đâđš Stella Assange : âIl faut libĂ©rer Julian pour protĂ©ger les journalistes du monde entierâ !
Une vie de famille normale avec Julian veut dire : une promenade en forĂȘt ou jouer avec les enfants. Nous en sommes malheureusement trĂšs loin. Mais nous ne perdons pas espoir.
đâđš Stella Assange : âIl faut libĂ©rer Julian pour protĂ©ger les journalistes du monde entierâ !
Par Marc Hairapetian, le 18 janvier 2024 - English version below
L'avocate et Ă©pouse du fondateur de Wikileaks, emprisonnĂ© Ă Londres, Ă©voque son cas, la libertĂ© de la presse et une vie de famille ânormaleâ.
Berlin - Stella Assange est une femme courageuse. NĂ©e Sara Gonzalez Devant le 20 novembre 1983 Ă Johannesburg, cette militante des droits de l'homme, connue plus tard sous le nom de Stella Moris-Smith Robertson, a fait la connaissance de son mari alors qu'elle a dĂ©fendu ses droits. Depuis des annĂ©es, elle ne le voit que deux fois par mois, lorsqu'elle lui rend visite dans le quartier de haute sĂ©curitĂ© de âHis Majesty's Prison Belmarshâ Ă Londres.
L'Australien Julian Paul Assange, aujourd'hui ĂągĂ© de 52 ans, a fait la une de l'actualitĂ© internationale en tant que journaliste d'investigation, activiste politique, ancien hacker, programmeur et fondateur et porte-parole de Wikileaks. Cette derniĂšre plateforme de divulgation rassemble des documents de critiques sur les gouvernements et de lanceurs d'alerte de nombreux pays du monde et les met Ă disposition en ligne. AcclamĂ© par les uns, Julian Assange est lâĂ©pine dans le pied des autres. En 2010, Wikileaks a publiĂ©, en collaboration avec le New York Times, le Guardian et le Spiegel, des extraits de protocoles militaires prouvant les crimes de guerre commis par les Ătats-Unis lors de leurs interventions en Afghanistan et en Irak. Le gouvernement amĂ©ricain a alors ouvert une enquĂȘte Ă son encontre. A cela s'est ajoutĂ© en aoĂ»t 2010 un mandat d'arrĂȘt en SuĂšde pour de prĂ©tendus dĂ©lits sexuels. Craignant d'ĂȘtre extradĂ© vers les Ătats-Unis, Julian Assange a Ă©chappĂ© Ă la menace d'extradition de la Grande-Bretagne vers la SuĂšde en juin 2012 en se dĂ©barrassant de son bracelet Ă©lectronique et en se rĂ©fugiant Ă l'ambassade Ă©quatorienne de Londres. L'asile politique lui a Ă©tĂ© accordĂ©. En 2019, le nouveau prĂ©sident Ă©quatorien LenĂn Moreno lui a retirĂ© sa citoyennetĂ©.
Les poursuites contre Julian Assange
Peu aprĂšs, Assange a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© par la police britannique dans ladite ambassade et condamnĂ© Ă une peine de cinquante semaines de prison pour violation de sa libertĂ© sous caution. Le mĂȘme mois, les Ătats-Unis ont demandĂ© au Royaume-Uni de l'extrader. L'acte d'accusation amĂ©ricain prĂ©voit une peine cumulĂ©e pouvant aller jusqu'Ă 175 ans d'emprisonnement, voire la peine de mort dans le pire des cas. Au dĂ©but de l'annĂ©e 2021, un tribunal londonien a dĂ©cidĂ© que le fondateur de Wikileaks ne devait pas ĂȘtre extradĂ© vers les Ătats-Unis. Le jugement s'appuyait sur un risque potentiel de suicide. En dĂ©cembre 2021, la cour d'appel a de nouveau levĂ© l'interdiction d'extradition, de sorte que Julian Assange risque Ă nouveau d'ĂȘtre extradĂ© aux Ătats-Unis. La cĂ©rĂ©monie de mariage entre lui et Stella Moris-Smith Robertson a eu lieu le 23 mars 2022 Ă la âHMP Belmarshâ. La robe de mariĂ©e a Ă©tĂ© conçue par la crĂ©atrice de mode Vivienne Westwood, aujourd'hui dĂ©cĂ©dĂ©e, mais le couple n'a pas Ă©tĂ© autorisĂ© Ă prendre de photos de mariage officielles.
