đâđš Zelensky, l'offre de cessez-le-feu & autres dĂ©lires britanniques
Le cessez-le-feu montre que lâUkraine n'a plus la main. Les Occidentaux claironnent lâhabituel non-sens selon lequel la Russie sera forcĂ©e d'accepter un cessez-le-feu aux conditions de l'Ukraine.
đâđš Zelensky, l'offre de cessez-le-feu & autres dĂ©lires britanniques
Par Ian Proud, le 12 mars 2025
La simple arithmétique met en évidence les pertes considérables subies par Zelensky au cours des six derniers mois.
La Russie acceptera, selon moi, la proposition de cessez-le-feu en Ukraine des Ătats-Unis. La balle sera alors dans le camp de Zelensky, qui devra signer un accord de paix synonyme de son naufrage politique, mais qui pourrait apporter au prĂ©sident Poutine les garanties de sĂ©curitĂ© qu'il recherche depuis plus de dix-sept ans.
Ătonnamment, la BBC a annoncĂ© que la Grande-Bretagne aurait contribuĂ© au consensus entre les Ătats-Unis et l'Ukraine sur la nĂ©cessitĂ© d'un cessez-le-feu de 30 jour, une manipulation des plus malhonnĂȘtes.
Le Royaume-Uni a fait tout ce qu'il a pu pour que l'Ukraine ne soit pas âforcĂ©eâ de nĂ©gocier pour mettre fin Ă cette guerre qui dure depuis trois ans. La semaine derniĂšre, un grand journal britannique a d'ailleurs confirmĂ© ce point dans un Ă©ditorial cinglant. Depuis trois ans, la version britannique du conflit tente de convaincre quâavec un soutien adĂ©quat et un peu de stratĂ©gie, l'Ukraine pourrait vaincre la Russie. Pour reprendre une expression militaire britannique, ce plan ân'a pas survĂ©cu au contact avec l'ennemiâ.
L'effondrement soudain de l'Ukraine à Koursk, aprÚs que les troupes russes ont rampé sur dix kilomÚtres le long d'un gazoduc que le président Zelensky a fait fermer en grande pompe en janvier, a constitué une défaite retentissante. Car elle a confirmé ce que de nombreux observateurs occidentaux disent depuis août 2024, à savoir que l'occupation d'une petite parcelle de territoire en Russie a été une erreur stratégique pour l'Ukraine. Depuis le lancement de l'offensive de Koursk, la Russie a gagné de vastes étendues de terre dans le sud de Donetsk, y compris plusieurs sites miniers d'importance et l'une des plus grandes centrales électriques d'Ukraine. Une simple évaluation mathématique montre que Zelensky a subi des pertes considérables au cours des six derniers mois. Une analyse plus globale révÚle que la guerre a été dans l'ensemble favorable à la Russie depuis l'échec de la contre-offensive ukrainienne à l'été 2023.
En Ukraine, les vautours tournoient dĂ©jĂ dans le ciel alors que le mandat prĂ©sidentiel de Zelensky, aujourd'hui dans sa sixiĂšme annĂ©e, touche Ă sa fin. Oleksiy Arestovich [ex-conseiller des questions de communications stratĂ©giques au cabinet de la prĂ©sidence de la RĂ©publique ukrainienne] n'a pas tardĂ© Ă appeler Zelensky Ă la dĂ©mission aprĂšs le fĂącheux Ă©change au bureau ovale. Petro Porochenko [homme d'affaires et homme d'Ătat ukrainien, prĂ©sident du pays du 7 juin 2014 au 20 mai 2019] a dĂ©clarĂ© que l'Ukraine est contrainte de conclure un accord. MĂȘme l'ancienne porte-parole de Zelensky a appelĂ© Ă la paix et laissĂ© entendre que le gouvernement ukrainien tente de brider tout dĂ©bat sur la question d'une trĂȘve. L'Ă©quipe Trump serait apparemment en pourparlers sur l'avenir avec l'ancienne PremiĂšre ministre Yulia Tymoshenko, notoirement corrompue. La marge de manĆuvre politique dont dispose Zelensky pour continuer Ă tenir bon avec des slogans vides de sens tels que âla paix par la forceâ et âforcer la Russie Ă faire la paixâ est en train de fondre comme neige au soleil.
Que l'Ukraine en soit venue Ă nĂ©gocier est bien la preuve qu'elle n'a pas d'autre choix, puisque les Ătats-Unis ont mis fin Ă la manne financiĂšre de l'armement et du renseignement. Rien dans le sommet de Djeddah ne suggĂšre un changement de posture amĂ©ricaine Ă l'Ă©gard de l'Ukraine.
