👁🗨 "Transcender la politique" : un groupe inattendu de parlementaires australiens se mobilise en faveur de Julian Assange
L'avocat d'Assange prévoit qu'Assange passera au moins trois ans dans le système judiciaire britannique, et cinq à sept ans avant de pouvoir "exercer ses droits", si jamais l'extradition a lieu.
👁🗨 "Transcender la politique" : un groupe inattendu de parlementaires australiens se mobilise en faveur de Julian Assange
Par By Finn McHugh, le 12 mars 2023
Un groupe multipartite d'hommes politiques australiens demande le retour de Julian Assange en Australie. Son père dit qu'il n'a pas l'espoir, mais la foi, que cela se produira.
POINTS CLÉS
Le père de Julian Assange dit qu'il n'a pas d'espoir, mais qu'il a "la foi".
Le fondateur de Wikileaks lutte contre l'extradition vers les États-Unis, où il risque 175 ans de prison.
Un groupe de parlementaires s'est réuni à Canberra cette semaine pour discuter de son avenir.
Le sénateur de One Nation Malcolm Roberts, et le sénateur des Verts David Shoebridge sont rarement sur la même longueur d'onde.
Qu'il s'agisse du changement climatique, de l'immigration, les deux hommes sont souvent en désaccord sur les questions à traiter.
Mais jeudi, leurs yeux étaient rivés sur un écran au Parlement, écoutant une présentation qui semblait avoir touché une corde sensible au-delà des clivages politiques australiens.
L'intervention de Stella Moris était retransmise par vidéoconférence depuis l'Europe.
Son mari, le fondateur australien de Wikileaks Julian Assange, est en détention provisoire depuis près de quatre ans à la prison londonienne de Belmarsh, une prison de haute sécurité spécialement réservée aux dé*tenus considérés comme à risque pour la sécurité nationale.
L'avocat australien de M. Assange, Steven Kenny, et son père John Shipton étaient présents à la réunion organisée par le groupe parlementaire "Bring Julian Assange Home".
Ce groupe est dirigé par le député indépendant Andrew Wilkie, et comprend des représentants de tous les partis représentés au Parlement.
M. Kenny a déclaré à SBS News qu'il était important que les hommes politiques aient accès aux faits plutôt qu'à la "propagande".
"Nous arrivons tous avec des idées préconçues. Il en va de même pour eux, jusqu'à ce qu'ils comprennent les mensonges qui ont été racontés au sujet de Julian. Ils commencent alors à se rendre compte qu'il y a un peu plus d'éléments dans cette histoire qu'ils ne le pensaient", ajoute-t-il.
▪️ UN AVERTISSEMENT AUX JOURNALISTES AUSTRALIENS
Sous la direction de M. Assange, Wikileaks a publié des centaines de milliers de documents américains classifiés, dont une vidéo intitulée "Collateral Murder" décrivant une frappe aérienne amer*icaine de 2007 qui a tué des journalistes et des civils.
Les 18 chefs d'accusation retenus contre lui aux Etats-Unis - le ministère de la justice (DoJ) l'a accusé d'avoir commis "l'une des plus importantes compromissions d'informations classifiées" de l'histoire du pays - sont passibles d'une peine maximale de 175 ans.
Le DoJ soutient que M. Assange a mis en danger des agents américains, ainsi que des Afghans et des Irakiens travaillant avec eux, en publiant leurs noms non expurgés.
Il affirme que M. Assange est poursuivi pour avoir mis des vies en danger, et non pour avoir agi en tant qu'éditeur, argument qui pourrait potentiellement éviter tout conflit avec le Premier Amendement, qui garantit la liberté d'expression.
Les tentatives des Etats-Unis pour l'extrader ont été approuvées par un tribunal britannique, bien que M. Assange fasse appel de la décision.
En 2019, les autorités suédoises ont abandonné une enquête distincte sur une allégation de viol portée contre le fondateur de Wikileaks.
M. Kenny prévoit que son client passera encore au moins trois ans dans le système judiciaire britannique, et qu'il lui faudra cinq à sept ans pour "exercer ses droits" aux Etats-Unis si l'extradition a lieu.
"À justice retardée, justice déniée", affirme-t-il.
M. Kenny affirme que les poursuites à l'encontre de son client par la superpuissance a été "largement acceptée" par les médias. Mais il avertit que la plus grande démo*cratie du monde est en train de créer un précédent international susceptible être utilisé par des régimes autoritaires à l'avenir.
"Vous pensez que vous êtes en sécurité, ici. Vous êtes en Australie et il n'y a pas de traité d'extradition, donc vous pouvez écrire ce que vous voulez sur la Chine", dit-il.
"Mais vous ne voulez pas aller à Bali en vacances, ni à Paris, ni à Rome, parce qu'ils ont des traités d'extradition avec la Chine.
