đâđš Pour Netanyahu, les otages ne sont jamais quâun prĂ©texte pour reprendre le gĂ©nocide
Les dirigeants & médias occidentaux doivent enrayer le processus. Mais ils contribuent à élaborer un récit propagandiste qui fait de la reprise du génocide une réalité quasiment inévitable.

đâđš Pour Netanyahu, les otages ne sont jamais quâun prĂ©texte pour reprendre le gĂ©nocide
Par Jonathan Cook, le 26 février 2025
IsraĂ«l nâa pu conserver le soutien de l'Occident pour son massacre Ă Gaza pendant 15 mois que grĂące Ă une campagne intensive et mensongĂšre.
Il a inventé et attribué des crimes de guerre particuliÚrement odieux au Hamas, tels que les décapitations de bébés et les viols de masse, pour lesquels aucune preuve n'a jamais été produite. à l'inverse il a minimisé ses propres crimes de guerre, autrement plus graves, en réponse à l'attaque du Hamas contre Israël.
Les crimes du Hamas d'octobre 2023 s'Ă©loignant peu Ă peu dans le rĂ©troviseur, et les crimes israĂ©liens Ă©tant toujours bien visibles avec la destruction complĂšte de Gaza - constituant un gĂ©nocide âplausibleâ, selon la Cour internationale de justice (CIJ) - les dirigeants israĂ©liens ont dĂ©sespĂ©rĂ©ment tentĂ© de dĂ©placer l'attention vers un nouveau champ de bataille narratif.
Ils ont besoin d'une nouvelle série de mensonges pour justifier la reprise du massacre. Et comme toujours, les médias occidentaux y contribuent abondamment.
Le Hamas et Israël jouent un jeu de propagande prévisible, utilisant les échanges de prisonniers israéliens et palestiniens lors de la premiÚre phase du cessez-le-feu pour se donner une posture morale.
Une fois de plus, Israël a toutes les cartes en main et bénéficie d'un soutien occidental massif, mais encore une fois, il ne gagne pas la guerre des relations publiques.
C'est pourquoi le Premier ministre israĂ©lien Benjamin Netanyahu a encore piquĂ© une de ses crises de colĂšre le week-end dernier, accusant cette fois le Hamas d'avoir mis en scĂšne la libĂ©ration d'IsraĂ©liens dans ce qu'il a appelĂ© des âcĂ©rĂ©monies dĂ©gradantesâ.
IsraĂ«l et ses soutiens ont Ă©tĂ© particuliĂšrement choquĂ©s, semble-t-il, par le comportement dâun des captifs libĂ©rĂ©s samedi, souriant sur l'estrade et embrassant amicalement deux de ses geĂŽliers sur le front.
Alors qu'il assistait à la cérémonie de remise de prisonniers avec le personnel de la Croix-Rouge, il a passé son bras autour des épaules de l'un de ses ravisseurs, dans un autre instant de sympathie manifeste.
Deux autres IsraĂ©liens, qui doivent ĂȘtre libĂ©rĂ©s au cours de la prochaine Ă©tape, ont Ă©tĂ© filmĂ©s en train de regarder la scĂšne depuis une voiture situĂ©e Ă proximitĂ©, se rĂ©jouissant Ă la perspective de la libertĂ© et appelant M. Netanyahu Ă ne pas saboter leur libĂ©ration.
Faire capoter le cessez-le-feu
Comme on pouvait s'y attendre, les médias occidentaux, dont la BBC, se sont fait l'écho d'Israël en suggérant qu'il s'agissait là de violations bien plus graves que celles commises par Israël, qui a tué plus de 130 Palestiniens depuis le 19 janvier, date du début du cessez-le-feu, au cours de centaines d'attaques contre Gaza.
De mĂȘme, les mĂ©dias n'ont accordĂ© qu'une couverture superficielle Ă la nouvelle vague de destruction israĂ©lienne, cette fois-ci en Cisjordanie occupĂ©e. Des milliers de maisons ont Ă©tĂ© dĂ©molies, des communautĂ©s entiĂšres faisant l'objet d'un nettoyage ethnique.
Les médias occidentaux ont manifestement omis de signaler que ces crimes de guerre constituent également des violations flagrantes de l'accord de cessez-le-feu.
