👁🗨 Une semaine décisive pour Julian Assange
Vacances juridiques obligent, la Cour pourrait se réunir ce 28 juillet au soir, ne pas tenir d'audience supplémentaire, & Julian pourrait alors être dans l'avion pour les Etats-Unis dès samedi matin.
👁🗨 Une semaine décisive pour Julian Assange
Par Patrick Boylan, le 26 juillet 2023 - English version below
Alors que Julian Assange vit le moment le plus dramatique de sa décennie de persécution judiciaire, l'Assemblée du Capitole de Rome délibère sur l'opportunité de lui prêter main forte - une main symbolique, certes, mais très importante : l'attribution de la citoyenneté honoraire de la ville de Rome.
Pourquoi cette semaine marque-elle le moment le plus dramatique pour ce journaliste australien de 52 ans ?
Parce que la High Court de Londres est sur le point de statuer sur sa demande de recours (la dernière dont il dispose). Si la Cour dit non, il pourrait être, sur le champ, envoyé aux Etats-Unis où l'attend une sentence à vie dont le procès est déjà écrit.
Bien sûr, en théorie, ses avocats auraient la possibilité de bloquer l'extradition en déposant une demande d'injonction auprès de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Mais en théorie seulement. En effet, Stella Assange, l'épouse de Julian et mère de son fils Gabriel, âgé de six ans, et de son fils Max, âgé de quatre ans, craint que la Cour ne soit saisie cette semaine même, la dernière semaine utile avant les vacances de la justice au mois d'août.
En effet, la Cour pourrait se réunir ce vendredi 28 juillet au soir, décider de ne pas tenir d'audience supplémentaire, et Julian pourrait alors prendre l'avion pour les Etats-Unis dès le samedi matin. Il n'y aurait en effet plus de temps matériel pour solliciter l'injonction, qui ne peut être accordée qu'après le rejet du dernier recours. Ou bien la Cour pourrait statuer lundi matin prochain (31 juillet), et Julian pourrait déjà prendre l'avion dans l'après-midi. Il est évident que, dans le premier comme dans le second cas, les autorités britanniques enfreindraient la pratique consistant à laisser au défendeur le temps de présenter une demande d'injonction. Mais elles ne violeraient aucune loi. Il s'agirait d'un acte de contrainte juridique dont Julian a déjà subi d'innombrables autres exemples.
Nous nous trouvons donc dans une semaine cruciale. La semaine même où l'assemblée du Capitole de Rome décide d'accorder ou non la citoyenneté honoraire au cofondateur de WikiLeaks. Jusqu'à présent, le chemin a été semé d'embûches : lors de la première programmation de la motion, le mardi 18 juillet, le quorum n'a pas été atteint. Lors de la seconde, le jeudi 20 juillet, le quorum était atteint, mais il était trop tard pour faire passer la motion. Lors de la troisième, le mardi 25 juillet, la discussion sur la loi budgétaire a épuisé tout le temps disponible. Il y aura une quatrième et dernière opportunité vendredi prochain, le 28 juillet, à 15 heures : croisons les doigts.
Quel paradoxe, tout de même !
D'un côté, nous avons le courageux et ingénieux co-fondateur du site WikiLeaks - celui qui nous a permis de prendre connaissance des méfaits que nos gouvernants escamotent derrière de pseudo Secrets d'État - qui, depuis plus de quatre ans, croupit en isolement dans un trou noir de deux mètres sur trois : une forme de torture psychologique, selon le rapporteur spécial de l'ONU sur la torture, Nils Melzer.
D'un autre côté, nous avons les courageux et diligents conseillers municipaux romains qui acceptent de souffrir de la chaleur insupportable de l'été - certainement une forme de torture aussi, mais pas tout à fait comparable - afin de faire tourner l'administration de la ville malgré les défaillances de certains collègues et l'absence de quorum.
Pourtant, il suffirait de peu pour que ces conseillers, mettant de côté leurs rivalités pour réfléchir un peu, demandent à la présidence de l'Assemblée la priorité absolue pour la motion de l'article 109 et la votent, offrant ainsi à Julian un coup de pouce dans ce moment décisif.
