đâđš Scott Ritter? Minuit moins une (et demie) ?
La vérité est que le monde est à une seconde de minuit, et que l'horloge peut sonner à tout moment, ce que la présence de l'Amiral Gorshkov au large des cÎtes américaines ne prouve que trop bien.
đâđš Minuit moins une (et demie) ?
Par Scott Ritter, le 24 janvier 2023
Un signal clair aux dirigeants amĂ©ricains qu'il n'y aura aucun survivant dans un Ă©change nuclĂ©aire entre les Ătats-Unis et la Russie.
La frĂ©gate russe de missiles guidĂ©s, l'Amiral Gorshkov, se trouve au milieu de l'ocĂ©an Atlantique, se dirigeant ostensiblement vers la cĂŽte est des Ătats-Unis, dans le cadre d'un voyage planifiĂ© qui a dĂ©butĂ© le 4 janvier 2023 et qui devrait traverser les ocĂ©ans Atlantique et Indien, ainsi que la mer MĂ©diterranĂ©e. L'Admiral Gorshkov est Ă©quipĂ© de 16 tubes de lancement verticaux, dont chacun pourrait, en thĂ©orie, ĂȘtre armĂ© de missiles hypersoniques Zircon Ă capacitĂ© nuclĂ©aire, capables de parcourir 1 000 kilomĂštres en moins de 10 minutes.
Pour parler franchement, la Russie sera bientĂŽt dans une situation oĂč un seul navire pourra, en quelques minutes, tirer sur les Ătats-Unis 16 missiles hypersoniques Ă capacitĂ© nuclĂ©aire, qui non seulement ne pourront ĂȘtre interceptĂ©s par aucun Ă©lĂ©ment de l'arsenal amĂ©ricain, mais qui atteindront leurs cibles respectives avant qu'une Ă©vacuation significative puisse ĂȘtre effectuĂ©e. Il s'agit, littĂ©ralement, d'une arme de dĂ©capitation.
La doctrine nucléaire russe actuelle ne prévoit pas de premiÚre frappe nucléaire ; en effet, le président russe Vladimir Poutine a clairement indiqué que la Russie ne serait pas la premiÚre nation à utiliser des armes nucléaires dans un futur conflit. Mais il a également souligné que la Russie ne serait pas non plus la deuxiÚme, ce qui signifie que la Russie libérerait son arsenal nucléaire sans attendre qu'une premiÚre frappe américaine touche le sol russe.
L'amiral Gorshkov envoie un signal clair aux dirigeants amĂ©ricains : il n'y aura pas de survivants dans tout Ă©change nuclĂ©aire entre les Ătats-Unis et la Russie.
Au milieu de ces manĆuvres, le Science and Security Board du Bulletin of the Atomic Scientists, un groupe de dĂ©fense du dĂ©sarmement fondĂ© en 1945 par Albert Einstein et des scientifiques de l'universitĂ© de Chicago qui ont participĂ© Ă la mise au point des premiĂšres armes atomiques dans le cadre du projet Manhattan, et qui gĂšre actuellement ce que l'on appelle "l'horloge de l'apocalypse" qui reflĂšte le risque de conflit nuclĂ©aire, a dĂ©cidĂ© d'avancer les aiguilles de l'horloge de dix secondes par rapport aux 100 secondes actuelles avant minuit. Dans un communiquĂ© annonçant cette dĂ©cision, intitulĂ© "PĂ©riode de danger sans prĂ©cĂ©dent : il est 90 secondes avant minuit", le conseil a dĂ©clarĂ© ce qui suit :
"La guerre en Ukraine pourrait entrer dans une deuxiĂšme annĂ©e horrifiante, les deux parties Ă©tant convaincues de pouvoir gagner. La souverainetĂ© de l'Ukraine et les accords de sĂ©curitĂ© europĂ©ens plus globaux qui ont largement tenu depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale sont en jeu. En outre, la guerre de la Russie contre l'Ukraine a soulevĂ© de profondes questions sur la maniĂšre dont les Ătats interagissent, Ă©rodant les normes de conduite internationale qui sous-tendent des rĂ©ponses efficaces Ă une variĂ©tĂ© de risques mondiaux.
"Et, pire que tout, les menaces à peine voilées de la Russie d'utiliser des armes nucléaires rappellent au monde que l'escalade du conflit - par accident, intention ou erreur de calcul - est un risque terrible. La possibilité que le conflit échappe au contrÎle de quiconque reste élevée."
