👁‍🗨 Une victoire sud-africaine mettra-t-elle fin au génocide de Gaza ?

La France préside le Conseil de sécurité. Selon l'article 94.2 de la Charte, l'ONU doit forcer Israël à appliquer l'arrêté de la CIJ. Mais ne comptons pas sur la Macronie de pacotille pour le faire.

© Photo : SCF

👁‍🗨 Une victoire sud-africaine mettra-t-elle fin au génocide de Gaza ?

Par Pepe Escobar, le 27 janvier 2024

---

Même si la CIJ peut être considérée comme une des farces collectives de l'Occident, le fait est que la décision demande explicitement à Israël d'arrêter le massacre.

Allons droit au but :

Par 15 voix contre 2, la Cour internationale de justice (CIJ) vient de se prononcer en faveur de l'Afrique du Sud, membre des BRICS, et d'ordonner à Israël de prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter un génocide à Gaza.

S'agissant du génocide le plus scruté de tous les temps, suivi 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 par tous les smartphones de la planète, on peut affirmer que l'Afrique du Sud vient de remporter une victoire étonnante contre le sionisme.

Et pourtant, comme l'affirme l'Armada des Cyniques du Monde, il n'y a pas eu, en termes concrets, d'appel au cessez-le-feu dans la bande de Gaza.

Bien sûr, on peut également faire valoir que l'appel au cessez-le-feu ne s'applique qu'à une guerre - comme dans le cas de la guerre par procuration en Ukraine. Gaza est un cas de génocide d'une population autochtone perpétré par une puissance occupante. Cela exige l'arrêt immédiat de tous les actes génocidaires. C'est essentiellement ce que la CIJ a ordonné.

Le ministère sud-africain des affaires étrangères a noté que “si l'on lit la phrase, il est implicite” qu'un cessez-le-feu doit être imposé.

Selon le très estimé ancien ambassadeur britannique Craig Murray,

“après un exposé des faits extrêmement accablant de la part de l'Afrique du Sud”, vigoureusement “et méticuleusement bien énoncé”,

les conclusions étaient inévitables.

En voici les grandes lignes :

“L'opération militaire menée par Israël à Gaza a fait un nombre incalculable de morts et de blessés, détruit d'importantes infrastructures et unités d'habitation, provoqué une sous-alimentation massive, provoqué l'effondrement du système de santé et déplacé la majorité de ses habitants. Cette guerre a touché l'ensemble de la population de Gaza et aura des conséquences durables. La Cour a pris note du langage déshumanisant tenu par les hauts responsables du gouvernement israélien”.

Par conséquent, la CIJ

“accède à la demande sud-africaine de prendre d'urgence des mesures provisoires pour la protection des Palestiniens de Gaza contre Israël et recommande” [c'est moi qui souligne] ce qui suit :

• Résolution 15-2 : “L'État d'Israël doit prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser le génocide à Gaza”.

• Résolution 15-2 : “L'Etat d'Israël veillera à ce que l'armée ne commette pas d'actes génocidaires.”

• Résolution 16-1 : “Israël prendra toutes les mesures nécessaires pour punir toutes les incitations publiques au génocide.”

• Résolution 16-1 : “Israël doit prendre des mesures immédiates et efficaces pour remédier aux conditions de vie défavorables dans la bande de Gaza”.

• Résolution 15-2 : “Israël doit prendre des mesures efficaces pour préserver les preuves des actes ayant une incidence sur la Convention sur le génocide”.

• Résolution 15-2 : “Israël soumet à la Cour un rapport sur toutes les mesures prises pour donner suite aux ordonnances de la Cour dans un délai d'un mois”.

Les Houthis et la convention sur le génocide

La décision de la CIJ est contraignante [c'est moi qui souligne]. Pourtant, même si la CIJ a décidé qu'Israël devait “prendre toutes les mesures nécessaires à la prévention des décès et des blessures” et répondre à tous les besoins humanitaires des Palestiniens (y compris l'accès à la nourriture, aux médicaments et aux infrastructures), que se passera-t-il si Tel-Aviv ignore tout simplement la décision ?

