đâđš Un empire en dĂ©route, ou la fin des opĂ©rations secrĂštes de la CIA
La NED ne rĂ©sisterait pas Ă la moindre enquĂȘte publique et les âopĂ©rationsâ ouvertement financĂ©es par les USA ne sont que le âbaiser de la mortâ quâelle Ă©tait censĂ©e dĂ©passer. L'Empire est en dĂ©route.
đâđš Un empire en dĂ©route, ou la fin des opĂ©rations secrĂštes de la CIA
Par Kit Klarenberg, le 5 janvier 2025
Au cours des derniers mois, une Ă©volution notable dans le dĂ©clin de l'Empire est passĂ©e quasiment inaperçue. La base de donnĂ©es des subventions de la National Endowment for Democracy [NED] a Ă©tĂ© dĂ©sactivĂ©e du web. Jusqu'Ă rĂ©cemment, une interface de recherche permettait aux visiteurs de consulter les dossiers dĂ©taillĂ©s des ONG, des organisations de la sociĂ©tĂ© civile et des projets mĂ©diatiques financĂ©s par Washington dans certains pays - couvrant la majeure partie du monde - les budgets allouĂ©s et les entitĂ©s responsables de la mise en Ćuvre de ces initiatives. Cette ressource a aujourd'hui disparu de maniĂšre inexplicable, et avec elle, d'Ă©normes quantitĂ©s de preuves irrĂ©futables et auto-incriminantes des pratiques barbouzardes des Ătats-Unis Ă l'Ă©tranger.
Les dossiers de subventions de la NED pour la GĂ©orgie, par exemple, sont le thĂ©Ăątre d'efforts rĂ©pĂ©tĂ©s de rĂ©volution de couleur, au premier rang desquels figurent des organisations soutenues par les financements de la NED. Bien que toujours accessibles via les archives internet, ils ont Ă©tĂ© supprimĂ©s au cours de l'Ă©tĂ©. Aujourd'hui, les visiteurs des URL associĂ©s sont redirigĂ©s vers une rubrique brĂšve et simplement intitulĂ©e âEurasieâ. Le texte dĂ©crit en termes trĂšs gĂ©nĂ©raux les objectifs de la Fondation au niveau rĂ©gional et le montant total dĂ©pensĂ©, mais les questions cruciales de savoir oĂč et sur quoi ne sont pas prĂ©cisĂ©es. Le texte indique en outre, comble de l'hypocrisie, que
âL'essentiel du travail de la NED dans la rĂ©gion consiste Ă garantir l'accĂšs des populations locales Ă des informations objectives. Dans toute la rĂ©gion, les acteurs gouvernementaux tentent de limiter la diffusion d'informations et la communication en ligne pour les citoyensâ.
En consĂ©quence, les universitaires indĂ©pendants, les militants, les chercheurs et les journalistes ont Ă©tĂ© exclus d'une ressource inestimable pour tracer et dĂ©noncer les machinations de l'Empire. Toutefois, la disparition des documents publics de la NED ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e que comme une victoire significative pour ces mĂȘmes acteurs. La raison d'ĂȘtre dĂ©clarĂ©e et explicite de la NED Ă©tait de rendre public ce que se permettait - et se permet encore dans de nombreux cas - le renseignement amĂ©ricain. Aujourd'hui, aprĂšs 40 ans de ravages dans le monde entier au service de l'Empire, la CIA a Ă©tĂ© contrainte Ă la clandestinitĂ©, mettant ainsi un terme Ă sa vocation. Combien de temps va-t-elle encore survivre ?
