👁🗨 Jour J, compte à rebours : Le droit d'Assange à un procès équitable - Part. 7*
La Défense d’Assange craint que le jury dans l'Est de la Virginie, soit “composé essentiellement d'employés & ex-employés de La Défense, du Renseignement, de sous-traitants & membres de leur famille”.
👁🗨 Jour J, compte à rebours : Le droit d'Assange à un procès équitable - Part. 7*
Par Kevin Gosztola, le 17 février 2024
L'équipe juridique du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, a sollicité la High Court of Justice britannique pour une réévaluation des risques que l'extradition fait peser sur son droit à un procès équitable.
Note de la rédaction : À l'approche d'un important procès en appel devant la High Court of Justice britannique les 20 et 21 février, la série " Jour J : Compte à rebours jusqu'au jour J " met en lumière les principaux aspects de l'appel du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, contre l'extradition vers les États-Unis.
La juge de district Vanessa Baraitser a déclaré sans équivoque dans sa décision sur l'extradition du fondateur de WikiLeaks Julian Assange qu'elle n'avait “aucune raison de douter que les garanties constitutionnelles et procédurales habituelles” seraient appliquées par le gouvernement des États-Unis afin que Julian Assange “bénéficie d'un procès équitable”.
Cependant, la défense de Julian Assange rejette la conclusion de la Cour. Lors de l'audience du 20 février, elle a prié la High Court of Justice britannique de réévaluer les risques que l'extradition fait peser sur le droit de M. Assange à un procès équitable.
Les avocats de M. Assange craignent que dans le district Est de Virginie, où il a été inculpé, le jury soit
“composé d'une forte concentration d'employés et d'ex-employés de la défense et du renseignement, de sous-traitants et de membres de leur famille”.
Le plus grand employeur d'Alexandria, en Virginie, où se trouve le palais de justice du district oriental, est en effet le ministère de la Défense des États-Unis.
Gordon Kromberg, le procureur adjoint du district, a affirmé [PDF] qu'Assange n'avait pas à s'inquiéter car un juge interrogera minutieusement
“les jurés potentiels, en présence des avocats du gouvernement et de l'accusé, afin d'assurer la sélection d'un jury équitable et impartial, capable de mettre de côté toute idée préconçue concernant cette affaire”.
Mais le fait est que, comme le décrit le Bureau du directeur du renseignement national (ODNI), un groupe de travail national sur les menaces d'initiés (NITTF) a été créé après qu'Assange et WikiLeaks ont publié “des milliers de documents classifiés par l'intermédiaire des médias internationaux et sur internet”. Ce groupe de travail a élaboré des politiques, des normes, des orientations et des formations qui désignent WikiLeaks comme un site que les “ennemis de l'intérieur” ou les soi-disant adversaires utiliseraient pour nuire au gouvernement américain ou lui porter préjudice.
Les “milliers de documents classifiés” qui ont motivé la création de ce groupe de travail sont les mêmes que ceux pour lesquels M. Assange a été inculpé. Étant donné que le gouvernement compte entre deux et trois millions de personnes disposant d'une habilitation de sécurité, il est difficile de croire que quiconque ayant ou ayant eu accès à des informations classifiées puisse examiner de manière impartiale les accusations portées contre M. Assange.
Selon le Crown Prosecution Service (CPS), qui représente le gouvernement américain dans la procédure d'extradition, “le critère pertinent” pour déterminer si les droits d'une personne extradée seraient violés est de savoir “si les tribunaux américains pourraient conclure qu'un procès équitable n'est pas plausible”. Un critère plutôt confus.
Les extraditions sont généralement accordées en vertu d'un traité ou d'un accord entre les États-Unis et un pays tiers. Si une personne faisant l'objet d'une demande d'extradition est extradée vers les États-Unis, il est peu probable qu'un tribunal américain bloque un procès après qu'un tribunal du pays signataire d'un tel accord a approuvé l'affaire.
Il existe notamment un traité d'extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni. Le Royaume-Uni dispose d'une loi sur l'extradition largement inspirée du traité. Les tribunaux britanniques examinent les demandes d'extradition sur la base de la jurisprudence et des orientations fondées sur la Convention européenne des droits de l'homme, qui leur demande d'évaluer le système judiciaire américain pour s'assurer qu'il n'existe pas de pratiques susceptibles de porter atteinte au droit d'une personne à un procès équitable.