Alors que l'AssemblĂ©e parlementaire du Conseil de l'Europe avait dĂ©jĂ votĂ© Ă l'unanimitĂ© en janvier 2020 pour la âlibĂ©ration immĂ©diateâ de Julian Assange et pour empĂȘcher son extradition vers les Ătats-Unis, le gouvernement britannique a autorisĂ© son extradition vers les Ătats-Unis peu aprĂšs son mariage, le 22 juin 2022. Sa dĂ©fense a fait appel de la dĂ©cision et il est donc toujours dĂ©tenu au Royaume-Uni. En novembre 2022, le Premier ministre australien Anthony Albanese ainsi que des mĂ©dias internationaux ont demandĂ© au gouvernement amĂ©ricain de mettre fin aux poursuites. En juin 2023, la demande d'appel a Ă©tĂ© rejetĂ©e par la High Court de Londres ... Le collaborateur de FR, Marc Hairapetian, a rencontrĂ© Stella Assange Ă l'Akademie der KĂŒnste am Hanseatenweg Ă Berlin pour un entretien.
Stella Assange se confie sur Julian Assange lors d'un entretien.
Votre mari Julian Assange a reçu le prix Konrad Wolff de l'Académie des arts fin 2023. Puisqu'il est toujours en prison, vous avez accepté le prix en son nom. Je sais que vos contacts avec lui sont limités, mais en avez-vous parlé avec lui ?
Oui, mais je n'ai pas eu le droit de lui montrer le certificat quand je lui ai rendu visite. Je n'ai pas le droit d'apporter quoi que ce soit Ă la prison. C'est la prison de haute sĂ©curitĂ© la plus Ă©troitement surveillĂ©e de tout le Royaume-Uni. Lors d'une conversation tĂ©lĂ©phonique, je lui ai parlĂ© du prix et du dĂźner avec le jury. Il m'a dit : âS'il te plaĂźt, transmets au jury ma reconnaissance pour la dĂ©cision et surtout pour le courage dont il a fait preuve en m'attribuant ce prixâ. C'Ă©tait important pour lui. Le prix est avant tout un soutien moral susceptible de l'aider Ă se rapprocher un peu plus de la libertĂ©.
Il est en effet en grande partie coupĂ© du monde. Sa cellule mesure deux mĂštres sur trois. Il y passe 21 ou 22 heures par jour, parfois mĂȘme 23 heures. C'est une existence trĂšs isolĂ©e. â Stella Assange sur les conditions de dĂ©tention de Julian Assange
Comment se sent-il aujourdâhui ? J'ai lu qu'il souffrait de dĂ©pression, ce qui est tout Ă fait comprĂ©hensible. La vie doit ĂȘtre un cauchemar pour lui depuis de nombreuses annĂ©es.
Chaque jour est un combat. Il a besoin d'ĂȘtre en contact avec le monde extĂ©rieur, de lire des articles et de me parler au tĂ©lĂ©phone, ou d'ĂȘtre en mesure de nous voir, moi, nos enfants et ses amis, deux fois par mois, pendant une heure et demie, sous surveillance, lors d'une visite Ă la prison. Il n'a pas internet. Il est vraiment coupĂ© du monde. Sa cellule mesure deux mĂštres sur trois. Il y passe 21 ou 22 heures par jour, parfois mĂȘme 23 heures. C'est une existence extrĂȘmement solitaire. Julian est quelqu'un gĂ©nĂ©ralement assoiffĂ© de connaissances. Il a besoin du monde extĂ©rieur pour explorer les choses avec passion. C'est pourquoi cette forme d'incarcĂ©ration est particuliĂšrement cruelle pour quelqu'un comme lui. De plus, il est toujours confrontĂ© Ă son extradition vers les Ătats-Unis. Il essaie d'y rĂ©sister du mieux qu'il peut avec le concours de ses dĂ©fenseurs . C'est un combat pour sa vie. Aux Ătats-Unis, le systĂšme de justice pĂ©nale est trĂšs diffĂ©rent de ce que nous connaissons, comprenons et avons l'habitude de voir en Europe. Il risque une peine Ă vie d'au moins 175 ans, peut-ĂȘtre mĂȘme l'exĂ©cution. Dans des cas Ă peu prĂšs similaires, seuls trois pour cent des lanceurs d'alerte inculpĂ©s ont Ă nouveau saisi la justice. De nombreux dĂ©tenus ne portent pas plainte aux Ătats-Unis parce qu'ils craignent que la procĂ©dure judiciaire ne les prive dĂ©finitivement de leur libertĂ©.