âL'agression militaire de la Russie, ses rĂ©seaux kleptocratiques, son influence parmi les Ătats autoritaires et les acteurs non Ă©tatiques et l'exportation de son idĂ©ologie autoritaire constituent une menace non seulement pour l'Ukraine et d'autres Ătats voisins, mais aussi pour le monde entier. Bien que la Russie projette sa puissance Ă l'Ă©chelle mondiale, elle est profondĂ©ment divisĂ©e Ă l'intĂ©rieur de ses frontiĂšres. Des pans entiers de la population continuent d'ĂȘtre favorables Ă la dĂ©mocratie et sont en quĂȘte d'opportunitĂ©s d'engagement civique et d'activisme local. Les Ătats d'Eurasie les plus dĂ©mocratiques, comme l'ArmĂ©nie et la GĂ©orgie, sont les mieux placĂ©s pour obtenir le soutien de l'Europe et canaliser les aspirations des populations Ă la dĂ©mocratie, Ă la prĂ©servation de l'identitĂ© nationale et Ă l'intĂ©gration europĂ©enne. En Asie centrale, les gouvernements, mĂȘme les plus autoritaires, cherchent des moyens d'accroĂźtre leur prestige international et leur lĂ©gitimitĂ© nationale. Une part croissante des populations locales s'identifie Ă l'Ukraine et cherche Ă faire valoir ses propres griefs Ă l'Ă©gard de la domination russe. Dans toute la rĂ©gion de l'Eurasie, la sociĂ©tĂ© civile exprime de plus en plus clairement le principe selon lequel, Ă long terme, seules les valeurs dĂ©mocratiques peuvent prĂ©server la souverainetĂ© des Ătats contre les empiĂštements impĂ©rialistes. En collaboration avec les principaux instituts, la NED soutient des programmes diversifiĂ©s afin de renforcer la capacitĂ© des organisations de la sociĂ©tĂ© civile, des mĂ©dias, des syndicats et des partis politiques Ă exiger de leurs gouvernements qu'ils rendent des comptes Ă leurs concitoyens. Au-delĂ de la rĂ©gion Eurasie, la NED s'efforce de crĂ©er des rĂ©seaux entre diverses organisations de la sociĂ©tĂ© civile afin de mieux cerner l'influence autoritaire de la Russie et d'y rĂ©pondreâ.
Des âcoups d'Ătatâ au grand jour
La NED a Ă©tĂ© fondĂ©e en novembre 1983, aprĂšs que la CIA a Ă©tĂ© mĂȘlĂ©e Ă une sĂ©rie de scandales publics trĂšs gĂȘnants. William Casey, alors directeur de l'Agence, a jouĂ© un rĂŽle central dans sa crĂ©ation. Son objectif Ă©tait de crĂ©er un dispositif public permettant Ă la CIA de mener Ă bien ses activitĂ©s traditionnelles d'ingĂ©rence Ă l'Ă©tranger, mais au grand jour. Depuis, la NED a financĂ© d'innombrables groupes d'opposition, mouvements militants, mĂ©dias et syndicats Ă coups de millions de dollars destinĂ©s Ă la propagande et Ă la mobilisation politique, afin de perturber, dĂ©stabiliser et dĂ©loger les rĂ©gimes âennemisâ dans le monde entier.
La vĂ©ritable nature de la NED a Ă©tĂ© ouvertement reconnue par les grands mĂ©dias pendant de nombreuses annĂ©es. En juin 1986, Carl Gershman, prĂ©sident de longue date de la NED, a dĂ©clarĂ© au New York Times: âIl serait terrible pour les groupes dĂ©mocratiques du monde entierâ d'ĂȘtre subventionnĂ©s par la CIA. La rĂ©vĂ©lation de telles connivences par le passĂ© impliquait qu'elles avaient Ă©tĂ© âsuspenduesâ et confiĂ©es Ă la NED. Plusieurs personnalitĂ©s haut placĂ©es ont vigoureusement niĂ© l'existence d'un quelconque lien entre la NED et l'Agence, bien que l'organe de presse ait reconnu que de nombreux programmes de la NED prĂ©sentaient des âsimilitudes Ă©videntesâ avec d'anciennes opĂ©rations de la CIA.
Ă cette Ă©poque, la NED travaillait d'arrache-pied pour Ă©radiquer le communisme en Union soviĂ©tique, au sein du Pacte de Varsovie et en Yougoslavie. Elle a notamment investi massivement dans le cĂ©lĂšbre syndicat polonais Solidarnosc, devenu le symbole international de la RĂ©sistance anti-communiste. En septembre 1991, le Washington Post a publiĂ© un article trĂšs Ă©logieux sur ces activitĂ©s, affirmant que les âmiracles politiquesâ rĂ©alisĂ©s par la NED dans l'ancienne sphĂšre soviĂ©tique ont inaugurĂ© un ânouvel univers de coups d'Ătatâ et le principe de âtransparence Ă l'Ă©trangerâ :
âLa grande Ă©poque des opĂ©rations secrĂštes est rĂ©volue. Le monde ne fonctionne plus clandestinement. Nous vivons dĂ©sormais Ă l'Ăšre de l'action dĂ©clarĂ©e... Lorsque de telles activitĂ©s sont menĂ©es ouvertement, les risques potentiels associĂ©s sont quasi nuls. La transparence est son propre garde-fou. Le financement clandestin de ces groupes serait un vĂ©ritable baiser de la mort s'il Ă©tait dĂ©couvert. Un financement transparent, semble-t-il, est synonyme de succĂšsâ.
