👁🗨 Trump prépare-t-il une guerre avec l’Égypte & la Jordanie ? (Question à ne pas poser à la gamine du Huffpost)
Trump comprend-il quoi que ce soit au droit international ? Comprend-il vraiment quelque chose au Moyen-Orient ?
👁🗨 Trump prépare-t-il une guerre avec l’Égypte & la Jordanie ? (Question à ne pas poser à la gamine du Huffpost)
Par Martin Jay*, le 14 février 2025
C'est la blague du gorille et non seulement Trump ne la comprend pas, mais elle ne s'applique plus à lui. Où un gorille de 300 kilos s'assoit-il dans la pièce ? Réponse : où il veut. La dernière version améliorée de Trump, qui consiste à intimider, menacer et tout ramener à lui, ne fonctionne toujours pas sur la scène internationale. Nous sommes tellement habitués à ce style de menaces avant même que les négociations ne commencent qui sont censées atténuer les victimes, mais que Trump le fasse aux dirigeants de l'Égypte et de la Jordanie, c'est énorme. Le roi Abdallah est bien venu, mais il a semblé visiblement choqué lors de la conférence de presse lorsque Trump a continué à parler de sa stratégie immobilière à Gaza, consistant à transférer les habitants de Gaza dans les pays voisins.
Le style de Trump lui vaut souvent des déboires. Il ne cherche nullement à utiliser ses propres canaux diplomatiques, ni même le département d'État, pour familiariser les dirigeants du monde entier avec ses idées farfelues. Lorsque M. Netanyahu est monté à la tribune la semaine dernière, lors de la conférence de presse, il était clair que l'idée de “s'emparer de Gaza” lui était déjà venue à l'esprit, ce jour-là d’ailleurs sans doute. Netanyahu avait l'air d'être en transe.
Comme Trump n'a pas la patience de lire ses dossiers ou d'écouter ses conseillers, ce type de situation est susceptible de se produire fréquemment. Une idée totalement stupide, qui n'a aucune chance de fonctionner d'un point de vue logistique ou juridique, prendra le pas sur un sujet plus important, en l'occurrence Gaza. Est-ce une ruse de Trump ? A-t-il l'intention de donner une impulsion samedi après-midi - 15février - pour que Netanyahu bombarde les Gazaouis avec encore plus de férocité que par le passé ? De nombreux analystes affirment aujourd'hui que les Palestiniens sont pris au piège, et que les négociations finales sont perturbées par le fait qu'un accord ne peut pas être conclu sans cessez-le-feu effectif. La mort de 92 Gazaouis pendant le cessez-le-feu en raison d'attaques israéliennes montre bien que les Israéliens n'ont pas l'intention de le respecter. Que les Palestiniens jouent le jeu, c'est ce que veulent Trump et Netanyahu.
“Bizarrement”, tous les Palestiniens libérés sont renvoyés à Gaza, qu'ils soient ou non originaires de l'enclave. L'accord conclu par les Israéliens prévoyait manifestement de les massacrer après quelques jours de liberté, mais dans un environnement qu'ils ne connaissent pas et qui n'est plus qu'un tas de décombres, avec quelques camions d'aide faisant leur apparition une fois de temps en temps.
Le plan global pour Gaza est de poursuivre le nettoyage ethnique. Pendant ce temps, le monde entier s'interroge sur le sérieux du projet de Trump d'“acheter” Gaza, corrigé par la suite par “s'en emparer”. Trump comprend-il quoi que ce soit au droit international ? Comprend-il vraiment quoi que ce soit au Moyen-Orient ?
Ce n'est pas si important. Ce qui compte, c'est que Trump ne peut fonctionner qu'à un niveau très basique, et que c'est lui qui devra élaborer le plan. Ses idées bouffonnes déstabilisent les dirigeants arabes, qui s'alignent tous pour bloquer son idée de Gaza et appeler à une solution à deux États. Ce qu'aucun journaliste de la Maison Blanche n'a été capable de demander, alors qu'ils en ont eu l'occasion en présence du roi Abdallah, c'est quelles pourraient être les implications pour l'Égypte et la Jordanie d'une réduction de leurs subventions. Le roi Abdallah a laissé entendre très courtoisement qu'il ne serait pas dans l'intérêt de l'Amérique de mettre en œuvre ce plan extravagant. Mais que voulait-il dire ?
En un mot, le plan de Trump d'abandonner les Palestiniens à l'Égypte et à la Jordanie ne peut pas fonctionner, non pas parce que ces dirigeants le bloquent, et vont même jusqu'à menacer de déclencher une guerre. Il ne peut pas fonctionner parce que Trump ignore tout de la politique régionale - amener un demi-million de Palestiniens en Jordanie pourrait sonner le glas du règne du roi Abdallah - mais surtout parce qu'Israël perdrait la Jordanie en tant que partenaire pour sa sécurité. Il est incroyable que personne dans l'équipe de Trump ne comprenne cela et n'en ait parlé à Donald. L'année dernière encore, lorsque l'Iran a tiré des roquettes sur Israël, c'est l'armée de l'air jordanienne qui les a abattues (partiellement). Israël va-t-il se débarrasser d'un tel partenaire pour la bagatelle de 1,5 milliard de dollars d'aide annuelle à Amman ? Trump 2.0 projette ses propres idées et fait de moins en moins appel aux spécialistes, remplacés par des toutous qui opinent sagement du bonnet. On peut s'attendre à ce que la tendance se confirme car, pour Trump, c'est une formule gagnante qui lui permet de maintenir un contact permanent avec les médias, de continuer à faire la une des journaux pour expliquer le suivi de sa première grande et stupide idée. Et ensuite, ils font le suivi de cette idée. Nos journalistes occidentaux sont désormais si peu formés, si stupides et si serviles qu'ils ne se rendent même pas compte qu'ils sont victimes de Trump, même s'il faut compatir avec la pauvre chérie du Huffington Post à qui Trump a dit “vous ne savez même pas de quoi vous parlez” lors d'un moment de câlinothérapie à bord d'Air Force One. Juste au moment où on croit que Trump a épuisé son répertoire, il se contente de ridiculiser les caniches qui le suivent partout et enregistrent ses commentaires, et se prennent probablement pour de vrais journalistes.
L'idée du plan immobilier délirant de Gaza n'est qu'une distraction pendant que les responsables prennent le relais et s'attellent à la tâche la plus ardue. Mais l'idée de Trump de déplacer les Palestiniens en Arabie saoudite, pour déjouer Sisi et Abdallah II, relève du génie. MBS n'a rien vu venir. Trump est toujours le gorille de 300 kilos qui cherche où s'installer dans la pièce. Et les Arabes devront s'accommoder de son excentricité, car il est aussi peu probable de les voir s'organiser et prendre la tête du mouvement que de voir la petite du Huffpost devenir journaliste.
* Martin Jay est un journaliste britannique primé basé au Maroc, où il est correspondant du Daily Mail (Royaume-Uni). Il a précédemment réalisé des reportages sur le printemps arabe pour CNN et Euronews. De 2012 à 2019, il a travaillé à Beyrouth pour plusieurs médias internationaux, dont la BBC, Al Jazeera, RT et DW, ainsi que pour le Daily Mail, le Sunday Times et TRT World en qualité de journaliste indépendant. Sa carrière l'a amené à travailler dans près de 50 pays d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Europe pour une multitude de grands médias. Il a vécu et travaillé au Maroc, en Belgique, au Kenya et au Liban.