Aujourd'hui, Netanyahu a exploité les relations apparemment cordiales entre certains des prisonniers israéliens et le Hamas comme prétexte pour faire échouer le cessez-le-feu avant que la deuxiÚme phase ne puisse commencer la semaine prochaine. Israël devrait alors se retirer complÚtement de la bande de Gaza et y permettre la reconstruction.
Les bus transportant des centaines d'otages palestiniens qui devaient ĂȘtre libĂ©rĂ©s samedi ont Ă©tĂ© contraints de faire demi-tour, les renvoyant dans leurs prisons. MĂȘme selon les propres Ă©valuations d'IsraĂ«l, la grande majoritĂ© de ces Palestiniens n'ont pas Ă©tĂ© âimpliquĂ©s dans les combatsâ.
Nombre d'entre eux, dont des membres du personnel mĂ©dical, ont Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s dans les rues de Gaza Ă la suite de l'attaque du Hamas du 7 octobre. Ils ont Ă©tĂ© dĂ©tenus sans inculpation, torturĂ©s et soumis Ă des conditions barbares que les groupes israĂ©liens de dĂ©fense des droits de l'homme ont comparĂ©es Ă âun enferâ.
Slogans génocidaires
On aurait prĂ©fĂ©rĂ© pouvoir croire qu'IsraĂ«l et ses soutiens se prĂ©occupent rĂ©ellement dâune prĂ©tendue atteinte Ă la dignitĂ© lors des remises dâotages, en vertu du droit humanitaire international. Mais il ne faut pas ĂȘtre dupe - ni stupide.
Avant mĂȘme de revenir sur l'Ă©change d'otages, IsraĂ«l a promis que les Palestiniens seraient soumis Ă leurs propres formes de traitement dĂ©gradant, les affublant de T-shirts ornĂ©s de slogans soutenant les actions gĂ©nocidaires d'IsraĂ«l contre la population de Gaza.
Les partisans d'IsraĂ«l n'ont pas semblĂ© trop prĂ©occupĂ©s par le sort des 600 otages palestiniens qui devaient ĂȘtre libĂ©rĂ©s samedi, que les bus les ont ramenĂ©s dans leurs camps de torture en IsraĂ«l au moment mĂȘme oĂč ils pouvaient goĂ»ter Ă la libertĂ©.
Quoi qu'il en soit, les otages israĂ©liens n'ont pas Ă©tĂ© une prioritĂ© pour Netanyahu, ils ne sont jamais quâun prĂ©texte pour reprendre le gĂ©nocide
Si Israël tenait tant à eux, il n'aurait pas bombardé Gaza pendant 15 mois.
Au contraire, il aurait saisi l'occasion d'un cessez-le-feu et d'un Ă©change de prisonniers non pas le mois dernier - comme il a Ă©tĂ© contraint de le faire sous la forte pression du futur prĂ©sident amĂ©ricain Donald Trump - mais en mai dernier, lorsqu'un accord lui a Ă©tĂ© proposĂ© exactement dans les mĂȘmes conditions.
Si IsraĂ«l se souciait tant des captifs, il n'aurait pas utilisĂ© de bombes antibunker d'une tonne fournies par les Ătats-Unis, qui ont non seulement dĂ©truit de vastes zones de Gaza sans discernement, mais aussi inondĂ© de gaz toxiques les tunnels dans lesquels de nombreux IsraĂ©liens Ă©taient dĂ©tenus.
Si IsraĂ«l se souciait tant des captifs, il n'aurait pas mis en place des âzones de mortâ non dĂ©clarĂ©es dans toute la bande de Gaza, oĂč les soldats israĂ©liens tirent sur tout ce qui bouge.
Trois Israéliens torse nu brandissant des drapeaux blancs de reddition ont été abattus par les troupes israéliennes dans des circonstances précisément similaires en décembre 2023.
Selon son bon vouloir
Les prisonniers israĂ©liens ne sont utiles Ă Netanyahu et Ă ses apologistes haineux que dans la mesure oĂč ils contribuent Ă Ă©tayer un rĂ©cit justifiant le gĂ©nocide.
Acculé par Trump, le Premier ministre israélien a estimé que le retour d'au moins quelques-uns d'entre eux est le prix à payer - pour apaiser le nouveau président américain et une grande partie de son propre public - avant de pouvoir reprendre les massacres d'enfants de Gaza.
