đâđš Pompeo : Un monstre qui tue des monstres Ă l'Ă©tranger
Pompeo, honorable comme les assassins de CĂ©sar, fait la cour aux mafieux pour 2024. Il a trahi la Constitution au profit d'un pouvoir exĂ©cutif illimitĂ©. MĂ©fiez-vous de sa quĂȘte de la Maison Blanche.
đâđš Pompeo : Un monstre qui tue des monstres Ă l'Ă©tranger
Par Bruce Fein, Special to Consortium News, le 30 janvier 2023
Bruce Fein passe en revue le nouveau livre de l'ancien secrĂ©taire d'Ătat amĂ©ricain, âNever Give an Inch : Fighting for the America I Loveâ.
Mike Pompeo se pavane dans le panthéon des meilleurs et des plus brillants concepteurs de la débùcle de la guerre du Vietnam, alimentée par la théorie contre-historique des dominos. Il est sorti premier de sa classe à West Point, diplÎmé de la faculté de droit de Harvard, et a été rédacteur en chef de la prestigieuse Harvard Law Review. Il occupe un niveau de compétence intellectuel supérieur à celui de son ancien patron, le président Donald Trump. Mais comme Jules César a dit de Cassius : "Il pense trop ; de tels hommes sont dangereux."
Pompeo surgit comme Alexandre le Grand sur Bucéphale dans son nouveau livre, Never Give an Inch : Fighting for America I Love, pour abattre les méchants, c'est-à -dire la Chine majoritairement communiste, l'Iran, le Venezuela et les terroristes islamiques internationaux.
M. Pompeo, ancien secrĂ©taire d'Ătat et ancien directeur de la CIA sous la prĂ©sidence de Donald Trump, et ancien membre du CongrĂšs (2010-2016) sous la prĂ©sidence de Barak Obama, s'attaque Ă ses ennemis, rĂ©els ou imaginaires, avec tout le zĂšle et la truculence du grand inquisiteur espagnol Tomas de Torquemada. Il voit le monde en couleurs primaires sans l'Ă©quilibre aristotĂ©licien du clair-obscur. "Vous ĂȘtes soit avec nous, soit contre nous", pour reprendre les mots du dictateur fasciste italien Benito Mussolini.
Pompeo est un chrétien dévot et évangélique qui professe s'inspirer de Dieu et de la Bible. Mais ne retenez pas votre souffle en attendant le livre d'Isaïe : "Ils briseront leurs épées pour en faire des socs de charrue, et leurs lances pour en faire des serpes ; on ne lÚvera plus l'épée nation contre nation, et on n'apprendra plus la guerre." Ne vous attendez pas non plus à rencontrer le Sermon sur la montagne de Jésus de Nazareth (Matthieu 5, 39) : "Mais je vous dis de ne pas résister au mal ; mais si quelqu'un te frappe sur la joue droite, tends-lui aussi l'autre."
La doctrine Pompeo va comme un gant à la définition de la diplomatie de Will Rogers : "l'art de dire 'bon chien' jusqu'à tomber sur un os." Pompeo savoure l'idée d'attendre une attaque réelle et imminente avant de pulvériser des nations ou des acteurs non étatiques "pas encore coupables" d'agression.
Il se fait le champion de l'abattage de l'ennemi perçu comme tel, sur la base de spĂ©culations sur de futures hostilitĂ©s nĂ©es d'un sectarisme rappelant la certitude du gĂ©nĂ©ral John DeWitt que les AmĂ©ricains d'origine japonaise n'Ă©taient "pas encore coupables" de trahison au lendemain de Pearl Harbor, parce qu'ils prĂ©sentaient tous les signes de l'innocence : "Le fait mĂȘme qu'aucun sabotage n'ait eu lieu jusqu'Ă prĂ©sent est une indication troublante et confirmante qu'une telle action sera entreprise."
Il n'a aucune patience pour le discours du 4 juillet 1821 du secrĂ©taire d'Ătat John Quincy Adams au CongrĂšs, renonçant Ă aller Ă l'Ă©tranger Ă la recherche de monstres Ă dĂ©truire pour prĂ©server la libertĂ© et la marche de l'esprit comme la gloire de la nation chez elle. Dans son monde hobbesien, la seule voie sĂ»re est la guerre prĂ©ventive partout jusqu'Ă ce que tous les ennemis hypothĂ©tiques des Ătats-Unis soient vaincus.
Pompeo trahit une ignorance choquante de la Constitution qu'il a juré à plusieurs reprises de soutenir et de défendre malgré ses impressionnantes références juridiques. L'article I de la Constitution confÚre au CongrÚs l'autorité constitutionnelle exclusive de déclarer la guerre, de réglementer le commerce extérieur, et de sanctionner les violations du droit international. Les auteurs de la Constitution étaient catégoriques et unanimes quant au pouvoir de guerre :
Le président George Washington, qui a présidé la Convention constitutionnelle, a conseillé :
"La Constitution confĂšre au CongrĂšs le pouvoir de dĂ©clarer la guerre ; par consĂ©quent, aucune expĂ©dition offensive d'importance ne peut ĂȘtre entreprise avant qu'il n'ait dĂ©libĂ©rĂ© sur le sujet et autorisĂ© une telle mesure."