La NED s'est employée à faire tomber un certain nombre de gouvernements tout au long des années 1990 et 2000, et ce trÚs ouvertement. Dans de nombreux cas, les médias grand public ont publié des comptes rendus trÚs révélateurs exposant précisément les modalités de l'opération. En novembre 2004, des militants formés et financés par la NED ont imposé un nouveau scrutin présidentiel en Ukraine, afin d'y installer un fantoche pro-occidental. Comme l'a rapporté avec jubilation le Guardian , toute cette opération a été
âconçue par les AmĂ©ricainsâ et âconstitue un processus complexe et brillamment conçu de promotion de l'image de marque et de communication grand public par l'Occidentâ, processus utilisĂ© Ă maintes reprises au cours du nouveau millĂ©naire pour ârenverser des rĂ©gimes hostilesâ :
âFinancĂ©e et organisĂ©e par le gouvernement amĂ©ricain, avec le concours de cabinets de consultants, d'instituts de sondage, de diplomates, des deux grands partis amĂ©ricains et d'organisations non gouvernementales amĂ©ricaines, l'opĂ©ration - ingĂ©nierie de la dĂ©mocratie par les urnes et la dĂ©sobĂ©issance civile - est aujourd'hui si bien rodĂ©e que ses mĂ©thodes sont dĂ©sormais un modĂšle pour gagner les Ă©lections de pays tiersâ.
Le âbaiser de la mortâ
L'annĂ©e suivante, l'USAID [United States Agency for International Development, USAID) est lâagence du gouvernement des Ătats-Unis chargĂ©e du dĂ©veloppement Ă©conomique et de lâassistance humanitaire dans le monde] a publiĂ© un magazine sur papier glacĂ©, Democracy Rising, vantant abondamment la façon dont elle et la NED ont jouĂ© un rĂŽle clĂ© dans une sĂ©rie de bouleversements insurrectionnels en GĂ©orgie, au Kirghizistan, au Liban, en Yougoslavie et ailleurs au cours des premiĂšres annĂ©es du XXIe siĂšcle. En fĂ©vrier 2014, le gouvernement ukrainien a de nouveau Ă©tĂ© victime d'un coup d'Ătat orchestrĂ© par la NED, la ârĂ©volutionâ de Maidan. Pourtant, les mĂ©dias ont soit ignorĂ© le rĂŽle irrĂ©futable des Ătats-Unis dans la genĂšse de ce bouleversement, soit rejetĂ© l'idĂ©e comme Ă©tant de la âdĂ©sinformation russeâ, ou relevant de la thĂ©orie du complot.
Et ce, bien que les sondages récents n'ont jamais prouvé que les Ukrainiens soutenaient majoritairement les manifestations de Maïdan, que le président évincé Viktor Ianoukovitch est resté l'homme politique le plus populaire du pays jusqu'au dernier jour de son mandat, que tous les acteurs de Maïdan, y compris et surtout les initiateurs des manifestations, ont été financés par la NED ou l'USAID, que les dirigeants des organisations financées par Washington dans le pays ont ouvertement annoncé leur volonté de renverser Ianoukovitch au cours des années précédentes, et que la NED ait soutenu le pays à hauteur d'environ 20 millions de dollars pour la seule année 2013.
Cette omertĂ de masse, encore renforcĂ©e depuis, s'explique peut-ĂȘtre par l'hostilitĂ© croissante des gouvernements et des populations Ă©trangĂšres Ă l'Ă©gard de la NED, et par les tentatives de restreindre ou carrĂ©ment proscrire l'organisation. Ainsi, non seulement la vĂ©ritable raison d'ĂȘtre et le modus operandi de la NED sont dĂ©sormais inavouables, mais ils sont Ă©galement farouchement contestĂ©s par les journalistes occidentaux. En juillet 2015, un article du Guardian sur le bannissement de la NED par la Russie s'est appuyĂ©, aussi incroyable que cela puisse paraĂźtre, sur une brĂšve citation du site web de la NED pour dĂ©crire ses activitĂ©s.
