👁🗨 Pizza, Gaza & famine made by Israël
La famine peut tuer plus de Palestiniens que le déluge d'armes d'Israël, épitaphe honteuse de la communauté internationale - soutien d’Israël qui affame un peuple pour qu'il capitule & se soumette.
👁🗨 Pizza, Gaza & famine made by Israël
Par Andrew Mitrovica, le 23 janvier 2024
La semaine dernière, je suis tombé sur un certain nombre d'images qui, mises bout à bout, en disent long sur l'ampleur des crimes commis par Israël à Gaza.
Il n'est pas fréquent qu'un journaliste fasse référence à une pizza au beau milieu d'une famine provoquée par une nation malveillante.
Mais par les temps qui courent et la décence qui s'impose, Israël, de son propre aveu, a toujours eu l'intention d'empêcher l’acheminement des vivres et de l'eau vers l'enclave dévastée et aux enfants, aux femmes et aux hommes qui, pour l'instant, la peuplent, constituant ainsi la caractéristique principale de son blocus total de la bande de Gaza.
À la lumière des outrages que les Palestiniens ont endurés et continueront d'endurer alors qu'Israël s'emploie à anéantir Gaza avec une férocité implacable, la pizza pourrait sembler un point de départ dérisoire, voire de mauvais goût, pour une chronique qui invoquera sans équivoque deux concepts : le génocide et la famine.
Pourtant, la semaine dernière, je suis tombé sur un certain nombre d'images choquantes qui, mises bout à bout, en disent long sur l'ampleur insensée des crimes dont nous sommes témoins à Gaza et ailleurs, ainsi que sur les situations diverses que vivent les cibles et les auteurs de ces horreurs.
La première photo montre deux jeunes soldats israéliens, chacun portant une tour de cartons de pizzas - apparemment offertes par une célèbre chaîne de pizzerias. Les soldats, vêtus de kaki, sont souriants. Ils sont tout excités. Le slogan marketing figurant sur les boîtes est le suivant : “Pour l'amour de la pizza”.
Une image complémentaire publiée sur Instagram montre un soldat israélien chauve et corpulent, une arme de gros calibre en bandoulière. Son bras droit repose sur une pile de pizzas gratuites livrées par la même filiale israélienne d'une célèbre chaîne de pizzas américaine. Un petit sourire se dessine sur son visage barbu et à lunettes.
Les émojis en forme de cœur sur les deux clichés sont destinés à exprimer, je suppose, la gratitude pour le repas offert par ce fast-food.
Les soldats israéliens ont l'air heureux. Ils seront repus. Si les soldats sont préoccupés ou perturbés par la folie meurtrière qui s'empare de la région, ce n'est en tout cas pas ce qui ressort du cliché pris par un téléphone portable.
Ils sont contents. Un air surréaliste de normalité règne au milieu de l'inhumanité omniprésente. Par bonheur, le dîner est servi.
D'autres photos, bien sûr, racontent une histoire bien différente, et infiniment plus cruelle.
Un groupe de garçons et de filles palestiniens se presse contre une porte en fer dans un secteur de la bande de Gaza décimée. Ils portent des pulls et des sweats à capuche pour se protéger du froid hivernal.
Ils se sont portés volontaires pour trouver nourriture et eau pour leurs familles. Ils tiennent à la main des casseroles et une passoire.
Une des fillettes sort du lot. Son bras tendu passe entre les barres noires et épaisses de la grille. Elle tient un bol en métal argenté. La fillette semble crier à quelqu'un au loin pour attirer l'attention sur son bol vide.
La rangée d'enfants à proximité suit le mouvement frénétiquement, obligés d'implorer de l'aide, eux aussi.
Des millions de Palestiniens n'imploreront personne. Ces jours-ci, ils prennent ce qu'ils peuvent pour survivre.
Il y a deux semaines, dans les ruines apocalyptiques d'un quartier à l'ouest de la ville de Gaza, des dizaines d'hommes et de garçons palestiniens se sont rués sur un camion abandonné comme des abeilles sur une ruche, en quête de farine et de conserves.