La privation totale d'Internet doit ĂȘtre une peine supplĂ©mentaire particuliĂšrement dure pour quelqu'un comme Julian Assange.
En effet. Julian n'a pas d'Internet, mais il n'a pas non plus d'ordinateur entiÚrement fonctionnel avec le logiciel correspondant. Il a un ordinateur qui lui a été donné par le ministÚre britannique de la Justice. Il ne l'a reçu qu'un an aprÚs avoir été incarcéré. Il a été délivré par le ministÚre de la Justice comme un ordinateur modifié. Certaines touches sont inutilisables et le logiciel de traitement de texte a également été retiré. Ainsi, l'appareil n'est plus qu'une sorte de lecteur PDF avec lequel il peut lire ses documents judiciaires. Il ne peut pas s'en servir pour écrire des notes à ses avocats. Il ne peut leur écrire qu'à la main, mais son écriture n'est pas trÚs lisible. Julian peut donc donner son avis à ses avocats uniquement par téléphone. Et cela entraßne des frais supplémentaires ... C'est désormais sa réalité ... Sa défense ne lui sera définitivement pas facilitée dans cette prison de haute sécurité.
Julian Assange doit se battre sur plusieurs fronts
Se doutait-il qu'il serait un jour emprisonnĂ© pour avoir publiĂ© des documents militaires amĂ©ricains secrets ? Beaucoup de gens l'admirent pour son courage, d'autres, surtout aux Etats-Unis, le dĂ©testent et souhaitent mĂȘme publiquement sa mort.
Lorsque Wikileaks a Ă©tĂ© lancĂ© en 2006, internet commençait seulement Ă atteindre son vĂ©ritable dĂ©veloppement. Les gouvernements commençaient Ă numĂ©riser leurs archives. Il y a eu un grand dĂ©bat pour savoir s'il s'agissait d'archives publiques ou seulement d'archives avec accĂšs spĂ©cial. La transparence et la responsabilitĂ©, combinĂ©es Ă l'expĂ©rience de Julian en tant que cartographe de la communication anonyme, ont permis de rendre ces archives refoulĂ©es accessibles au public via Wikileaks. Dans ce contexte, le terme âanonymeâ signifie que la source n'a pas Ă©tĂ© nommĂ©e. Vous le voyez, la libertĂ© de la presse Ă©tait plus forte Ă l'Ă©poque qu'aujourd'hui. Le climat Ă l'Ă©poque oĂč Julian a Ă©tĂ© emprisonnĂ© Ă©tait trĂšs diffĂ©rent de celui des annĂ©es 2009, 2010 et 2011, oĂč il avait dĂ©jĂ tout publiĂ©. La pire de ses accusations est alors tombĂ©e sous l'administration Trump. Bien sĂ»r, Julian avait dĂ©jĂ fait l'objet de nombreuses attaques, notamment calomnieuses, ainsi que d'attaques financiĂšres, les banques amĂ©ricaines et Paypal ayant alors Ă©tĂ© contraintes, sur ordre du tribunal, de cesser de traiter les dons Ă Wikileaks. A cela s'ajoutent les attaques pour viols extravagantes dont il a fait l'objet. Julian a donc dĂ» se battre sur plusieurs fronts Ă la fois. L'accusation portĂ©e contre lui en 2018 n'est pas le fruit du hasard. Elle avait en effet un autre but que celui de le nuire et de le condamner.
Pouvez-vous préciser ce point ?