âLa National Endowment for Democracy (NED), une organisation Ă but non lucratif basĂ©e Ă Washington et financĂ©e en grande partie par le CongrĂšs amĂ©ricain, est devenue le premier groupe frappĂ© d'interdiction en Russie en vertu d'une loi contre les organisations non gouvernementales internationales âindĂ©sirablesâ.
Selon son site web, la National Endowment for Democracy (NED) se
âconsacre Ă la croissance et au renforcement des institutions dĂ©mocratiques dans le mondeâ et en finançant des organisations non-gouvernementales locales dans plus de 90 pays. Mais dans un communiquĂ© publiĂ© mardi, le parquet a dĂ©clarĂ© qu'elle âconstitue une menace pour l'ordre constitutionnel de la FĂ©dĂ©ration de Russie, ainsi que pour la protection et la sĂ©curitĂ© du gouvernementâ.â
Si les grands mĂ©dias ont gardĂ© le silence sur l'influence dĂ©lĂ©tĂšre de la NED Ă l'Ă©tranger au cours de la derniĂšre dĂ©cennie, il n'en va pas de mĂȘme pour les universitaires, les militants, les chercheurs et les journalistes dissidents. La base de donnĂ©es des subventions de la NED s'est avĂ©rĂ©e un outil inestimable pour surveiller de prĂšs les intrigues internationales de Washington et rĂ©pertorier les liens privĂ©s et organisationnels des agents et des organes d'influence parrainĂ©s par la NED. Par ailleurs, les multiples aveux publics de ses propres dirigeants ont suffi Ă prouver que la NED n'est rien d'autre que la couverture de la CIA.
Chaque fois que des manifestations éclatent quelque part dans le monde et sont largement couvertes par les médias occidentaux, les citoyens concernés peuvent consulter la base de données des subventions de la NED et constater que, dans l'écrasante majorité des cas, la plupart, voire la totalité des individus et des groupes cités dans les reportages, bénéficient d'un financement de la NED. Bien qu'impossible à quantifier, il ne serait pas surprenant que les voix dissidentes attirant l'attention sur cette réalité aient contribué à prévenir des tentatives de révolutions de couleur, à contrecarrer des campagnes d'ingérence, à protéger des gouvernements et des personnalités politiques populaires, et bien d'autres choses encore.
Bien entendu, mĂȘme si la NED a dĂ©libĂ©rĂ©ment supprimĂ© du web les preuves de ses multiples activitĂ©s, les connivences perdurent - aujourd'hui, de maniĂšre clandestine. On peut mĂȘme affirmer que les malversations de la NED sont d'autant plus dangereuses que les individus et les organisations peuvent dissimuler leurs sources de financement. Mais cette initiative montre clairement que la NED ne rĂ©sisterait pas aujourd'hui Ă la moindre investigation publique, alors que son existence Ă©tait censĂ©e servir d'exemple. Elle dĂ©montre Ă©galement que les âopĂ©rations explicitesâ ouvertement financĂ©es par les Ătats-Unis constituent aujourd'hui le âbaiser de la mortâ que la NED Ă©tait censĂ©e dĂ©passer. L'Empire est en dĂ©route.
Je ne crois pas que lâempire soit en dĂ©route...rĂ©duire le site web au public nâest quâune strategie pour absorber la transition prochaine de Biden Ă Trump. Chaque agence (mis Ă part la CIA qui sâautofinance) attend ses nouveaux directeurs et ignore quel sera son prochain budget. Elles seront jugĂ©es selon leurs resultats et la nouvelle politique financiĂšre de Musk. Si Trump en plus dĂ©cide de ne plus verser un cent dans la dĂ©route ukrainienne, la NED va tenter de faire peau neuve pour plaire Ă son nouveau boss et se focaliser sur ses lubies...genre TaĂŻwan ou lâIran et laisser tomber les ex-republiques soviĂ©tiques. Pendant son premier mandat, la NED sâen est bien sortie . Elle a lâart et la maniĂšre de rester vierge. MĂȘme avec un budget amoindri, lâobjectif est de durer 4 ans . Ceux qui ont le plus malmenĂ© Trump de 2020 Ă 2024 sont ailleurs et la chasse aux sorciĂšres va occulter les mĂ©faits de l'agence qui nâa apparemment pas agit sur les affaires interieures...