Même en considérant qu'Israël doit déposer un rapport sur les mesures correctives dans un délai d'un mois à compter de la décision, tous les paris sont ouverts sur la question de savoir si les adeptes de la psychopathie biblique se conformeront à la décision.

La réponse ne s'est pas fait attendre. Le ministre israélien de la Sécurité nationale, Ben Gvir, candidat caricatural à un rôle d'incontrôlable psychopathe dans un film d'horreur au rabais, a déclaré que

“la décision du tribunal antisémite de La Haye prouve ce que l'on savait déjà : ce tribunal ne recherche pas la justice, mais plutôt la persécution du peuple juif. Il est resté silencieux pendant l'Holocauste et “poursuit aujourd'hui son hypocrisie en allant encore plus loin”.

Les psychopathes ne connaissent rien à l'histoire. La CIJ, dans sa version actuelle, a été fondée en 1945.

Ce que la décision de la CIJ a certainement fait, c'est légitimer de facto la force morale des Houthis qui soutiennent “notre peuple” à Gaza.

Et ce, alors que les États-Unis et le Royaume-Uni répètent à qui veut l'entendre dans le Sud qu'ils doivent attaquer les Houthis, dont la politique de défense de la Palestine se traduit par le respect de la Convention sur le génocide. Les États-Unis et le Royaume-Uni évoquent cyniquement la nécessité de “protéger le droit international”.

L'écrasante majorité des pays du Sud interprète plutôt les actions des Houthis comme une force de maintien de la paix défendant la Convention sur le génocide, attaquée par les pourvoyeurs véreux de “l'ordre international fondé sur des règles”.

Parallèlement, il faut souligner un point crucial. La France préside actuellement le Conseil de sécurité des Nations unies. Selon l'article 94.2 de la Charte des Nations unies, à la demande de l'Afrique du Sud, l'ONU doit [c'est moi qui souligne] contraindre Israël à appliquer l'arrêté de la CIJ.

Personne ne doit compter sur la France macroniste de pacotille pour faire le nécessaire.

Les massacres ne s'arrêteront pas

Du point de vue du Sud, il est tout à fait consternant qu'une Africaine, la juge ougandaise Julia Sebutinde, se soit opposée à toutes les mesures conservatoires demandées par l'Afrique du Sud à l'encontre d'Israël.

La CIJ ayant conclu que

“les actions d'Israël à Gaza risquent (c'est moi qui souligne) de commettre un génocide dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe ethnique spécifique - les Palestiniens”,

il s'ensuit logiquement que la complicité des États-Unis avec Israël équivaut à une complicité des États-Unis au génocide des Palestiniens.

La décision de la CIJ met en fait en accusation les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Allemagne et les autres membres de l'Occident collectif qui ont tous déclaré que l'affaire sud-africaine était “sans fondement juridique” et devait être rejetée.

Il n'est donc pas étonnant qu'une équipe de 47 avocats sud-africains prépare déjà une action en justice contre les États-Unis et le Royaume-Uni pour complicité.

Quelle que soit la suite des événements, l'armada du cynisme mondial, très impliquée, ne relâchera pas ses efforts. Lorsque la CIJ ordonne à Israël de “prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter les morts et les blessés”, on peut assurément l'interpréter comme un appel à un cessez-le-feu, sans mentionner le mot magique.Même si la CIJ peut être considérée comme une farce collective de l'Ouest, le fait est que l'arrêt demande explicitement à Israël d'arrêter les massacres.

Mais ce que l'Armada cynique mondiale voit en réalité, ce sont quatre éléments toxiques liés entre eux : pas de cessez-le-feu / tuer les Palestiniens, mais en douceur / les nourrir avant de les tuer / et vous avez encore un mois entier pour vous engager dans un massacre généralisé.

On peut affirmer que la CIJ a fait le maximum de ce qu'elle pouvait faire dans le cadre de sa juridiction et de ses procédures.

Cependant, si l'on considère que la CIJ dispose d'une marge de manœuvre quasi nulle pour faire appliquer sa décision - elle est tributaire d'une ONU hyper-corrompue - l'Armada du cynisme mondial a peut-être vu juste : les massacres ne s'arrêteront pas.

https://strategic-culture.su/news/2024/01/27/will-a-south-african-victory-stop-the-gaza-genocide/