Il a clairement indiqué à plusieurs reprises qu'il n'a pas la moindre intention de s'orienter vers un cessez-le-feu permanent aprÚs la premiÚre phase, c'est-à -dire les principaux échanges de prisonniers.
Pour Netanyahu, le seul intĂ©rĂȘt des prisonniers israĂ©liens est de pouvoir reprendre le gĂ©nocide.
Le Hamas, quant Ă lui, a tout intĂ©rĂȘt Ă utiliser la petite fenĂȘtre offerte par la libĂ©ration des captifs pour suggĂ©rer qu'il n'est pas le croque-mitaine des doctrines Ă©laborĂ©es par les IsraĂ©liens et imposĂ©es par les Occidentaux.
Il espÚre que ses remises d'otages, soigneusement gérées, montreront à quel point il gouverne toujours Gaza, malgré le déchaßnement destructeur d'Israël.
Et le Hamas a des raisons de cultiver des relations normales avec les captifs israéliens, améliorant son image auprÚs de l'opinion publique étrangÚre, pour rendre plus difficile le retour de Netanyahou au génocide.
IsraĂ«l, bien sĂ»r, ne peut prĂ©tendre Ă ce type de motivation rĂ©ciproque. En tant que partie de loin la plus puissante - celle qui, avant mĂȘme le 7 octobre 2023, retenait toute la population de Gaza en otage par un blocus de 17 ans- il sait que ses revendications ne seront pas dĂ©noncĂ©es par les mĂ©dias occidentaux.
Les prisonniers palestiniens libérés qui ont témoigné de tortures, d'agressions sexuelles et de viols - confirmés par les observateurs internationaux des droits de l'homme - ont été tout simplement ignorés.
Le âsyndrome de Stockholmâ
Bien que la situation soit favorable Ă IsraĂ«l, les rĂ©alitĂ©s divergentes sont telles qu'IsraĂ«l est en train de perdre la guerre mĂ©diatique, mĂȘme si elle n'est pas terminĂ©e. C'est pourquoi Netanyahu n'a aucun intĂ©rĂȘt Ă poursuivre les Ă©changes de prisonniers un jour de plus qu'il n'est tenu de le faire.
Les prisonniers libérés par le Hamas n'aident pas sa cause. Ils l'entravent.
Les apologistes du génocide israélien, abondamment relayés par les médias occidentaux, ont été briÚvement soulagés de voir qu'un groupe d'otages israéliens libérés au début du mois semblait presque aussi pùle et émacié que les centaines d'otages palestiniens libérés par Israël.
L'état de ce petit groupe d'Israéliens a suscité l'indignation générale, alors que la santé bien plus dégradée des Palestiniens libérés n'a suscité que l'indifférence la plus totale.
Mais dans la plupart des cas, les IsraĂ©liens libĂ©rĂ©s semblaient en assez bonne santĂ©, dâautant qu'IsraĂ«l a bloquĂ© l'entrĂ©e de vivres et d'eau Ă Gaza pendant 15 mois, et que la plupart des captifs ont Ă©tĂ© dĂ©tenus dans de profonds souterrains pour les protĂ©ger des campagnes de bombardement israĂ©liennes qui ont rasĂ© la quasi-totalitĂ© de la bande de Gaza.
Ce qui préoccupe encore plus Israël, c'est que les captifs sont apparus pour la plupart détendus face à leurs geÎliers.
Sur la dĂ©fensive, les partisans d'IsraĂ«l ont rejetĂ© ces scĂšnes comme Ă©tant des mises en scĂšne pour les camĂ©ras ou ont prĂ©tendu que les captifs souffraient clairement du âsyndrome de Stockholmâ.
MĂȘme si cette hypothĂšse est possible, pourquoi aucun prisonnier palestinien n'a manifestĂ© dâaffection similaire Ă l'Ă©gard de ses gardiens de prison israĂ©liens ?
Le temps presse
Quelle que soit la façon dont l'opinion publique occidentale évalue les preuves qui s'offrent à elle, Israël n'a guÚre de raisons de s'en réjouir.
Ces scÚnes entre le Hamas et les otages sont difficiles à concilier avec le récit dominant sans fondements présenté par Israël - et recyclé par les institutions occidentales - selon lequel le Hamas est un groupe de barbares qui décapite des bébés et commet des viols en masse.