La défense de M. Assange met en avant la possibilité d'une “négociation de plaidoyer coercitive” et les condamnations publiques de hauts fonctionnaires américains pour soutenir que le fondateur de WikiLeaks ne bénéficierait pas d'un procès équitable. Il est certainement gênant que Joe Biden ait qualifié Assange de “terroriste high-tech” et qu'il soit aujourd'hui président du pays qui requiert l'extradition.
Les directives sur le droit à un procès équitable en vertu de la Convention européenne des droits de l'homme [PDF] mentionnent que
“le choix des termes utilisés par les fonctionnaires dans leurs déclarations avant qu'une personne ait été jugée et reconnue coupable d'une infraction” a son importance.
L'absence de possible défense de l'intérêt public pour les personnes accusées d'avoir enfreint la loi sur l'espionnage est encore plus troublante. Les poursuites récentes engagées à l'encontre des lanceurs d'alerte leur ont interdit de s'adresser à un juge ou à un jury pour expliquer les raisons pour lesquelles ils avaient divulgué des informations. Dans le cadre de ces poursuites, qui sont les premières du genre, M. Assange devra probablement faire face à une restriction similaire qui porte atteinte à son droit à un procès équitable en limitant grossièrement ce qui peut être dit sur les raisons pour lesquelles il a publié des documents pour WikiLeaks.
Le lanceur d'alerte des Pentagon Papers, Daniel Ellsberg, a expliqué au juge comment il avait omis de révéler au public les raisons pour lesquelles il avait communiqué à la presse des documents révélant les mensonges entourant la guerre du Viêt Nam. Il pensait pouvoir témoigner de ses motivations lors de son procès.
En 1973, lors du procès, l'avocat d'Ellsberg a demandé pourquoi il avait copié les Pentagon Papers. L'accusation s'y est immédiatement opposée. Chaque fois que son avocat a tenté de reformuler la question, la cour a refusé de l'autoriser à dire au jury “pourquoi il avait fait ce qu'il avait fait”.
Les tribunaux fédéraux continuent de traiter les affaires relevant de la loi sur l'espionnage de la même manière.
“La notion de motif ou de circonstances atténuantes n'est pas recevable”, a déclaré Ellsberg au tribunal britannique. “Ce qui signifie que je n'ai pas bénéficié d'un procès équitable, en dépit d'un juge très intelligent et consciencieux.”
Par ailleurs, il faut souligner que le droit à un procès équitable inclut le droit à une assistance juridique réelle, et que ce droit dépend du “droit de l'accusé à communiquer avec son avocat en privé”.
Comme l'a raconté Baraitser,
“les États-Unis ont demandé son arrestation provisoire le 22 décembre 2017 et un mandat des autorités anglaises a été émis le même jour. Avant cette date, il n'avait aucune obligation de se présenter à un poste de police ou à un tribunal en réponse à des convocations ou comme condition de la mise en liberté sous caution.”
La société de sécurité espagnole UC Global, qui a espionné les réunions d'Assange avec ses avocats et aurait ensuite partagé des enregistrements audio et vidéo avec la CIA, était chargée de la sécurité de l'ambassade de l'Équateur de 2012 à 2018. Pendant plusieurs mois, alors que les conversations privilégiées entre avocat et client faisaient l'objet d'une surveillance, Assange avait en fait un statut d'accusé.
Ce type d'activité, qui aurait bénéficié du soutien des services de renseignement américains, n'est pas sans conséquence pour M. Assange. On ne peut raisonnablement penser que cette question peut être résolue en cloisonnant les preuves d'espionnage afin que les procureurs ne puissent pas les utiliser dans le cadre de l'affaire. Les procureurs peuvent recourir à des “constructions parallèles” pour contourner cette supposée entrave.
La CIA est autorisée à fournir des informations au procureur général des États-Unis pour l'aider à déterminer le degré de sévérité des conditions de détention de M. Assange. En cas de condamnation, elle peut influer sur la manière dont il est emprisonné. La santé mentale et physique de M. Assange est précaire et, en fonction de la nature abusive de sa détention, l'extradition pourrait signifier sa mort en détention aux États-Unis.
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https://thedissenter.org/countdown-day-x-assange-right-to-fair-trial/