L'ignorance de cette dĂ©claration est manifeste. Ce que le Conseil appelle "la guerre de la Russie contre l'Ukraine" ignore la vĂ©ritĂ© historique basĂ©e sur les faits, Ă savoir que le conflit ukrainien n'Ă©tait, et n'est, que le sous-produit d'un plan concertĂ© des Ătats-Unis et de l'OTAN visant Ă utiliser l'Ukraine comme un faire-valoir pour gĂ©nĂ©rer un conflit destinĂ© Ă faire tomber le gouvernement du prĂ©sident russe Vladimir Poutine.
Ce plan est en place depuis au moins 2008, lorsque l'ancien ambassadeur des Ătats-Unis en Russie (et actuel directeur de la CIA), William Burns, a averti que tout effort de l'OTAN pour faire entrer l'Ukraine dans ses rangs prĂ©cipiterait une Ă©ventuelle intervention militaire russe. MalgrĂ© cet avertissement sĂ©vĂšre, l'OTAN a lancĂ© une invitation Ă l'Ukraine en novembre 2008, initiant clairement une relation de cause Ă effet connue qui a dĂ©fini la politique de l'OTAN Ă l'Ă©gard de la Russie comme Ă©tant celle d'un conflit par procuration utilisant l'Ukraine comme substitut de l'OTAN.
Cette politique a Ă©tĂ© renforcĂ©e par les Ătats-Unis, l'Union europĂ©enne et l'OTAN qui ont agi de concert pour prĂ©cipiter un coup d'Ătat en Ukraine en fĂ©vrier 2014, dans le but d'Ă©vincer le prĂ©sident constitutionnellement Ă©lu, Victor Ianoukovitch, et de le remplacer par un nouveau gouvernement ultranationaliste dominĂ© par des adeptes de l'ignoble idĂ©ologie de Stepan Bandera. Le coup d'Ătat a rĂ©ussi et, en avril, le nouveau gouvernement ukrainien a dĂ©clarĂ© la guerre Ă la population russe du Donbas. Cette action a dĂ©clenchĂ© l'annexion de la CrimĂ©e par la Russie et la fourniture d'un soutien militaire par la Russie au Donbas, dĂ©clenchant l'intervention militaire mĂȘme dont William Burns avait mis en garde six ans auparavant.
L'Ukraine et ses alliés de l'OTAN ont alors demandé la paix, engageant des négociations qui ont abouti à l'adoption de l'accord de Minsk, qui mettait en place un cessez-le-feu en échange de garanties concernant la souveraineté ukrainienne sur le Donbas ainsi qu'une autonomie relative pour les Russes ethniques du Donbas, protégeant leur langue, leur religion, leur culture et leurs traditions.
Les accords de Minsk sont restĂ©s lettre morte pendant huit ans, l'Ukraine ne parvenant pas Ă mettre en Ćuvre les changements constitutionnels nĂ©cessaires pour garantir les droits des Russes ethniques du Donbas. Les raisons de ce retard sont aujourd'hui bien connues, grĂące aux aveux publics de l'ancien prĂ©sident ukrainien Petro Porochenko, de l'ancienne chanceliĂšre allemande Angela Merkel, et de l'ancien prĂ©sident français François Hollande, tous trois signataires des accords. Ces trois dirigeants nationaux ont reconnu que les accords de Minsk n'Ă©taient qu'un simulacre conçu par l'Ukraine pour gagner du temps afin de construire une armĂ©e mandataire de l'OTAN capable de rĂ©cupĂ©rer Ă la fois le Donbas et la CrimĂ©e.
La décision de la Russie d'envahir l'Ukraine le 24 février 2022 n'était pas un acte d'agression non provoqué, mais plutÎt l'exercice légitime de son droit, avec les républiques nouvellement indépendantes de Lougansk et de Donetsk, à l'autodéfense collective préventive face à la menace imminente d'une agression par l'armée ukrainienne nouvellement formée qui était, à dessein, un peu plus qu'un mandataire de l'OTAN.
Le fait que les membres estimĂ©s du Bulletin of Atomic Scientists - qui compte dans ses rangs dix laurĂ©ats du prix Nobel - semblent ignorer cette histoire, rĂ©vĂšle leur capacitĂ© Ă comprendre la vĂ©ritable nature de la menace Ă laquelle le monde est confrontĂ© aujourd'hui, et d'oĂč vient cette menace.