En réduisant le Hamas à l'état de monstres, l'objectif d'Israël était de déshumaniser l'ensemble de la population de Gaza, afin de justifier ses crimes génocidaires.
Pourtant, les scĂšnes oĂč les captifs manifestent un rapport humain avec leurs geĂŽliers du Hamas rendent l'idĂ©e plus difficile Ă dĂ©fendre.
Si le Hamas n'est peut-ĂȘtre pas aussi diabolique que l'opinion publique occidentale a Ă©tĂ© amenĂ©e Ă le croire - si le comportement de ses membres est peut-ĂȘtre comparable, voire meilleur, Ă celui des soldats et des gardiens de prison israĂ©liens -, que faut-il penser de la fiabilitĂ© de la couverture mĂ©diatique occidentale des 15 mois de gĂ©nocide qui viennent de s'Ă©couler ?
Et plus encore, que révÚle notre propre barbarie occidentale en voyant nos élus accepter avec tant de désinvolture le meurtre de dizaines de milliers - voire de centaines de milliers - de civils palestiniens à Gaza pour prétendument se venger de l'attaque du Hamas en 2023 ?
Que penser de la prétention d'Israël à une haute autorité morale alors que ses dirigeants ont explicitement déclaré leur intention génocidaire à l'égard des enfants de Gaza - nous affirmant que la population entiÚre est impliquée dans l'attaque du Hamas et qu'elle est donc une cible légitime ?
Ă quelle position Ă©thique IsraĂ«l peut-il prĂ©tendre lorsque, mĂȘme au cours d'un cessez-le-feu, il viole les termes de l'accord plus de 250 fois, et refuse de cesser rĂ©ellement les hostilitĂ©s ?
Quelle attitude éthique Israël adopte-t-il en larguant des tracts au-dessus de Gaza, comme il l'a fait la semaine derniÚre, réaffirmant ses intentions génocidaires si les Palestiniens ne se soumettent pas au plan de Trump visant à nettoyer ethniquement l'ensemble de la population ?
Le tract, Ă©mis par l'âAgence de sĂ©curitĂ© israĂ©lienneâ, met en garde :
âSi tous les habitants de Gaza devaient mourir... personne n'aurait de compassion pour vous, personne ne demanderait de vos nouvelles... Le temps presse, la partie est presque finieâ.
Le texte se termine en exhortant les Palestiniens Ă collaborer :
âQuiconque souhaite fuir avant qu'il ne soit trop tard, nous sommes lĂ - nous serons lĂ jusqu'Ă la fin des tempsâ.
Arguments racistes
Israël a cherché à exploiter l'émotion suscitée par la mort à Gaza de la famille Bibas - une mÚre israélienne et ses deux jeunes enfants pris en otage le 7 octobre - en se livrant à une désinformation massive.
AprĂšs la restitution des corps le week-end dernier, IsraĂ«l a immĂ©diatement affirmĂ© que la famille a Ă©tĂ© tuĂ©e par ses ravisseurs - dans leur cas, il ne s'agirait pas du Hamas mais d'un gang criminel, connu sous le nom de âSeigneurs du dĂ©sertâ, qui aurait capturĂ© la famille aprĂšs avoir Ă©galement rĂ©ussi Ă sortir de Gaza en octobre 2023.
Supposons un instant que la version israĂ©lienne de l'assassinat de la famille âde sang-froidâ soit conforme aux faits.
S'il est plus logique que les IsraĂ©liens se soucient davantage de ces trois morts que du massacre et des mutilations par l'armĂ©e israĂ©lienne de dizaines de milliers d'enfants palestiniens Ă Gaza, pourquoi les hommes politiques et mĂ©dias occidentaux adoptent-ils le mĂȘme raisonnement raciste ?
Pourquoi la mort de trois innocents israéliens compte-t-elle que la mort de dizaines de milliers d'innocents palestiniens ?
Mais en fait, nous avons de trĂšs bonnes raisons de croire qu'IsraĂ«l ment une fois de plus, et qu'il s'agit simplement de rĂ©chauffer la fiction des âbĂ©bĂ©s dĂ©capitĂ©sâ qui avait Ă l'origine suscitĂ© un Ă©lan gĂ©nocidaire.