James Madison, pÚre de la Constitution, a développé,
"Dans aucune partie de la Constitution on ne trouve plus de sagesse que dans la clause qui confie la question de la guerre ou de la paix à la législature, et non au département exécutif."
James Wilson, dĂ©lĂ©guĂ© Ă la Convention constitutionnelle et plus tard juge Ă la Cour suprĂȘme des Ătats-Unis, ajouta ,
"Ce systÚme ne nous précipitera pas dans la guerre ; il est calculé pour nous en prémunir. Il ne sera pas au pouvoir d'un seul homme, ou d'un groupe d'hommes, de nous entraßner dans une telle détresse ; car le pouvoir important de déclarer la guerre est dévolu à la législature dans son ensemble."
Alexander Hamilton, délégué à la Convention constitutionnelle et ardent défenseur d'une présidence musclée, avait compris que "la législature peut seule déclarer la guerre, peut seule faire passer effectivement la nation d'un état de paix à un état d'hostilité" et ainsi
"[i]l est de la compétence et du devoir de l'exécutif de préserver à la nation les bienfaits de la paix. Seule la législature peut les interrompre en plaçant la nation dans un état de guerre".
Pourtant, Pompeo approuve tacitement des guerres prĂ©sidentielles illimitĂ©es et inconstitutionnelles qui ne sont ni dĂ©clarĂ©es par le CongrĂšs, ni menĂ©es en Ă©tat de lĂ©gitime dĂ©fense. Ni en tant que membre du CongrĂšs, ni en tant que directeur de la C.I.A., ni en tant que secrĂ©taire d'Ătat, Pompeo n'a jamais protestĂ© contre les guerres prĂ©sidentielles inconstitutionnelles en Afghanistan, en Irak, en Libye, en Somalie, au YĂ©men, en Syrie, et contre les acteurs non Ă©tatiques Al-QaĂŻda et ISIS. Il pense que le prĂ©sident est couronnĂ© d'une autoritĂ© illimitĂ©e, entre autres, pour dĂ©cider si et quand attaquer la Chine ou l'Iran avec des armes nuclĂ©aires ou conventionnelles.
Nier la Constitution
Rien de tout cela n'est dit explicitement. Mais il est implicite en ceci que le livre exclut la Constitution ou le CongrĂšs comme Ă©tant pertinents pour la guerre ou la politique Ă©trangĂšre. En effet, ces deux institutions ne sont mĂȘme pas autorisĂ©es Ă faire leur apparition dans l'Ă©laboration et la mise en Ćuvre de la politique de sĂ©curitĂ© nationale.
M. Pompeo dĂ©nonce une prĂ©tendue rĂ©action excessive Ă l'assassinat par l'Arabie saoudite de Jamal Khashoggi, rĂ©sident permanent des Ătats-Unis et journaliste au Washington Post. La C.I.A. a conclu avec un haut degrĂ© de confiance que le prince hĂ©ritier Mohammed bin Salam (MBS) a ordonnĂ© le dĂ©membrement macabre de Khashoggi dans le consulat saoudien d'Istanbul.
Pompeo qualifie Khashoggi d'"activiste", comme si ce terme était péjoratif. Sam Adams était un activiste, Paul Revere était un activiste, les participants à la Boston Tea Party étaient des activistes, les signataires de la Déclaration d'indépendance qui ont risqué et donné la derniÚre mesure de leur dévouement étaient des activistes. L'Amérique ne serait pas une nation si elle n'était pas composée des militants que Pompeo méprise. Comme l'a souligné le juge Louis D. Brandeis dans l'affaire Whitney contre Californie (1927), "la plus grande menace pour la liberté est un peuple inerte".
L'AmĂ©rique pour laquelle Pompeo se bat n'est pas l'AmĂ©rique issue de Lexington et de Concord, dont le souffle a Ă©tĂ© entendu dans le monde entier. Elle est une AmĂ©rique indistincte de la monarchie oĂč le roi ne peut faire aucun mal, reprĂ©sentant une contre-rĂ©volution du 4 juillet 1776.
Pompeo approuve ce pouvoir présidentiel de jouer le rÎle de procureur, de juge, de jury et de bourreau pour exterminer toute personne sur la planÚte (y compris les citoyens américains qui ne se trouvent pas sur un champ de bataille) sur la base d'une intuition spéculative selon laquelle la victime pourrait devenir un danger pour la sécurité nationale. Son point de vue réfractaire fait écho à celui d'un de ses prédécesseurs, Henry Kissinger, qui avait rouspété auprÚs du président Gerald Ford en 1975 : "C'est un acte de folie et une humiliation nationale que d'avoir une loi interdisant au président d'ordonner un assassinat."
Pompeo héroïse les agents de la C.I.A. qui ont commis des actes de torture (un crime universel selon la Convention contre la torture) ou détruit des preuves incriminantes comme Jose Rodriguez.