Si la Russie l'accepte, le cessez-le-feu se limitera à une pause dans les combats. En effet, il ne se limite pas à l'idée franco-ukrainienne irréalisable de suspendre les combats uniquement dans les airs et en mer, pour permettre à l'Ukraine de continuer à se battre sur le terrain. Le communiqué de Djeddah favorise paradoxalement la Russie, car un cessez-le-feu partiel aurait apporté un répit à l'armée ukrainienne, qui ne jouit pas d'une supériorité aérienne stratégique, malgré son attaque massive de drones sur Moscou et d'autres régions de Russie.
La dĂ©claration conjointe Ătats-Unis-Ukraine appelle l'Ukraine et les autres pays Ă
âengager immĂ©diatement des nĂ©gociations en vue d'une paix durable qui assure la sĂ©curitĂ© de l'Ukraine Ă long termeâ.
Si la Russie accepte un cessez-le-feu, des pourparlers approfondis visant à instaurer une paix durable débuteront dans un délai de 30 jours. La Russie a toujours déclaré qu'elle n'acceptera pas un simple cessez-le-feu. Elle souhaite que les grandes questions soient abordées en bloc. Il s'agit notamment de l'aspiration de l'Ukraine à rejoindre l'OTAN, du statut des quatre oblasts annexés par la Russie depuis le début de la guerre, et des mesures de protection des russophones en Ukraine.
Ce dernier point devrait ĂȘtre le plus facile Ă rĂ©gler, du moins en thĂ©orie, bien qu'il se heurte Ă la rĂ©sistance des ultranationalistes ukrainiens. Le second sera plus dĂ©licat, car l'Ukraine ne pourra pas rĂ©cupĂ©rer les terres occupĂ©es militairement, et il faudra peut-ĂȘtre faire preuve d'une certaine finesse diplomatique pour permettre de geler la ligne de dĂ©marcation. La pilule la plus amĂšre Ă avaler pour l'Ukraine et ses promoteurs europĂ©ens sera de loin la question de l'OTAN.
Quelques instants Ă peine aprĂšs que le SecrĂ©taire Ă la DĂ©fense amĂ©ricain, Peter Hegseth, a dĂ©clarĂ© Ă la ConfĂ©rence de Munich sur la sĂ©curitĂ© que l'aspiration de l'Ukraine Ă l'OTAN est irrĂ©aliste, Keir Starmer a dĂ©clarĂ© lâinverse Ă Zelensky. La Grande-Bretagne est tout simplement bien incapable â et les Ătats-Unis et la Russie insistent sur ce point â d'amender son argument de base en matiĂšre de stratĂ©gie pour l'Ukraine. Il est Ă©galement peu probable que la Russie accepte une proposition britannique de dĂ©ploiement de forces de maintien de la paix de l'OTAN en Ukraine, mĂȘme si elles sont basĂ©es Ă Lviv ou Ă des centaines de kilomĂštres de la ligne de front.
De plus, la Russie compte sur une évolution des négociations de paix au sujet des sanctions économiques. Avant le début des négociations à Djeddah, le journal The Guardian a publié un article d'opinion d'Andriy Yermak appelant à davantage de sanctions contre la Russie dans le cadre d'un éventuel plan de paix. Un plan tout simplement aberrant. Quel politicien un tant soit peu sensé peut-il croire que la Russie signera un processus de paix la sanctionnant pour avoir mis fin à une guerre qu'elle est en train de gagner sur le champ de bataille ?
Je doute que la Russie s'attende Ă la levĂ©e sans condition des 20 000 sanctions, mais elle exigera l'annulation immĂ©diate du plus grand nombre d'entre elles, conformĂ©ment Ă un plan Ă plus long terme. En outre, la question des 300 milliards de dollars de rĂ©serves russes gelĂ©s, dont la majeure partie est dĂ©tenue Ă Bruxelles, va devoir ĂȘtre rĂ©solue. Ignorer la question ou espĂ©rer que les pays occidentaux pourront simplement donner cet argent Ă l'Ukraine ne fonctionnera tout simplement pas. LĂ aussi, les choses devront ĂȘtre passĂ©es Ă la loupe.
La dĂ©cision de l'Ukraine d'accepter un cessez-le-feu illustre Ă quel point elle n'a plus de cartes en main. De nombreux Occidentaux claironnent lâhabituel non-sens selon lequel la Russie sera contrainte d'accepter un cessez-le-feu aux conditions de l'Ukraine. Le prĂ©sident Poutine y verra l'opportunitĂ© d'obtenir de l'OTAN les garanties de sĂ©curitĂ© Ă long terme rĂ©clamĂ©es depuis dix-sept ans, que l'Otan a ostensiblement persistĂ© Ă ignorer.