La famille Bibas a été déclarée tuée par un tapis de bombes israélien en novembre 2023, au début du génocide israélien.
Le Hamas a proposé de restituer leurs corps - ainsi que le pÚre encore vivant - peu aprÚs leur mort. De maniÚre parfaitement cynique, comme le souligne l'analyste palestinien Muhammad Shehada, Israël a rejeté l'offre afin de pouvoir
âprĂ©tendre qu'ils sont toujours en vie et capitaliser sur le rĂ©cit des âmonstresâ palestiniens retenant un bĂ©bĂ© en otageâ.
Aujourd'hui, la souffrance de la famille Bibas est exploitée par Israël et ses partisans - aidés par les médias - afin de galvaniser le soutien en faveur d'un retour à l'assassinat de sang-froid d'enfants palestiniens.
Il est probable que la famille Bibas, comme des milliers de familles palestiniennes, a Ă©tĂ© tuĂ©e par des bombes fournies par les Ătats-Unis. Cela expliquerait la confusion initiale des corps des victimes, qui a vu le retour en IsraĂ«l d'une femme palestinienne plutĂŽt que de Shiri Bibas, la mĂšre, avant que le Hamas ne soit en mesure de corriger l'erreur.
Signe de l'absence de crédibilité des responsables israéliens dans cette affaire, les membres survivants de la famille Bibas ont interdit aux responsables du gouvernement d'assister aux funérailles mardi.
Une avalanche de plaintes
La complicité des médias occidentaux dans ces manipulations par trop évidentes a été pleinement démontrée une fois de plus.
Une enquĂȘte menĂ©e la semaine derniĂšre par Declassified UK a rĂ©vĂ©lĂ© que des collaborateurs de la BBC, de Sky News, d'ITN, du Guardian et du Times ont tĂ©moignĂ© du ârĂšgne absoluâ de la propagande israĂ©lienne au sein de leurs rĂ©dactions.
Des journalistes mĂ©contents du Guardian ont compilĂ© un tableau listant une âfoule d'exemplesâ montrant que le journal
ârelaie la propagande israĂ©lienne sans aucune contestation ou vĂ©rification... ou accorde de la crĂ©dibilitĂ© Ă des dĂ©clarations ouvertement fausses de la part de porte-paroles israĂ©liensâ.
Un journaliste de Sky a dĂ©clarĂ© que la chaĂźne a imposĂ© tout un ensemble de rĂšgles non Ă©crites exclusivement applicables Ă la couverture d'IsraĂ«l : âC'est une lutte permanente pour faire connaĂźtre la vĂ©ritĂ©â. Chaque fois que les Palestiniens sont humanisĂ©s ou que les porte-parole israĂ©liens sont passĂ©s au crible, la chaĂźne doit faire face Ă une âavalanche d'appels tĂ©lĂ©phoniques et de plaintesâ.
La menace de priver Sky de l'accĂšs aux responsables israĂ©liens ou d'interdire aux correspondants de la chaĂźne de se rendre dans la rĂ©gion a eu l'effet escomptĂ©, impactant âce qui se dit ou ne se dit pas Ă l'antenneâ.
Le personnel de la BBC a de nouveau Ă©voquĂ© un climat au sein du radiodiffuseur public dĂ©shumanisant systĂ©matiquement les Palestiniens, Ă lâopposĂ© du traitement rĂ©servĂ© aux IsraĂ©liens.
L'un de ses journalistes a souligné que
âle recours au terme âgĂ©nocideâ est effectivement interdit, et tout collaborateur utilisant ce terme est immĂ©diatement excluâ.
C'est dans ce contexte qu'il faut interprĂ©ter la dĂ©cision de la BBC, ce week-end, de retirer un documentaire sur Gaza briĂšvement disponible sur son service de streaming iplayer : Gaza : How to Survive a War Zone, qui prĂ©sente la destruction de Gaza du point de vue d'un enfant, le premier projet de la chaĂźne publique Ă humaniser les Palestiniens, 16 mois aprĂšs qu'IsraĂ«l a commencĂ© son gĂ©nocide âplausibleâ. Visionnez le film ici :

La lùcheté des médias
Les groupes pro-israéliens, qui ont rationalisé de maniÚre macabre le massacre des enfants de Gaza tout au long du processus, ont inévitablement protesté. Et la BBC, de maniÚre tout aussi prévisible, ne pouvait que céder à la moindre pression.