L'administration Trump Ă©tait victime de fuites. Il y avait de nombreuses fuites au sein de son propre cabinet, bien plus qu'auparavant sous Obama et maintenant sous Biden. Trump Ă©tait entourĂ© de personnes fournissant de nombreuses informations Ă la presse. Le New York Times Ă©tait alimentĂ© par ces fuites et publiait constamment de nouvelles rĂ©vĂ©lations. Le Washington Post Ă©galement. L'administration Trump Ă©tait donc trĂšs motivĂ©e pour colmater ces fuites. La meilleure façon d'y parvenir Ă©tait d'appliquer l'âEspionage Actâ contre les lanceurs d'alerte. L'Espionage Act est une loi fĂ©dĂ©rale amĂ©ricaine datant de 1917, adoptĂ©e aprĂšs l'entrĂ©e des Ătats-Unis dans la PremiĂšre Guerre mondiale et modifiĂ©e Ă plusieurs reprises depuis lors. Elle visait Ă l'origine Ă interdire l'ingĂ©rence dans les opĂ©rations militaires ou le recrutement, Ă prĂ©venir la dĂ©sobĂ©issance militaire et Ă empĂȘcher le soutien aux ennemis des Ătats-Unis en temps de guerre. Sur la base de cette loi, les communistes Ethel et Julius Rosenberg ont par exemple Ă©tĂ© accusĂ©s d'espionnage pour l'Union soviĂ©tique, condamnĂ©s Ă mort et exĂ©cutĂ©s en 1953. D'autres personnes accusĂ©es d'infractions Ă l'Espionage Act sont le dĂ©putĂ© socialiste germano-amĂ©ricain et rĂ©dacteur de journaux Victor L. Berger, le leader syndical et cinq fois candidat du âSocialist Party of Americaâ Eugene V. Debs, les anarchistes Emma Goldman et Alexander Berkman, l'ancien prĂ©sident de la âWatch Tower Bible and Tract Societyâ Joseph Franklin Rutherford, le lanceur d'alerte du Pentagone Daniel Ellsberg, les agents soviĂ©tiques Aldrich Ames et Robert Hanssen, l'agent germano-russe George Trofimoff, la lanceuse d'alerte Chelsea Manning, le lanceur d'alerte de la National Security Agency Edward Snowden - et mon mari.
Nous devons rĂ©tablir la norme de la libertĂ© de la presse, mĂȘme dans le monde occidental, puisquâelle qu'elle est inscrite dans la lĂ©gislation. â Stella Assange
Mais en aoĂ»t 2022, on a Ă©galement appris que l'ancien prĂ©sident Donald Trump lui-mĂȘme faisait l'objet d'une enquĂȘte pour violation possible des dispositions de l'Espionage Act, qui interdisent aux personnes non autorisĂ©es de dĂ©tenir des documents gouvernementaux liĂ©s Ă la dĂ©fense qui pourraient nuire aux Ătats-Unis ou aider une nation Ă©trangĂšre.
C'est bien sĂ»r vrai, mais c'est une autre histoire qui mĂ©rite en effet une enquĂȘte Ă part entiĂšre. A l'Ă©poque de l'administration Trump, l'enquĂȘte ne s'Ă©tendait pas seulement au lanceur d'alerte, mais aussi Ă la maison d'Ă©dition qui a publiĂ© les fuites. Quand le dossier de Julian a Ă©tĂ© ouvert, avec l'application de l'espionnage comme jamais auparavant, les attaques contre la presse libre sont Ă©galement devenues trĂšs concrĂštes. Il y a un avant et un aprĂšs l'arrestation de Julian, son asile Ă l'ambassade Ă©quatorienne et son arrestation par les autoritĂ©s britanniques. Il n'y a plus de norme mondiale, surtout pour les dissidents emprisonnĂ©s. Aux Ătats-Unis et en Grande-Bretagne, et plus gĂ©nĂ©ralement en Occident, on insiste sur la libertĂ© de la presse, mais quand on en vient Ă parler de Julian, personne, et surtout pas la justice, ne respecte les anciens principes qui le protĂ©geraient. L'un de mes arguments est que nous devons libĂ©rer Julian pour protĂ©ger les journalistes du monde entier ! Nous devons rĂ©tablir la norme de la libertĂ© de la presse, mĂȘme dans le monde occidental, oĂč elle est pourtant inscrite dans la lĂ©gislation.
La présidence à la Maison Blanche est-elle déterminante pour Julian Assange ?
Pensez-vous que des changements dans la hiérarchie de la politique aux Etats-Unis, par exemple un nouveau changement de président, pourraient aider votre mari ?