Les Ătats-Unis, aprĂšs avoir dĂ©libĂ©rĂ©ment provoquĂ© un conflit prĂ©mĂ©ditĂ© avec la Russie, tentent maintenant de mettre en Ćuvre une politique Ă deux volets destinĂ©e Ă dĂ©clencher un moment de type Maidan Ă Moscou (du nom de la place Maidan, Ă Kiev, oĂč des nĂ©onazis soutenus par les Ătats-Unis ont organisĂ© un coup d'Ătat violent contre l'ancien prĂ©sident ukrainien Victor Ianoukovitch), oĂč la population russe se soulĂšverait contre le gouvernement du prĂ©sident Vadimir Poutine, le renverserait et installerait un dirigeant pro-occidental qui ramĂšnerait la Russie Ă l'existence de type colonial des annĂ©es 1990, lorsque Boris Eltsine a permis Ă l'Occident collectif de violer la Russie Ă©conomiquement, et de la dominer politiquement.
Cette politique comporte deux volets :
l'imposition de sanctions économiques liées à la décision de la Russie d'intervenir militairement en Ukraine, et
la poursuite d'un conflit par procuration en Ukraine destiné à saigner la Russie à blanc.
L'objectif de cette politique est d'engendrer des troubles massifs au sein d'une population russe démoralisée qui se soulÚverait à son tour pour chasser le président Poutine du pouvoir.
La folie d'un tel plan est incomprĂ©hensible. Imaginez un instant que la Russie s'engage dans un plan d'action visant Ă retirer le Mexique de la sphĂšre d'influence amĂ©ricaine et, ce faisant, promulgue un conflit dont l'objectif est que le Mexique reprenne par la force le territoire englobant les Ătats de Californie, d'Arizona, du Nouveau-Mexique et du Texas. L'idĂ©e que les Ătats-Unis resteraient les bras croisĂ©s face Ă une telle menace est grotesque. Il en va de mĂȘme pour l'idĂ©e que la Russie devrait faire de mĂȘme.
Une petite leçon d'histoire pour le Bulletin of Atomic Scientists :
Ce sont les Ătats-Unis, et non la Russie, qui se sont retirĂ©s des traitĂ©s sur les missiles antibalistiques et les forces nuclĂ©aires intermĂ©diaires.
Ce sont les Ătats-Unis, et non la Russie, qui ont gelĂ© les nĂ©gociations sur l'extension du nouveau traitĂ© sur les armes stratĂ©giques.
Ce sont les Ătats-Unis, et non la Russie, qui ont rĂ©cemment promulguĂ© une politique de posture nuclĂ©aire qui permet l'utilisation prĂ©ventive d'armes nuclĂ©aires dans un scĂ©nario non nuclĂ©aire.
Ce sont les Ătats-Unis, et non la Russie, qui ont dĂ©ployĂ© une tĂȘte nuclĂ©aire Ă faible rendement (c'est-Ă -dire "utilisable") (la W-76-2) sur des missiles balistiques lancĂ©s par des sous-marins Trident, et qui ont menĂ© des jeux de guerre au cours desquels le secrĂ©taire Ă la dĂ©fense s'est exercĂ© aux procĂ©dures de communication nĂ©cessaires pour lancer cette arme lorsque la Russie Ă©tait la cible dĂ©signĂ©e du missile.
Ce sont les Ătats-Unis, et non la Russie, qui construisent une armĂ©e ukrainienne par procuration conçue intentionnellement pour pouvoir s'emparer du territoire que la Russie revendique comme sien (les quatre anciennes provinces ukrainiennes annexĂ©es par la Russie en septembre 2022, et la CrimĂ©e), sachant trĂšs bien que l'un des Ă©lĂ©ments dĂ©clencheurs du dĂ©clenchement des armes nuclĂ©aires russes est toute force militaire conventionnelle qui menace la survie existentielle de la Russie.
Le Bulletin of Atomic Scientists devrait ĂȘtre sourd, muet et aveugle pour ne pas reconnaĂźtre ces faits sous-jacents, et ne pas les considĂ©rer comme des vĂ©ritĂ©s.
Ce qui signifie qu'ils sont complices de la terreur nuclĂ©aire perpĂ©trĂ©e par les Ătats-Unis, et indiffĂ©rents aux consĂ©quences de celle-ci.
Le Bulletin of Atomic Scientists a donc fondamentalement tort d'estimer qu'il reste 90 secondes avant minuit.
La vérité est que le monde est à une seconde de minuit, et que l'horloge peut sonner à tout moment, ce que la présence de l'Amiral Gorshkov au large des cÎtes américaines ne prouve que trop bien.