La lùcheté des médias de l'establishment a atteint des sommets inégalés.
Les lobbyistes pro-israéliens ont accusé la BBC de soutenir le terrorisme et de se livrer à la désinformation, parce que le narrateur principal du film, Abdullah, 14 ans, est le fils d'un vice-ministre du gouvernement du Hamas.
Ayman al-Yazouri est qualifiĂ© de âchef terroristeâ dans une plainte officielle adressĂ©e Ă la BBC et signĂ©e par 45 journalistes et responsables de mĂ©dias juifs.
Ce sont pourtant les objections du lobby qui constituent la véritable désinformation : elles se fondent sur une législation britannique draconienne, influencée par Israël, qui assimile toute relation avec le Hamas, le gouvernement de Gaza, à du terrorisme.
Israël a capturé et torturé des centaines de membres du personnel médical de Gaza, précisément au motif qu'ils seraient associés au terrorisme parce que travaillant dans des hÎpitaux publics supervisés par le gouvernement du Hamas.
De mĂȘme, M. al-Yazouri, qui a obtenu un doctorat en biologie environnementale dans une universitĂ© britannique et a ensuite travaillĂ© au ministĂšre de l'Ăducation des Ămirats arabes unis, oĂč il a participĂ© Ă l'Ă©laboration du programme d'Ă©tudes scientifiques, a Ă©tĂ© recrutĂ©, Ă son retour Ă Gaza, par les ministĂšres de l'Ă©ducation et de l'agriculture, en raison de ses compĂ©tences spĂ©cialisĂ©es et non parce qu'il est membre du Hamas.
Le choix de son fils Abdullah, scolarisé dans l'unique école anglophone de Gaza, n'a été sans doute motivé que pour une raison toute simple : il était l'un des rares enfants de Gaza à pouvoir s'exprimer couramment dans la langue maternelle des téléspectateurs de la BBC.
Quoi qu'il en soit, la narration d'Abdullah est tout à fait banale : elle se contente de présenter des personnages qui se débattent dans la catastrophe humanitaire provoquée par Israël, que le public peut voir de ses propres yeux à l'écran.
Des pressions extrĂȘmes
Les enfants dont les histoires sont racontées - et qui ont été supprimées - ont été sélectionnés pour des raisons clairement journalistiques : parce qu'ils réalisent des choses fascinantes sous des pressions inouïes, qu'il s'agisse de devenir une superstar sur Tiktok, malgré un blocus alimentaire imposé par Israël, ou de faire du bénévolat dans un hÎpital pour transporter les personnes mutilées lors d'attaques israéliennes de l'ambulance au médecin qui les attend.
Le documentaire est par ailleurs entiĂšrement favorable Ă IsraĂ«l : le Hamas est maudit par une population qui souffre plus qu'IsraĂ«l. Ce que la plus haute cour du monde dĂ©clare ĂȘtre un gĂ©nocide Ă Gaza est dĂ©crit simplement comme une âguerreâ. Et les IsraĂ©liens faits prisonniers par le Hamas, soldats compris, sont uniformĂ©ment qualifiĂ©s d'âotagesâ.
Ce que les groupes de pression pro-israĂ©liens redoutent - Ă l'exception de la sĂ©quence finale dans laquelle une Ă©quipe d'ambulanciers est attaquĂ©e par des hĂ©licoptĂšres Apache israĂ©liens - ce sont les portraits de Palestiniens qui contredisent la propagande israĂ©lienne, selon laquelle tous les habitants de Gaza, mĂȘme les enfants, sont des terroristes qui ont semĂ© la mort et la destruction Ă leur propre dĂ©triment.
Cet argument ne peut trouver d'Ă©cho que chez un psychopathe. Et pourtant, nos radiodiffuseurs l'acceptent sans broncher, tout comme le gouvernement du Premier ministre britannique Keir Starmer.
Ne nous mĂ©prenons pas : c'est un argument qui justifie le gĂ©nocide. Les dirigeants et les mĂ©dias occidentaux se doivent dâenrayer ce processus. Mais ils contribuent au contraire Ă Ă©laborer un rĂ©cit propagandiste qui fait de la reprise du gĂ©nocide une rĂ©alitĂ© quasiment inĂ©vitable.