"Pourquoi les Chinois n'exerceraient-ils pas les mêmes droits juridiques internationaux pour faire taire leurs détracteurs ?”
▪️ LA SANTÉ MENTALE DE JULIAN ASSANGE EN PRISON
M. Shipton reste silencieux pendant que l'avocat parle, mais devient expansif lorsqu'on l'interroge sur l'état d'esprit de son fils.
"Son état d'esprit varie selon qu'il a l'impression que les choses s'améliorent, ou qu'elles se dégradent", explique-t-il.
Selon lui, le transfert de sonn fils à Belmarsh a été un coup qui l'a plongé dans une "profonde dépression" alors qu'il était iso*lé 23 heures par jour dans l'aile sanitaire de la pris*on.
“Au moins un des détenus de cette aile était un meurtrier condamné”, explique M. Shipton.
“Les prisonniers appelaient l'aile sanitaire "l'aile de l'enfer". Vous êtes coupé de tout contact humain, enfermé avec des personnes souffrant de diverses formes de folie", explique-t-il.
M. Shipton explique que son fils n'a plus droit qu'à un appel téléphonique de 10 minutes par jour, mais que cela dépend de la disponibilité. Les dimanches sont plus chargés - les détenus rivalisent pour obtenir un appel le week-end.
Après une procédure judiciaire qui a duré plus de dix ans, il rejette désormais l'optimisme, quant à une issue à l'incarcération de son fils.
"L'espoir, en tant que moteur, s'use et semble plutôt bête... il suffit de faire ce que l'on peut", dit-il.
Mais lorsqu'on lui demande si l'espoir le soutient personnellement, sa réponse est simple.
"Non", dit-il en marquant une pause. "Non, j'ai juste la foi.”
▪️ ENGAGEMENT MULTIPARTITE
Selon M. Kenny, l'engagement des différents partis, caractéristique de nombreuses démocraties qui disposent de groupes de travail parlementaires pro-Assange, montre que les "fondements sous-jacents" de l'affaire transcendent la politique.
"Il s'agit de la liberté de la presse. Il s'agit d'une personne poursuivie pour avoir révélé la vérité", explique-t-il.
"Les gens de gauche et de droite savent que pour survivre, ils ont besoin d'une presse libre. Nous avons besoin que le gouvernement soit tenu pour responsable et qu'il rende des comptes, et nous avons besoin de la*nceurs d'alerte".
Le député du gouvernement [travailliste] Josh Wilson n'a pas pu assister à la réunion, mais publié une vidéo soulignant que l'affaire avait des implications plus larges que celles conncernant d'un seul homme.
"C'est en fait essentiel, plus globalement, parce que les poursuites contre Julian Assange sapent certains principes importants de la liberté de la presse et de la responsabilité de l'action gouvernementale", a-t-il déclaré.
"Il est temps que la persécution, les poursuites, et l'incarcération de Julian Assange prennent fin."
Cependant, M. Wilson a déclaré qu'il était heureux de faire partie d'un go*uvernement qui avait déclaré que "trop, c'est trop".
▪️ COMMENT LE GOUVERNEMENT ALBANESE VOIT L'AFFAIRE
Le Premier mini*stre Anthony Albanese a réitéré son désir de voir M. Assange rentrer chez lui, mais a souligné la nécessité d'une diplo*matie "discrète" pour y parvenir.
Un porte-parole du ministère des affaires étrangères et du commerce a souligné que l'Australie n'était pas en mesure d'intervenir dans les procédures judiciaires d'un autre pays
"tout comme ils ne sont pas en mesure d'intervenir dans celles de l'Australie".
Il a toutefois précisé que M. Assange, comme tout Australien incarcéré à l'étranger, bénéficiait d'un soutien consulaire régulier.
"Le gouvernement australien a clairement exprimé son point de vue selon lequel l'affaire de M. Assange traîne depuis bien trop longtemps, et qu'il convient d'y mettre un terme", a déclaré le ministère dans un communiqué.
"Nous continuerons à exprimer ce point de vue aux gouvernements du Royaume-Uni et des Etats-Unis."
M. Shipton affirme que son engagement avec le parti travailliste s'est limité à une seule réunion depuis l'entrée en fonction de ce dernier.
"Nous avons trouvé Penny Wong diserte sur la question et sympathique. [Mais depuis lors, nous n'avons eu aucun contact avec aucun membre du gouvernement", déclare-t-il.
Il insiste sur le fait que "les questions juridiques [qui] recouvrent d'un voile" sur son fils doivent être posées, l'attention se tournant vers ce que Wikileaks a révélé.
"Notre attention a été détournée, pour se concentrer sur les circonstances immédiates d'une personne persécutée. Nous prenons parti ou avons des opinions, et nous en oublions de regarder les bains de sang, et la destruction d'une nation après l'autre", déclare-t-il.