La question de savoir qui prĂ©side Ă la Maison Blanche impliquerait en effet que Julian est impitoyablement Ă la merci de la politique ! Certains candidats dĂ©mocrates Ă la prĂ©sidence disent qu'ils gracieraient Julian dĂšs le premier jour de leur prise de fonction. De toute Ă©vidence, ils ne sont malheureusement pas en tĂȘte des sondages pour le moment. Marianne Williamson et le philosophe et thĂ©ologien Dr Cornel West qui la soutient se sont en tout cas prononcĂ©s, tout comme Robert F. Kennedy Jr., pour l'abandon immĂ©diat des charges contre Julian. A l'Ă©poque d'Obama, c'Ă©tait aussi, pour le moins, envisagĂ©. Ce ne sera pas le cas pour les rĂ©publicains comme Donald Trump ou Ron DeSantis. Mike Huckabee, l'ancien gouverneur de l'Arkansas, demandait dĂ©jĂ en 2010 : âTout Ă part l'exĂ©cution est une peine bien trop douceâ. On sait que Trump dĂ©nonce âle manque de dĂ©termination Ă inculperâ. Le âproblĂšme du New York Timesâ reprĂ©sente pour lui âla solution du New York Timesâ. Lors d'une discussion entre lui et le directeur du FBI Christopher A. Wray - je l'ai lu dans un livre - il a Ă©tĂ© dit : âOn veut une tĂȘte au bout d'une piqueâ ! Cette tĂȘte, c'est celle de Julian - comme exemple dissuasif pour les autres dissidents et amoureux de la vĂ©ritĂ©. C'est aussi la raison pour laquelle le Washington Post, le New York Times et le Guardian, lorsqu'ils font des reportages, sont dorĂ©navant prudents et ne publient pas les documents qui leur sont transmis. Ils se disent finalement : âRegardez l'affaire Assange. Si nous utilisons ces documents et les publions, nous risquons de fermer boutique pour des annĂ©es !â
Pour conclure, me permettez-vous de poser une question personnelle ?
Bien sûr.
Pensez-vous qu'un jour vous pourrez mener une vie de famille "normale" avec Julian Assange ?
Une vie de famille normale avec Julian veut dire : une promenade en forĂȘt ou jouer avec les enfants. Nous en sommes malheureusement trĂšs loin. Mais nous ne perdons pas espoir.
A mural of Wikileaks founder Julian Assange, with his wife Stella standing in front © Antonio Balasco/dpa
đâđš Stella Assange: âJulian must be freed to protect journalists worldwideâ!
A normal family life with Julian means a walk in the woods or playing with the kids. Unfortunately, we're a long way from that. But we're not giving up hope.
By Marc Hairapetian, January 18, 2024
The lawyer and wife of the Wikileaks founder, imprisoned in London, talks about her case, freedom of the press and a ânormalâ family life.
Berlin - Stella Assange is a courageous woman. Born Sara Gonzalez Devant on November 20, 1983 in Johannesburg, this human rights activist, later known as Stella Moris-Smith Robertson, met her husband while defending his rights. For years, she has seen him only twice a month, when she visits him in the high-security wing of âHis Majesty's Prison Belmarshâ in London.
Australian Julian Paul Assange, now 52, has made international headlines as an investigative journalist, political activist, former hacker, programmer and founder and spokesman for Wikileaks. This latest disclosure platform gathers documents from government critics and whistleblowers from around the world and makes them available online. Acclaimed by some, Julian Assange is a thorn in the side of others. In 2010, in collaboration with the New York Times, the Guardian and Spiegel, Wikileaks published extracts from military protocols proving the war crimes committed by the United States during its interventions in Afghanistan and Iraq. The US government then opened an investigation against him. This was compounded in August 2010 by an arrest warrant in Sweden for alleged sexual offences. Fearing extradition to the United States, Julian Assange escaped the threat of extradition from Great Britain to Sweden in June 2012 by getting rid of his ankle bracelet and taking refuge in the Ecuadorian embassy in London. He was granted political asylum. In 2019, the new Ecuadorian president LenĂn Moreno stripped him of his citizenship.
The case against Julian Assange
Shortly afterwards, Assange was arrested by British police in the said embassy and sentenced to fifty weeks' imprisonment for breach of bail. That same month, the United States asked the UK to extradite him. The US indictment carries a cumulative sentence of up to 175 years' imprisonment, or even the death penalty in the worst case. In early 2021, a London court ruled that the Wikileaks founder should not be extradited to the US. The ruling was based on a potential risk of suicide. In December 2021, the Court of Appeal again lifted the extradition ban, so Julian Assange is once again at risk of extradition to the USA. The wedding ceremony between him and Stella Moris-Smith Robertson took place on March 23, 2022 at the âHMP Belmarshâ. The wedding dress was designed by the late fashion designer Vivienne Westwood, but the couple were not allowed to take official wedding photos.
