sous un autre angle. Je me fiche éperdument de savoir si Donald Trump et Stormy Daniels ont eu des relations intimes il y a 17 ans ou si elle lui a soutiré de l'argent, et les cas de ce niveau d'"ingérence électorale" dans la politique américaine sont tout simplement trop nombreux pour être cités, en particulier lorsqu'ils impliquent des démocrates.
Oups ! Me voilà tombé dans le piège du je-m'en-foutisme. À votre avis, quel degré d'ingérence électorale peut-on attribuer à juste titre aux démocrates, à la Maison-Blanche d'Obama, au ministère de la Justice d'Obama et au Federal Bureau of Investigation après la fuite des courriels des démocrates en juillet 2016 et, avec la coopération enthousiaste de la presse, tous ces groupes ont lancé une campagne de désinformation acharnée et très médiatique, impliquant dans de nombreux cas des abus de pouvoir, pour salir Trump en le faisant passer pour une sorte de marionnette du Kremlin ?
Imaginez un peu la situation. Que Trump ait ou non couché avec une star du porno en 2006, les démocrates l'ont certainement fait dix ans plus tard. À l'approche des élections de 2016, ils ne se lassaient pas de la saine Stormy. Aujourd'hui, nous constatons qu'ils continuent à le faire. C'est ce qui est important dans l'affaire Stormy Daniels. C'est la raison pour laquelle le procureur serait sur le point d'émettre un acte d'accusation.
Et ceci, chers lecteurs, est un abus de pouvoir en temps réel. Qui est le plus sordide - Donald Trump, Stormy ou Alvin Bragg ? Désolé, je ne devrais pas mettre les lecteurs face à un choix aussi difficile. Mon vote : Bragg, et de loin.
Naufrage en vue
Nous continuons à être confrontés à tous les résidus des années du Russiagate, lorsque la plate-forme de politique étrangère de Trump a exposé l'imperméabilité de l'État profond au pouvoir politique, peut-être pour la première fois depuis que le président John Kennedy a limogé Allen Dulles de son poste de directeur de la C.I.A. en 1961. Nous constatons aujourd'hui que la lutte de l'État permanent pour défendre son statut pérenne et son invisibilité a détruit une très grande partie de notre sphère publique et des institutions qui sont censées fonctionner en son sein.
L'anarchie par le biais de la "loi", et nous avons besoin des guillemets maintenant, malheureusement. Et ils sont nombreux
Vous savez, nous aurions dû prendre conscience de notre avenir lorsque la C.I.A. a corrompu les élections italiennes en 1948, ou lorsque les coups d'État se sont succédé et que Mohammad Mossadegh a été destitué de son poste de premier ministre de l'Iran cinq ans plus tard. Ces gens n'ont que faire du processus démocratique ou des institutions qui l'accompagnent, et il en sera inévitablement de même lorsqu'ils ramèneront chez eux leur cortège de désordres.
Jimmy Dore a soulevé quelques points controversés lors d'une émission diffusée sur Internet l'autre jour. Premièrement, lorsque le procureur Bragg signifiera à Trump - apparemment dans le courant de la semaine, bien qu'il puisse y avoir des retards, lit-on maintenant - nous saurons que notre système juridique est un appendice de l'oligarchie. Deuxièmement, Trump sera en passe de remporter une victoire éclatante à la suite de cette parodie.
Sur le premier point, Dore a parfaitement raison, bien que la corruption de nos procureurs, juges et tribunaux soit évidente pour ceux d'entre nous qui y sont attentifs depuis des années. Je suis moins convaincu par une victoire de Trump l'année prochaine, mais - j'irai jusqu'à dire - sa campagne sera dynamisée lorsqu'il pourra se présenter comme un martyr des machinations de l'État profond.
Je n'aime pas l'idée que Donald Trump soit un martyr de quoi que ce soit. Ce n'est pas non plus l'idée que je me fais d'un héros, en dépit des positions solides en matière de politique étrangère citées au début de cet article.
Mais il y a là un calcul intéressant à faire.
Vendredi dernier, NBC News a relaté que l'administration Biden avait ordonné aux forces de l'ordre locales, étatiques et fédérales de se préparer à des manifestations et à d'éventuelles violences après l'annonce de l'inculpation de M. Trump. Depuis, la chaîne a modifié sa Une et son texte pour ne plus mentionner que les ordres émanent de l'administration, mais qu'importe : c'est ainsi que fonctionnent les médias américains de nos jours. Comment peut-on qualifier cela? De l'édition furtive ?
Nous pouvons supposer qu'Alvin Bragg sait parfaitement que ce qu'il s'apprête à faire divisera encore davantage la nation - si tant est qu'il y ait encore matière à la diviser. En toute connaissance de cause et apparemment dans l'indifférence la plus totale. Une priorité est désormais claire : l'État profond, en poursuivant Donald Trump, ne se préoccupe pas de ce qu'une grande partie des Américains peut penser ; il s'agit d'éliminer Trump en tant que force politique, quelle que soit la façon dont les citoyens concernés perçoivent son action.
Par conséquent, tous les poulains de l'État profond d'après 1945 rentrent au bercail pour s'y épanouir. Sympathique, non ? Quoi que vous puissiez penser de Donald Trump, il n'en fait pas partie, pas du tout.
* John Birch était un capitaine du renseignement militaire de l'armée de l'air des États-Unis, un agent de l'OSS en Chine pendant la Seconde Guerre mondiale, ainsi qu'un ancien ministre baptiste et missionnaire.
* Patrick Lawrence, correspondant à l'étranger pendant de nombreuses années, principalement pour l'International Herald Tribune, est critique des médias, essayiste, auteur et conférencier. Son dernier ouvrage s'intitule Time No Longer : Americans After the American Century. Son site web est Patrick Lawrence. Soutenez son travail via son site Patreon. Son compte Twitter, @thefloutist, a été définitivement censuré sans explication.
https://scheerpost.com/2023/03/21/patrick-lawrence-trump-the-stormy-deep-state/