M. Pompeo soutient tacitement l'espionnage sans mandat de chaque AmĂ©ricain par l'agence de sĂ©curitĂ© nationale, qui bafoue le droit d'ĂȘtre laissĂ© tranquille en vertu du quatriĂšme amendement. Il aurait Ă©tĂ© consternĂ© par la dĂ©nonciation par William Pitt l'Ancien du pouvoir monarchique illimitĂ© d'envahir les foyers :
"L'homme le plus pauvre peut, dans sa chaumiĂšre, dĂ©fier toutes les forces de la couronne. Elle peut ĂȘtre frĂȘle ; le toit peut trembler ; le vent peut la traverser ; la tempĂȘte peut entrer, la pluie peut entrer, mais le roi d'Angleterre ne peut pas entrer. Toutes ses forces n'osent pas franchir le seuil de ce logis en ruine."
Pompeo se moque du discours d'adieu de George Washington. Il mettait en garde contre les "attachements passionnĂ©s" ou "l'affection" envers toute nation. Mais Pompeo se pĂąme devant l'Arabie Saoudite et MBS. En ce qui concerne ce dernier, Pompeo s'inspire de l'ancien ambassadeur des Ătats-Unis aux Nations unies, Andrew Young, qui a fait l'Ă©loge de l'ayatollah fanatique iranien Khomeini, destinĂ© Ă ĂȘtre "saluĂ© comme un saint".
De mĂȘme, M. Pompeo se pĂąme devant MBS qui "mĂšne la plus grande rĂ©forme culturelle de l'histoire de la nation. Il s'avĂ©rera ĂȘtre l'une des figures les plus importantes de son temps, une figure vĂ©ritablement historique sur la scĂšne mondiale."
Mais le propre dĂ©partement d'Ătat de Pompeo a mis en accusation l'Arabie saoudite de MBS pour des violations flagrantes et en sĂ©rie des droits de l'homme en 2020, comme suit :
"[U]n assassinat illĂ©gal ; des exĂ©cutions pour des dĂ©lits non violents ; des disparitions forcĂ©es ; la torture et des cas de traitements cruels, inhumains ou dĂ©gradants de prisonniers et de dĂ©tenus par des agents du gouvernement ; des conditions de dĂ©tention difficiles et mettant la vie en danger ; des arrestations et dĂ©tentions arbitraires ; des prisonniers ou dĂ©tenus politiques ; de graves restrictions Ă la libertĂ© d'expression, Ă la presse et Ă l'Internet, notamment des menaces de violence ou des arrestations ou poursuites injustifiĂ©es Ă l'encontre de journalistes, la censure, le blocage de sites et le harcĂšlement et l'intimidation de dissidents saoudiens vivant Ă l'Ă©tranger ; des interfĂ©rences substantielles avec la libertĂ© de rĂ©union pacifique et la libertĂ© d'association ; des restrictions sĂ©vĂšres de la libertĂ© de religion ; des restrictions de la libertĂ© de mouvement ; l'incapacitĂ© des citoyens Ă choisir pacifiquement leur gouvernement par le biais d'Ă©lections libres et Ă©quitables ; la violence et la discrimination Ă l'Ă©gard des femmes, bien que de nouvelles initiatives en faveur des droits des femmes aient Ă©tĂ© mises en Ćuvre ; la traite des personnes ; la criminalisation de l'activitĂ© sexuelle consensuelle entre personnes du mĂȘme sexe ; et des restrictions de la libertĂ© d'association des travailleurs, notamment l'interdiction des syndicats et de la nĂ©gociation collective. "
L'irrespect de Pompeo pour l'Ătat de droit a Ă©tĂ© illustrĂ© par sa campagne cavaliĂšre en tant que secrĂ©taire d'Ătat en faveur de la rĂ©Ă©lection du prĂ©sident Donald Trump par le biais d'un discours enregistrĂ© diffusĂ© lors de la convention nationale rĂ©publicaine de 2020, en violation de l'interdiction pĂ©nale du Hatch Act.
Il ne dit pas un mot sur ce qui, Ă mon avis, Ă©tait l'insurrection violente orchestrĂ©e par Trump contre le Capitole le 6 janvier 2021 pour empĂȘcher le transfert pacifique du pouvoir prĂ©sidentiel en vertu du douziĂšme amendement et de la loi sur le dĂ©compte Ă©lectoral.
Pompeo, un homme aussi honorable que les assassins de CĂ©sar, fait la cour aux mafieux violents de Trump pour 2024.
Il a trahi la Constitution au profit d'un pouvoir exécutif illimité.
MĂ©fiez-vous de sa quĂȘte de la Maison Blanche.
Never Give an Inch : Fighting for the America I Love. Broadside Books, 24 janvier 2023.
* Bruce Fein a été procureur général adjoint associé sous le président Ronald Reagan et directeur de recherche pour les républicains au sein du Joint Congressional Committee on Covert Arms Sales to Iran. Son site Internet est www.lawofficesofbrucefein.com. Son fil Twitter est @brucefeinesq.
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