While the Parliamentary Assembly of the Council of Europe had already voted unanimously in January 2020 for Julian Assange's âimmediate releaseâ and to prevent his extradition to the US, the British government authorized his extradition to the US shortly after his wedding, on June 22, 2022. His defense appealed against the decision, and he remains detained in the UK. In November 2022, Australian Prime Minister Anthony Albanese and international media called on the US government to halt the prosecution. In June 2023, the appeal was rejected by the London High Court... FR contributor Marc Hairapetian met Stella Assange at the Akademie der KĂŒnste am Hanseatenweg in Berlin for an interview.
Stella Assange talks about Julian Assange.
Your husband Julian Assange was awarded the Konrad Wolff Prize by the Academy of Arts at the end of 2023. Since he is still in prison, you accepted the prize on his behalf. I know your contact with him is limited, but have you spoken to him about it?
Yes, but I wasn't allowed to show him the certificate when I visited him. I'm not allowed to bring anything into the prison. It's the most closely guarded high-security prison in the UK. In a telephone conversation, I told him about the prize and the dinner with the jury. He said to me: "Please pass on to the jury my gratitude for the decision and above all for the courage they have shown in awarding me this prize". It meant a lot to him. Above all, the prize was a moral support that could help him move a little closer to freedom.
He is largely cut off from the world. His cell measures two meters by three. He spends 21 or 22 hours a day there, sometimes even 23. It's a very isolated existence. - Stella Assange on Julian Assange's prison conditions
How is he feeling today? I've read that he's suffering from depression, which is totally understandable. Life must have been a nightmare for him for many years.
Every day is a struggle. He needs to be in contact with the outside world, to read articles and talk to me on the phone, or to be able to see me, our children and his friends, twice a month, for an hour and a half, under supervision, during a visit to the prison. He has no Internet. He's really cut off from the world. His cell is two by three meters. He spends 21 or 22 hours a day there, sometimes even 23. It's an extremely solitary existence. Julian is a person with a general thirst for knowledge. He needs the outside world to explore things with passion. That's why this form of incarceration is particularly cruel for someone like him. What's more, he's still facing extradition to the United States. He is trying to resist it as best he can, with the help of his defenders. It's a fight for his life. In the United States, the criminal justice system is very different from what we know, understand and are used to in Europe. He faces a life sentence of at least 175 years, perhaps even execution. In roughly similar cases, only three percent of indicted whistleblowers have ever gone to court again. Many prisoners in the USA do not press charges because they fear that the legal proceedings will deprive them of their freedom for good.
Total Internet deprivation must be a particularly harsh additional punishment for someone like Julian Assange.
Indeed. Julian has no Internet, but neither does he have a fully functional computer with corresponding software. He has a computer given to him by the British Ministry of Justice. He only received it a year after being incarcerated. It was issued by the Ministry of Justice as a modified computer. Some keys are unusable and the word processing software has also been removed. As a result, the device is now no more than a kind of PDF reader with which he can read his court documents. He cannot use it to write notes to his lawyers. He can only write to them by hand, but his handwriting is not very legible. So Julian can only give advice to his lawyers by telephone. And that means extra costs... This is now his reality... His defense will definitely not be made any easier in this high-security prison.
Julian Assange has to fight on several fronts
Did he suspect he would one day be imprisoned for publishing secret US military documents? Many people admire him for his courage; others, especially in the USA, hate him and even publicly wish him dead.
When Wikileaks was launched in 2006, the Internet was just beginning to reach its full potential. Governments were beginning to digitize their archives. There was much debate as to whether these were public archives or only archives with special access. Transparency and accountability, combined with Julian's experience as a cartographer of anonymous communication, made these suppressed archives accessible to the public via Wikileaks. In this context, the term âanonymousâ means that the source has not been named. As you can see, freedom of the press was stronger back then than it is today. The climate at the time Julian was imprisoned was very different from that of 2009, 2010 and 2011, when he had already published everything. The worst of his accusations then came under the Trump administration. Of course, Julian had already been the subject of numerous attacks, including slanderous ones, as well as financial ones, with US banks and Paypal then forced by court order to stop processing donations to Wikileaks. Added to this were the extravagant rape charges against him. Julian has therefore had to fight on several fronts at once. The charge brought against him in 2018 was no accident. Indeed, it had a purpose other than to harm and condemn him.