Un coup de pouce non négligeable. Le vote de la motion ne serait pas simplement un geste de reconnaissance pour l'immense contribution d'Assange au journalisme d'investigation dans le monde entier. Le vote pourrait avoir des effets tangibles et réels. En effet, l'attribution de la citoyenneté honoraire par la ville de Rome, Caput Mundi, qui s'ajouterait aux nombreuses autres reconnaissances déjà accordées par d'autres villes, pourrait fournir au président américain Joe Biden la justification dont il a besoin pour tenir ses cerbères à distance, et renoncer à la demande d'extradition d'Assange, formulée par son prédécesseur Trump.
“Un coup de fil peut sauver une vie”, disait une vieille publicité. Il en va de même pour la citoyenneté d'honneur.
👁🗨 A decisive week for Julian Assange
By Patrick Boylan, July 26, 2023
As Julian Assange faces the most dramatic moment in his decade of judicial persecution, Rome's Capitoline Assembly is deliberating whether to lend him a helping hand - a symbolic one, to be sure, but a very important one: the award of honorary citizenship of the city of Rome.
Why does this week mark the most dramatic moment for the 52-year-old Australian journalist?
Because the High Court in London is about to rule on his appeal (the last one he has). If the court says no, he could immediately be sent to the United States, where a life sentence awaits him, the trial for which has already been written.
Of course, in theory, his lawyers would be able to block extradition by filing an injunction with the European Court of Human Rights (ECHR). But only in theory. Indeed, Stella Assange, Julian's wife and the mother of his six-year-old son Gabriel and four-year-old son Max, fears that the case could come before the Court this very week, the last useful week before the August recess.
Indeed, the Court could meet this Friday evening, July 28, decide not to hold an additional hearing, and Julian could then fly to the United States as early as Saturday morning. There would be no material time left to apply for the injunction, which can only be granted once the last appeal has been rejected. Or the Court could rule next Monday morning (July 31), and Julian could already be on the plane in the afternoon. Obviously, in either case, the British authorities would be breaking the practice of giving the defendant time to apply for an injunction. But they would not be breaking any laws. It would be an act of legal coercion, of which Julian has already suffered countless other examples.
So this is a crucial week. The very week when Rome's Capitoline Assembly decides whether or not to grant honorary citizenship to the WikiLeaks co-founder. So far, the path has been strewn with pitfalls: at the first scheduling of the motion, on Tuesday July 18, the quorum was not reached. At the second, on Thursday July 20, quorum was reached, but it was too late to pass the motion. At the third, on Tuesday July 25, the discussion on the budget bill used up all the time available. There will be a fourth and final opportunity next Friday, July 28, at 3 p.m.: fingers crossed.
What a paradox!
On the one hand, we have the courageous and ingenious co-founder of the WikiLeaks website - the man who enabled us to learn about the misdeeds that our rulers hide behind pseudo State Secrets - who, for over four years, has languished in solitary confinement in a two-by-three-meter black hole: a form of psychological torture, according to the UN Special Rapporteur on Torture, Nils Melzer.
On the other hand, we have the courageous and diligent Roman city councillors who are willing to suffer through the unbearable summer heat - certainly a form of torture too, but not quite comparable - in order to keep the city administration running despite the failings of some colleagues and the absence of a quorum.
Yet it wouldn't take much for these councillors, putting aside their rivalries for a moment's reflection, to ask the President of the Assembly for absolute priority for the Article 109 motion and vote for it, thus offering Julian a helping hand at this decisive moment.
A significant boost. A vote on the motion would not simply be a gesture of recognition for Assange's immense contribution to investigative journalism worldwide. The vote could have real, tangible effects. Indeed, the granting of honorary citizenship by the city of Rome, Caput Mundi, which would add to the many other recognitions already granted by other cities, could provide US President Joe Biden with the justification he needs to keep his henchmen at bay, and abandon his predecessor Trump's request for Assange's extradition.
"A phone call can save a life", said an old advert. The same goes for honorary citizenship.
* Patrick Boylan est maître de conférences en théorie et pratique de la traduction à l'université Roma Tre, auteur du livre Free Assange, et cofondateur du groupe "Free Assange Italia".