đâđš "Tout peut s'arrĂȘter demain"
"Julian est dans la merde et je veux le sortir de lĂ . Il ne peut plus s'exprimer en son nom, c'est pourquoi je dois parler pour lui, sa famille, et ses amis". â John Shipton
đâđš "Tout peut sâarrĂȘter demain"
Stella Assange fait Ă©tape Ă MĂŒnster dans le cadre de la tournĂ©e #FreeAssange.
đ° Par Frank Biermann, le 4 dĂ©cembre 2022
CâĂ©tait une soirĂ©e spĂ©ciale, la veille du deuxiĂšme dimanche de l'Avent, au petit cinĂ©ma d'art et d'essai Cinema de la Warendorfer Strasse. La politique mondiale s'y est arrĂȘtĂ©e pour quelques heures. Un trio menĂ© par Stella Assange, Ă©pouse et avocate de Julian Assange, le prisonnier politique le plus cĂ©lĂšbre du monde, fondateur de la plateforme de divulgation Wikileaks, y a veillĂ©. Elle a rencontrĂ© Julian Assange Ă Londres en 2011, et en est tombĂ©e amoureuse plus tard, lorsqu'elle a rejoint son Ă©quipe internationale d'avocats. Ils ont deux enfants ensemble (nĂ©s en 2017 et 2019). Stella et Julian se sont mariĂ©s en mars 2022 dans la prison de haute sĂ©curitĂ© de Belmarsh, au sud-est de Londres.
à ses cÎtés, Niels Ladefoge, journaliste. Il a participé en tant que caméraman au documentaire "Ithaka", projeté au Cinema ce soir, et a suivi John Shipton, le pÚre de Julian Assange, pendant deux ans.
Le troisiĂšme membre du groupe: Craig Murray, un Ăcossais terre-Ă -terre et plein d'humour, journaliste et ex-diplomate. Qui accepte avec calme de perdre deux fois de suite son ordinateur portable. "Cela peut aussi ĂȘtre une coĂŻncidence", rĂ©pond-il au milieu des rires de la salle Ă la question de savoir si les trois, en tant que trio de soutien, devaient Ă©galement s'attendre Ă des rĂ©pressions et des traques, et mĂȘme craindre les services secrets et autres puissances obscures. Murray a Ă©tĂ© ambassadeur britannique en OuzbĂ©kistan de 2002 Ă 2004, jusqu'Ă ce qu'il rĂ©vĂšle, en tant que lanceur d'alerte, l'utilisation de la torture. Murray est considĂ©rĂ© comme l'un des principaux soutiens d'Assange grĂące Ă ses nombreux reportages sur les procĂ©dures judiciaires. DĂšs le dĂ©but de la soirĂ©e, il explique clairement qu'il n'y aura pas de procĂšs Ă©quitable. "Ce n'est pas acceptable que l'une des parties puisse espionner intĂ©gralement la dĂ©fense de l'autre".
Lorsque le film "Ithaka" dĂ©marre, un silence lourd s'installe rapidement dans la salle. Les spectateurs voient alors Stella leur ouvrir les yeux sur sa vie privĂ©e avec Julian. Le film montre des images des camĂ©ras de surveillance de la CIA ( qui Ă©taient installĂ©es dans l'appartement du fondateur de Wikileaks, Julian Assange, dans un appartement de l'ambassade Ă©quatorienne Ă Londres). On y voit ses tentatives d'Ă©tablir une relation entre les enfants et leur pĂšre en isolement Ă l'aide d'un tĂ©lĂ©phone portable et de vidĂ©os prises avec un tĂ©lĂ©phone portable. Les jours passĂ©s Ă l'ambassade Ă©quatorienne comptaient encore parmi les meilleurs. Le 11 avril 2019, Assange a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© Ă Londres sur la base d'un mandat d'arrĂȘt amĂ©ricain. Il est incarcĂ©rĂ© depuis prĂšs de trois ans et demi dans une prison britannique de haute sĂ©curitĂ©, oĂč l'on enferme habituellement les terroristes ou les membres du crime organisĂ©.
Le héros malgré lui du film s'appelle John Shipton, il est le pÚre de Julian Assange, un constructeur à la retraite, un esprit intelligent qui aime Aristote et la mythologie grecque. La motivation de cet homme de 76 ans, qui vit à Melbourne et est redevenu pÚre à 70 ans, est claire : "Julian est dans la merde et je veux le sortir de là ". Stella est étonnée de voir à quel point la maniÚre de raconter de son beau-pÚre et de son mari sont semblables. Calme, réfléchi, ne cherchant pas à faire des effets de manche. En fait, il n'aime pas les médias. Mais si ses interviews peuvent aider son fils, il le fait: "Julian ne peut plus s'exprimer en son nom, c'est pourquoi je dois parler pour lui, sa famille et ses amis". Comme par exemple lors de la procédure d'extradition de Julian vers les Etats-Unis, réclamée par le gouvernement américain, lorsqu'une décision est rendue. En septembre 2002, la décision est certes en faveur de Julian. La raison invoquée par le juge est qu'Assange souffre de dépressions moyennes à graves et qu'il est considéré comme suicidaire. Cela rend John, furieux et en colÚre: "C'est déjà terrible, et cela va empirer. Julian a déjà 49 ans". De nombreux spectateurs ont les larmes aux yeux, comme ce pÚre qui souffre. Brian Eno a composé la musique du film. Le prix que Julian Assange et tous ses proches doivent payer pour leur combat en faveur de la liberté de la presse est trÚs lourd.
Le film est suivi d'un dĂ©bat animĂ© par Liza Lauer, du groupe universitaire d'Amnesty International. "Mon mari sert d'exemple, et il ne faut pas qu'il fasse d'Ă©mules", dit Stella. Il s'agit tout de mĂȘme d'un combat totalement inĂ©gal entre la puissance mondiale que constituent les Etats-Unis, d'une part, et Assange et son Ă©quipe juridique, d'autre part. Au-delĂ de toute question juridique, cette procĂ©dure est une affaire politique. Et elle ne peut ĂȘtre rĂ©solue que politiquement. "Tout pourrait sâarrĂȘter demain". Elle se fĂ©licite du fait que les cinq mĂ©dias "The New York Times", "The Guardian", "Le Monde", âDer Spiegelâ et "El PaĂs", qui ont publiĂ© il y a trĂšs exactement douze ans, en collaboration avec Wikileaks, des rĂ©vĂ©lations qui ont fait la une des journaux du monde entier, aient publiĂ© une lettre ouverte intitulĂ©e "Le journalisme n'est pas un crime". Ils y rĂ©clament l'abandon par le gouvernement amĂ©ricain des poursuites contre Julian Assange pour la publication de documents secrets.
Comme il n'est guĂšre rĂ©aliste de compter sur l'arrĂȘt de la procĂ©dure, Stella, Craig et Niels continueront Ă mener des actions dans toute l'Allemagne avec le documentaire, tout en sachant que toutes les salles de cinĂ©ma ne seront pas forcĂ©ment aussi bien remplies que celle de MĂŒnster.
https://steadyhq.com/de/munstersche/posts/883797a0-6390-4042-be88-4b6e8861d1f1