Can you clarify this point?
The Trump administration was a victim of leaks. There were many leaks within his own cabinet, far more than before under Obama and now under Biden. Trump was surrounded by people providing a lot of information to the press. The New York Times was fueled by these leaks and constantly published new revelations. So did the Washington Post. The Trump administration was therefore highly motivated to plug these leaks. The best way to do this was to enforce the Espionage Act against whistleblowers. The Espionage Act is a U.S. federal law dating from 1917, passed after the United States entered the First World War and amended several times since then. It was originally intended to prohibit interference in military operations or recruitment, to prevent military disobedience and to prevent support for enemies of the United States in time of war. On the basis of this law, Communists Ethel and Julius Rosenberg, for example, were charged with spying for the Soviet Union, sentenced to death and executed in 1953. Others charged with Espionage Act offenses include German-American socialist congressman and newspaper editor Victor L. Berger, labor leader and five-time Socialist Party of America candidate Eugene V. Debs, anarchists Emma Goldman and Alexander Berkman, former Watch Tower Bible and Tract Society president Joseph Franklin Rutherford, Pentagon whistleblower Daniel Ellsberg, Soviet agents Aldrich Ames and Robert Hanssen, German-Russian agent George Trofimoff, whistleblower Chelsea Manning, National Security Agency whistleblower Edward Snowden - and my husband.
We must re-establish the norm of press freedom, even in the Western world, as it is enshrined in law. - Stella Assange
But in August 2022, we also learned that former President Donald Trump himself was under investigation for possible violation of the Espionage Act, which prohibits unauthorized persons from possessing defense-related government documents that could harm the United States or aid a foreign nation.
This is of course true, but it's another story that indeed deserves an investigation in its own right. In the days of the Trump administration, the investigation extended not only to the whistleblower, but also to the publishing house that published the leaks. When Julian's case was opened, with the application of espionage like never before, the attacks on the free press also became very concrete. There is a before and after to Julian's arrest, his asylum in the Ecuadorian embassy and his arrest by the British authorities. There is no longer a global norm, especially for imprisoned dissidents. In the United States and Great Britain, and more generally in the West, we insist on freedom of the press, but when it comes to talking about Julian, nobody, and especially not the justice system, respects the ancient principles that would protect him. One of my arguments is that we must free Julian to protect journalists the world over! We need to re-establish the norm of press freedom, even in the Western world, where it is enshrined in law.
Is the White House presidency decisive for Julian Assange?
Do you think that changes in the hierarchy of politics in the United States, such as another change of president, could help your husband?
The question of who presides over the White House would indeed imply that Julian is ruthlessly at the mercy of politics! Some Democratic presidential candidates say they would pardon Julian on their first day in office. Obviously, they are unfortunately not leading the polls at the moment. Marianne Williamson and the philosopher and theologian Dr. Cornel West, who supports her, have in any case come out in favor of dropping the charges against Julian immediately, as has Robert F. Kennedy Jr. In the Obama era, this was also, at the very least, envisaged. Not so for Republicans like Donald Trump or Ron DeSantis. Mike Huckabee, the former governor of Arkansas, asked as long ago as 2010: âAny short of execution is far too mild a punishmentâ. We know that Trump denounces âthe lack of determination to indictâ. For him, the âNew York Times problemâ means âthe New York Times solutionâ. In a discussion between him and FBI Director Christopher A. Wray - I read it in a book - it was said: âWe want a head on a stick !â That head is Julian's - as a deterrent to other dissidents and lovers of the truth. It's also the reason why the Washington Post, the New York Times and the Guardian, when reporting, are now cautious about publishing the documents they receive. In the end, they say to themselves: "Look at the Assange affair. If we use these documents and publish them, we risk going out of business for years!"
In conclusion, would you allow me to ask a personal question?
Of course.
Do you think that one day you'll be able to lead a "normal" family life with Julian Assange?
A normal family life with Julian means: a walk in the woods or playing with the kids. Unfortunately, we're a long way from that. But we're not giving up hope.