Gaza est en proie à la faim, au manque et au désespoir. Les magasins ont été détruits. Les maisons ont été détruites. Les cimetières ont été détruits. Les écoles ont été détruites. Les mosquées ont été détruites. Les hôpitaux ont été réduits à néant.
L'espoir a été anéanti.
Le génocide qui se déroule jour après jour à Gaza prend deux formes. L'une est bruyante et expéditive. L'autre est silencieuse et ralentie. Mais les deux sont mortelles et, malgré les démentis prévisibles des capitales occidentales prévisibles, sont délibérées.
Le déferlement de bombes et de drones par Israël sur Gaza, qui a tué des milliers de Palestiniens et en a mutilé des milliers d'autres, a pour but de tuer et de mutiler - sans délai.
La destruction massive, brutale et immédiate de la bande de Gaza a été conçue à dessein. Elle a pour but de terroriser. Elle a pour but d'éradiquer. Elle a pour but de réduire Gaza - tout Gaza - en poussière, stérile et inhabitable.
Quiconque, où qu'il se trouve, prétendant le contraire fait l'apologie d'un gouvernement israélien qui a clairement affiché son objectif de nettoyage ethnique de Gaza, à maintes reprises ... et ouvertement.
Les apologistes préfèrent le confort de l'aveuglement aux désagréments de l'honnêteté.
Un génocide lent et silencieux est en train de se produire au-delà des scènes “bang-bang” qui dominent sur les écrans des chaînes d'information occidentales.
Il se produit dans les villages de tentes précaires qui abritent la légion de Palestiniens sans abri contraints de se déplacer - à pied et à dos de mulet - d'un bout à l'autre de la bande de Gaza assiégée.
C'est là que, selon les Nations unies, la famine se propage à une “vitesse fulgurante”.
Martin Griffiths, sous-secrétaire général des Nations unies aux affaires humanitaires et coordinateur des secours d'urgence, a récemment déclaré à Christiane Amanpour, sur CNN, que la “grande majorité” des 400 000 Palestiniens considérés par les agences des Nations unies comme risquant de mourir de faim “sont en réalité en situation de famine, et pas seulement en danger de famine”.
Les famines sont dues à la combinaison des caprices impitoyables de la nature et des conséquences inévitables de l’offensive.
La famine qui frappe Gaza n'est pas une “catastrophe naturelle”, mais le résultat direct et orchestré des graves actions et de l'inaction d'Israël.
La plupart des victimes du génocide bruyant et rapide d'Israël sont des enfants. Son génocide lent et silencieux est voué à faire bien plus de victimes innocentes. Les 350 000 enfants de Gaza âgés de moins de cinq ans sont particulièrement vulnérables.
“Les enfants qui risquent fort de mourir de malnutrition et de maladie ont désespérément besoin de traitements médicaux, d'eau potable et de services d'assainissement, mais les conditions sur le terrain ne nous permettent pas d'atteindre en toute sécurité les enfants et familles”,
a déclaré Catherine Russell, directrice générale de l'UNICEF.
Cette famine d’origine humaine est, d'un point de vue juridique ou moral, un crime de guerre flagrant.
“Le gouvernement israélien se sert de la famine des civils comme stratégie de guerre dans la bande de Gaza occupée, ce qui constitue un crime de guerre”,
a averti Human Rights Watch dans un rapport publié à la mi-décembre.
"Les forces israéliennes bloquent délibérément l'acheminement de l'eau, de la nourriture et du carburant, tout en faisant délibérément obstacle à l'aide humanitaire, en rasant apparemment des zones agricoles et privant la population civile d'objets indispensables à sa survie.”
La famine métastasée, combinée à l'épidémie certaine, est susceptible de tuer plus de Palestiniens que le déluge incessant de bombes et de drones d'Israël.
Ce sera l'épitaphe honteuse de la communauté internationale : plutôt qu’endiguer une famine, elle a soutenu Israël pendant que son “allié stratégique” essaie d'affamer les Palestiniens pour qu'ils capitulent et se soumettent.
Honte à eux. Honte à eux tous.
* Andrew Mitrovica est un chroniqueur d'Al Jazeera basé à Toronto.
https://www.aljazeera.com/opinions/2024/1/23/pizza-gaza-and-an-israeli-made-famine