đâđš Seymour Hersh : "De la merde sur les murs"
Mes histoires ont Ă©tĂ© taxĂ©es de fausses, inventĂ©es, scandaleuses &, dixit le Pentagone Ă propos de mon travail sur Abu Grahib, de âtissu d'absurditĂ©s"- pour lequel j'ai remportĂ© un prix George Polk...
đâđš Pourquoi Substack ? "De la merde sur les murs"
Un message pour vous, les lecteurs, Ă propos de moi et de Substack
Par Seymour Hersh, le 8 février 2023
En 2004, aprĂšs avoir publiĂ© les premiers articles sur la torture des prisonniers irakiens Ă Abu Ghraib, un porte-parole du Pentagone a rĂ©agi en qualifiant mon journalisme de âtissu d'absurditĂ©s". (Il a Ă©galement dĂ©clarĂ© que j'Ă©tais un gars qui "balançait de la merde sur les murs" et "attendait de quelqu'un qu'il dĂ©cortique la rĂ©alitĂ©." J'ai remportĂ© mon cinquiĂšme prix George Polk pour ce travail).
J'ai Ă©tĂ© pigiste pendant une grande partie de ma carriĂšre. En 1969, j'ai rĂ©vĂ©lĂ© l'histoire d'une unitĂ© de soldats amĂ©ricains au Vietnam qui avait commis un horrible crime de guerre. On leur avait ordonnĂ© d'attaquer un village de paysans ordinaire oĂč, comme quelques officiers le savaient, ils ne rencontreraient aucune rĂ©sistance - et on leur avait dit de tuer Ă vue. Les gars ont assassinĂ©, violĂ© et mutilĂ© pendant des heures, sans qu'aucun ennemi ne soit dĂ©couvert. Le crime a Ă©tĂ© couvert au sommet de la chaĂźne de commandement militaire pendant dix-huit mois - jusqu'Ă ce que je le dĂ©couvre.
J'ai remporté le prix Pulitzer du reportage international pour ce travail, mais le faire connaßtre au public américain n'a pas été chose aisée. Je n'étais pas un journaliste établi travaillant pour une entreprise reconnue. Ma premiÚre histoire, publiée par une agence de presse à peine en place dirigée par un de mes amis, a été rejetée par les rédacteurs en chef des magazines Life et Look. Lorsque le Washington Post l'a finalement publié, il l'a parsemée de démentis du Pentagone et du scepticisme irréfléchi de l'homme chargé de la réécriture.
D'aussi loin que je me souvienne, on m'a toujours dit que mes histoires Ă©taient fausses, inventĂ©es, scandaleuses, mais je n'ai jamais arrĂȘtĂ©. En 2004, aprĂšs avoir publiĂ© les premiers articles sur la torture des prisonniers irakiens Ă Abu Ghraib, un porte-parole du Pentagone a rĂ©agi en qualifiant mon journalisme de âtissu d'absurditĂ©s". (Il a Ă©galement dĂ©clarĂ© que j'Ă©tais un gars qui "balançait de la merde sur les murs" et "attendait de quelqu'un qu'il dĂ©cortique la rĂ©alitĂ©." J'ai remportĂ© mon cinquiĂšme prix George Polk pour ce travail).
J'ai fait mon temps dans les grands mĂ©dias, mais je n'y ai jamais Ă©tĂ© Ă l'aise. Plus rĂ©cemment, je n'aurais pas Ă©tĂ© le bienvenu de toute façon. L'argent, comme toujours, faisait partie du problĂšme. Le Washington Post et mon ancien journal, le New York Times (pour n'en citer que quelques-uns), se sont retrouvĂ©s dans une phase de recul de la livraison Ă domicile, de la vente en kiosque et de l'affichage publicitaire. CNN et ses rejetons, comme MSNBC et Fox News, se battent pour les gros titres sensationnels au dĂ©triment du journalisme d'investigation. De nombreux journalistes brillants sont encore Ă l'Ćuvre, mais une grande partie des reportages doivent respecter des directives et des contraintes qui n'existaient pas Ă l'Ă©poque oĂč je rĂ©digeais des articles au quotidien pour le Times.
C'est lĂ qu'intervient Substack. Ici, j'ai le genre de libertĂ© pour laquelle je me suis toujours battu. Sur cette plateforme, j'ai vu les auteurs se libĂ©rer les uns aprĂšs les autres des intĂ©rĂȘts Ă©conomiques de leurs Ă©diteurs, se lancer dans des articles sans craindre le nombre de mots ou de colonnes et, surtout, s'adresser directement Ă leurs lecteurs. Et ce dernier point, pour moi, est l'argument dĂ©cisif. Je n'ai jamais eu envie de frĂ©quenter des politiciens ou de m'acoquiner avec des hommes d'argent dans des cocktails oĂč l'on s'impose - des soirĂ©es de baise de stars, comme j'ai toujours aimĂ© les appeler. Je suis au mieux de ma forme lorsque je bois du bourbon bon marchĂ© avec les militaires, que je travaille avec les associĂ©s de premiĂšre annĂ©e d'un cabinet d'avocats pour obtenir des renseignements, ou que j'Ă©change des histoires avec le ministre junior d'un pays dont la plupart des gens ignorent le nom. Cela a toujours Ă©tĂ© mon style. Et il s'avĂšre que c'est Ă©galement l'Ă©thique de cette communautĂ© en ligne.
Ce que vous trouverez ici est, je l'espÚre, le reflet de cette liberté. L'histoire que vous lirez aujourd'hui est la vérité telle que je l'ai élaborée pendant trois mois, sans aucune pression de la part d'aucun éditeur, rédacteur en chef ou de pairs pour la faire correspondre à certains courants de pensée, ou la tronquer pour apaiser leurs craintes. Substack signifie simplement que le reportage est de retour... sans filtre et sans programme, comme je l'aime.
Seymour M. Hersh
Washington, DC